Je vote sans hésitation aucune "question pas assez souvent traitée mais passionnante".
Les Sassanides, prenant là aussi le relais des Parthes, ayant été les plus grands ennemis des Romains (puis des Byzantins), je ne pense pas que ce soit tant d'un désintérêt qu'ils souffrent plutôt que d'un manque de références bibliographiques -du moins en français- à leur sujet. Prenons les deux dynasties iraniennes précédentes: les Achéménides, en plus de voir consacrées à leur royaume de nombreux pages par Hérodote, se sont notamment vus consacrés les ouvrages de Pierre Briant. Si son monumental "pavé" Histoire de l'Empire perse de Cyrus à Alexandre est d'un abord assez difficile, le Darius, les Perses, l'Empire du même auteur constitue une première approche des plus intéressantes. De plus, de nombreux ouvrages sur la Grèce antique consacrent au moins un chapitre à l'étude de la Perse achéménide (je pense en particulier à Le monde grec et l'orient de feu Edouard Will). Concernant les Arsacides, grâce soit rendue au sieur André Verstandig (si certains passages de son ouvrage sont peut-être un peu simplistes, l'ensemble reste de bonne facture) dont l'Histoire de l'Empire parthe constitue à ma connaissance l'unique synthèse en français sur ce peuple et son royaume. Peut-être que certains ouvrages sur Byzance accordent une place aux Sassanides... je me suis peu aventuré en ce domaine (hormis la synthèse de John Julius Norwich). Les quelques titres cités par Aurelianus confirment malheureusement l'"aridité" de la bibliographie consacrée aux Sassanides: trouver ces ouvrages doit relever du parcours du combattant...
Voyons aussi le problème au niveau des sources. L'Empire achéménide joue un grand rôle dans la littérature grecque "classique", non seulement en tant qu'adversaire, antithèse de l'"idéal grec", mais aussi en raison de sa "proximité", due notamment au rôle d'arbitre qu'eurent souvent à jouer les souverains perses (les diverses "paix du roi" entre-autres). Concernant les Arsacides, il n'est peut-être pas impossible que leur philhellénisme affiché n'ait pas inspiré aux auteurs grecs une certaine "sympathie", les flattant en ce sens qu'ils pouvaient constater que si politiquement le monde grec n'était plus grand chose, sa culture, elle, pouvait toujours s'avérer "conquérante". L'anecdote de Plutarque, racontant que le roi Orodès était en train d'assister à une représentation des Bacchantes d'Euripide, me semble assez révélatrice de la perception grecque des Parthes. Ajoutons à cela l'habileté de souverains tels Mithridate Ier, conquérant de Babylone, qui surent conforter leur image de Philhellène. S'il exista un certain "capital de sympathie" envers cette attitude, il est alors possible que le "raidissement nationaliste" qui marqua l'arrivée des Sassanides à la tête de l'Iran contribua à le faire fondre. Peut-être aussi que, dû à cette même "réaction", le royaume sassanide connu un certain repli sur lui-même contribuant à accroître la méconnaissance à son sujet.
Il est possible aussi que la méconnaissance des Sassanides traduise, de manière plus large, d'un certain européocentrisme faisant que les civilisations en marge de celles que nous qualifions de classiques sont quelques peu tenues à l'écart (c'est notamment le cas de Carthage, hormis l'attention portée au personnage d'Hannibal).
Ce ne sont bien-sûr que des hypothèses personnelles.
_________________ "Nous autres civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles". Paul Valéry
"C'était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d'Hamilcar". Gustave Flaubert
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