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Message Publié : 17 Oct 2011 10:45 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

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La question coloniale est venue brutalement, depuis une dizaine d'années, faire changer d'échelle les tensions entre histoire et politique ; elle a porté sur grand écran la politisation interne de l'histoire. D'autant qu'au même moment, ou à peu près, l'histoire coloniale se trouvait relayée par les problèmes que posait l'avènement d'une histoire mondiale.

Deux débats anciens, mais qui ont pris une intensité politique, l'un avec la réalité de la mondialisation économique et financière, l'autre avec la loi Taubira, en 2001, qui criminalisait l'esclavage et la traite atlantique, suivie en 2003 du Livre noir du colonialisme (Robert Laffont), dirigé par Marc Ferro, et surtout par la loi de 2005 sur "la présence positive de la France outre-mer" et la bataille autour de son article 4, qui obligeait les professeurs et les manuels à faire droit à cette vision des choses, lequel finit par être retiré.

En un sens, la question coloniale n'est que la dernière venue des explosions mémorielles qui, depuis les années 1980, avaient atteint toutes les minorités, portée principalement par l'immigration africaine et antillaise. Et ce qu'elle paraît réclamer est du même ordre que les précédentes, juive, ouvrière, féministe, corse, etc. Catherine Coquery-Vidrovitch le formule clairement au début de son livre sur Les Enjeux politiques de l'histoire coloniale (Agone éditeur, 2009) : "Notre histoire nationale n'a-t-elle ou n'a-t-elle pas à inclure l'histoire de la colonisation et de l'esclavage colonial français dans notre patrimoine historique et culturel commun ?" Ainsi posée, la question ne souffre guère de discussion.

La question va en réalité beaucoup plus loin, en opposant ceux qui pensent que la part coloniale de notre histoire a peu engagé des constantes de l'identité nationale, et ceux qui estiment nécessaire de repenser l'ensemble de cette identité nationale en termes postcoloniaux, l'identité nationale n'étant pas loin de révéler sa vérité dans l'oppression coloniale et dans son déni. Il s'agirait donc non plus d'inscrire la colonisation au grand registre de l'histoire nationale, mais de réécrire cette histoire nationale à la lumière noire de la colonisation. Bonaparte a rétabli en 1802 l'esclavage à Haïti. Or l'esclavage a été déclaré crime contre l'humanité. Donc Bonaparte est un criminel contre l'humanité. Et puisqu'il n'est pas là pour répondre de son crime, les historiens doivent le faire à sa place.

Bien entendu, histoire mondiale et études coloniales relèvent de domaines différents, encore que les mêmes interrogations portent sur la manière de les écrire et sur quelles bases les aborder. Si le thème de ces Rendez-vous de l'histoire, l'Orient, permet cependant de les rapprocher, c'est que l'histoire mondiale (ou, comme on l'appelle, "globale", "comparée", "connectée") débouche sur le procès de l'européo-centrisme, comme l'histoire coloniale sur le procès de l'histoire nationale. Et que, dans les deux cas, le lien intrinsèque est établi entre nation et histoire comme entre Europe ou Occident et histoire.

Cette mise en cause compose un très large spectre de courants de pensée, que, en m'inspirant de l'analyse que fait Krzysztof Pomian des rapports de la "world history" avec l'histoire universelle, je vais m'efforcer, par souci de clarté pédagogique, d'identifier. Ils consistent en effet à :

1 - affirmer que l'essor de la modernité occidentale s'est fait par l'exploitation du reste du monde : argument de base du marxisme et du néomarxisme ;

2 - établir le parallèle entre le développement scientifique et la domination, entre la connaissance ou la fabrication illusoire des exotismes et l'impérialisme. C'est le thème d'Edward Saïd dans son célèbre ouvrage, L'Orientalisme (Seuil), livre pionnier de la critique anti-occidentaliste, en 1978, que le monde arabe a perçu à tort, dit l'auteur dans une importante postface de 2003, comme une défense et illustration systématiques de l'islam et des Arabes ;

3 - minorer les apports de l'Occident et son rôle dans l'unification du monde, et reconstruire l'histoire de manière à en effacer la spécificité occidentale. La démonstration consiste alors à reporter toutes les innovations occidentales à des inventions bien antérieures et faites ailleurs qu'en Europe : en Chine, en Inde, dans le monde arabe, depuis la numération décimale et le zéro jusqu'à l'imprimerie à caractères mobiles, en passant par la boussole et la poudre à canon. Ou en allant jusqu'à contester l'unicité et la modernité du capitalisme ;

3 - refuser d'accepter pour penser l'histoire toutes les catégories d'intelligibilité émanées de l'Occident, en particulier celle de "civilisation" sur laquelle reposent l'oeuvre de Toynbee ou la thèse de Huntington ;

4 - dénoncer l'affirmation, non plus seulement de l'impérialisme politique de l'Occident, mais de son impérialisme historique en prétendant démontrer comment l'Europe a imposé le récit de son passé au reste du monde. C'est ce que veut montrer par exemple Jack Goody dans son livre récent, Le Vol de l'histoire (Gallimard, 2010), à propos de la compréhension de l'Asie. On mesure la distance, sur cinquante ans, de cette position extrémiste avec le relativisme historique de Lévi-Strauss dans son célèbre opuscule de 1952, Race et histoire ;

5 - récuser le concept même de l'histoire au sens moderne, celui, justement, qui s'était donné comme l'Histoire avec un grand "h" et se présentait comme l'étalon pour établir qui était ou n'était pas dans l'Histoire et pour mesurer à quelle distance se trouvait de l'Histoire telle ou telle population lointaine. C'est un écho de cet argument qui, par exemple, a provoqué la réaction négative des Africains au discours de Dakar de Nicolas Sarkozy en 2007, discours qui comportait pourtant de fortes condamnations du colonialisme mais faisait état du "retard des Africains à entrer dans l'Histoire" ;

6 - récuser enfin toute pensée de l'universel au nom du fait que c'est une autoglorification et une autojustification impérialiste de la civilisation qui a inventé et défini les formes de l'universel.

Dans cette nouvelle "situation faite à l'histoire", comme disait Péguy, faite d'une tension dilatée entre l'histoire et la politique, la France qui, il y a encore une génération, à la belle époque de l'école des Annales, brillait d'un rayonnement mondial, paraît, Jean-François Sirinelli l'a dit fortement dans l'opuscule qui vient de paraître, L'histoire est-elle encore française ? (CNRS éditions, 60 p., 4 euros), se retirer du devant de la scène internationale.

S'il est vrai que cette scène est dominée par la recherche d'une histoire du monde, par la "world history", il est clair que ce sont les Américains qui sont à la pointe - peut-être parce que, se souvenant d'avoir été les premiers décolonisés de l'histoire, ils ont une forte raison de s'identifier au refus de l'européo-centrisme. Il est clair également que, si c'est l'attachement à l'histoire nationale qui est la raison du retard à se mettre à l'histoire mondiale, c'est la France qui, de tous les pays européens, a le plus de raisons d'éprouver ce retard. Sur ce point, il est inutile de revenir.

En revanche, c'est sur sa difficulté à assumer sans hypertension son passé colonial que je voudrais insister pour finir. La passion qui l'anime, les blocages qui la paralysent me paraissent moins tenir au ressentiment et à la mauvaise conscience qu'à deux circonstances historiques.

La première tient sans doute au fait qu'à la différence de l'Angleterre, par exemple, la dépossession coloniale s'est achevée pour la France dans la guerre, la guerre d'Algérie, qui suivait celle d'Indochine. Deux défaites sur fond de défaite de 1940. La fixation sur l'Algérie a de multiples dimensions, moitié colonie et moitié trois départements français.

La guerre d'Algérie a pris des allures de guerre de Sécession. Elle a marqué pour la métropole un changement de régime et de République, et c'est l'homme qui avait lavé la France du désastre de 1940 qui a baissé le drapeau en Algérie. Et les conséquences de la défaite algérienne sont aussi loin d'être terminées que les conséquences de la défaite de 1940.

La deuxième raison tient à l'attitude de la gauche, hésitante et ambiguë vis-à-vis de la colonisation. L'association rétrospective entre la gauche et l'anticolonialisme est une idée reçue et fabriquée. Bien au contraire. Non seulement les partis de gauche se sont convertis tardivement à l'anticolonialisme, mais c'est au nom des Lumières, au nom de l'idéal révolutionnaire et jacobin que s'est opérée l'expansion coloniale.

Ici encore, l'exemple algérien serait probant. Par nature et par définition, le nationalisme algérien a pris à contre-pied la gauche française, qui s'est concentrée sur la défense des petits pieds-noirs de Bab el-Oued ; de telle sorte que la lenteur de la guerre d'Algérie tient en partie à la lente et difficile conversion de la gauche à l'idée de l'indépendance algérienne. L'intensité de l'affaire algérienne a rejailli sur l'ensemble de l'affaire coloniale, devenue une crise de conscience vite refermée et mal digérée.

Pierre Nora

Ce texte est un extrait de la conférence de clôture des Rendez-vous de l'Histoire de Blois, dimanche 16 octobre.http://www.lemonde.fr/idees/article/201 ... _3232.html


Je fais mienne cette tribune assez intéressante, pour ne pas poser texte et la question sans se mouiller en donnant une fausse idée de détachement.

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« Étudiez comme si vous deviez vivre toujours ; vivez comme si vous deviez mourir demain. » Isidore de Séville


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Message Publié : 22 Oct 2011 22:47 
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Hérodote
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L'histoire est toujours en partie politisée. Le seul angle d'attaque suffit par moment à voir de quel bord est l'auteur. Après, tout est affaire de degré. Exemple typique : Le Goff et l'Europe. Cela n'entraîne pas que tous les travaux seraient à jeter, loin s'en faut.

Au passage, Nora lance une petite pique à l'attention du CVUH. Personnellement, je ne lui en veux pas outre mesure puisque je me reconnais bien plus dans le collectif qu'il incarne que dans le CVUH beaucoup trop politisé à mon goût. Ce collectif participe à mon sens de cette petite musique qui m’exaspère qui consiste à rappeler combien la France s'est mal comportée. Difficile d'être fier d'être français quand on vous rabâche les oreilles sur les crimes commis par le passé. Certains appellent cela repentance. Dernier exemple en date : la commémoration du 17 octobre 1961.


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Message Publié : 22 Oct 2011 23:43 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 14 Avr 2005 10:11
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Après, tout est affaire de degré. Exemple typique : Le Goff et l'Europe.

A quoi pensez vous en ecrivant cela ?

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Message Publié : 23 Oct 2011 7:23 
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Hérodote
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Je me réfère à l'ouvrage "L'Europe est-elle née au Moyen-Âge ?" Le nom de la collection en dit assez long : Faire l'Europe. L'auteur cherche à enraciner l'idée européenne loin dans le passé, à montrer son ancienneté afin de faire advenir une Europe culturelle et par suite politique. Il est moins question d'une volonté de vivre ensemble que d'une réalité qui préexisterait à celle-ci. On insiste sur tout ce qui nous relient les uns aux autres. C'est certes intéressant, mais cela relève d'un projet politique, non d'un projet historique.

Aux débuts de l'Union Européenne (CECA, CEE), on insistait sur l'empire carolingien qui coïncidait peu ou prou avec les pays signataires. A présent, chez le Goff, l'Europe s'arrête au Bosphore. C'est une construction ad hoc, un objet factice dont on cherche à donner de l'épaisseur. Ce n'est pas par l'histoire que l'Europe se construit, mais par une volonté politique qui elle marque l'histoire. Bref, c'est moins un travail d'historien auquel se livre le Goff qu'un travail de politicien qui use (mais il est fortement sollicité dans ce sens) de son aura de célèbre médiéviste. Il y a confusion des genres à mon sens.

En espérant avoir clarifié ce point de mon précédent message.


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Message Publié : 29 Oct 2011 17:06 
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Salluste
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La lutte implicite entre Liberté pour l'Histoire, derrière Nora, et le CVUH, derrière Noiriel continue...Qu'on ne me dise pas que le second est plus politisé que le premier ! La tirade de fin sur la gauche est explicite, elle...

Quand à cette phrase :
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l'immigration africaine et antillaise.
, je crois qu'elle part d'elle-même. Quand quelqu'un de l'intelligence de Nora en est à considérer les Antillais comme des immigrés...

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"Je veux croire à l’histoire, si l’histoire est ce récit entraînant qui nous soulève et nous désoriente, nous oblige et nous délie" (Patrick Boucheron)


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Message Publié : 30 Oct 2011 8:43 
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Tous les Antillais - et les Africains non plus au passage - ne sont pas Français...

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Un peuple sans âme n'est qu'une vaste foule
Alphonse de Lamartine


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Message Publié : 30 Oct 2011 9:22 
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Hérodote
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tofraziel a écrit :
La lutte implicite entre Liberté pour l'Histoire, derrière Nora, et le CVUH, derrière Noiriel continue...Qu'on ne me dise pas que le second est plus politisé que le premier ! La tirade de fin sur la gauche est explicite, elle...

Quand à cette phrase :
Citer :
l'immigration africaine et antillaise.
, je crois qu'elle part d'elle-même. Quand quelqu'un de l'intelligence de Nora en est à considérer les Antillais comme des immigrés...



Je pense que Nora faisait référence au Bumidom, cette migration décidée et voulue par l'Etat ( par exemple :http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remi_0765-0752_1987_num_3_3_1142). C'est un élément que je ne connaissais d'ailleurs pas. Votre remarque m'a permis d'en apprendre plus.

Pour ce qui est de Liberté pour l'Histoire, il n'est pas question de participer à l'université d'été de l'UMP par exemple, alors que le CVUH participe à la fête de l'Huma (info du 04/09 dernier sur le site du cvuh par exemple). Signe évident d'une politisation plus poussée, vous ne croyez pas ?


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Message Publié : 30 Oct 2011 21:35 
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Eginhard
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Localisation : Var
Oui çà dépend des membres du CVUH mais j'avais assisté à une conférence: "Nicolas Sarkozy et l'Histoire" à Montpellier. Pour deux chercheurs sur trois, j'ai plus entendu de la politique que de l'histoire.

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"Si, dans la pratique démocratique anglaise, l’opposition, selon un mot admirable, remplit un service public, dans les États totalitaires, l’opposition devient crime ", Raymond ARON.


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Message Publié : 03 Nov 2011 14:46 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 14 Avr 2005 10:11
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Jean-Pierre Azéma, Élisabeth Badinter, Jean-Jacques Becker, Françoise Chandernagor, Alain Decaux, Marc Ferro, Jacques Julliard, Jean Leclant, Pierre Milza, Pierre Nora, Mona Ozouf, Jean-Claude Perrot, Antoine Prost, René Rémond, Maurice Vaïsse, Jean-Pierre Vernant, Paul Veyne, Pierre Vidal-Naquet et Michel Winock

La liste des signataires ne semble pas donner dans le politique. De plus la revue dirigée par Pierre Nora, le Débat, fait de la politique au sens le plus pur mais n'intervient pas dans les débats partisans ou dans les fêtes d'aucun parti.

Je reviendrai plus tard sur ce sujet.

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Message Publié : 03 Nov 2011 19:01 
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Georges Duby
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On peut comprendre l'inquiétude de nombreux historiens devant la tentative très politique de réécriture de l'histoire à laquelle nous assistons, y compris concernant le colonialisme qui a été entrepris de bonne foi par des républicains qui pensaient aider l'Afrique tout en développant leur pays.
Est-cer là, plus ou moins implicitement, le thème de Nora que je n'ai pas encore lu ?

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Heureux celui qui a pu pénétrer les causes secrètes des choses. Virgile.


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Message Publié : 03 Nov 2011 19:15 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

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Il ne prend pas position sur la question du colonialisme lui même ; il contesterait plutôt la centralité de la préoccupation politique dans le travaux de quelques historiens qui a force de faire principalement de la politique font probablement moins d'histoire.

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Message Publié : 03 Nov 2011 19:20 
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Polybe
Polybe

Inscription : 26 Mai 2005 18:43
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Sur Nora, il peut être intéressant de lire également l'article que lui consacre Laurent Gervereau dans le numéro du Monde du premier novembre intitulé "Pourquoi canoniser Pierre Nora ?"
La tendance à considérer comme apolitique et plus objectif ce qui convient à notre vision des choses est curieuse mais assez courante.
Si Liberté pour l'histoire vous paraît comme apolitique, c'est surtout que c'est une coquille vide qui n'avait pas vocation à produire des textes au nom du collectif au-delà de l'appel fondateur, contrairement au CVUH. Par conséquent, si les signataires s'expriment en leur nom propre, ils ne sont pas invités à des manifestations quelconques pour faire entendre le point de vue de Liberté pour l'histoire, contrairement, encore une fois, à ce qui a pu se passer pour le CVUH à la Fête de l'huma.

D'autre part, la principale divergence entre Liberté pour l'histoire et le CVUH se situe surtout dans le fait que les premiers s'opposent à toute loi mémorielle et veulent ainsi réserver l'histoire aux seuls historiens sommés, par conséquent, de régenter la mémoire. Les seconds, quant à eux, acceptent que l'histoire appartienne à tous, qu'elle puisse donc être exploitée à des fins mémorielles par qui le voudra, mais refusent que l'enseignement de l'histoire puisse être lui-même instrumentalisé à ces fins et entendent défendre la place du discours scientifique et critique de l'historien.


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Message Publié : 04 Nov 2011 10:28 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 14 Avr 2005 10:11
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Si Liberté pour l'histoire vous paraît comme apolitique, c'est surtout que c'est une coquille vide qui n'avait pas vocation à produire des textes au nom du collectif au-delà de l'appel fondateur, contrairement au CVUH. Par conséquent, si les signataires s'expriment en leur nom propre, ils ne sont pas invités à des manifestations quelconques pour faire entendre le point de vue de Liberté pour l'histoire, contrairement, encore une fois, à ce qui a pu se passer pour le CVUH à la Fête de l'huma.

Ce qui est un peu la définition d'apolitique d'ailleurs de ne pas s'impliquer dans les débats partisans. On devrait d'ailleurs dire apartisan.
Nora fait de la politique pourquoi pas, mais dans ce cas qu'elle est sa ligne ? Son parti ? C'est quoi l'engagement politique de Pierre Nora ? Et quand on voit le spectre politique de Liberté pour l'Histoire, il est difficile de définir la ligne politique de cette association. Il faut rappeler que Madeleine Rébérioux était sur la même ligne que Pierre Nora ; on ne pourra pourtant pas douter des combats politiques de la première.

Citer :
La tendance à considérer comme apolitique et plus objectif ce qui convient à notre vision des choses est curieuse mais assez courante.
Vous pensez à qui et quoi ? Pouvez vous développer ?

Citer :
D'autre part, la principale divergence entre Liberté pour l'histoire et le CVUH se situe surtout dans le fait que les premiers s'opposent à toute loi mémorielle et veulent ainsi réserver l'histoire aux seuls historiens sommés , par conséquent, de régenter la mémoire.
Il me semble que Liberté pour l'Histoire n'a jamais refusé à quiconque de faire de l'Histoire, d'écrire et de diffuser ses propres analyses. Il s'oppose aux lois mémorielles mais ce n'est pas réserver aux historiens de faire de l'Histoire mais juste de dire que ce n'est pas au politique de dire et figer l'Histoire. Imaginez que les députés de la IIIème république aient fait voter des lois mémorielles, on rigolerait bien aujourd'hui pour les abroger.

Citer :
Les seconds, quant à eux, acceptent que l'histoire appartienne à tous, qu'elle puisse donc être exploitée à des fins mémorielles par qui le voudra, mais refusent que l'enseignement de l'histoire puisse être lui-même instrumentalisé à ces fins et entendent défendre la place du discours scientifique et critique de l'historien.
Ils sont contre la loi de 2005 sur la colonisation mais pas la loi Taubira alors que cette dernière comporte nombre de points sujets à discussion. C'est au nom de cette dernière loi que des associations comme le CRAN voulait poursuivre ce dernier. Le CVUH considère, d'une certaine façon, qu'il y a de bonnes et de mauvaises lois mémorielles.

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