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Si c'est ça alors par contre je m'en tape! Peu me chaut de l'avis des ploucs qui trouvent qu'on a l'air ennuyeux parce que l'on s'intéresse aux vieux documents.
Le problème, c'est que la vision de ces "ploucs" se retrouve parfois au niveau des instances gouvernementales, ce qui peut justifier
certaines politiques ou prises de position fort peu amicales envers la recherche intellectuelle... et les moyens qui lui sont attribués, la place qui lui est donnée dans une société. Convaincre les "ploucs", c'est aussi (essayer) éviter les jugements de type "ah, ces chercheurs/universitaires/profs qui ne foutent rien" que l'on voit facilement fleurir. C'est triste, mais je crois qu'on est forcé de passer par une entreprise de "communication" non seulement pour défendre la place de la recherche savante dans une société, mais même pour pouvoir continuer à nous intéresser tranquillement aux vieux documents dans de bonnes conditions...
Mais nous digressons.
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On ressent face aux objets qui sont réellement passés par les mains des gens qu'on étudie, une émotion irremplaçable. On y est plutôt plus vivant que les yeux braqués sur un écran d'ordinateur. D'autre part pour les spécialistes de diplomatique et de critique des textes, la matérialité de l'objet est un élément irremplaçable, par exemple pour la datation. Les trous de dents de rats témoignent de l'ordre des pages qui a pu être bouleversé et que l'on peut ainsi reconstituer. Et puis, Il faut pouvoir vérifier que la numérisation ne comporte pas de lacunes.
Je ne sais pas, c'est peut-être une question de génération ou d'expérience personnelle, mais pour ma part (j'ai 23 ans et suis en M1) les archives me donnent assez peu d'émotions. Enfin si, j'aime bien les visiter... Dans de bonnes conditions. Mais les récits entendus de camarades qui travaillaient cette année sur des sources accessibles seulement en archives a de quoi dégoûter. La BNF, par exemple, malgré son excellente initiative Gallica, a des politiques tyranniques par rapport aux ouvrages matériels qu'elle abrite : bien souvent, non seulement pas de photocopie (ce qui est normal) mais pas non plus de photographie... Idem pour une amie partie fouiller les archives brésiliennes, il a fallu qu'elle se tape le recopiage à la main des articles de journaux qui l'intéressaient. Un temps et une énergie qui seraient mieux employés à faire de la recherche, plutôt qu'à redécouvrir le travail du moine copiste.
C'est pour ça que malgré effectivement la valeur irremplaçable de l'objet matériel, je tends à être hostile à un certain nombre de lieux de conservation, qui font de la rétention bête et méchante d'informations quand ils devraient rendre la recherche plus accessible à tous ! Interdire de photographier un texte ne sert à rien, puisqu'on peut toujours le recopier à la main... à rien sauf à faire perdre du temps, et, sans doute,
à affirmer les droits de la bibliothèque sur ses manuscrits. Droits qui me semblent moralement fort contestable, car elle n'en est pas l'auteur, et quant à la conservation du manuscrit, elle se fait sur des fonds publics ; ledit manuscrit devrait donc être propriété de tous...
Par ailleurs, pour ce que vous dites sur la diplomatique, ma chère et tendre a travaillé cette année sur un registre médiéval de délibérations de conseil municipal catalan, numérisé (l'original est en Catalogne...). Cela ne l'a pas empêchée de faire, entre autres, de la diplomatique, car la numérisation, comme c'est de plus en plus le cas, était bonne, incluant les couvertures, les pages de garde... Tandis que sans la numérisation, elle n'aurait rien pu faire du tout, en tout cas sur ce manuscrit !
Mon espoir est aussi qu'avec un accès à distance à des sources internationales, on sorte un peu de la situation actuelle, où les Français font de l'histoire de France, les Anglais, de l'histoire d'Angleterre, etc. L'un des problèmes, en-dehors des questions idéologiques, étant jusqu'à maintenant l'accès à des sources étrangères.