Voici le texte :
Arthur Rimbaud a écrit :
Les Veilleurs
A l’heure où le ciel rose impose son grand cœur
Comme on pose un baiser sur le front d’une femme,
Je m’en vais jusqu’au lac pour y voir votre flamme
Surgir de l’onde calme et réchauffer mon pleur.
Et je peins, Angela, je peins dans la douleur,
Je peins sur la grand’ toile étoilée de mon âme
Votre esprit qu’il me reste, et qui sur l’eau s’exclame ;
Je peins, doux m’écriant : « Revoici la couleur ! »
Puis je danse toujours près du chevalet rouge,
Et je sens votre mort soudainement qui bouge,
S’approchant pour glisser au profond de mes mains ;
Et nous tournons, tournons, ainsi qu’en ma mémoire,
Quand les soirs nous allions jusqu’aux petits matins
Nager dans un poème et peindre la nuit noire.
Arthur Rimbaud – Avril 1871