Nérée a écrit :
L’étude conclurait qu’il est impossible de préciser le port d’attache du navire.
Le commerce maritime antique fonctionne essentiellement par cabotage, prenant des produits des divers ports traversés, ce qui a tendance à constituer une cargaison hétéroclite. D'ailleurs la cargaison n'indique pas la provenance de l'équipage, déterminer le port d'attache, il faut plutôt étudier le mobilier possédé par les marins, en admettant que celui-ci reflète bien leur lieu d'origine, ce qui est peu évident dans un tel contexte. De plus, certains pensent que les épaves de la période, notamment celle d'Ulu burun, pourraient être des cargos chargés d'une mission diplomatique (laquelle pouvait d'ailleurs se couplet d'opérations commerciales). Cela et d'autres facteurs expliquent pourquoi on est bien en peine de déterminer l'origine de ces deux épaves, au mieux on peut postuler quel parcours elles accomplissaient au moment de leur naufrage, mais de là à en tirer quelque chose sur le dynamisme des circuits d'échange en Méditerranée orientale, c'est plus problématique. De plus, les trouvailles sur un site de plusieurs objets venant de contrées lointaines ne nous disent pas comment ils sont arrivés là (en une ou plusieurs fois, par des cadeaux, du commerce, du pillage ?), ni s'ils sont arrivés là en même temps ou sur du long terme, et il est généralement impossible de déterminer s'ils témoignent de circuits d'échanges réguliers ou exceptionnels.
Citer :
Peux- t-on en conclure que les habitants de la côte levantine supervisaient ce trafic ?
Pour l'Âge du Bronze cela est impossible à déterminer, les cités commerciales les plus dynamiques semblent bien être au Levant, mais cette vision peut être influencée par nos sources, notamment épigraphiques. On ne peut pas dire qu'il existait pour cette époque des circuits d'échanges de la même importance que ceux de l'époque suivante, animés notamment par les migrations phénicienne et grecque (les "colonisations"). Le commerce dans la Méditerranée orientale n'en est qu'à ses balbutiements : manifestement les marchands levantins commercent dans leur région, vers l'Égypte, l'Anatolie et Chypre, mais il ne semble pas qu'ils aillent plus loin. Des marchands crétois sont signalés de temps en temps en Syrie ou en Égypte, mais ils semblent plus actifs dans l'Égée, où ils sont par la suite supplantés par les "Mycéniens". Chypre est un cas particulier, du fait de ses mines de cuivre et de sa situation privilégiée, au contact de l'Anatolie, du Levant et de l'Égypte, et pas si loin que ça de l'Égée, avec laquelle les contacts se renforcent quand s'installent des "Grecs" (Mycéniens) vers le fin du Bronze récent. Hormis des situations exceptionnelles, il me semble bien que les circuits maritimes de cette période sont segmentés, on ne peut pas dire qu'il y ait des marchands qui aient des circuits réguliers allant de l'Égée au Levant en passant par l'Anatolie, on aurait plutôt une circulation de produits se faisant par des voyages sur courte ou moyenne distance, autour de plusieurs ports servant de plaque-tournante et de relais entre différents réseaux d'échanges (Ugarit, Byblos, Gaza, Ura, un port de Chypre, de Crète, voire en Égée, etc.).