Jerôme a écrit :
En fait il faudrait sans doute distinguer deux questions. Tout d'abord, sur le plan des idées, l'inégalité raciale de droit ou de fait aux colonies a-t-elle un lien avec les théories nationales socialistes ?
Il est compliqué de répondre à cette question dont la réponse serait plus philosophique qu'historique. Il semble que la volonté de classer les hommes selon divers critères soit aussi vieille que la volonté de ne les juger que sur leurs qualités intrinsèques. Dit autrement, on peut considérer qu'un romain se jugeait supérieur aux membres des peuples assujettis par Rome parce qu'il était romain. Mais, on a un tas d'exemples où des non-romains, passés du coté de la romanité ont pu accéder à des postes élevés et prestigieux.
Après, il est facile de noter que ces classements ont évolués au fil des siècles selons divers critères. A certaines époques, c'est le fait d'être ou de ne pas être un barbare qui détermine votre place initiale dans la société. Place initiale parce que certains ont su développer diverses qualités pour aller au-delà de leur condition initiale. A d'autres époques, ce fut le fait d'être un bon chrétien (ou perçu comme tel). Ou d'être catholique ou réformé, riche ou pauvre, noble ou roturier... On pourrait continuer ainsi pendant longtemps, mais chaque époque, chaque société a tenté de classer les gens selon des critères qui leurs semblaient pertinents. Ils furent raciaux, philosophiques, culturels, social... L'historien peut constater qu'à certaines époques la bonne étiquète est telle ou telle. Il peut constater qu'il y a des évolutions et noter ces évolutions.
Au moment de la montée en puissance du NSDAP, il y a eut des jeunes officiers nationalistes pour s'opposer à se vision raciale. La raison était simple, en réduisant le nombre de bons allemands, on réduisait le nombre de personnes susceptibles de porter l'uniforme et de se battre pour l'Allemagne. Et, il est ironique de constater que dans les faits, ils ont eu raison.
Jerôme a écrit :
D'autre part sur le plan pratique, est-ce que la brutalité de la répression outre-mer n'a pas préparé les Allemands aux crimes du IIIè Reich ?
Là-aussi, j'ai du mal à comprendre votre "plan pratique". SI on ne parle que du plan pratique des solutions. Il n'y a pas 10 000 manières d'exclure des groupes sociaux d'une société constituée, de regrouper ces gens dans des camps de concentration, puis de les exterminer. Il est donc normal que les solutions utilisées par le NSDAP pour remplir ces missions soient en fait des solutions pratiques qui avaient déjà faits leurs preuves. Si on veut avoir un peu de pertinence, il faut noter que les nazis se sont trouvés face à des réalités qui n'avaient pas encore été appréhendées.
Lors des massacres coloniaux, on ne rapporte pas de cas de soldats qui jettent leurs fusils ou refusent de participer à des pelotons d'exécutions. On ne rapporte pas de cas d’exécutants perturbés par les bains de sangs auxquels ils ont participé. On peut objectivement se poser la question de savoir si de tels cas n'ont pas été rapportés :
- parce qu'il n'y en a pas eu;
- parce qu'on n'a pas jugé digne de les rapporter ...
Dans le premier cas, il faudrait noter que certains des tueurs nazis ressentaient quand-même une certaine forme de compassion pour leurs victimes. Forme qui n'aurait pas été connue à l'époque coloniale...
Tout ceci a eu une incidence, car on a dû créer les chambres à gaz et les crématoriums. La première Shoah, la "Shoah par balles", c'est déroulée "à l'ancienne". On a regroupé des gens, on leur a fait creuser des fosses et on les a fusillés en les faisant tomber dans les fosses qu'ils venaient de creuser. Mais, suite aux problèmes psychologiques soulevés, on a cherché d'autres solutions. Ce furent les camions de la mort, puis les chambres à gaz qu'elles fussent alimentés par des moteurs diesels réglés pour produire beaucoup de CO et de CO2 ou à l'aide de Zyklon B.
Il y a une autre différence. Lors des massacres coloniaux, on a souvent exposés les corps. Le but était de terroriser les populations asservies en leur faisant comprendre qu'il n'y avait aucun espoir dans la révolte. Les nazis ont cherché a faire disparaitre le maximum de preuves, et de corps. De faire en sorte qu'il n'existe aucune preuve de leurs méfaits, mais aussi aucune preuve de l’existence et de la disparition des "races" qu'ils voulaient faire disparaitre ...
Ces différences me paraissent très significatives, et il faudrait en tenir compte