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Message Publié : 08 Août 2008 21:55 
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Salluste
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Quand on prend un hallucinogène et qu'on écrit "sous effets", on produit du texte hallucinée à l'aide d'une plume délirante. On se livre à ce que je qualifierait de présentation littéraire.

Si j'écrivais sur le sujet après, en étant lucide, je ne me livrerais qu'à une re-présentation littéraire. Ce serait une écriture froide pour une écriture à froid. Elle bénificierait de recul, d'un regard critique, etc. mais ne bénéficierait pas de la chaleur, elle ne serait pas délirante, elle serait "fausse".

Ici, sur ce forum, je trouve très dommage qu'on ne se livre qu'à des re-présentation historique et qu'on laisse de côté la véritable présentation en laissant de côté l'époque encore trop proche.

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« Suffering also has its worth. Through sorrow, pride is driven out, and pity felt for those who wander in samsara; Evil is avoided, goodness seems delightful. »

Shantideva


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Message Publié : 09 Août 2008 4:49 
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Philippe de Commines
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Inscription : 05 Jan 2008 16:29
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C'est probablement pour ça que les projets visant à intégrer les périodes plus récentes au forum avancent avec circonspection...

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Les facultés de conceptualisation de l'empereur Constantin paraissent avoir été très limitées ; malgré de longues séances, les évêques ne semblent pas avoir réussi à lui faire bien comprendre la différence qui séparait l'orthodoxie de l'arianisme. (Y. Le Bohec)

Bref, un homme "au front étroit mais à la forte mâchoire" (J.P. Callu)


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Message Publié : 09 Août 2008 11:30 
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Inscription : 01 Sep 2006 8:43
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Salut !

C'est la différence profonde entre Histoire et Politique, même si cette dernière aimerai bien enchaîner la première.

Cordialement.


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Message Publié : 09 Août 2008 16:52 
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Salluste
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Inscription : 02 Juil 2006 20:33
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Pascal a écrit :
Salut !

C'est la différence profonde entre Histoire et Politique, même si cette dernière aimerai bien enchaîner la première.

Cordialement.


Je ne crois pas, non.

En outre, faire comme si les frontières étaient si clairs, c'est profondément simpliste et je crois bien que la réalité est bien plus complexe. Réduire l'histoire à l'Histoire, c'est dommage pour elle, au contraire elle danse avec la politique, la médiologie, et tout un tas d'autres disciplines et même avec des a-discplines.

J'interroge le processus narratif : il y a présentation, et il y a re-présentation.

Par exemple, il serait intéressant de parler de la guerre du gaz en Bolivie, de la démission de Carlos Diego Mesa Gisbert, etc. C'est tout proche, c'est déja historique.

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Message Publié : 11 Août 2008 18:36 
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Inscription : 01 Sep 2006 8:43
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Salut !

L'explication qui procède de la moindre résistance est toujours la plus probable. Tout d'abord, il faut que vous vous débarrassiez d'un certain nombre de préjugés. Les évènements ne sont pas l'Histoire, ils sont des histoires ou de morceaux d'histoires.
L'Histoire est une forme d'écriture causale et systémique dans la description et l'explication des évènements et des choix qui sont faits par une société donnée à un moment donné. En cela, elle a un certain nombre de règles et de grilles d'analyse qui contraignent cette écriture.
En faisant de l'Histoire, le but premier est d'expliquer, et non de vivre les realia et les choix d'une société donnée à un moment donné (plus ou moins long suivant l'épaisseur chronologique choisie et donc les approximations choisies). Les évènements ne sont que des marqueurs-repères symboliques marquant les affrontement et les choix ou non-choix d'une société. On ne doit donc pas s'en tenir qu'à eux, mais bien expliquer ce qui est sous-jacent.
Si nous reprenons ta première image, à savoir le texte "halluciné", tu poses un problème finalement assez bien connu en historiographie. Ton texte halluciné est un texte que tu as choisi d'écrire avant de prendre les substances qui te mènes à cet état, et par ce choix tu forces l'état hallucinatoire de ton écrit. Si tu n'avais pas décidé d'écrire sous état hallucinatoire, mais pris des substances pour d'autres raisons ta phase hallucinatoire aurait été bien différente. En fait, tu la contrôle contrairement à ce que tu peux croire. Cet acte est donc bien politique : en écrivant au coeur d'un évènement tu as un but. En Histoire, on a des équivalents : ce sont Annales, les journaux intimes ou les journaux tout court. Maintenant, si tu attends quelque temps et que tu rédiges à court terme (l'espace d'une vie est du très court terme en Histoire), tu auras un écrit qui se voudra plus objectif, mais ce sera en fait marqué par tes conceptions, ta vie, ton histoire. Tu en donneras une version avec ta vision politique des évènements + des déformations.
Par contre, plus le temps passe sur les évènements, plus surgissent de témoignages n'appartenant pas aux mêmes cercles de pensée ; plus les langues se délieront. Voire même, ce ne seront pas ceux de la génération qui ont vécu les évènements qui parleront, mais ce sera la 2nde génération qui transmettra ce que leurs ainés auront dit sous le sceau du secret et/ou du tabou et/ou de la honte.
A ce moment-là, un historien pourra prendre l'ensemble de ces sources et écrire de l'Histoire en se libérant le plus possible des contraintes politiques contemporaines des évènements, en décrivant les mécanismes qui ont aboutis à ces choix, mais certainement pas en les faisant revivre. Ca c'est le boulot des romanciers (tout du moins d'un certain type). Il pourra même de façon marginale utiliser ces écrits et ces analyses en fonction de la politique qui lui est contemporaine même de façon inconsciente, mais ça on y peut pas grand chose sauf être en tant qu'historien le plus paranoïaque possible.
D'où le fait qu'en Histoire et sans doute sur ce forum, on laisse passer un temps qui peut te paraître assez long entre le sujet et l'analyse du sujet. C'est le temps que l'ensemble des données ou une diversités de données sur le sujet soient accessibles. C'est le temps que l'ensemble des historiens spécialistes d'une période puissent engager un débat sur les interprétations et arrivent à un consensus sur l'interprétation (qui est temporaire et fonction des données) qui se veut amoral.
Des personnes peuvent juger ces évènements, à la lumière ou pas des travaux d'Historiens, mais là cela relève de la politique.

En d'autres termes :
- Tu vis et tu donnes une interprétation d'évènement(s) dont tu ne maitrises pas tous les chemins consécutifs (tu ne te donnes pas le temps de connaitre tous les aboutissants des évènements), mais tu veux absolument donner ta vision des choses : c'est de la politique.
- Tu écris de façon personnelle sur des évènements en donnant un jugement ou en ne rapportant que ton témoignage : c'est de la politique.
- Tu rassembles les causalités et les conséquences à travers une diversité de témoignages pour tenter d'en donner une description des choix et des raisons qui y ont présider pour une société donnée en un temps donné, sans émettre une préférence quelconque : tu fais de l'Histoire.
- Tu utilises les travaux historiques pour dire qu'une démarche événementielle est bien ou mal, en recherchant à ne pas reproduire une "erreur" : c'est de la politique.

D'où mon expression, certes lapidaire mais pas simpliste :
Citer :
C'est la différence profonde entre Histoire et Politique, même si cette dernière aimerait bien enchaîner la première.


Cordialement.


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Message Publié : 11 Août 2008 18:49 
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Salluste
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Inscription : 02 Juil 2006 20:33
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Pascal a écrit :
Si nous reprenons ta première image, à savoir le texte "halluciné", tu poses un problème finalement assez bien connu en historiographie. Ton texte halluciné est un texte que tu as choisi d'écrire avant de prendre les substances qui te mènes à cet état, et par ce choix tu forces l'état hallucinatoire de ton écrit. Si tu n'avais pas décidé d'écrire sous état hallucinatoire, mais pris des substances pour d'autres raisons ta phase hallucinatoire aurait été bien différente. En fait, tu la contrôle contrairement à ce que tu peux croire. Cet acte est donc bien politique : en écrivant au coeur d'un évènement tu as un but.


Excellente réponse (et intelligente, et dans le sujet) je l'apprécie vraiment. Je la re-lirai, au passage.

Cela dit, pour te signifier que "non, je ne le crois pas, je ne crois pas que me phase hallucinatoire fut neutre", voici ce que j'ai écrit quand la phase retombait :

La plume qui ne se différencie pas du délire mais qui, au contraire, est absorbée et assimilée par lui, la plume qui ne témoigne pas en faveur d'une tension, pour un esprit plus clair, la plume qui n'en n'est plus une mais qui est tout entière délire, la plume qui est un doigt, celle-ci seule est véritablement délirante et traduit le vrai délire.

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Message Publié : 11 Août 2008 19:31 
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Inscription : 02 Juil 2006 20:33
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Un peu plus à froid : dans ton analyse, tu oublies un phénomène important, c'est le langage. Langage qui est "une structure de sens" pour reprendre les idées du structuralismes linguistiques et même jusqu'à Michel Foucault et Michel de Certeau.

Écrire l'histoire dans cette langue et pas une autre, de ce langage (échelle plus large qui comprend de multiples façon d'occuper l'espace : il y a énonciation piétonnière mais aussi énonciation par l'odeur, par la fumette) c'est déja rendre compte d'une "structure de sens" qui se veut souvent danser avec la structure sociale (la configuration sociale, si on veut).

"Rendre compte, oui, mais de quoi ?" telle est la question. Tu réponds en faveur de la sacro-sainte objectivité recherchée et jamais atteinte, moi en faveur d'autre chose. C'est la vie.

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Message Publié : 12 Août 2008 21:05 
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Salut !

Non, je n'oublie pas le langage, il est sous-tendu à mes propos, mais pour te répondre exactement et être sûr du sens de tes propos, pourrais-tu éclaircir ton 2ème paragraphe, s'il-te-plait ?

Cordialement.


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Message Publié : 13 Août 2008 0:10 
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Salluste
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Pascal a écrit :
Salut !

Non, je n'oublie pas le langage, il est sous-tendu à mes propos, mais pour te répondre exactement et être sûr du sens de tes propos, pourrais-tu éclaircir ton 2ème paragraphe, s'il-te-plait ?

Cordialement.


Dis grossièrement, je pense qu'il y a comme une identité entre la société et le langage.

Dans cette perspective, la société est une structure (elle est structurée, cadrillée comme un plateau d'échec ou un plateau de go). C'est une scène sur laquelle se produisent un certain nombres d'acteurs (individus, entreprises, coopratives, etc) et ils s'articulent, ils dessinent une "configuration sociale" (comme un échiquier peut être configuré).

Cette structure produit du sens notamment au travers du langage (qu'elle produit et qui la produit aussi dans la mesure ou il lui confère une identité ; ne dit-on pas "la langue de Goethe", "la langue de Dante", etc ?). Dans cette perspective, le langage est une "structure de sens" qui témoigne en faveur de la "structure sociale" et qui en rend compte (il y a comme un dialogue entre les deux, une communauté structurale ou architecturale, voir même une identité).

Le langage contribue à cadriller la société, il y a un ordre du discours (comme il y a un code vestimentaire) qui cadrille. Dès qu'on s'égard, on est en marge.

Faisons un test :

nom de dieu de putain de bordel de merde d'enculé de ta mère !

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Message Publié : 13 Août 2008 8:13 
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Humm... vous n'êtes pas obligé d'en arrivé là pour prouver votre théorie... :-|

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Alphonse de Lamartine


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Message Publié : 13 Août 2008 9:16 
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Salut !

Oui, c'est bien ce que j'avais compris. Merci pour tes précisions. C'est ce que j'avais compris.

En effet, le langage est quelque chose d'important. Comme je te le disais il est sous-tendu dans mes propos. Explications :

Dans un premier temps, tu me permettras de réduire le langage à quatre propositions inclusives simples.
(1) Le langage est un moyen collectif d'échanger des informations. Il est commun ; et en effet, il reflète par sa structure interne (grammaire et lexicologie) la vision du monde d'une société à un moment donné.
(2) Le langage est un moyen personnel de donner sa vision du monde pouvant être déviante ou comprise comme déviante par rapport au commun, et d'en donner une vue compréhensible pour autrui.
(3) Le langage par ses défauts et approximations peut induire une transformation de la compréhension des structures sociale, et/ou ouvrir une évolution de la vision du monde d'un point de vue collectif ou individuel.
(4) Le langage traduit par ses évolutions générales de structures des évolutions des conceptions sociétales.

Tu remarqueras que les deux premières propositions s'inscrivent dans un temps court (événementiel), tandis que les deux dernières dépendant d'un temps plus long (période).

Lors de l'analyse d'une période historique, les historiens récoltent des éléments de langages (pas que l'écrit). Au delà du contenu, toutes productions langagières s'inscrivent dans les 2 premières propositions. Ces éléments de langage sont analysés à travers des grilles et les informations réparties de façon à ce qu'elles soient "traduites" dans le langage commun et les structures communes des historiens. Au niveau du contenu, on agit de même. Ce qui permet d'accéder aux 2 dernières propositions.
Lors des débats avec les autres historiens, il est bien entendu d'usage de discuter et de clarifier les travaux de chacun de façon à rendre véritablement communes les écritures personnelles, d'où la production de consensus sur les structures d'une époque.
Les productions des historiens peuvent être réduites aux deux premières propositions et être ré-analysées et re-débattues de façon à les réinclure dans le processus d'analyse historique. C'est le travail de l'historiographie.

J'espère avoir été clair et avoir répondu à tes remarques.

Cordialement.


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Message Publié : 13 Août 2008 16:49 
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Salluste
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Inscription : 02 Juil 2006 20:33
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Tu as été clair. Et comme on s'est un peu égaré du l'initial "présentation et re-présentation" permets-moi d'embrayer un nouveau sujet qu'on pourra traiter en parallèle : Le schéma et le processus narratif dans l'Histoire.

Je donnerai suite ici ultérieurement. Il me faut le temps de la cogitación, le temps d'enfanter.

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