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Message Publié : 22 Mars 2008 11:48 
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Eginhard
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Cette question a été soulevée au cours d'un autre débat et il semble (pour deux participants au moins ;) ) qu'elle mérite un topic à elle seule.
A partir de quel moment, un évènement ne relève-t-il plus de l'actualité et passe dans le champ de l'histoire? Cela doit-il se définir par une date, un accès aux sources, des travaux d'historiens?
Il semble que la frontière soit extrêmement floue. D'autre part, il n'est pas interdit à l'historien de déborder sur des questions d'actualité si il reste sur des problématiques et des méthodes historiques. Nous avons vu toute la complexité de cela au moment des présidentielles avec certains historiens qui se prononçaient sur le sujet en restant fidèle à la déontologie de l'historien (je pense par exemple à Jean-François Sirinelli) et d'autres qui échouaient de façon pitoyable (ce n'est qu'un exemple, je ne veux pas un débat ou une polémique sur cet exemple). Cela vaut également pour les journalistes qui peuvent faire référence à certains évènements qui relèvent de l'histoire mais pour mieux éclairer l'actualité.

Autre exemple, les bornes chronologiques du forum. Le Rwanda, le Kosovo, le 11 septembre sont des évènements historiques mais sont pourtant exclus du forum car certains ne peuvent toucher à des évènements "quasi immédiats" sans basculer dans la polémique.

Bref, le rapport entre actualité et histoire est complexe et conflictuel. Peut-on et doit-on définir une frontière? Si oui, sur quels critères?

PS: Narduccio, j'espère rester fidèle à la digression du topic sur Wikipedia. Je vous laisse également replacer si vous le pensez nécessaire le débat entre vous-même et Hektor qui a amené ces questions.

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"Si, dans la pratique démocratique anglaise, l’opposition, selon un mot admirable, remplit un service public, dans les États totalitaires, l’opposition devient crime ", Raymond ARON.


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Message Publié : 22 Mars 2008 12:27 
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J'ai réfléchi à la question entretemps. Il est vrai que la frontière est floue.
Prenons 2 exemples :
Le premier la chute du mur de Berlin. Si l'on faisait un sondage, je suis sûr que l'on aurait une immense majorité pour dire que c'est de l'histoire. Même si de nombreux peuples subissent encore de nos jours les conséquences des évènements qui amènent à cet évènement. La chute du mur clôt une période de l'histoire du monde (pas seulement de l'Allemagne, mais bien du monde) et en ouvre donc un suivant. Nous sommes dans la période post guerre-froide et comme l'avait déclaré un journaliste: nous avons terminé la période que l'on pourrait appeler l'après-guerre (et il se referait à l'après seconde guerre mondiale ...).

Le second ? Celui qui a initié la divergence de vue qui a amené la naissance de cette discussion : la catastrophe de Tchernobyl. Du moins en France, d'autres pays ont rangé cet évènement dans l'histoire.
Pourquoi en France cet évènement rempli encore les colonnes des journaux ? Pourquoi pour de nombreuses personnes, il s'agit encore d'actualités ? Parce qu'il y a de nombreuses choses sur ces a-coté qui ne paraissent pas explicite pour l'opinion publique et parce que la vision objective qu'en aurait un historien ne correspondrait pas à ce qu'en perçoivent les gens.

Pourtant Tchernobyl précède de 3 ans la chute du mur. Mais, une partie de ce qui dans notre inconscient constitue "Tchernobyl" fait encore parti de notre vie. Il y a encore au moins un procès en cours. Il y en a eu un autre qui a opposé 2 personnes sur l'affaire du mensonge et qui s'est fini en queue de poisson devant la cours européenne des droits de l'homme à Strasbourg. Je reste volontairement flou. Je ne désire pas que cette discussion dérive en une polémique stérile.

Donc, la question se pose : comment définir cette frontière entre histoire et actualité. Il y a des évènements qui sont très vite définis comme "historiques", il y en a d'autres qui restent pendant longtemps dans les pages actualités, on pourrait citer les emprunts russes, le cas des Malgré-nous en Alsace (qui n'est toujours pas totalement résolu de manière satisfaisante pour toutes les parties). Je sais qu'à PH la question a été tranchée par la décision d'instaurer la "frontière temporelle de 1989". Mais, il y a des évènements qui ont eu lieu après 1989 et qui donneraient lieu à un débat serein, il y en a d'autres qui sont plus vieux et qui lancent chaque fois une polémique virulente.

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Message Publié : 22 Mars 2008 12:45 
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Philippe de Commines
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Une réponse "au débotté", qui est plus un élément pour alimenter la réflexion, qu'une réponse : la frontière entre l'actualité et l'histoire est là où l'historien la fixe : cela dépend du "périmètre" de son travail. Il n'y a qu'un impératif, à mon sens : l'événement doit pouvoir être pris comme un événement ou une séquence achevée.

Pour reprendre votre exemple de Tchernobyl (j'ai suivi votre discussion "wikipédiste" ;) ) : l'historien peut faire un travail d'historien sur la catastrophe elle-même et sur ce qui s'est passé autour d'elle jusqu'au moment où la catastrophe a été jugulée (mise en place du coffrage terminée).

Le reste est toujours d'actualité et ne relève pas de l'historien : fuites radioactives sur le site aujourd'hui (s'il y en a) ; le "bilan" des conséquences humaines (des gens meurent encore aujourd'hui) ; l'impact à moyen-long terme (sur place et ailleurs : les champignons de la forêt vosgienne sont-ils toujours "atomiques" ?)

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Message Publié : 22 Mars 2008 12:48 
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Philippe de Commines
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Entièrement d'accord avec Narduccio .
La limite "linéaire" n'est certainement pas bonne mais applicable .
Une autre serait certainement meilleure mais inapplicable .
Ensuite l'histoire peut être "immédiate" ;

Je me rappelle un post que l'on m'a effacé où je parlais "en direct" de l'enterrement du patron de Michelin mort accidentellement en mer (2007 je crois) .
Pour moi c'était à la fois du direct et aussi de l'histoire :
devant nos yeux,en direct,l'enterrement du maître de forge avec les grands pontes politiques economiques et religieux de la région + tous "ses" ouvriers .

Sociologiquement c'était extarordinaire .

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Message Publié : 22 Mars 2008 12:53 
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Karolvs a écrit :
l'impact à moyen-long terme (sur place et ailleurs : les champignons de la forêt vosgienne sont-ils toujours "atomiques" ?)



Je vis près de la frontière allemande et j'ai de la famille en Italie. Dans ces 2 pays, cela relève de l'histoire ou au moins ne soulève pas de polémiques dans la presse. Le cas français est bien particulier sur ce sujet et pourrait bien faire l'objet d'une analyse historique pour montrer pourquoi un évènement qui a eu lieu il y a plus de 20 ans est encore d'actualité dans notre pays et pas dans les autres.

Ce que je veux montrer par là, c'est qu'un évènement devient aussi de l'histoire a partir du moment que l'on à décidé qu'il en faisait partie et par ce on j'entends l'essentiel de l'opinion publique. Ce qui n'est pas le cas en France pour cette affaire.

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Message Publié : 22 Mars 2008 13:01 
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Ungern a écrit :
Je me rappelle un post que l'on m'a effacé où je parlais "en direct" de l'enterrement du patron de Michelin mort accidentellement en mer (2007 je crois) .
Pour moi c'était à la fois du direct et aussi de l'histoire :
devant nos yeux,en direct,l'enterrement du maître de forge avec les grands pontes politiques économiques et religieux de la région + tous "ses" ouvriers .

Sociologiquement c'était extraordinaire .


C'est un évènement comme la chute du mur de Berlin. Il est tout de suite perçu comme la fin d'une période historique et le début d'une autre. En tant que tel, il est immédiatement perçu comme historique. Ce serait aussi le cas de la mort de Lazare Ponticelli, par exemple.
En fait, il serait à la fois historique et d'actualité. Historique parce qu'il clôt la période précédente. D'actualité par les incertitudes que fait naitre le changement de période. Mais, j'ai l'impression qu'usuellement, on considère la plupart de ces évènements comme la fin d'une période.
La chute du mur est la fin d'une période et l'ouverture initiée par cette chute est le début d'une autre. La différence du vocabulaire est aussi essentielle à la compréhension de l'évènement.

PS: une frontière non-linéaire serait inapplicable, à moins d'avoir un juge suprême dont le pouvoir sera reconnu par tous et qui définirait au cas par cas ce qui serait historique et ce qui relève des sujets d'actualités.

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Message Publié : 22 Mars 2008 14:14 
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Bonjour,

Si j'en crois la définition donnée par le Larousse, l'histoire est la partie du passé connue par des documents écrits.
Il faut donc avoir à disposition des écrits, authentiques autant que possible, écrits se rapportant au passé, donc des archives. La limite serait alors la date de mise à disposition de l'ensemble des documents permettant une étude exhaustive. En France, cela serait de 30 ans (en théorie) mais de nombreux documents sont inaccessibles avant 60 ans. Pour moi ce chiffre marquerait la frontière entre passé et actualité.
Dire qu'un évènement est historique ne signifie pas qu'il appartient à l'histoire. Cela se peut, mais cela peut aussi signifier qu'il entrera (futur) dans l'histoire ou qu'il influencera le cours de l'histoire.

Cordialement
Jean


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Message Publié : 22 Mars 2008 14:22 
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Jean.D a écrit :
Si j'en crois la définition donnée par le Larousse, l'histoire est la partie du passé connue par des documents écrits.


Cette définition n'est-elle pas trop restrictive et trop littéraire ? Ne devrait-elle pas être revue ?

Je m'explique. De nombreux témoignages écrits sur le passé sont des pièces de procès ou des déclaration solennelles; donc des écrits qui reprennent la parole et qui sont parfois de seconde ou de troisième main. Quand à l'histoire récente, on ne peut plus se contenter de l'écrit, il y a les documents photographiques, les divers supports sonores et les documents visuels (films, documentaires, reportages, ...). Bien entendu, on entend dire que ces documents doivent être analysés parce que manipulables ... tout comme les documents écrits. Tout ce que réalise l'homme est manipulable et interprètable. C'est de la somme des documents qu'émerge la grille de lecture que valide l'historien.

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Message Publié : 22 Mars 2008 14:40 
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Narduccio a écrit :
Je sais qu'à PH la question a été tranchée par la décision d'instaurer la "frontière temporelle de 1989". Mais, il y a des évènements qui ont eu lieu après 1989 et qui donneraient lieu à un débat serein, il y en a d'autres qui sont plus vieux et qui lancent chaque fois une polémique virulente.


Il me vient une autre idée en complément à mon précédent message.
Pour moi, comme je l'ai dit, la limite se situerait en 1948.
Il est vrai que, entre 1948 et 1989, il est possible de discuter des évènements. Mais sur quelles bases ? A-t-on toutes les données ? Je crois que la réponse est négative puisque tous les documents existants ne sont pas encore disponibles.
Et dans certains cas même 1948 est une date encore trop proche puisque des documents médicaux (rapport d'autopsie par exemple) ne sont communicables qu'après un délai de 150 ans .
Je ne pense pas que la notion de polémique, utile à la tenue du forum, soit à prendre en considération. Il doit être possible de soulever de belles envolées en traitant de l'action altruiste des seigneurs de 1750 lol

Jean


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Message Publié : 22 Mars 2008 14:44 
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Narduccio a écrit :
Je m'explique. De nombreux témoignages écrits sur le passé sont des pièces de procès ou des déclaration solennelles; donc des écrits qui reprennent la parole et qui sont parfois de seconde ou de troisième main.


Ce pourquoi un travail sérieux ne peut être fait que d'après les minutes du procès, soit après 120 ans (à vérifier)

Exemple : les bomabrdement de juin 1940 par les Italiens.

Jean


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Message Publié : 22 Mars 2008 15:07 
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Jean.D a écrit :
Narduccio a écrit :
Je m'explique. De nombreux témoignages écrits sur le passé sont des pièces de procès ou des déclaration solennelles; donc des écrits qui reprennent la parole et qui sont parfois de seconde ou de troisième main.


Ce pourquoi un travail sérieux ne peut être fait que d'après les minutes du procès, soit après 120 ans (à vérifier)

Exemple : les bombardement de juin 1940 par les Italiens.

Jean


Je me suis mal exprimé. Pour de nombreuses personnes, il y a d'un coté des documents sérieux, reposant sur l'écrit et de l'autre le reste de la documentation disponible. Or, l'écrit peut être autant sujet à caution que le non-écrit. Et vice-versa: n'oublions pas qu'une partie de la Constitution française est la transcription d'un discours du premier ministre de l'époque devant l'Assemblée Nationale. Surtout que dans de très nombreux cas, l'écrit n'est que la transcription de l'oral. Un film, une photo, un enregistrement sonore, bien exploités, peuvent être une source sérieuse pour l'historien. Mais, il est plus difficile de s'approprier ces "nouveaux" supports. Hier un intervenant du Journal de l'Histoire (diffusé sur la chaine Histoire) expliquait qu'il avait du devenir un spécialiste de l'uniformologie lorsqu'il s'est servi des films d'archives pour un travail sur la première guerre mondiale. Très peu de ces films sont datés et seuls les détails des uniformes permettent de les dater assez précisément.

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Message Publié : 22 Mars 2008 15:09 
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Je ne partage pas l’avis général qui ressort des premières interventions sur ce fil.

« Pourquoi en France cet évènement (Tchernobyl 1986) rempli encore les colonnes des journaux ? Pourquoi pour de nombreuses personnes, il s'agit encore d'actualités ? Parce qu'il y a de nombreuses choses sur ces a-coté qui ne paraissent pas explicite pour l'opinion publique et parce que la vision objective qu'en aurait un historien ne correspondrait pas à ce qu'en perçoivent les gens. » écrit Narduccio.

Je crois qu’il y a là confusion entre l’événement lui-même et ses échos.
L’explosion de la centrale a eu lieu, c’est un événement fini, dont on peut faire l’histoire : analyse (avec mise en perspective) des faits, de leurs causes et des conséquences y compris celles qui font « actualité ».
Si ce n’était le cas, on pourrait dire que le régime de Vichy serait encore de l’actualité et non de l’histoire puisque, régulièrement, il y a débat sur le sujet entre historiens et opinion publique (perception des gens).

Pour preuve de ce que j’avance, Narduccio donne lui-même l’argument quand il écrit : « Dans ces 2 pays (Allemagne et Italie), cela (Tchernobyl) relève de l'histoire ou au moins ne soulève pas de polémiques dans la presse. ».
Le propos témoigne bien qu’il y a une différence entre l’événement (qui fait partie de l’histoire) et la polémique qui est un autre événement, inachevé celui-ci et qui ressortirait, lui, de l’actualité.
Il faut distinguer le sujet (l’accident de Tchernobyl) d’une de ses conséquences (une polémique qui est – je le dis sans mauvais jeu de mot – une autre histoire :) ).


Mon premier critère de distinction s’appuiera donc sur la formule que j’emprunte à Karolus : « l'événement doit pouvoir être pris comme un événement ou une séquence achevée. »
Par « séquence achevée » entendons que le fait a produit son effet « immédiat » ; il est terminé.
A ce titre, Berlin 89, le 11 septembre et les municipales françaises de 2008 sont de l’histoire. Les faits immédiats sont établis (chute du mur et du communisme en Allemagne, attaque terroriste et effondrement des tours, campagne électorale et élection des maires), analysés et expliqués pour eux-mêmes. Pour évoquer un exemple récent : pendant toute la campagne des municipales en France jusqu’à l’élection des maires ces jours ci, les municipales étaient de l’actualité ; elles sont désormais de l’histoire.

Ungern évoque un souvenir : « Je me rappelle un post que l'on m'a effacé où je parlais "en direct" de l'enterrement du patron de Michelin mort accidentellement en mer (2007 je crois).
Pour moi c'était à la fois du direct et aussi de l'histoire


Je ne suis pas d’accord sur ce point : le « direct » évoqué n’est pas de l’histoire mais du témoignage. Un individu assiste à un événement qui peut être « historique », mais le discours qu’il tient sur celui-ci ne sera jamais qu’un témoignage, une donnée qui servira peut-être, ultérieurement, à l’élaboration du discours historique, mais ce n’est pas de l’histoire. Ne pas confondre « assister à ce qui fait histoire » et « faire de l’histoire ». Celui qui vit en direct l’effondrement des Twin Towers ne fait pas de l’histoire, il témoigne.

Mon deuxième critère est donc d’ordre méthodologique. Si on écarte du débat le fait que tout est Histoire en ce sens où tout participe du réel historique, la différence entre « histoire » et « actualité » relève de la nature du discours tenu sur un événement quel qu’il soit. Est histoire tout ce qui relève de la tentative de reconstruction du passé dans le respect des méthodes de la science historique, de sorte de donner au lecteur une compréhension globale du sujet traité, et ce quelles que soient les lacunes des sources disponibles ; est « journalistique » ou « actualité » tout discours tendant à transmettre une information brute au présent, qu’il s’agisse d’un fait ou d’un point de vue.

A contrario, je ne suis donc pas d’accord pour fixer l’historicité par le recours à une ancienneté temporelle (principe cher à ce forum qui exclut tout sujet au-delà d’une date, principe que je comprends pour la paix du dit forum, mais qui n’a pas de sens historiographique).
Je ne suis pas d’accord non plus avec l’idée consistant à dire qu’un fait entre dans l’histoire « là où l'historien la fixe » (dixit Karolus) ; c’est laisser la question pendante puisqu’elle dépendrait d’un choix arbitraire et non d’un critère un tant soit peu objectif ! Que se passe-t-il en effet, quand « l’historien » qui fixe la limite et contesté dans son choix par un de ses pairs ?


NB : entre journaliste et historien, la distinction ne saurait être faite stricto sensu. Tout journaliste qui est d’abord témoin peut faire un travail d’historien dès lors qu’il respecte les méthodes d’analyses des points de vues et des liens de causalités les plus exhaustifs possibles sur un sujet que nous dirons « achevé ». Dans ce cas, il change d’ailleurs de support et propose ce qu’on appelle un « documentaire » plutôt qu’un « reportage ». Par définition, le premier travail fait recours à une documentation (des sources analysées) quand le second se contente de « relater ce qu’il a vu » (selon le Robert). De même, nul historien n’est historien a temps plein et chaque membre de cette corporation peut se muer en témoin (ou journaliste dans le sens où il parle "au jour dit") à la faveur d’un événement, donnant son avis ou son opinion sur celui-ci sans que sa qualité professionnelle puisse donner quitus privilégié à ce qui n’est qu’un point de vue parmi d’autres.
Est ainsi journaliste le témoin, historien l'analyste. Le discours sur l’événement est « actualité » quand il est témoignage, « histoire » quand il relève de l’analyse scientifique. Du moins, est-ce ainsi que je vois les choses, mes deux critères n’ayant pas vocation à proposer une réponse exhaustive à la question de ce fil.


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Message Publié : 22 Mars 2008 15:14 
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Baudolino a écrit :
Que se passe-t-il en effet, quand « l’historien » qui fixe la limite et contesté dans son choix par un de ses pairs ?


IL faut lire " quand l'historien qui fixe la limite est contesté..."

désolé !


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Message Publié : 22 Mars 2008 15:21 
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Philippe de Commines
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Localisation : Metz
Baudolino a écrit :
entre journaliste et historien, la distinction ne saurait être faite stricto sensu.


Je suis d'accord avec beaucoup de points de votre intervention, mais pas celui-ci. En effet, le journaliste et l'historien sont radicalement séparés par ce qui fait le fondement de leur travail: le rapport à la source. Un historien doit citer ses sources et les donne en notes. Le journaliste n'est pas contraint de les donner et, le plus souvent, il préfère ne pas les donner pour les protéger et ne pas les tarir.
Bref, on croit les preuves d'un journaliste sur parole, on croit un historien parce qu'il apporte des preuves vérifiables.

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(Martin Luther)


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Message Publié : 22 Mars 2008 15:39 
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Jean-Claude a écrit :
Baudolino a écrit :
entre journaliste et historien, la distinction ne saurait être faite stricto sensu.


Je suis d'accord avec beaucoup de points de votre intervention, mais pas celui-ci. En effet, le journaliste et l'historien sont radicalement séparés par ce qui fait le fondement de leur travail: le rapport à la source. Un historien doit citer ses sources et les donne en notes. Le journaliste n'est pas contraint de les donner et, le plus souvent, il préfère ne pas les donner pour les protéger et ne pas les tarir.
Bref, on croit les preuves d'un journaliste sur parole, on croit un historien parce qu'il apporte des preuves vérifiables.


De fait, nous sommes d'accord. J'ai seulement voulu dire que l'historien peut se comporter en journaliste et vice versa ; il n'y a pas de frontière étanche chez chacun. Dans la mesure où je n'ai pas été clair sur ce point, merci de m'avoir repris. :)


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