Citer :
Karolvs a écrit :
Eh bien, non, cette loi ne cherche pas à réparer, ni moralement ni autrement. D'ailleurs, comment le pourrait-elle ?
Duc de Raguse a écrit :
Ah ? Parce que pour vous cette loi n'est pas la reconnaissance d'un crime (de dette j'avais envie d'écrire...) ?
Duc de Raguse, vous le faites exprès ?
J'ai écrit textuellement ceci : "Il me semble que j'ai déjà expliqué que
cette loi se borne à reconnaître un certain nombre de faits (les traites négrières transatlantique et dans l'océan indien, l'esclavage...) et à les qualifier juridiquement : crimes contre l'humanité.
Aucune réparation, ni morale ni autre ; seulement la reconnaissance (c'est un acte de justice en soi) et la qualification juridique des faits."
Le sens de cette phrase est très clair : cette loi est la reconnaissance d'un crime et la qualification juridique de ce crime. Rien d'autre.
Duc de Raguse a écrit :
Lorsqu'un Etat reconnaît les crimes de ses prédécesseurs, il tente de réparer par la législation les errements du passé, non ?
Pas toujours. S'agissant des lois mémorielles, il ne tente pas de réparer ; seulement de reconnaître et de fixer le souvenir dans la mémoire collective (êtes vous incapable de comprendre cela ?). Et c'est justement parce que ce sont des loi de mémoire et rien de plus, qu'on appelle ces lois "mémorielles".
Duc de Raguse a écrit :
Sinon, pourquoi pareille loi qui punit tout individu la critiquant ?
C'est à la loi Gayssot que vous faites allusion ?
Réponse à votre question : Vous vous trompez encore, et vous nous faites tourner en rond.
J'ai déjà explique que la loi ne punit pas les personnes qui critiquent la loi (sinon vous seriez un certain nombre ici à être en infraction). Elle punit ceux qui nient ou contestent publiquement le fait que le crime contre l'humanité a été commis. Pourquoi cette interdiction de nier le crime qui a été commis ? Parce que la négation du crime inflige une souffrance supplémentaire aux personnes et aux communautés qui en ont été les victimes, et heurte profondément la conscience humaine en général. Pour de plus amples renseignements sur ce point, je vous invite à relire mes interventions du début de ce "topic"
Citer :
Karolvs a écrit :
Il me semble que j'ai déjà expliqué que cette loi se borne à reconnaître un certain nombre de faits (les traites négrières transatlantique et dans l'océan indien, l'esclavage...) et à les qualifier juridiquement : crimes contre l'humanité.
Duc de Raguse a écrit :
Et moi, il me semble que vous ne suivez pas non plus mes explications : "reconnaître un certain nombre de faits", vous dites, et bien soit, mais "les qualifier juridiquement", non.
Vous mélangez des choses différentes. Il est vrai que ce n'est pas évident à comprendre, et un juriste l'expliquerait plus clairement que moi. Mais je suis sûr que vous comprenez que "qualifier juridiquement un crime passé de crime contre l'humanité" dans une loi "mémorielle", ce n'est pas "juger des sociétés anciennes". C'est simplement dire une évidence : 1/ de tels traitements ont été infligés à des millions d'êtres humains ; c'est vrai et si vous en doutez, sachez que les historiens l'ont prouvé ; 2/ ces traitements relèvent du crime contre l'humanité.
Duc de Raguse a écrit :
De quel droit le législateur actuel peut juger des sociétés anciennes d'un crime qui n'a été défini que depuis 60 ans et qui ne s'appliquait qu'à des régimes totalitaires, s'étant livré à un génocide planifié et rationalisé ?
D'abord, j'ai déjà expliqué X fois qu'une loi mémorielle ne juge pas. Les lois mémorielles ne sont pas des lois "contre" nos ancêtres. Ce sont des lois faites pour les gens d'aujourd'hui et pour l'avenir.
Ensuite, toutes les lois mémorielles françaises se rapportant à des génocides (loi Gayssot et loi du 29 janvier 2001-génocide arménien) concernent des génocides planifiés ou rationalisés. Et pour ne pas alourdir la discussion, je ne m'attarderai pas sur le fait que cette définition "ad hoc" prise à Nuremberg pour qualifier les crimes vaincus d'alors, est aujourd'hui un peu dépassée, et que la définition juridique actuelle du génocide est celle, plus étendue, de l’article 2 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948.
Enfin, je ne vois pas toujours pas pourquoi on devrait s'interdire aujourd'hui que la France dise l'évidence : des millions de gens ont été massacrés, déportés ou réduits en esclavage pour ce qu'ils étaient, ou parce qu'ils gênaient, ou parce que c'était économiquement profitable, et que la France dise que ces pratiques sont un crime contre l'humanité. Doit-on taire cela parce que ceux qui les pratiquaient ne connaissaient pas le statut de Nuremberg ?
Duc de Raguse a écrit :
Il est où le génocide planifié dans l'esclavage, faudrait qu'on m'explique ?
Je n'ai jamais dit qu'il y avait génocide planifié dans l'esclavage.
Et je vous explique volontiers (bien que là aussi, il me semble l'avoir déjà fait quelque part) : génocide et esclavage sont deux crimes différents : le génocide est un crime contre l'humanité ; l'esclavage en est un autre ; il n'y a pas que le génocide qui est un crime contre l'humanité. Vous trouverez une liste des crimes contre l'humanité dans l'article 7 du statut de la cour pénale internationale.
Duc de Raguse a écrit :
Et puis surtout vous nous parlez de "qualification", mais depuis quand la peine de crime contre l'Humanité cesse d'être une peine pour ne devenir qu'une "qualification"...
Vous avez une drôle de définition des sens de la loi pénale et criminelle.
Pardon, mais c'est vous qui confondez.
Crime contre l'humanité = un crime, comme son nom l'indique.
La peine, c'est la punition à laquelle le criminel est condamné (pour éviter que vous continuiez à nous faire tourner en rond, je dois rappeller tout de suite, encore une fois, qu'une loi mémorielle ne condamne personne pour le(s) crime(s) dont elle parle, puisqu'elle est purement mémorielles)
La qualification, c'est le fait de dire ce qu'est l'acte aux yeux de la loi : un délit, ou un crime, ou un crime contre l'humanité…
Sommes nous d'accord ?
Duc de Raguse a écrit :
Demandez à n'importe quel juriste, qui vous expliquera que si les personnes concernées vivaient encore, elle risqueraient la prison à perpétuité dans le droit français.
Ben oui. Mais comme ces personnes sont mortes, personne n'est poursuivi pour ces crimes et personne ne risque aucune condamnation. C'est pour ça que ces lois sont dites "mémorielles".
Duc de Raguse a écrit :
C'est tout de même plus qu'une simple "qualification", mais aussi un jugement et une condamnation collective.
En somme, vous voulez quoi ? Qu'on laisse ces crimes s'évanouir sous la poussière de l'histoire et que les négationnistes de demain puissent dire à l'humanité de demain, qu'à Auschwitz on n'a gazé que des poux et qu'à Haïti c'était des singes qui coupaient la canne à sucre ?
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Karolvs a écrit :
Mais où voyez vous donc que la loi veut "réparer" quelque chose ?
Duc de Raguse a écrit :
Si elle est vide de sens juridique, de volonté de réparation et n'est que "qualificative" ou qu'indicative, pourquoi l'avoir fait voter. Pourquoi ne pas l'avoir ajouter au dictionnaire, sous l'article esclavage ou crime contre l'Humanité ?
Pour deux raisons au-moins : le dictionnaire n'a aucune qualité pour reconnaître juridiquement et qualifier juridiquement un crime, et le dictionnaire ne représente pas la République Française ou la communauté française. Le dictionnaire ne représente que M. Hachette ou M. Larousse…
Citer :
Karolvs a écrit :
Etre ou ne pas être en situation morale de débiteur, cela relève de la conscience individuelle de chacun ; on ressent quelque chose ou on ne ressent rien par rapport à ces événements, comme on peut se sentir en empathie avec les Poilus de 14 ou ne rien ressentir du tout.
Duc de Raguse a écrit :
Non, cette loi ne nous demande pas de "ressentir" individuellement quelque chose ou pas, elle nous demande d'adhérer au fait que les Français du XVème siècle sont des criminels contre l'Humanité et cela jusqu'en 1848. Ouf, on est un peu moins criminels que les Américains, qui ont attendu treize ans de plus pour cesser d'être des criminels.
Mais d'où tirez vous que j'ai affirmé que la loi qui nous "demande" de ressentir quelque chose ? Je répète en soulignant : "Etre ou ne pas être en situation morale de débiteur, cela relève de la
conscience individuelle de chacun ; on ressent quelque chose ou on ne ressent rien…" Traduction si ce n'est pas clair : la loi ne vous demande rien : vous êtes libre de ressentir ce que vous voulez. C'est votre affaire.
Et d'où tirez vous que la loi vous demande d'adhérer au fait que les Français du XVème siècle sont des criminels contre l'Humanité ? La loi ne vous demande rien (pardon pour les répétitions, mais il faut répéter parce que vous n'entendez pas). La loi dit seulement que la République Française d'aujourd'hui reconnaît que cette traite négrière constitue un crime contre l'humanité.
Duc de Raguse a écrit :
Et de grâce, cessez de faire celui qui n'a pas compris qui a fait voter cette loi et à l'intention de qui elle est destinée. Cette loi clientéliste et politicienne renforce encore un peu plus la victimisation que certains exploitent à fond dans les Antilles.
Si vous y voyez un beau discours universaliste, rempli de sincérité, alors tant mieux. Mais ouvrez un peu vos yeux et observer quelles dérives cette loi à porté vers les milieux afrocentristes qui l'ont reçu comme du pain béni.
On dirait que vous voulez que la France laisse recouvrir du linceul de l'oubli, comme un détail de l'histoire, le souvenir des millions d'enfants, de femmes et d'hommes qui ont crevé (il n'y a pas d'autre mot) pendant les traversées ou qui sont morts enchaînés dans les îles ou en Amérique. Pourquoi ? Parce que c'est dommageable pour la mémoire des Français du XVème au XIXème siècle qui regardaient cette pratique comme un régime juridique et économique profitable et moralement défendable ? Parce que certains aujourd'hui jouent sur la corde sensible de la victimisation pour des avantages particuliers ?
Je ne prétends pas que la loi Taubira est "sainte", je n'ignore pas qu'elle a été présentée par une élue guyanaise de gauche et votée par une assemblée nationale de gauche, et je ne conteste pas qu'elle est l'objet de toutes sortes de "détournements" partisans. J'ai aussi présente à l'esprit la leçon de René Rémond : "
Le processus devient dangereux quand l'attachement au particulier prend le pas sur l'adhésion à la généralité et devient un obstacle à l'ouverture sur l'universel". Cela ne doit pas nous empêcher de regarder les 4 lois mémorielles pour ce qu'elles sont : la proclamation de l'attachement de la France à des valeurs générales et universelles.
Duc de Raguse a écrit :
Et d'ailleurs, depuis quand une loi de la République est faite uniquement pour une catégorie de citoyens ?
Ces lois, comme toutes les lois, sont faites pour tous.
Citer :
Karolvs a écrit :
Non. Mais en faisant quelque chose pour que la réalité de ces événements ne soit pas transformée et ne s'estompe pas avec le temps.
Duc de Raguse a écrit :
Bof, la société change tout comme les motivations des différents législateurs et lorsqu'on jugera cette loi inutile, elle tombera.
Elle correspond à une aspiration T à un temps Y.
Pïre, on pourrait même penser le contraire... Tout dépend de la société qui fait la loi. Comprenez-vous donc pourquoi c'est une porte ouverte à tout et n'importe quoi ?
Il y aurait beaucoup à dire sur ces très vastes questions.
Très rapidement : la loi sera peut-être abrogée un jour, mais en attendant elle existe toujours et elle n'a pas déclenché la "guerre civile" tant annoncée par certains ; elle est peut-être d'inspiration T à un moment Y, mais elle repose sur quelque chose d'universel et qui touche à la conscience de l'humanité en général ; le déferlement de tout et n'importe quoi à travers la porte ouverte n'a pas eu lieu. Par contre, il y a pas mal de monde qui attend derrière la porte fermée sur le négationisme.
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Karolvs a écrit :
Les historiens et les autres chercheurs sont parfaitement libres de chercher ce qu'ils veulent et comme ils veulent. Duc de Raguse a écrit : C'est vrai que la polémique concernant Olivier Pétré-Grenouilleau, vous ne connaissez pas ?
C'est votre mauvaise foi qui est consternante !
Je confirme que les historiens et les autres chercheurs sont parfaitement libres de chercher ce qu'ils veulent et comme ils veulent.
Qu'une association d'Antillais, Guyanais et Réunionnais ait suscité un vif émoi dans la communauté des historiens en trouvant intelligent d'attaquer le professeur Olivier Pétré-Grenouilleau en justice pour "contestation de crime contre l’humanité", avant de retirer finalement sa plainte, la belle affaire ! Pas joli-joli en effet. Mais O. Pétré-Grenouilleau a-t-il été empêché de chercher ? Par quelle administration ? Par quel tribunal ? Par quel groupe de pression ? Un historien est-il empêché quelque part de chercher et de publier le résultat de son honnête travail de scientifique en toute liberté ?
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Duc de Raguse a écrit : Il faudra bien montrer quels barbares étaient nos ancêtres... C'est un peu aller vite en besogne et manquer totalement d'esprit critique, ce qui est sensé être apporté en priorité aux élèves.
Karolvs a écrit :
Vous êtes de mauvaise foi. Vous savez très bien que ce n'est pas cela. Duc de Raguse a écrit : Expliquez-moi les subtilités, je n'ai pas dû tout comprendre alors...
C'est vous qui "attaquez", alors c'est à vous de prouver, ou au-moins apporter quelque argument à l'appui de ce que vous affirmez à savoir : les lois mémorielles ont été faites pour apprendre à nos enfants que nos ancêtres étaient des barbares.
Citer :
Duc de Raguse a écrit : Ce point peut se défendre, mais il ouvre une porte à tout et n'importe quoi. Je reprends mon exemple précédent : je suis issu d'une famille qui a subi des vexations et des humiliations au début du siècle dernier et je demande avec les personnes qui sentent être dans la même situation que moi une loi aux législateur pour que l'Etat et la communauté du moment reconnaisse ses fautes
Karolvs a écrit :
Monsieur le duc, comme Huyustus, vous amalgamez des choses très différentes, ce qui montre bien que vous n'avez pas vraiment réfléchi à la question. Duc de Raguse a écrit : Oui, je peux aussi vous retourner cela, comme c'est vide d'argument ça mange pas de pain !
L'argument m'a semblé assez évident pour que je puisse me dispenser de l'exprimer. Mais si vous n'êtes pas conscient de l'amalgame, je le montre : ce n'est pas de vexations et d'humiliations qu'il est question dans les lois mémorielles, mais de crimes contre l'humanité. Je suis sûr que vous voyez la différence.
Citer :
Karolvs a écrit :
Les lois mémorielles ne sont pas "ouvertes à tout et n'importe quoi"; elles reconnaissent et fixent la mémoire de ce qu'il y a de plus grave dans l'histoire de l'humanité
Duc de Raguse a écrit :
Non, elles font bien plus que cela et il n'y a que vous pour ne pas vouloir le voir.
Je pense que vous dramatisez.
Citer :
Duc de Raguse a écrit : Bref, cette vision du passé […] offre l'orgueil suprême pour une génération de mettre au ban de l'Humanité ses prédécesseurs.
Karolvs a écrit :
Quelle piètre idée vous vous faites de nos enseignants ! Duc de Raguse a écrit : Qui vous parle des enseignants ?
Vous-même, là où vous dites que : "
On y est... La loi entre dans les programmes scolaires et demande aux enseignants de bien veiller à son enseignement. A nouveau les frontières entre la loi et l'Histoire sont baffouées, fixant des cadres stricts d'un enseignement et d'une recherche. Il faudra bien montrer quels barbares étaient nos ancêtres... C'est un peu aller vite en besogne et manquer totalement d'esprit critique, ce qui est sensé être apporté en priorité aux élèves."
Citer :
Karolvs a écrit :
C'est faire oeuvre de vérité et de justice, quand l'histoire et la loi disent la vérité des faits, rien de plus, rien de moins. Duc de Raguse a écrit : Finalement, vous y arrivez enfin - et vous vous contredisez d'ailleurs -, il s'agit bien pour vous de rendre justice. Or, toute décision de justice comporte une sentence prononcée à l'égard d'un coupable. Bon, j'arrête-là, c'est peine (
) perdue...
Bon, allez, puisque vous abandonnez, je vous laisse le dernier mot et je vous rejoins pour dire que nos lointains esclaves et esclavagistes étaient tous de gentils garçons, puisque c'est grâce à eux que ces îles françaises sont aujourd'hui ce qu'elles sont.