Cuchlainn a écrit :
Citer :
L'uchronie sous des dehors sympatiques peut dangeureusement remettre en cause ce que l'histoire a de plus précieux sa vérité.
L'uchronie de ce point de vue-là pose exactement le même problème que n'importe quelle fiction qui ne sait pas "rester à sa place". Je m'explique un chouya :
On a eu ce débat "au moins un nombre incalculable de fois" sur ce forum et j'en ai retenu ceci : il est extrêmement difficile de faire de l'uchronie un vrai travail d'historien rigoureux, car par définition, on est obligé d'empiler une hypothèse sur une hypothèse. Puis une autre et encore une autre. Une uchronie, c'est un embranchement où on prend le chemin que l'Histoire n'a pas pris. A l'embranchement suivant on fait quoi ? Et au suivant ? Et au suivant ? Bref, l'historien rigoureux est obligé de se limiter à quelques pas au-delà du premier de ces embranchements. Une uchronie aux dimensions d'un bouquin ne peut donc être qu'une fiction, un roman, quelque fouillée que soit la documentation de l'auteur.
Pour ma part, il n'y a jamais eu de doute dans mon esprit : l'uchronie est juste un exercice permettant d'imaginer « comment les choses se seraient-elles passées si... ? »
On nage bien dans l'imaginaire, car il est pratiquement impossible de déterminer exactement ce qui peut se passer dans le cas où un évènement historique se modifie.
Admettons par exemple que les Alliés aient tenté de débarquer en France en 1943 au lieu de le faire en 1944. Toute l'histoire de la Seconde guerre mondiale, à partir de là, serait sûrement très différente de celle que nous connaissons... Mais, en fait, seul l'historien maîtrisant vraiment bien son sujet pourraient formuler des hypothèses plus ou moins convaincantes concernant cette « guerre alternative ».
Et là se situe le problème : le spécialiste de la question est rarement quelqu'un qui s'amuse à ce genre de jeu... D'autant plus que ça ne fait pas du tout « sérieux ».
Donc, l'uchronie est plutôt un genre réservé aux écrivains (souvent d'ailleurs de science-fiction) et ceux-là sont très rarement d'authentiques historiens... Dans le cas du
Maître du Haut Château de Philip K. Dick, beaucoup sur ce Forum n'aiment pas le roman, parce qu'il ne semble pas convaincant.
Mais j'aurai tendance à souligner que Dick n'était ni historien, ni un spécialiste de la Seconde guerre mondiale... Et qu'il avait au moins l'honnêté de rappeler au lecteur, dans le bouquin même, que la réalité décrite dans son bouquin était bidon !