Un petit extrait de l'article de P. Vidal Naquet:
"[...]Nous avons, d'un côté, l'hoplite armé de pied en cap, avec son lourd appareil militaire, et de l'autre, nous avons le crypte qui est, nous disent les textes grecs,
gumnos, c'est à dire nu, autrement dit sans armes, ou, au plus, il n'a qu'un petit poignard. Nous avons l'hoplite qui est un combattant qui vit de la solidarité pleine et entière du groupe, et nous avons au contraire, l'homme isolé, ou vivant en petits groupes. Nous avons un jeune homme qui court dans les montagnes, et nous avons l'hoplite qui, au contraire, combat toujours et systématiquement en plaine. Nous avons l'hoplite qui combat l'été[...] au contraire les sources anciennes nous disent que le crypte est un homme de l'hiver, qui pratique ses exercices en plein hiver. Nous avons le crypte qui est un assassin rusé, qui emploie ce que le Grec appelle l'
apaté ou la ruse, et nous avons au contraire, exalté par la tradition spartiate depuis Tyrtée au VIIe siècle, l'homme qui combat au grand jour et qui combat de façon loyale. Nous avons le crypte qui mange ce qu'il peut, au petit bonheur, sans trouver le temps de faire la cuisine. L'hoplite est au contraire, le combattant qui partage les repas collectif qui sont un trait spécifique de la société spartiate ou de la société crétoise[...].
En bref, du côté de l'hoplite, tout est ordre, tout est ce que les Grecs appellent
taxis, et du côté du crypte, tout est ruse, en grec
apaté, tout est désordre, tout est déraison.
[...]
Je pourrais poursuivre la comparaison et montrer que cette inversion est un trait absolument caractéristique pécisément du passage de la jeunesse à l'âge adulte, que tout jeune, avant de devenir hoplite, passe d'ailleurs par la situtation contraire.[...]"
Publié dans Structuralisme et marxisme
(collectif... et excellent ) et repris dans Le chasseur noir
(La Découverte).