Jadis a écrit :
Est-ce que l'historien rend justice ?
Il ne me semble pas. Pour rester dans la métaphore juridique, si l'acte historique passait en justice, il le serait devant un peuple, devant des peuples, devant des générations dont la mémoire juge l'acte. Pour rendre justice à un acte historique, il faut saisir son sens et écrire "pour toujours" sa signification. Pour rendre justice à un acte historique, il faut lui donner un sens pérenne pour la postérité et l'interpréter d'une certaine manière, ce que les individus, de manière collective, font en tentant de choisir une lecture unique d'un événement historique.
Quel est le rôle de l'historien dans ce processus ?
A nouveau, il me semble que le rôle de l'historien est celui d'avocat, pas de juge. Par ses recherches, il peut exhumer des documents, analyser et comparer des textes, des propos tenus, des actes semblant s'enchaîner, s'expliquer les uns, les autres. Par sa connaissance, il peut introduire des éléments d'explication que les individus n'ont pas forcément en leur possession. Il apporte des preuves au tribunal de l'histoire pour comprendre un événement et en faire une lecture particulière. Tous les historiens, comme tous les avocats, ne défendent pas une même lecture : certains viennent porter une charge contre un événement, d'autres le défendent, et c'est finalement au juge de trancher.
Quel juge ?
Le problème est que la lecture de l'histoire, tout particulièrement l'histoire contemporaine, est personnelle. Parce qu'elle est intimement liée à un discours politique et économique, l'histoire est vécue et interprétée selon les croyances de tout un chacun. L'historien n'a pas vocation à forcer l'individu à interpréter l'acte historique d'une manière mais il a plutôt pour mission de lui soumettre des preuves pour faire évoluer son jugement.
Complètement d'accord, Jadis.
J'ai eu déja maintes discussions concernant la morale dans l'historiographie (geschiedschrijving (écriture de l'histoire), en allemand: Geschichtsschreibung)...
J'ai toujours maintenu que la morale n'a pas de place dans l'historiographie et que c'est aux individus ou groupes d'individus de juger ce qu'ils ont lu dans l'historiographie...et on entre rapidement dans la discussion de l'impartialité de l'historien qui selon beaucoup est illusoire...
Mais vous avez résumé beaucoup plus mieux (presque "cartésienne") ce que je voulais exprimer dans mon approche "tâtonnante"...
Cordialement et avec grand estime,
Paul.