jovien a écrit :
1° Les Turcs (je veux dire les habitants de l'actuelle République de Turquie), dans quelle proportion descendent-ils de non-Anatoliens turcophones qui ont envahi l'Empire byzantin, et dans quelle proportion descendent-il des populations qui étaient déjà là (et qui, donc, parlaient grec, arménien ou kurde), ou de populations qui sont arrivées après la conquête turque, notamment en provenance d'Europe balkanique ? Et les conquérants turcophones, dans quelle mesure descendaient-ils de gens qui, six siècles auparavant, étaient turcophones, c'est-à-dire vivaient dans le Sin-kiang et avaient les yeux bridés, et dans quelle mesure descendaient-ils de gens récemment turcisés ? En d'autres termes :
1) Dans quelle mesure les Turcs descendent-ils des conquérants de l'Anatolie, et dans quelle mesure descendent-ils des conquis ?
2) Ceux qui descendent des conquérants de l'Anatolie, dans quelle mesure descendent-ils des conquérants sortis du Sin-Kiang, et dans quelle mesure descent-ils de ceux que ceux-là ont conquis ?
Les peuples de langues turques se sont diffusées par acculturations et métissages au Ier millénaire de notre ère. On soupçonne fortement que les huns aient eu une composante turcique à l'origine. Comme beaucoup de peuples des steppes eurasiennes, les huns se sont organisées en fédérations avec liens de vassalités avec les peuples qu'ils ont croisés. Les peuples turciques d'Asie du nord ont rencontrés différents peuples d'Eurasie avec lesquels ils se sont métissés dont très probablement les scythes et d'autres peuples indo-européens entre autres. Ce qui fait qu'ils ont rapidement, au cours de leur Histoire, eu un aspect anthropologique intermédiaire entre le nord asiatique et le caucasien. Exemple avec l'arrivée des turciques ouïgours chez les tokhariens.
Lorsque les Oghouzes, un peuple turcique, arrivent en Anatolie ils sont bien sûr bien moins nombreux que les populations autochtones. Ayant pris le pouvoir, ils ont réussit à acculturer une bonne part de ces populations locales. Il restait environ un quart de population grecques anatoliennes, arméniennes, assyriens au XIXe siècle... avant que l'État Turc ne pratique massacres et déportations d'où le fait que la composition de la population soit toute autre à notre époque.
L'on retrouve de fréquent cas d'acculturations dues à l'arrivée d'une petite composante de population. Les romains arrivés en Gaule n'auraient pas représentés plus de 1% de la population locale... et cela a donné les gallo-romains. Les arabes ont également diffusés leur langue aux populations de l'Afrique du nord sans pour autant dépasser en nombre les amazighs autochtones.
jovien a écrit :
2° Le Turc moyen contemporain a-t-il conscience que beaucoup des ancêtres des Turcs contemporains vivant il y a mille ans habitaient l'Anatolie et parlaient grec ? Et qu'il y mille cinq cents ans, probablement tous les turcophones avaient les yeux bridés ?
Je ne le pense pas. Pour les turcs, les grecs ont été les "anciens" ennemis. Quand j'écris "anciens" c'est bien entre parenthèse... Dans de nombreux pays, la fierté nationaliste pousse à rester sur des à prioris. En Afrique du nord, de nombreuses personnes rejettent leurs origines amazighs. Au Japon, les aïnous ont longtemps été rejetés alors que des populations proto-aïnous du nord de l'archipel se sont très probablement mélés avec les ancêtres des japonais. etc...
Arcadius a écrit :
Je ne suis pas absolument certain que votre deuxième question ait le moindre intérêt historique...
Je penserais plutôt le contraire. Il est bon de rappeler qu'aucun peuple n'est de "sang pur". Nous sommes tous le fruit de peuples qui se sont rencontrés, qui se sont métissés, acculturés. Il est mauvais que des peuples cherchent à oublier... ou déformer leur Histoire par nationalisme ou extrémisme religieux.