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Message Publié : 23 Avr 2008 20:51 
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Lorsque nous débattons de Furet, nous nous appuyons le plus souvent sur son chef d'oeuvre Le Passé d'une illusion.

J'observe avec joie que vous avez aussi aimé ! :wink:
Lorsque je l'ai lu l'été dernier, j'ai fortement apprécié son analyse sur les révolutions française et bolchevique, tout en l'incluant dans le vécu des contemporains du XXème siècle, avec une finesse et une nuance incomparables.
Voilà pour les fleurs... :mrgreen:

Citer :
Les auteurs de cet article eux-mêmes s'engagent dans un article contre Furet en raison du contexte, de leurs idées et de ce qu'incarne Furet.

Exactement et même si mon post initial - que j'ai modéré depuis - était rédigé dans un style mi-sarcastique mi-accusateur, c'est ce que j'avais relevé aussi.
Le tiers de l'article (le début) est consacré à une attaque de Furet, non pour ses travaux, mais pour ses idées (un communiste transfuge, muant en libéral) et sa prétendue "mondanité".
Ce type de jugement est indigne d'un historien à mes yeux.

Citer :
Arrêtez-moi si je me trompe mais l'objectif de l'article est de voir si Furet n'est pas plus un idéologue qu'un historien.

Non, vous avez bien compris. Furet ne serait qu'un penseur politique selon M. Riot-Sarcey et pas un historien sous prétextes que ses propres recherches soient "faibles" (c'est marrant j'ai l'impression qu'il a soutenu une thèse, non ? :mrgreen: ) et qu'il ne fait qu'engloutir les travaux des autres pour les refondre à sa sauce.
Voilà une belle accusation lancée sans l'once d'une preuve ! On est dans le registre de la calomnie et de la simple attaque personnelle.

Citer :
"le totalitarisme absolu" je n'ai malheureusement pas lu l'article de Furet dont il est question. Les auteurs lui reprochent de privilégier l'idéologie au contexte pour expliquer la chute du bloc soviétique.

L'auteur lui reproche d'avoir qualifié l'URSS de régime totalitaire, tout simplement. Mais, cet article date de 1991 et à l'époque peu d'historiens osaient rapprocher les régimes fascistes et nazis du soviétique. Le concept de totalitarisme permet cela et il a "osé" le faire. :rool:

Citer :
Là encore, ils reprochent à Furet de ne s'intéresser à la Révolution que pour des raisons idéologiques. Ne peut-on pas renvoyer la balle à l'école marxiste?

Bien entendu, puisque pour tous les révolutionnaires du parti ouvrier socialiste en Russie (bolchevik, comme menchevik), la Révolution française restait la référence qu'ils étudiaient en permanence à la lumière des idées de Marx. Lénine et Trostky ont été les premiers à le faire. Le fait qu'on joue en permanence la Marseillaise en Russie lors des manifestations et des grèves entre 1894 et 1917 n'est pas insignifiant non plus. Ce sont les politiques et les auteurs d'obédiance marxiste, qui ont, les premiers, cherché à dépasser la Révolution française en Russie.
Et, vous avez raison, de rappeler que Furet s'est intéressé à ce phénomène dès les années 1950-1960, justement parce qu'il était communiste.

Citer :
n'abuserait-elle pas un tout petit peu l'historienne spécialiste des femmes?

Bien entendu et c'est aussi une des raisons de son inconditionnel soutien aux PCF et à ses organisations féministes... :mrgreen:
On sort vraiment du domaine historique là... :'(

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Message Publié : 24 Avr 2008 17:16 
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Grégoire de Tours
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Ah ça ! :)
Manifestement, vous persistez à vouloir plus parler de politique que d'historiographie. Bien, après tout, c'est votre choix, moi, j'avais cru comprendre que la charte était assez claire, mais je ne vais pas être plus modérateur que le modérateur :wink:
Donc, je vais simplement relever deux ou trois points qui me semblent un peu problématiques :

Phocas a écrit :
Lorsque nous débattons de Furet, nous nous appuyons le plus souvent sur son chef d'oeuvre Le Passé d'une illusion.

Vous, peut-être. Moi, il me semblait que les historiens retenaient d'abord les travaux de Furet sur la Révolution. Vous voyez que, d'emblée, on ne parle pas de la même chose.
Et c'est d'ailleurs intéressant. Le sujet que vous avez vous-même lancé s'intitule : "Que retenir de François Furet ?" Il est clair que pour une certaine frange, ce qu'on retient essentiellement, c'est la trajectoire politique d'un homme qui, né dans un milieu grand-bourgeois, s'est adonné au communisme durant sa jeunesse, puis converti au libéralisme, et qui en a fait un très beau livre. Clairement, c'est sans doute ce trajet-là qui en fait aujourd'hui une sorte d'icone intouchable aux yeux de certains.
Les autres se rappellent aussi simplement que c'est un historien et un intellectuel, critiquable au même titre que n'importe quel autre.

Phocas a écrit :
Il est vrai que côté occidental, nous avons tendance à dire que l'effondrement était inévitable du fait de l'impasse idéologique du système communiste.

Je pense qu'il est très exagéré d'assimiler un courant historiographique à l'ensemble de la pensée occidentale. Dans ce seul forum, vous trouverez maintes explications historiques à l'écroulement de l'URSS, qui ne ressortent aucunement de l'idéologie.
Car fort heureusement, tous les historiens occidentaux n'attribuent pas à l'idéologie le rôle de principe explicatif premier.
En revanche, c'est bien ce que fait Furet, et c'est effectivement le point sur lequel il est critiquable -j'entends, sur le plan historiographique, mais oui, j'ai bien compris que ce n'était pas votre centre d'intérêt principal.

Phocas a écrit :
D'ailleurs qui étaient les trois plus grands historiens de la Révolution selon Furet? Tocqueville, Michelet, et ... George Lefebvre. Il n'oublie pas les travaux ultérieurs mais se concentre sur Tocqueville car celui-ci a longtemps été oublié à la différence de Michelet et Lefebvre.

Bof.
D'abord, la position de Furet vis-à-vis de Lefebvre est très ambigüe. A mon avis, Furet se définit presque commme un anti-Lefebvre.
Ensuite, s'il rappelle Tocqueville, ce n'est pas tant parce que celui-ci est "oublié" -ça, c'est bien encore typiquement un lieu commun de la pensée "libérale", tiens :wink: - mais parce que Tocqueville propose un schéma interprétatif de la Révolution dont Furet compte s'inspirer, tout simplement. En particulier, et toujours, le rôle central que Tocqueville accorde au concept d'idéologie.

Duc de Raguse a écrit :
L'auteur lui reproche d'avoir qualifié l'URSS de régime totalitaire, tout simplement. Mais, cet article date de 1991 et à l'époque peu d'historiens osaient rapprocher les régimes fascistes et nazis du soviétique. Le concept de totalitarisme permet cela et il a "osé" le faire.

Et où donc avez-vous vu que Furet utilisait le concept de totalitarisme comme rapprochement entre les régimes nazis et soviétiques ? Après l'avoir encensé, vous voulez l'assassiner, le pauvre ? :) Non, je serais bien curieux de voir cela.

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...que vont charmant masques et bergamasques...


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Message Publié : 24 Avr 2008 18:47 
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Eginhard
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J'ai cité Le Passé d'une illusion car l'article que vous nous proposez s'intéresse plus aux idées politiques de Furet qu'à ses travaux sur la Révolution. J'ai donc précisé qu'il ne fallait pas tenir compte de cet ouvrage pour bien analyser cet article car il est antérieur à l'ouvrage, vous devriez me remercier plutôt que de ma faire la leçon. Evitez de déformer mes propos même si je maintiens que c'est un grand ouvrage.
Bergame a écrit :
Vous, peut-être. Moi, il me semblait que les historiens retenaient d'abord les travaux de Furet sur la Révolution. Vous voyez que, d'emblée, on ne parle pas de la même chose.
Et c'est d'ailleurs intéressant. Le sujet que vous avez vous-même lancé s'intitule : "Que retenir de François Furet ?" Il est clair que pour une certaine frange, ce qu'on retient essentiellement, c'est la trajectoire politique d'un homme qui, né dans un milieu grand-bourgeois, s'est adonné au communisme durant sa jeunesse, puis converti au libéralisme, et qui en a fait un très beau livre. Clairement, c'est sans doute ce trajet-là qui en fait aujourd'hui une sorte d'icone intouchable aux yeux de certains.

C'est surtout ce trajet qui fait que certains ne peuvent parler de lui sans le vilipender. Osez affirmer que ce n'est pas ce que fait cet article. Je trouve que c'est un auteur vraiment intéressant en particulier pour ses travaux sur la Révolution. Ce n'est pas parce que je cite Le Passé d'une illusion que je ne m'intéresse pas à ses autres ouvrages. Lire Furet ne m'empêche pas non plus de lire d'autres historiens de la Révolution.
Bergame a écrit :
Les autres se rappellent aussi simplement que c'est un historien et un intellectuel, critiquable au même titre que n'importe quel autre.

Je pense que vous me rangez dans la première catégorie et vous la seconde.
Bergame a écrit :
Il est vrai que côté occidental, nous avons tendance à dire que l'effondrement était inévitable du fait de l'impasse idéologique du système communiste.
Je pense qu'il est très exagéré d'assimiler un courant historiographique à l'ensemble de la pensée occidentale. Dans ce seul forum, vous trouverez maintes explications historiques à l'écroulement de l'URSS, qui ne ressortent aucunement de l'idéologie.
Car fort heureusement, tous les historiens occidentaux n'attribuent pas à l'idéologie le rôle de principe explicatif premier.
En revanche, c'est bien ce que fait Furet, et c'est effectivement le point sur lequel il est critiquable -j'entends, sur le plan historiographique, mais oui, j'ai bien compris que ce n'était pas votre centre d'intérêt principal.

Vous êtes formidable, vous souhaitez débattre et vous me démontez alors que je n'ai jamais eu une parole déplacée à votre égard. Je pense que mon précédent post montre que j'ai lu avec attention votre article. J'y ai répondu sur de nombreux points. Cet article est plus politique qu'historique, ce qui implique que dans ce post je ne suis pas parti bien loin dans la Révolution, d'ailleurs les quelques fois où je l'ai évoquée vous n'y répondez pas. Sur Gorbatchev, j'ai été un peu manichéen mais regardez ce topic c'est saisissant:
http://www.passion-histoire.net/viewtopic.php?f=50&t=16550
Bergame a écrit :
Bof.
D'abord, la position de Furet vis-à-vis de Lefebvre est très ambigüe. A mon avis, Furet se définit presque commme un anti-Lefebvre.
Ensuite, s'il rappelle Tocqueville, ce n'est pas tant parce que celui-ci est "oublié" -ça, c'est bien encore typiquement un lieu commun de la pensée "libérale", tiens :wink: - mais parce que Tocqueville propose un schéma interprétatif de la Révolution dont Furet compte s'inspirer, tout simplement. En particulier, et toujours, le rôle central que Tocqueville accorde au concept d'idéologie.

Il fait pourtant de Lefebvre le troisième meilleur historien de la Révolution, dans l'article "Histoire universelle" du Dictionnaire critique de la Révolution. Il le critique certes mais il montre que ses travaux ont permis une avancée remarquable.
Furet a incontestablement permis la redécouverte de Tocqueville, on n'en a jamais autant parlé que lorsque Furet l'a mis en avant. D'ailleurs si vous relisez mon précédent post, le crétin libéral que je suis faisant plus de l'idéologie que du politique, vous verrez que je suis un peu critique vis-à-vis du poids que Furet donne à Tocqueville.
Bergame a écrit :
Duc de Raguse a écrit :
L'auteur lui reproche d'avoir qualifié l'URSS de régime totalitaire, tout simplement. Mais, cet article date de 1991 et à l'époque peu d'historiens osaient rapprocher les régimes fascistes et nazis du soviétique. Le concept de totalitarisme permet cela et il a "osé" le faire.

Et où donc avez-vous vu que Furet utilisait le concept de totalitarisme comme rapprochement entre les régimes nazis et soviétiques ? Après l'avoir encensé, vous voulez l'assassiner, le pauvre ? :) Non, je serais bien curieux de voir cela.

Relisez le chapitre 6 du Passé d'une illusion.

Je veux bien débattre avec vous mais évitez le genre de piques que vous me lancez, je ne l'ai jamais fait à votre égard. Restons-en aux idées et si vous souhaitez approfondir la Révolution, cela ne me pose aucun problème.

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"Si, dans la pratique démocratique anglaise, l’opposition, selon un mot admirable, remplit un service public, dans les États totalitaires, l’opposition devient crime ", Raymond ARON.


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Message Publié : 24 Avr 2008 18:55 
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Manifestement, vous persistez à vouloir plus parler de politique que d'historiographie. Bien, après tout, c'est votre choix, moi, j'avais cru comprendre que la charte était assez claire, mais je ne vais pas être plus modérateur que le modérateur

Je pense que vous n'avez pas lu correctement l'article que vous avez mis en ligne. Cette historienne ne parle que très peu d'histoire pour s'en prendre uniquement à Furet, non pour ses travaux, mais car c'est un "libéral" écouté des politiques du moment.
Nous tenions simplement à rappeler le fait que cette historienne appartient à l'école marxiste et qu'elle est d'extrême-gauche, pour nuancer un peu la gravité de ses accusions et comprendre un peu mieux les raisons de son courroux, rien de plus. :wink:
Bref, on contextualise sa pensée et son article (1991), tout simplement. Mais je ne vois pas où nous faisons "de la politique"... :-|

Citer :
Moi, il me semblait que les historiens retenaient d'abord les travaux de Furet sur la Révolution.

Oui, mais il les intègre dans Le Passé d'une illusion en les faisant rejaillir sur le contemporains du XXème siècle et l'histoire de celui-ci, à travers les séismes politiques que celui a connu.
En somme, il dépasse ainsi Penser la Révolution. Certes, au niveau historiographique c'est moins novateur et porteur, mais au niveau de la démarche intellectuelle cela reste fort intéressant.

Citer :
Il est clair que pour une certaine frange, ce qu'on retient essentiellement, c'est la trajectoire politique d'un homme qui, né dans un milieu grand-bourgeois, s'est adonné au communisme durant sa jeunesse, puis converti au libéralisme, et qui en a fait un très beau livre.

Il n'a pas fait un livre de son propre parcours... :-|
Les éditeurs ont simplement fait précéder le Passé d'une illusion de ses articles de réflexion politique entre les années 1950 et 1991, lorsque Penser le XXème siècle est paru. Cet ouvrage n'a pas été écrit réellement par Furet, mais on a compilé certains de ses écrits dans ce recueuil.

Citer :
Car fort heureusement, tous les historiens occidentaux n'attribuent pas à l'idéologie le rôle de principe explicatif premier.
En revanche, c'est bien ce que fait Furet, et c'est effectivement le point sur lequel il est critiquable -j'entends, sur le plan historiographique, mais oui, j'ai bien compris que ce n'était pas votre centre d'intérêt principal.

Les rares articles de Furet sur la question ne sont pas importants pour l'historiographie de la fin de l'URSS, que ce soit d'un point de vue national ou international et il n'a jamais été spécialiste de la période, ni de la question. Dans ses critiques, Riot-Sarcey donne davantage de force à ses écrits qu'ils n'en ont jamais eu et n'en auront jamais.
D'ailleurs, le sujet n'est pas l'URSS, mais la Révolution française.

Citer :
Et où donc avez-vous vu que Furet utilisait le concept de totalitarisme comme rapprochement entre les régimes nazis et soviétiques ?

Il ne l'a pas utilisé pour rapprocher les deux régimes, mais pour qualifier le régime soviétique, ce qui est un crime pour certains et bien rare à cette date... lol
Puisque, lorsque les pionniers dans l'utilisation de ce concept l'employaient au sujet du régime soviétique (comme Arendt), une levée de boucliers était visible avec des arguments fallacieux du type "vous ne pouvez comparer l'incomparable". Après l'ouverture des archives soviétiques, ces voix, décridibilisées, se sont tues...

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Message Publié : 24 Avr 2008 19:59 
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Grégoire de Tours
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Non Phocas, que voulez-vous, je trouve que vous n'êtes pas très juste vis-à-vis de cet article. Vous l'avez lu ? Tant mieux. Mais vous n'en extirpez que 3 phrases qui sont relativement anecdotiques. Non, pour moi, ici, vous en restez à la confrontation de positions idéologiques. Vous ne m'avez même pas demandé ce que moi, je trouvais d'intéressant dans ce texte, et pourquoi je l'avais posté. C'aurait pourtant été une bonne manière d'entamer la discussion, non ? Mais non, l'auteur de ce texte est marxiste, féministe, elle raconte des "inepties", elle lance des "attaques personnelles" contre Furet, voila son cas réglé tout comme vous aviez réglé celui de Losurdo. "Et merci, Bergame, de nous l'avoir proposé".
Allons ! Vous savez très bien ce que vous faites.

Duc de Raguse a écrit :
Citer :
Et où donc avez-vous vu que Furet utilisait le concept de totalitarisme comme rapprochement entre les régimes nazis et soviétiques ?

Il ne l'a pas utilisé pour rapprocher les deux régimes, mais pour qualifier le régime soviétique.


Alleluia ! Si vous étiez près de moi en chair et en os, je vous embrasserais presque ! Oui, ce que vous dites là est juste, ça me fait plaisir, dites donc !
En revanche, Furet reproche par exemple à Nolte d'employer le terme "totalitarisme" pour qualifier à la fois le régime nazi et le régime soviétique.
Mais si Phocas a une citation, je suis très preneur : Rien n'empêche que Furet ait changé d'avis sur ce point.

La suite est plus discutable.
Citer :
Puisque, lorsque les pionniers dans l'utilisation de ce concept l'employaient au sujet du régime soviétique (comme Arendt)...

Inexact. Arendt circonscrit le concept de "totalitarisme" au nazisme et à la période de l'histoire soviétique qui correspond au règne de Staline. Et elle est très claire sur ce point.
Citer :
Après l'ouverture des archives soviétiques, ces voix, décridibilisées, se sont tues...

Tant qu'à faire, c'est plutôt l'inverse. En fait, à l'occasion de l'ouverture des archives soviétiques, on s'est rendu compte que les estimations avaient été plutôt surévaluées durant la Guerre Froide. Je parle par exemple des estimations portant sur le nombre de déportés et de tués. C'est en tous cas ce que dit Nicolas Werth.

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Message Publié : 24 Avr 2008 20:11 
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Localisation : Provinces illyriennes
Citer :
Arendt circonscrit le concept de "totalitarisme" au nazisme et à la période de l'histoire soviétique qui correspond au règle de Staline. Et elle est très claire sur ce point.

C'est bien normal son étude sur la question date de 1951 ! :wink:

Citer :
C'est en tous cas ce que dit Nicolas Werth.

Je voudrais bien savoir où et quand ?

Citer :
En fait, à l'occasion de l'ouverture des archives soviétiques, on s'est rendu compte que les estimations avaient été plutôt surévaluées durant la Guerre Froide.

Surévaluées par qui ? Je me demande comment on peut se livrer à des calculs lorsqu'on a aucun chiffre et qu'aucune information ou presque ne sort d'URSS, hormis celles du mensonge d'Etat. :-|

Bon, de toute manière il serait bien plus indiqué que l'on en revienne sur ce qui fait débat et non sur ces digressions parasitantes. Je sais que vous les affectionnez, mais on s'éloigne du sujet.
Le sujet étant la critique de cette affirmation pour le moins mensongère, travestissant la pensée de Furet :

Citer :
La revendication révolutionnaire de l'égalité abstraite et universelle entre tous les hommes ne pouvait en effet que conduire au manichéisme et au fanatisme idéologique et engendrer la Terreur


Personnellement, je n'ai pas arrêté de chercher depuis et je n'ai trouvé nulle part chez Furet -dans son Dictionnaire critique de la Révolution, Penser la Révolution et Le Passé d'une illusion - une telle affirmation de sa part. :-|

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Message Publié : 24 Avr 2008 21:14 
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Eginhard
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Bergame votre ton à mon égard commence sérieusement à m'agacer. J'ai pris un certain temps à lire votre article et je ne "règle pas son compte" à l'auteur de façon aussi expéditive que vous le dîtes. Je parle de Lefebvre, Tocqueville, d'historiographie, mais non vous me balayez d'un revers de la main. D'un autre côté, c'est à vous de nous dire ce que vous trouvez à cet article et non à moi de vous le demandez.

Vous n'avancez aucune idée. J'ai l'impression que vous recherchez la confrontation à tout prix. Duc de Raguse s'est excusé auprès de vous, j'espérais qu'après cela vous en viendrez enfin aux idées mais il semble qu'il vous faut une personne à attaquer. Malheureusement, je n'ai pas la patience de Duc de Raguse, à la prochaine attaque je cesserai d'avoir le moindre débat avec vous car encore une fois je ne vous ai jamais attaqué et je n'ai jamais rien supposé de vos opinions. Comme vous l'aviez dit récemment on ne peut savoir qui est derrière le clavier, mais il semble que cette belle leçon ne s'applique pas à vous.

Pour Losurdo, un philosophe qui est au bord de la négation du génocide cambodgien ne m'intéresse pas. Appelez çà comme vous voulez!
Quant à une des auteurs de votre article, je n'ai aucun problème avec le fait qu'elle soit marxiste ou féministe. Je me demande si vous avez lu mon post avec autant d'attention que j'ai lu votre article. Je trouve que c'est un peu tiré par les cheveux de nous dire que Furet a une lecture limite misogyne de la Révolution. Maintenant, vous qui êtes un amoureux du débat que les autres empêchent de parler pour des raisons idéologiques, j'aimerai que vous m'expliquiez à partir de vos lectures de Furet ce qui montre dans ses écrits qu'il a une lecture misogyne de la Révolution, voilà un beau sujet qui ne devrait pas susciter de polémique.
Expliquez nous également ce qui vous dérange dans l'interprétation que Furet a de Lefebvre, ce qui vous intéresse dans cet article que vous nous proposez (j'étais sincère quand je vous remerciais) oui je vous le demande Bergame pourquoi nous avoir proposé cet article?

PS: pour les citations je vous laisse chercher.

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Message Publié : 24 Avr 2008 22:11 
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Fustel de Coulanges
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Inscription : 15 Nov 2006 17:43
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Bergame a écrit :
Citer :
Puisque, lorsque les pionniers dans l'utilisation de ce concept l'employaient au sujet du régime soviétique (comme Arendt)...

Inexact. Arendt circonscrit le concept de "totalitarisme" au nazisme et à la période de l'histoire soviétique qui correspond au règne de Staline. Et elle est très claire sur ce point.



D'autres ont montré, depuis, que ce totalitarisme est déjà plus qu'en germe à l'époque de Lénine...

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Message Publié : 25 Avr 2008 8:30 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 23 Avr 2005 10:54
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Bon, puisque vous en arrivez à dire que je n'avance aucune idée, Phocas, je crois qu'il est temps de conclure. Lire cela à propos de ce topic précisément, je trouve que c'est quand même un peu fort de café, revoyez-en la chronologie.
Bref.

Bon, qu'est-ce que je dis sur le fond ? Après avoir essayé de montrer pourquoi Furet et Nolte, àmha, n'étaient pas assimilables l'un à l'autre -et là, personne n'a rien trouvé à redire, que je sache, au contraire, vous étiez plutôt d'accord, Phocas, n'est-ce pas ?- j'ai aussi tenté de montrer comment et pourquoi Furet, àmha toujours, était critiquable.
Oh bien sûr, il est critiquable pour être "de droite" si on est "de gauche", la belle affaire ! Et il est défendable pour être "de droite" quand on est "de droite", merveilleux.

Mais il est aussi critiquable quant à sa manière très particulière d'écrire l'histoire. Reprendre les modèles interprétatifs de Tocqueville n'est pas sans conséquence, cela l'incite par exemple à s'intéresser plus particulièrement à la signification des évènements qu'aux faits eux-mêmes. Mais cela, Furet le dit très bien et l'assume très bien, c'est précisément ainsi qu'il veut écrire l'histoire de la Révolution.
Anecdotiquement, lorsque je dis par exemple que Furet se positionne quasiment comme un anti-Lefebvre, je veux dire que le jugement que Furet porte sur Lefebvre est que celui-ci est un très grand érudit, sans doute le plus grand connaisseur de la période dit-il. Mais, selon Furet, il n'a eu
François Furet a écrit :
comme vision synthétique de l'immense évènement auquel il a consacré sa vie, que les convictions d'un militant du Cartel des gauches ou du Front populaire.
[Penser etc., p.24]

Vous voyez, il faut comprendre, je crois, comment Furet se positionne en tant qu'historien :
D'abord, il s'agit de dresser un tableau synthétique, longue durée, des évènements, bien plus que de s'attacher à l'exposition d'un problème circonscrit à un évènement, ou une pratique, sur lequel on rechercherait l'exhaustivité des faits, ce qu'on pourrait appeler la micro-histoire.
Et ensuite, il s'agit de donner à l'enchainement des évènements une signification, une lecture, qui est d'emblée une lecture particulière, qui s'assume éventuellement avoir des racines politiques. Et Furet dit très bien, très clairement, qu'il écrit contre la lecture marxisante de la Révolution, on ne peut quand même pas faire l'impasse sur ça.
En ce sens, la critique qui est faite par exemple, par le texte que j'ai cité sur la lecture politisée de l'histoire par Furet, n'est absolument pas illégitime. Au contraire, on peut critiquer Furet sur le fait de proposer une lecture politique particulière de l'histoire, puisque c'est ce qu'il a défini lui-même comme étant son projet.
En revanche, ce que le texte cité me semble, personnellement, ne pas prendre en compte, est que Furet ne dit absolument pas que sa lecture de l'histoire est une lecture vraie, ni même que c'est la seule possible. Au contraire, il écrit clairement que :
François Furet a écrit :
De la Révolution française, il y a donc des histoires royalistes, des histoires libérales, des histoires jacobines, etc.

et qu'elles ne sont pas contradictoires.
C'est cela, la grande force de Furet vis-à-vis de tous les idéologues. Il définit une lecture de l'histoire, il assume très bien qu'elle soit politisée, il lui assigne clairement un objectif qui est, entre autres, de constituer une lecture alternative à l'histoire marxisante, mais il assume aussi que sa lecture de l'histoire n'est aucunement ni la seule possible ni la seule vraie.

Du coup, il assume également qu'elle soit critiquable. Heureusement, d'ailleurs, n'est-ce pas, puisque c'est par la critique que progresse la connaissance. Personnellement, j'ai essayé de montrer, à mon petit niveau, et valant ce que ça peut valoir, par quel biais elle pouvait être critiquable : Le rôle assigné à l'idéologie, cette fois en tant que principe explicatif aux évènements historiques. Et c'est -parmi d'autres choses beaucoup plus anecdotiques, il est vrai- la critique que j'ai retrouvée dans le texte cité : Furet explique tout, en dernier ressort, par l'idéologie. C'est clairement ce qu'il a retenu de Tocqueville, et cela aussi, il le dit explicitement.
Bon, et bien, c'est effectivement son choix, parfaitement assumé, mais on est en droit de dire qu'il existe peut-être d'autres facteurs explicatifs. Personnellement, je trouve par exemple que forger le concept d'"idéologie égalitaire" pour expliquer le cheminement de la Révolution française, et même, celui du XIXe s. (puisque la Révolution selon Furet court sur tout le siècle), bon, c'est une lecture, encore une fois, mais il me semble que c'est une lecture qui n'est plus satisfaisante. Sans doute, elle avait du sens dans les années 70, clairement, et on le comprend bien. Mais enfin, il y a maintenant presque 20 ans (20 ans !) que le Mur est tombé et on a changé d'époque -évidemment, lorsqu'on lit certaines réactions sur ce forum, on pourrait presque en douter, mais je continue de penser que ce sont avant tout des réflexes acquis de vieille garde.

Voila, enfin, j'espère en tous cas avoir à peu près répondu à votre sollicitation, Phocas.

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Message Publié : 26 Avr 2008 10:12 
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Eginhard
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Bergame a écrit :
Bon, puisque vous en arrivez à dire que je n'avance aucune idée, Phocas, je crois qu'il est temps de conclure. Lire cela à propos de ce topic précisément, je trouve que c'est quand même un peu fort de café, revoyez-en la chronologie.

Vous en venez aux idées et je trouve çà intéressant, si vous souhaitez arrêter-là très bien ; je réponds tout de même à votre message, libre à vous d’en faire ce que vous voulez. Et pour vous prouvez ma bonne volonté, je ne réponds même pas au « fort en café ».
Bergame a écrit :
j'ai aussi tenté de montrer comment et pourquoi Furet, àmha toujours, était critiquable.

Mais vous n’avez pas à le montrer, il est critiquable sur bien des aspects ; ce que j’aimerai c’est qu’il soit plus critiqué en tant qu’historien et non pour ses idées ou son parcours.
Bergame a écrit :
Oh bien sûr, il est critiquable pour être "de droite" si on est "de gauche", la belle affaire ! Et il est défendable pour être "de droite" quand on est "de droite", merveilleux.

Je ne savais pas qu’il était de droite, mais passons sur ce point qui n’a rien à voir avec l’histoire.
Bergame a écrit :
Reprendre les modèles interprétatifs de Tocqueville n'est pas sans conséquence, cela l'incite par exemple à s'intéresser plus particulièrement à la signification des évènements qu'aux faits eux-mêmes. Mais cela, Furet le dit très bien et l'assume très bien, c'est précisément ainsi qu'il veut écrire l'histoire de la Révolution.

C’est exactement ce que je reproche à votre article : critiquer Furet sur ce point alors qu’il a expliqué les atouts et inconvénients de sa méthode. Il rompt avec l’histoire sociale marxiste en s’intéressant à l’idée de Révolution. Cette école a été plus que bénéfique sur le plan de la compréhension sociale de la Révolution, mais Furet veut comprendre l’idée en elle-même, pour cela il remonte en amont et dans cette démarche rencontre les écrits de Tocqueville. Certes sa démarche a de quoi désabusé ses lecteurs. Si on prend son Penser la Révolution, quel est le rapport entre un article au vitriol sur l’historiographie marxiste, un sur Tocqueville et le dernier sur Cochin ? L’idée de Révolution qu’il cherche à décortiquer dans tous ses écrits, on le voit très bien avec la gauche et la Révolution au XIXème. Il n’est nullement un idéologue mais un historien des idées comme on en rencontre dans toutes les périodes. Et comme vous le dîtes, cette démarche n’est pas la seule et comporte bien des limites. L’article l’attaque sur le fait qu’il oublie le social et les femmes, là je trouve franchement que c’est du n’importe quoi car Furet en tant qu’historien ne prétend pas à l’exhaustivité et n’y voit d’ailleurs qu’un leurre. Il l’explique parfaitement dans L’Atelier de l’Histoire :
François Furet a écrit :
Il faut plutôt accepter de réduire les ambitions déraisonnables de l’histoire totale, pour utiliser au maximum, dans notre connaissance du passé, les découvertes sectorielles et les méthodes de quelques analyses, et les hypothèses qui naissent de ce grand remue-ménage contemporain qu’on appelle les sciences de l’homme. Le prix à payer pour cette reconversion, c’est l’éclatement de l'histoire, la renonciation de l'histoire à un magistère social. Mais le gain de connaissance mérite peut-être cette abdication… Le Passé d’une illusion, Flammarion, 1982, P89

Cette position est désormais révolue mais nous parlons 26 ans plus tard. L’article en expliquant qu’il oublie les femmes et le social néglige totalement la méthode revendiquée par Furet. C’est seulement depuis quelques années qu’on retrouve des historiens passant d’une branche à l’autre de l’histoire, on le voit avec Jean-Clément Martin, capable d’écrire sur la violence dans la Révolution, les femmes, la Vendée…

Pour Lefebvre vous avez en grande partie raison, mais encore une fois il souligne les avancées permises par ses travaux, en fait dans le passage que vous citez, Furet lance une pique sur les opinions de Lefebvre mais son désaccord est avant tout historique. Lefebvre parlait de « capitalisme » pour l’aristocratie foncière de la fin XVIIIème, ce que Furet lui reproche c’est d’étudier dans un vaste ensemble le fait que les paysans se soient à la fois soulevés contre la noblesse en 1789 et contre la République en 1793, or Lefebvre ne fournit pas vraiment les causes du soulèvement contre ces deux entités radicalement différentes, il ne sépare pas le phénomène. C’est vraiment le principal reproche qui est ici fait à ce grand historien.
Bergame a écrit :
Et Furet dit très bien, très clairement, qu'il écrit contre la lecture marxisante de la Révolution, on ne peut quand même pas faire l'impasse sur ça.
En ce sens, la critique qui est faite par exemple, par le texte que j'ai cité sur la lecture politisée de l'histoire par Furet, n'est absolument pas illégitime. Au contraire, on peut critiquer Furet sur le fait de proposer une lecture politique particulière de l'histoire, puisque c'est ce qu'il a défini lui-même comme étant son projet.

Il écrit contre l’école marxiste, non pas parce qu’elle est marxiste, mais parce qu’elle n’explique pas l’idée de Révolution. C’est une lecture politique de la Révolution qu’il propose et non une lecture politisée. Les méthodes historiques de l’école marxiste ne lui convenaient plus. Je suis entièrement d’accord pour la lecture politique mais pas pour la lecture politisée. C’est une opposition plus historique que politique. Plutôt que de s’intéresser à son profil politique, il vaut mieux s’attarder sur ce qu’il pense de lé Révolution:
François Furet a écrit :
Au lieu de fixer le temps, la Révolution française l’accélère et le morcelle. C’est qu’elle ne parvient jamais à créer d’institutions. Elle est un principe et une politique, une idée de souveraineté autour de laquelle s’engendrent des conflits sans règles… La Révolution en débat, Folio, 1999, P76

La Révolution en tant que phénomène politique reste pour lui une énigme qu’il faut décortiquer, c’est pour cela qu’il la compare aux révolutions anglaise et américaine, c’est pour cela qu’il recourt à des auteurs qui n’ont strictement rien à voir : Quinet, Burke, Tocqueville, Cochin,…, c’est pour cela qu’il adopte une chronologie large, car l’idée de Révolution dépasse l’évènement aussi bien en amont qu’en aval.
François Furet a écrit :
l’extraordinaire pouvoir de contrainte de la Révolution française sur la politique française du XIXème siècle, id, P79

Bergame a écrit :
mais il assume aussi que sa lecture de l'histoire n'est aucunement ni la seule possible ni la seule vraie.

Je ne peux que vous approuver.
Bergame a écrit :
Le rôle assigné à l'idéologie, cette fois en tant que principe explicatif aux évènements historiques. Et c'est -parmi d'autres choses beaucoup plus anecdotiques, il est vrai- la critique que j'ai retrouvée dans le texte cité : Furet explique tout, en dernier ressort, par l'idéologie. C'est clairement ce qu'il a retenu de Tocqueville, et cela aussi, il le dit explicitement.

Là, je ne peux pas approuver. Il n’explique pas tout par l’idéologie, il cherche à comprendre l’idée. Il ne cherche pas à comprendre les soulèvements paysans en tant que tels, le rôle des femmes,… mais il veut savoir ce qu’est la Révolution, comment a-t-elle été pensée ? D’où vient cette idée ? Où va-t-elle ? Comme nous l’avons dit tout les deux : il ne prétend pas tout expliquer, il se concentre sur l’idée de Révolution et la suit pour mieux la comprendre ; la lecture est peut-être exclusivement politique mais elle n’est pas celle d’un idéologue. Je vois bien le reproche sous-jacent que fait l’article à Furet : il lit la Révolution comme un libéral. Non, son approche est celle d’un historien s’appuyant sur des sources qui comme toutes les sources sont critiquables. Il sait que sa démarche est plus fragile que l’histoire sérielle et l’assume, mais c’est une démarche fondamentalement historique avec ses forces et ses inconvénients.
Tous les travaux de Furet vont dans ce sens. Prenons le dictionnaire critique avec ses cinq entrées, le but est de comprendre cette idée de Révolution. Bien sûr, il comporte de très nombreuses lacunes par exemple dans le chapitre "acteurs" on ne trouve pas une entrée "femmes" ce qui bien sûr est une faiblesse et montre les lacunes en termes sociaux de cette approche mais nous sommes tous les deux du même avis : Furet l’assume parfaitement. Mais prenons son cinquième chapitre, on y retrouve tous ceux qui ont pensé la Révolution de Tocqueville à Jaurès, d’Aulard à Mathiez en passant par Michelet et là nous avons une incroyable avancée. L’histoire de Furet n’a certes pas les mêmes atouts que l’historiographie marxiste, elle apporte une nouvelle lecture : une histoire politique centrée sur l’idée de Révolution, cette démarche a ses atouts et ses faiblesses mais elle est bien une démarche d’historien.
Bergame a écrit :
Mais enfin, il y a maintenant presque 20 ans (20 ans !) que le Mur est tombé et on a changé d'époque -évidemment, lorsqu'on lit certaines réactions sur ce forum, on pourrait presque en douter, mais je continue de penser que ce sont avant tout des réflexes acquis de vieille garde.

Il fallait que vous balanciez une pique, je ne me sens pas visé et je ne sais pas à qui cela s’adresse mais c’est vraiment dommage de terminer votre intervention de la sorte.

Que retenir de Furet ? Je crois d’abord que je retiendrai un auteur extraordinairement compliqué à lire. On ne lit pas du Furet en diagonale, il faut le lire et le relire avant de bien le comprendre. C’est un homme du XXème siècle avec ses doutes et ses idées, mais il faut bien distinguer deux profils chez Furet : le "libéral mélancolique" (Pierre Hassner) et non le "libéral bon teint" comme vous le qualifiez, qui a regardé son siècle avec un regard particulier, puis l’historien de la Révolution et non l’idéologue de la Révolution. On peut critiquer son travail d’historien mais je crois que pour cela il faut aller lire ses travaux en profondeur. Or cet article montre de grosses lacunes dans la lecture de Furet, disons même que ses auteurs n’ont pas compris grand-chose à sa démarche historique.
Il est vrai que le social reste la principale lacune de son approche de la Révolution, mais nous disons cela dans le cadre historiographique actuel en oubliant le contexte du moment où il a commencé à publier ses travaux. Les auteurs de l’article fustigent Furet comme participant à toutes les rencontres et projets sur la Révolution en 1991, mais ils oublient de souligner l’accueil qu’il a reçu dans les années 60-70, lui l'ancien communiste osant parler de Révolution alors qu’il n’avait même pas écrit de thèse… Mazauric lui-même regrette ces attaques.

Voilà Bergame, faîtes ce que vous voulez de cette intervention. Concluez, reprenez, mais restez-en aux idées et évitez les piques et préjugés à mon encontre. Essayons d'en rester au débat, sinon arrêtons-là.

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Message Publié : 26 Avr 2008 10:52 
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En guise de rappel historiographique, il faut tout de même noter que les travaux de Furet ont mis en exergue la lecture de la Révolution faite par l'école marxiste, qui la plaçait dans un contexte politique précis, c'est-à-dire dans le schéma historique de Marx.
En effet, les travaux de Furet dans les années 1970 contredisent une vision d'une Révolution bourgeoise, qui ne doit être étudiée et appréhendée que d'un "bloc" (ce sont les termes de Jaurès). Pour cette école, il n'y a pas de "césure" majeure en 1792, puisque la Révolution demeure encore "bourgeoise", ce qui est un raccourci trop simpliste qui a le défaut de mettre le côté le rôle de certains acteurs de ces événements, qui n'agissent pas en fonction d'une "conscience de classe", comme le prétend encore Soboul.
C'est logique, puisque pour les marxistes, la Révolution bourgeoise dans dans le cheminement marxiste n'est qu'une "introduction" à la révolution prolétarienne qui doit suivre obligatoirement. En effet, selon eux, comme les bourgeois ont pris le pouvoir politique, alors qu'ils disposaient déjà du pouvoir économique (ce qui reste toujours à prouver en 1789), il peuvent poursuivre leur oppression. Celle-ci conduisant inévitablement à une révolution sociale visant à l'établissement de la dictature du prolétariat, c'est-à-dire du socialisme.
Cette vision déterministe de l'histoire et de la RF en parcticulier est rendue caduque par les travaux de Furet et d'Ozouf, entre autres. Et, cela n'a rien à voir avec la chute du mur, je ne comprends pas, d'ailleurs, très bien cette remarque... :-|
De la même manière, pour l'école marxiste, avant 1789 il n'y avait pas vraiment un mouvement de divers groupes d'acteurs (noblesse frondeuse, parlementaires, libéraux, bourgeoisie, émotions paysannes...) qui annonçaient des mutations politiques à venir et que ce temps de la mutation était entâmé depuis près de dix ans. Là encore, Furet démontre l'inverse et reprend les analyses de Tocqueville dans sa démarche.

Citer :
cela l'incite par exemple à s'intéresser plus particulièrement à la signification des évènements qu'aux faits eux-mêmes.

Mais tous les historiens procèdent ainsi ! Ils questionnent des événements passés avec des problématiques actuelles et ne pensez pas que cela les dédouane d'étudier en profondeur les faits en question.

Il me semble Bergame, qu'il faudrait que vous ouvriez un ouvrage de synthèse sur les travaux historiques qui ont été réalisés sur la Révolution depuis le XIXème siècle. Cela mis en perspective vous comprendrez mieux en quoi Furet a innové par rapport à l'école marxiste.
Car ses opproches demeurent marxistes : il se sert des travaux de cette école sur les différents groupes sociaux de l'époque - qui n'avaient pas été réalisés par les historiens du XIXème siècle -, mais démontre l'erreur de penser qu'ils agissaient en fonction de leur "conscience de classe" - essentiellement concernant la bourgeoisie et la paysannerie - et que la Révolution française demeure un moment qu'on ne peut glisser artificiellement dans un mouvement plus long qui tirerait vers une révolution prolétarienne obligatoire.
C'est placer ainsi les acteurs de l'histoire dans un carcan étouffant, qui ne tient pas debout, puisqu'il nie les aspects individuels et collectifs de ces derniers, qui sont bien plus complexes et multiples.
Car, qui peut croire un instant que le marquis de Bouillé et de La Fayette avaient les mêmes idées politiques, alors qu'ils sont nobles tous les deux - et de la même famille ? Qui peut croire que Robespierre pensait déjà à la République et au remplacement du roi, lorsqu'il entre à Versailles aux Etats-Généraux le 5 mai 1789 ?
C'est cela la nouveauté de Furet dans l'historiographie de la Révolution et rien d'autre. Il combat le détermisme offert par l'école marxiste à l'étude de ces événements, tout comme la fameuse "conscience de classe", qui ne tient pas à l'étude des faits et des actes qui touchent les acteurs de la RF.

Citer :
concept d'"idéologie égalitaire"

Désolé, mais ce n'est pas un concept historique et Furet n'a jamais prétendu que cela en était un.

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Alphonse de Lamartine


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Message Publié : 26 Avr 2008 11:54 
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Eginhard
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A venir (mois de mai) un colloque intitulé: François Furet: le passé d'une illusion. Pour ceux qui ne sont pas loin de la Franche-Comté :'( . Le programme peut-être consulté sur le lien suivant:
http://www.univ-fcomte.fr/download/partage/document/actualite/colloques_conferences/depliant_furet2.pdf

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Message Publié : 26 Avr 2008 15:04 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 23 Avr 2005 10:54
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Et bien, je vois bien votre bonne volonté, Phocas, et j'apprécie vraiment certains passages. Mais j'avoue ne pas comprendre votre besoin d'en rester autant à des querelles politico-idéologiques. Si vous décidiez de ne parler que d'historiographie, Phocas, vous constateriez peut-être qu'en décrivant l'historiographie de Furet comme une analyse de l'idée de la Révolution, d'une part, nous sommes d'accord tous les deux (mais peut-être n'avez-vous pas lu ma petite analyse en page 1, je ne vous en veux pas) et d'autre part, vous êtes peut-être même d'accord, au moins sur le fond, avec M.Riot-Sarcey (mais peut-être avez-vous passé rapidement sur les chapitres intitulés "De l'idée en révolution" et "l'histoire de l'idée", et je ne vous en veux pas non plus). Peut-être. Et je vais vous dire, moi, cela me ferait plaisir.

J'ai beaucoup plus de mal, je dois l'avouer, à accepter des "les auteurs n'ont pas compris grand-chose à la démarche historique de Furet". Je trouve que cette discussion aura décidément été particulièrement vive à l'encontre de M. Riot-Sarcey qui, malgré tout, est quand même professeur d'université, elle. Mais ici, c'est une dame sur laquelle on peut manifestement s'essuyer les pieds, qualifier de tous les noms d'oiseau, et décréter qu'elle ne comprend pas grand-chose à ce sur quoi elle écrit. Franchement, je trouve que cela commence quand même à faire un peu beaucoup.

Mais bref, abandonnons donc ce maudit texte qui n'aide manifestement pas à notre discussion, et essayons d'avancer un peu sur Furet lui-même. Vous dites que si l'on veut critiquer Furet, il faut le critiquer sur le plan historiographique. Je suis donc ô combien ! d'accord avec vous. Mais puis-je vous demander quelle critique, exactement, vous lui adresseriez ? Je vois que vous commencez à esquisser une critique sur le social. J'aimerais sincèrement vous demander d'approfondir un peu, car ce n'est pas ce qui me viendrait en premier à l'esprit, mais je serais heureux d'avoir vos vues là-dessus.

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Message Publié : 26 Avr 2008 19:13 
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Eginhard
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Bergame a écrit :
Et bien, je vois bien votre bonne volonté, Phocas, et j'apprécie vraiment certains passages. Mais j'avoue ne pas comprendre votre besoin d'en rester autant à des querelles politico-idéologiques. Si vous décidiez de ne parler que d'historiographie, Phocas, vous constateriez peut-être qu'en décrivant l'historiographie de Furet comme une analyse de l'idée de la Révolution, d'une part, nous sommes d'accord tous les deux (mais peut-être n'avez-vous pas lu ma petite analyse en page 1, je ne vous en veux pas) et d'autre part, vous êtes peut-être même d'accord, au moins sur le fond, avec M.Riot-Sarcey (mais peut-être avez-vous passé rapidement sur les chapitres intitulés "De l'idée en révolution" et "l'histoire de l'idée", et je ne vous en veux pas non plus). Peut-être. Et je vais vous dire, moi, cela me ferait plaisir.

Franchement Bergame, j’aime l’art avec lequel vous alternez compliments et belles leçons à l’égard de vos interlocuteurs. J'ai lu deux fois votre article avec attention pour autant il semble que je n'ai rien compris, heureusement vous me pardonnez. Ce qui est formidable c’est que vous me dites que j’en reste aux aspects politico idéologiques alors que la majeure partie de mon message, que j’ai pris un certain temps à écrire, est historiographique. Formidable, je cite plusieurs ouvrages, j’amène plusieurs points mais la seule chose que vous retenez ce sont les aspects politiques. C’est vous qui avez posté un article à caractère plus politique qu’historique. Je ne suis pas le seul à dire cela de cet article il me semble. A moins que le Duc soit inclus avec moi dans la vieille garde qui pense comme avant 1991, heureusement que vous ne voulez qu’un débat historiographique.
Pour votre article, je fais à chaque fois référence aux auteurs qui sont deux je le rappelle. Je ne m’essuie pas les pieds dessus et force est de constater que cet article n’a pas grand-chose d’historique. La seule attaque que j’ai lancée est légitime. Ils ne rédigent pas un papier historique. La preuve quand ils jugent la méthode de Furet ils sont à côté de la plaque, vous l’avez-vous-même souligné, mais moi je n’ai pas droit de le dire. Pour que les auteurs sortent des choses pareilles, c’est qu’ils n’ont jamais lu l’Atelier de l’histoire dans lequel il explique sa méthode. Donc oui j’ai été très correct jusqu’à maintenant mais là j’ai le droit d’attaquer. Elle comme vous le soulignez est universitaire. Qu’est-ce que vous insinuez : qu’on n’a pas le droit de la critiquer au nom de cela ? Si je ne peux pas critiquer les gens plus intelligents que moi, il va falloir que je me contente de lire Oui Oui.

Mais vous voulez abandonner cet article et c’est tant mieux. J’ai déjà évoqué les points sur lesquels pour ma part je critiquerai Furet, je ne vous gratifie pas du « je ne vous en veux pas ». Selon moi, on ne peut avoir une approche complète de la Révolution par la seule lecture de Furet. Furet s’est concentré sur le « Penser la Révolution », ses travaux ne permettent donc pas de bien comprendre le « Vivre la Révolution ». Là évidemment c’est le lecteur de 2008 qui parle, ce que j’apprécie vraiment dans l’historiographie actuelle c’est cette analyse qui croise politique, social et culturel, sans pour autant tomber dans une microhistoire stérile. Je trouve que l’historiographie de la Révolution se porte bien en ce moment, si on enlève bien sûr le Livre noir qui n’apporte strictement rien. En fait Furet aurait vraiment gagné à pouvoir croiser ces phénomènes. Mais cette démarche n’existait pas vraiment au moment où il écrivait. Et comme il le dit son approche se limite à l'idée de Révolution. D’un autre côté son approche de l’idée est tellement vaste qu’on peut difficilement lui reprocher de ne pas avoir été exhaustif sur certains points. Ma remarque pourrait sembler juvénile mais quand on lit Furet, il y a rarement des anecdotes, on n’a jamais de pauses, le cerveau doit constamment être en éveil car il sort très rarement de l’idée. Sur certains passages, il faut plusieurs lectures avant de bien comprendre. Ce serait le second point que je reprocherai à Furet, il est parfois très compliqué, on ne le lit pas comme on lit Duby (ce qui n’est nullement un jugement de valeur) ; d’un autre côté la facilité ou non de lecture n’est pas vraiment un jugement de compétence en histoire.

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Message Publié : 08 Nov 2008 12:56 
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Eginhard
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Inscription : 30 Juil 2007 13:17
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Localisation : Var
Dans le dernier numéro de l'Histoire, Pierre Assouline consacre un papier sur les dernières attaques contre François Furet. Celles-ci ont été lancées par Vincent Peillon dans son livre La Révolution n'est pas terminée, Le Seuil.
Je mets le lien vers la critique de l'IHRF, à la suite vous y trouverez l'interview du député européen au Nouvel Observateur: "Faut-il brûler Furet?"
http://ihrf.univ-paris1.fr/spip.php?article301
La réaction de Mona Ozouf:
Mona Ozouf a écrit :
Avez-vous lu François Furet?
Par Mona Ozouf
Le débat que notre journal a publié le 28 août entre Vincent Peillon et Philippe Raynaud m'a laissée perplexe: pour donner au Parti socialiste un supplément d'âme (j'applaudis, j'espère, je veux croire), suffit-il de s'en remettre au spiritualisme de Pierre Leroux et à la religion de l'humanité? Ce sympathique projet ne m'a pas paru très clair. Ce qui l'est en revanche, c'est le repoussoir choisi pour mieux mettre en valeur cette aube radieuse: l'oeuvre de François Furet. Une oeuvre que Vincent Peillon a surtout imaginée, a dit justement ici Philippe Raynaud.
J'ai lu à mon tour le livre de Peillon, auquel je voudrais suggérer de lire enfin François Furet. Le procès en sorcellerie qu'il entame comporte deux objections majeures (je néglige celles qu'il a tout bonnement recopiées chez Jean-Fabien Spitz (1), sans jamais trouver, ni même chercher, le texte de Furet qui leur donnerait de la consistance). La première est d'avoir traité avec dérision la IIe République et sa pensée. Cette fois, Vincent Peillon s'est armé de citations. Le malheur veut qu'elles ne soient pas de Furet, mais de moi. J'en discuterais volontiers avec lui et lui recommande, pour conforter sa thèse, un auteur qui, à propos des penseurs de 1848, a déclaré «ne faire guère confiance aux esprits forts qui les tournent en ridicule» et s'est reconnu «le fils» de ces républicains préhistoriques. Qui donc, cet allié providentiel? Furet, bien sûr.
La seconde objection est plus extravagante encore. Furet aurait négligé la dimension religieuse de la Révolution française et méconnu la pensée d'Edgar Quinet. Tout lecteur de Furet sait que nul plus que lui ne s'est intéressé «au gouffre qui s'est ouvert dans la vie publique française par l'affrontement entre la Révolution et l'Eglise catholique»; nul n'a davantage réfléchi au déficit spirituel qui en est résulté. Quant à Quinet, sous l'autorité duquel s'ouvre «Penser la Révolution française», je conseille à Vincent Peillon de lire le portrait en pied que Furet lui a consacré. Je tiens à sa disposition toutes les références dont il aurait besoin.
Le titre du «Nouvel Obs», l'autre jour, m'a fait sursauter. Brûler Furet? Pas ça tout de même! Pas ici! Mais à tout prendre, ce titre dit beaucoup de la fausse controverse qui s'installe. Les brûleurs de livres, l'histoire nous l'apprend assez, les ont rarement lus.
M.O.
(1) «Le Moment républicain en France», Gallimard.

http://bibliobs.nouvelobs.com/2008/09/10/avez-vous-lu-francois-furet

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