Isidore a écrit :
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Saviez-vous que la plupart de nos tabous (sexualité, animalité, odeurs...) sont les conséquences de la "fabrication" du Diable pour unifier les Chrétiens sous la bannière du repentir ?
Non je ne savais pas mais vous devriez pouvoir m'éclairer sur ce processus ?
Très grosso-modo (je ne vous réciterai pas le livre, ne voulant pas vous gâcher la surprise...
):
Le Diable a été, dès sa "création" politique (à savoir, non sa création religieuse, il existait déjà sous des formes diverses, serpent tentateur, ange déchu, et; mais sa création
politique, à savoir sa dangerosité fabriquée), rattaché à certaines notions.
Rattaché à la femme, "humide" et froide, proche de la Lune, de la nuit (tandis que l'homme était chaud, sec, solaire
); d'après des conceptions universelles: la femme a les chairs "molles", les règles, etc, autant de phénomènes qui ont attisé la méfiance au cours du temps. L'image de la Femme a été modifiée de fait. La femme est devenue la réceptrice du diable, la tentatrice, la victime du Mal et son alliée par excellence. Son corps et surtout son ventre sont ainsi représentés dans bien des oeuvres artistiques du Moyen-âge comme des
bouches avides de luxure et de Mal (voir aussi les procès de sorcellerie: le premier des "crimes" était pour ces femmes la fornication et le plaisir éprouvé avec le Démon. Muchembled fournit plusieurs "témoignages" forcés de ces accusées). Logiquement, la sexualité, contrôlée par des autorités compétentes, enseignée à l'église et soumise à la Confession, a subi un encadrement de plus en plus strict. Vouée uniquement à la procréation, elle s'est vue limitée à cette fonction et la sodomie, par exemple, est devenue un crime puni de mort (pour les deux partenaires). Ne parlons pas de l'homosexualité!
Le diable a également été rattaché à l'animal, par opposition à l'homme: tentative de réfréner les pulsions primaires pour créer un cadre social. L'éructation, les flatulences, la sexualité pour le plaisir ont ainsi été politiquement puis socialement brimées: la "politesse" est pour une part non anodine une résultante de ces politiques anti-diable!!!.
Et l'odorat, sens "animal" par excellence, a pris de fait une connotation extrêmement négative, il est le sens de la "saleté" (à une époque où les mauvaises odeurs sont omniprésentes), tandis que l'ouïe et la vue sont les sens humains, spirituels, tournés non vers la Terre mais vers le Ciel. Rapidement s'est créé un lien entre l'odeur et la maladie. Les parfums, remède supposé éloigner les épidémies, s'est développé en partie pour ces raisons: la mauvaise odeur attire la maladie et son principal vecteur, le diable. On a ainsi vu dès le XVème siècle se développer une mode parmi la haute bourgeoisie et la noblesse consistant à appliquer sur son visage un tissu trempé dans du parfum, avec la croyance qu'éloigner la puanteur équivalait à éloigner le diable et la maladie...
Je brosse ici quelques axes de réflexion de l'auteur à très gros traits; mais vous trouverez dans son ouvrage-même toutes les références et dates dont vous aurez besoin!
J'espère avoir un minimum satisfait votre curiosité, bien à vous!