Je m'excuse d'avoir répondu avec du retard mais il me fallait le temps de la réflexion et surtout du temps tout court !
JARDIN DAVID a écrit :
Je ne peux pas suivre nico86 sur ce terrain. La rédaction de l'opuscule ne souffre pas de nuances. C'est à charge et c'est brutal.
Ce qui est à charge et qui est brutal c'est le niveau du premier accueil reçu par la horde des hostiles.
On critique en déconstruisant l'autre pas simplement son opuscule mais sa personne, ainsi on peut trouver pèle-mêle des remarques d'Historien aussi atterrantes de mièvrerie que les reproches que l'on veut bien adresser à l'ouvrage incriminé.
Chapoutot devient Chapingre, Ingrao a comme sérieux problème d'être amoureux de Chapoutot, on parle de groupies (sans doute un peu débiles) pour ceux qui ne charge pas le livre et j'en passe...
Quand on veut juger de la tonalité des débats on ne se limite pas une seule interview donnée dans les Inrocks ont fréquente aussi les "tavernes défouloirs" fabriquées de toute pièce par des chercheurs, et un historien en guise de porte drapeau, pour en faire des autodafés.
Donc je vous conseil d'aller aussi fureter, si vous ne l'avez pas déjà fait, là ou ça sent mauvais.
Le duo incriminé n'est très certainement pas au dessus de tout soupçon mais il m'étonnerai qu'il s'improvise animateur de foire, face a ce Tsunami délirant il a d'ailleurs mis la clé sous la porte de ses réseaux sociaux.
JARDIN DAVID a écrit :
On n'y trouve donc pas, pour rester dans l'image, de "pilote dans l'avion" et c'est bien un postulat de départ des deux auteurs. Après tout pourquoi pas, mais il faudrait au moins essayer de le démontrer. Un raisonnement scientifique aurait dû amener les auteurs à exposer finement les différentes thèses en présence (I KERSHAW, B PLOUVIER, mais aussi F DELPLA). Il est vrai que le format poche ne le permet pas facilement. Par contre la suite du texte justifie amplement l'impression de court ouvrage bâclé.
Je vais vous surprendre mais finalement je trouve cet ouvrage raté ! Tout ça pour ça, mais oui je le trouve franchement raté.
Raté car il y a trop de coquilles historiques pour le rendre crédible (Docteur Blum à la place du Docteur Bloch pour ne prendre que cet exemple) des faits Historiques
volontairement omis sans explication préalable et l'explication scientifique que nous étions en droit d'attendre n'y ait pas (une nuit de Cristal et un Reichstag qui ne sont qu'un songe , le quasi effacement de Hitler dans la montée en puissance du génocide, Churchill puisque vous le citez n'est finalement pas aussi présent qu'il aurait été souhaitable, pour finir sur un bouquet final d'absences...) raté car personne n'a compris le but recherché par les deux auteurs et par conséquent tout le monde a considéré cet opuscule comme un minable recraché de ce que nous savons déjà.
Par conséquent si l'on s'en tient à l'aspect uniquement bibliographique ça vaut pas un pet de lapin à côté des bios de Kershaw et de Longerich.
Oui c'est ouvrage est raté et c'est d'autant plus dommageable car, au vu de l'idée de départ, il aurait mérité d'être réussi et cela aurait permis de réelles avancées historiographiques.
Au lieu de ça on reste dans l'ornière boueuse et en voulant accélérer pour en sortir on s'enfonce davantage.
Oui ce livre est raté car il n'a pas atteint sa cible, parce qu'il a été mal ficelé pour lui permettre de délivrer le message qu'il voulait initialement livrer.
Mais c'était quoi l'idée de départ ? C'était de se poser une question d'apparence simple.
Et si l'on retirait ce gros arbre, qu'est Hitler, en plein milieu de la forêt du Nazisme, que resterait t'il ? Un trou immense, un vide explicatif ou la mise à nue de cette matrice qu'est le national socialisme. Fatalement ce débat a provoqué une guerre entre ceux qui ont peur de perdre l'ultime explication d'un coupable unique et ceux qui veulent descendre en rappel au fond de ce trou au risque de ne plus remonter.
Nos deux alpinistes s'y sont essayé et ils ont brutalement dévissé. pourquoi ? par manque d’expérience ? je ne le crois pas, le terrain était trop glissant ? sans doute, la paroi trop difficile ? assurément.
Là au moins je peux attribuer à cet historien vindicatif et parfois clownesque le bon sens de la formule "Hitler ce n'est pas rien, Hitler c'est les Jorasses à escalader".
Bien oui Hitler a ce quelque chose d'impénétrable et d'incontournable que seul un Kershaw peut vous autoriser à approcher (Des yeux bleus acier, un regard hypnotique qui vous transperce, quelque chose de magnétique et d’indescriptible) un Kershaw que je trouve comme étant le meilleur biographe d'Hitler car ses écrits sont transpirants de vérité sur la dimension quasi irréelle rendant la personne du Fuhrer thaumaturgique.
JARDIN DAVID a écrit :
Il est vrai que le format poche ne le permet pas facilement. Par contre la suite du texte justifie amplement l'impression de court ouvrage bâclé.
Tout est lié et on retombe dans les mêmes travers. En voulant mettre Hitler dans l'ombre pour en faire jaillir la lumière putride du National Socialisme ils ont renforcé l'obscurité et la confusion.
Par conséquent on se retrouve avec un livre avec un format troublant (comme je l'avais spécifié lors de mes premiers post) un format laissant penser qu'il s'agit d'un vulgaire que sais je, un livret grand public destiné à ceux qui ne veulent pas trop se casser la tête pour rapidement apprendre des choses sur cette période.
Au final l'ouvrage n'est pas bâclé il est hors sujet, non pas par rapport à l'histoire, mais HS au regard des idées qu'il était censé défendre.
Je n'aime pas faire ce constat mais la bonne foi et la raison m'y obligent, le constat est d'autant plus amer que je trouve que ce livre n'est pas à la hauteur de ce que Chapoutot peut produire.
JARDIN DAVID a écrit :
Une autre dimension qui me semble manquer : la façon dont la quasi-totalité des dirigeants de la période, sauf CHURCHILL et peut-être, tardivement STALINE, se sont leurrés sur les qualités et intentions du dictateur moustachu. Avec toujours un coup de retard, sidérés, ils n'arrivaient pas à reprendre l'initiative. La "BlitzPolitik" en quelque sorte. Si on devait trouver une autre qualité à AH, (les deux auteurs tentent bizarrement de faire la démonstration inverse et peu convaincante d'un AH fonctionnant en mode 14-18) ce serait une certaine forme de modernité, très en avance sur les autres dirigeants mondiaux. Je pense ici, par exemple, à l'intégration des nouvelles techniques (automobile, autoroutes, radio, ...), à la "com", à l'adaptation permanente de l'idéologie affichée aux objectifs à atteindre. Une grande fluidité qui contraste avec les doctrines très figées du camp d'en face. On pourrait développer si besoin.
Et c'est là que les auteurs ont une nouvelle fois loupé ce coche consistant à contre balancer la superpuissance manipulatrice de AH et son image d'imperfectible génie lui ayant permis d'accéder au pouvoir. De ce fait on élude toute une ambiance de repli et de fuite en avant, tout un climat politique vicieux et vicié pendant et après la République de Weimar où la démocratie ne prend pas racine, tout un tas d'événement où l'on ne veut pas voir les choses par calcul par intérêt ou parce qu'elles sont d'une banalité déconcertante car dans l'air du temps.
A ce titre l'attitude de la presse durant les années 30 est révélatrice de l'immense "pus" dans lequel baigne une partie de l'Europe
https://www.franceculture.fr/…/hitler-1933-pourquoi-la-pres… (Je vous renvoi à une récente émission sur France Culture)
Tout ça on ne le voit pas, on ne le divine même pas au travers d'Hitler. Pas facile de mettre Hitler en transparence sans le faire disparaître. Tout l'enjeu était peut être là.
JARDIN DAVID a écrit :
Pour ma part, voici ce que j'imagine pour sortir de l'ornière : nos deux auteurs devraient, si ce n'est en cours, se presser de rédiger une nouvelle étude de leur cru, qui fera oublier le faux-pas de côté !
JD
Alors évidemment on reprend nos doutes et on repart avec car on a pas plus de réponses qu'au début. Chapoutot qui voulait mettre fin, une bonne foi pour toute au Nazisme n'y ait manifestement pas parvenu, l'équation est sans doute trop complexe. L'essai est raté, à mon avis il faut oublier. Certains ont eu ce qu'ils souhaitaient la mise à disposition d'un polygone de tir à peu de frais. Que ceux qui doutaient que leur ligne historiographique au sujet d'Hitler soient remise en question se rassurent le débat me semble désormais clos et le petit que sais je sur Hitler proprement enterré.
Comme je l'avais mentionné par ailleurs la réalité crue se trouve, pourtant, dans les librairies pas dans la tête des chercheurs....Nicolas Offenstadt avec son dernier opus littéraire sur l'Allemagne de l'Est et le Hitler de Chapoutot et Ingrao vont très certainement pilonner les ventes. Le malheur c'est que par snobisme le grand public a longtemps été jeté en marge de ces débats entre initiés. Le malheur c'est que la plupart des historiens tendent à oublier les responsabilités pédagogiques qui leur incombe.Ils ont remporté leur bataille historique et finalement c'est ça qui importe.