Esther a écrit :
L'homme aurait récolté (volontairement ou non) les spécimens dont les grains restaient sur l'épi, créant son premier organisme génétiquement modifié
(et peut-être pas le premier).
Ça, c'est certain. Quelques décennies d'observation et d'essais peuvent suffire à modifier une plante sauvage pour qu'elle offre un meilleur rendement.
Quittons un instant le Proche-Orient pour l'Amérique, où l'agriculture est apparue un peu plus tardivement, mais dans des circonstances similaires, avec une céréale qui, au XVIe siècle, était cultivée de Rio de la Plata (Argentine) aux rives du Saint-Laurent (Canada) : le maïs. Il constituait la base de l'alimentation des peuples précolombiens.
Or, le maïs, sous sa forme actuelle, n'existe pas à l'état sauvage. Longtemps, les chercheurs se sont disputés l'origine botanique de la plante, certains estimant qu'elle dérivait d'un maïs sauvage qui existait avant l'arrivée de l'homme sur le continent, d'autre que le maïs provenait de la téosinte, une plante sauvage (I
http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Teocinte_Oax_5_agosto_2008_063.jpg). Les recherches en biologie moléculaire semble accréditer la seconde hypothèse. La domestication du maïs par plants sélectionnés de Téosinte aurait commencé il y a environ neuf millénaires dans le bassin du fleuve Balsas, au Mexique. Par comparaison, si l'on regarde des clichés de la téosinthe et du maïs actuel, difficile d'y trouver des ressemblances... Et pourtant, ce sont des plantes extrêmement proches génétiquement.
On ne peut pas dire non plus que les peuples américains il y a neuf millénaires aient bénéficié des connaissances environnementales du reste du monde, ni par transmission, ni par acculturation, vu que téosinte et maïs ne poussaient pas ailleurs. Par conséquent, comme leurs lointains cousins du Proche-Orient, ils ont à un moment donné, pour des raisons qui restent à déterminer, tenté non seulement de diversifier leurs sources alimentaires en devenant progressivement agriculteurs, mais aussi exercé une action délibérée pour modifier une plante sauvage afin d'en faire une céréale à rendement satisfaisant. Tellement satisfaisant, d'ailleurs, qu'elle s'est répandue sur des milliers et des milliers de kilomètres vers le nord et le sud.
Le blé a connu une évolution comparable, à ceci près que les plantes d'origine ont été plus faciles à identifier.
Ça me rappelle une discussion avec une de mes tantines, accro au bio, un jour où elle était toute contente d'avoir trouvé sur un marché du pain fait avec du grand épeautre. "Tu sais, le grand épeautre, était cultivé déjà il y a 2000 ans, jusque dans les années 30. Il a été abandonné pour des questions de rendement."
Eh oui, un épi de grand épeautre est formé de quatre grains... On conçoit qu'à des époques où les gens n'avaient aucune idée du bio et seulement l'obsession de pouvoir manger à leur faim, ils se soient d'abord souciés de privilégier leur production... dès l'aube de l'agriculture.