Mécène a écrit :
Encore une fois, les termes. C'est presque toujours le point clé, celui qui fait diverger les réponses.
La question: "Lucifer, un mythe ou une réalité ?":
1. Tout d'abord, qu'est-ce qu'un mythe ?
2. Par réalité, on peut remplacer par "Histoire" dans le sens où il s'agit soit d'un mythe soit d'une réalité, et donc d'un personnage historique. Qu'est-ce qui distingue l'Histoire du mythe ?
Je reprends intégralement la réponse que j'avais faite, sur un ancien fil, au sujet de la nature et de l'interprétation des mythes ( Grecs )...
"Je crois que l'on prend un risque en essayant de se raccrocher à des exemples contemporains ou communs pour tenter d'expliquer le fonctionnement des croyances et la perception des mythes et de leur histoire par les anciennes civilisations, dont la civilisation Grecque ( puisque c'est d'elle dont il s'agit sur ce fil )
Les Grecs possédaient leur programme de vérité qui est totalement différent du notre, donc l'utilisation et l'interprétation qu'ils faisaient de leurs mythes n'est en rien comparable à l'image que nous en avons.
Je pense que pour bien poser les choses il faut définir, au préalable, ce qu'est un mythe et quels sont les différents sens que l'on donne à la croyance.
Le mythe, tout d'abord, n'est pas un texte spécifique répondant à une réalité donnée pour le Grec de l'antiquité.
Car les mythes sont polysémiques tout comme la poésie, ce qui logique puisque le mode de transmission des mythes prend la forme de récits oraux obéissant, dans leur construction, à certaines règles de fonctionnement.
Transmis de bouche à oreille, il est normal, que ces mythes subissent des transformations voir des déformations.
Il faut fixer les choses pour capter la mémoire, la mythologie est donc le produit écrit de cette tradition orale.
C’est ainsi que nous sont parvenus les récits du poète Béotien Hésiode, de Pindare ou ceux d’Homère.
Cette mise en écriture d’une tradition orale très lointaine ne se vérifie pas partout ailleurs, c’est le cas de l’Afrique où la tradition orale est toujours d’actualité.
Aujourd’hui on cherche à établir au sein de ces récits ce qui relève de l’histoire et du mythe, c’est par exemple la question que l’on se pose sur les réalités archéologiques liées à la guerre de Troie.
La définition des récits mythiques nous amène à nous interroger sur l’utilité de ceux-ci et par conséquent sur les rapports et les croyances que les Grecs entretenaient avec eux.
On ne peut donc pas partir du principe de les Grecs concevaient leurs mythes comme mythiques mais comme un temps réel, un temps ancien attesté celui des héros, celui des origines.
Le mythe a pour utilité de donner corps au passé, d’établir une continuité avec le présent pour le justifier.
La naissance de l’univers trouve son explication dans Gaia enfant Pontos et Ouranos, les malheurs des hommes viennent de la splendide Pandore …
Les récits vont contribuer à donner du sens et permettre à l’homme Grec de mieux se positionner par à son environnement et à ses semblables.
Après avoir défini le mythe et son utilité il convient de le rattacher à cette notion de croyance.
A mon avis la notion de croyance est multiple, on croit à des vérités scientifiques et mathématiques démontrées et donc évidentes, on croit à des faits historiques assurés.
Ce qui n’est pas du tout la même chose que croire en une religion, ou bien croire en la justice de son pays, ou croire en la fiction d’un roman qui peut apparaître plausible.
Pour ce qui est de la croyance Grecque par rapport aux mythes il n’y a aucun dogmatisme, il n’y a pas cette adhésion à un ensemble de croyances et d’affirmations systématiques.
Il croit en leurs mythes, avec toutefois des réserves et sans aucune obligation, en étant convaincu qu’il existe des puissances supérieures non périssables.
Contrairement à cette interprétation rationnelle de l’univers des mythes, chez le Grec ancien, notre conception traditionnelle des mythes consiste à leur affecter une dimension essentiellement légendaire et complètement détachée de la réalité.
Cette vision des choses, durant l’antiquité, a très certainement favorisé le développement des écoles philosophiques et de la pensée raisonnée sans laquelle la notion de démocratie n’aurait pu germer"