Tant qu'on aura pas retrouvé les rouleaux authentiques signés de la main de Moïse au somet du mont Sinaï, on n'aura pas atteint la vraie veritas hebraica.
L'élaboration des textes massorétiques s'est achevée aux environs du dixième siècle, ce qui est tardif par rapport à la septante. Mais cette entreprise a cependant été menée très scupuleusement à partir de textes très anciens de sorte qu'il est impropre de parler de version médiévale. Le travail des massorètes a principalement porté sur la vocalisation des textes, œuvre de conservation d'une langue qui avait cessé d'être vernaculaire. La découverte des manuscrits de Qumran a été précieuse à la connaissance des textes bibliques et l'on a aujourd'hui abandonné l'idée d'un unique texte authentique. Les spécialistes admettent l'existence de divergences et considèrent que s'attacher à déterminer quel est le vrai texte de la bible est aussi vain que chercher à savoir quelle est la véritable source de la Loire.
Un spécialiste comme Thomas Römer a certainement d'excellentes raisons de privilégier les massorètes. Toutefois, si besoin est, comme le montre son étude de deux versets assez obscurs du livre d'Amos, il recourt à la Septante. Les textes massorétiques présentent l'avantage qu'ils n'ont pas été altérés par une traduction. Car on dit avec raison que toute traduction est une trahison. En passant d'une langue à une autre très éloignée, comme le grec l'est de l'hébreux, des nuances intraduisibles dans la langue d'origine sont perdues et des précisions indispensables dans la langue de destination mais inconnues dans la langue de départ peuvent être obligatoirement ajoutées. L'article suivant donne un excellent exemple des problèmes qui peuvent se poser au traducteur :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ha%C3%AFku#Exemple.
Que des considérations théologiques et non simplement linguistiques aient influé dans les différentes versions canoniques propres à chaque religion ne fait aucun doute. Mais l'arbre ne doit pas cacher la forêt : les arrangements sont mineurs et les écarts entre les différentes versions restent très ténus. Si les Chrétiens contemporains font confiance à un texte hébraïque qui a été recopié par des rabbins au milieu de l'ère chrétienne, c'est tout simplement que les rabbins ont fait du bon boulot.
Quant au Coran, c'est une tout autre affaire. Je ne crois pas qu'il soit interdit de le traduire. Quoi qu'il en soit, les autorités saoudiennes qui se revendiquent comme les gardiennes de la foi diffusent le coran dans une multitude de langues. Mais seul le texte en arabe définitvement arrêté sous les premiers califes fait foi. La falsification de la Bible par les Juifs et les Chrétiens qui est alléguée dans le Coran ne vise pas d'infimes différences entre différentes versions de la Bible mais des points fondamentaux des foi juive ou chrétienne. Ainsi, la mort du Christ sur la Croix, inacceptable pour les Musulmans qui reconnaissent Jésus comme prophète, est-elle niée bien que tous les textes du Nouveau Testament la relatent-ils de façon concordante. A cela, l'islam a une explication : le Nouveau Testament est faux et s'il est faux, c'est que les chrétiens l'ont falsifié. Cela procède plus de la théorie du complot que de la science car le fait qu'un certain Yeshouah, qui prêchait avec un certain succès et déplaisait au grand-prêtre, ait été crucifié par le procurateur Ponce-Pilate à la demande de ce grand-prêtre n'est historiquement guère contestable et l'idée, apparue six siècles après cet évènement, qu'on aurait substitué au dernier moment un pauvre anonyme à ce Yeshouah n'est fondée sur aucun indice sérieux scientifiquement recevable.