Je n'arrive pas a trouver pour quelle raison Athènes a recherché une alliance avec Denys l'Ancien. Ce n'est certainement pas pour avoir attiré à sa cour des poètes et des philosophes et ni d'avoir gagner le premier prix pour sa tragédie intitulée "La rançon d'Hector" jouée à Athènes.

Pourtant, il me semble que les Grecs n'aimaient pas beaucoup les tyrans.

C'est peut-être la peur qu'inspire Carthage ?

C'est tout un programme que votre question!:wink:
Si je comprends bien, vous posez trois questions en même temps:
1) Pourquoi Athènes s'est-elle alliée à Denys de Syracuse?
2) Est-ce que les Grecs n'aimaient pas les tyrans?
3) Est-ce que Carthage inspirait de la peur aux Grecs?

Bien à vous,

Fialin.

De quelle alliance parlez-vous ? Durant la guerre du Péloponnèse, Athènes attaque Syracuse en 413. Corinthe (Syracuse avait été fondée par des colons Corinthiens) et Sparte répondent à son appel au secours. L'armée athénienne s'épuise devant les fortifications de Syracuse et sa flotte est anéantie. Affaiblis, les démocrates abandonnèrent le pouvoir à un «tyran», Denys l'Ancien. Celui-ci rétablit la grandeur de la cité, assura son hégémonie sur la Sicile et la Calabre et promut les constructions et les arts.


Le mot tyrannie est un mot ionien. Le terme n'avait pas à l'origine le sens défavorable qui l'aura plus tard : il désignait uniquement l'exercice d'un pouvoir personnel. Dans l'imaginaire des Grecs, le tyran est l'anti-citoyen par excellence, celui qui confisque le pouvoir de la communauté civique. La tyrannie était très répandue dans la vie politique en Grèce, surtout au VIIe et VIe siècles. Si elle fit souvent la transition entre la monarchie et la démocratie, la tyrannie réapparaît aussi dans des circonstances exceptionnelles comme à Athènes au cours des Guerres Médiques. Les tyrans s'illustrèrent souvent par leur propension à réformer, développer et embellir leur cité, comme Pisistrate à Athènes ou Phidon à Argos.


Athènes et Carthage ne furent jamais en concurrence car leur apogée respective ne coincident pas. Par contre, les cités de Sicile et Carthage s'affrontèrent tout au long de leur Histoire respective directement ou indirectement (soutien aux Romains).

_________________
"Lisez, éclairez-vous, ce n'est que par la lecture qu'on fortifie son âme." - Voltaire
"Historia vero testis temporum, lux veritatis, vita memoriae, magistra vitae." De oratore - Cicéron

En 367 av. J.-C. Athènes recherche une alliance avec Denys l'Ancien et j'aimerais savoir les raisons de cette alliance. Peut-être le fait d'être Archonte de Sicile lui donne des privilèges ?

Merci beaucoup pour toutes ces précisions [/list]

Vous êtes sûre qu'il s'agit de Denys l'Ancien et non de Denys le Jeune car l'année 367 correspond exactement au changement de dirigeant ?

_________________
"Lisez, éclairez-vous, ce n'est que par la lecture qu'on fortifie son âme." - Voltaire
"Historia vero testis temporum, lux veritatis, vita memoriae, magistra vitae." De oratore - Cicéron

D'après le livre Le IVe siècle grec de Pierre Carlier, Ed. du Seuil p.190, Denys l'ancien aimait lire ses vers à ses convives et voulait qu'on l'admirât. Il a aussi fait représenter à Athènes des pièces de sa composition, mais sans succés et c'est seulement en 367 à un moment où les Athéniens recherchaient son alliance que sa tragédie intitulée La Rançon d'Hector obtint le premier prix. Le tyran, selon certains récits malveillants, célébra son succès par des libations si abondantes qu'il en mourut.

Dans mes recherches, pour connaître le but de cette alliance, je ne trouve rien à ce sujet. Est-ce pour lutter contre Carthage ou contre Sparte

Si vous avez des précisions, je vous en remercie par avance
[/i]

Votre interrogation Junod Janine est de la plus haute pertinence, car elle reflète à elle seule toute l’histoire géopolitique de cette fin de V siècle av. JC. Les raisons du souhait d’Athènes d’une alliance avec Denys l’ancien de Syracuse sont inhérentes à la triple menace perse – carthaginoise et spartiate qui a pesé tour à tour sur les alliés (athéniens et Syracuse).

Les Carthaginois ont menacé la Sicile de plusieurs invasions avant même l’arrivée de Denys au pouvoir de Syracuse. En 409, les Carthaginois envahissent l’Ile et s'emparent de Sélinonte et d'Himère, puis d'Agrigente en 405 avant J.-C. Lorsque Denys de Syracuse s'empare du pouvoir 397 avant J.C., il refoule les envahisseurs. Je suis entièrement d’accord avec vous concernant la menace carthaginoise : cette dernière est d’autant plus dangereuse lorsqu’on sait que les Carthaginois ont toujours eut pied dans l’Ile durant plusieurs siècles et qu’ils ont tenté de prendre Syracuse plusieurs fois. La menace carthaginoise est donc la première cause de l’alliance entre Athènes et Syracuse.

Quant aux athéniens qui ont pu mesurer la force militaire de Syracuse lors de leur dernière expédition contre la cité ils se sont résigné à une alliance avec cette dernière en raison de la double menace sparte et perse qui pèse sur eux.

La crainte des athéniens a commencé avec l’alliance de Sparte et des Perses lors du traité de Milet en 412 av. JC et elle est motivée par les nombreuses défaites faces à sparte et à d’autres puissances. Parmi les nombreuses défaites face à Sparte et ses alliés et qui ont conduit à la capitulation d’Athènes lors de la guerre du Péloponnèse, ont a :

- 424 Défaite des Athéniens à Délions contre les Béotiens.
- 418 Défaite d’Athènes face à Sparte à Mantinée.
-407 Défaite des Athéniens face à la flotte Spartiate à Lysandre.
-405 Défaite des Athéniens face à la flotte Spartiate à L’Aigos Potamos.
-405 novembre Les Spartiates assiègent Athènes.
-404 avril Prise et capitulation d’Athènes, mettant fin à la guerre du Péloponnèse.
-404 Sparte impose le régime oligarchique des trente tyrans ; début des proscriptions.

Quant à la menace perse elle est d’autant plus forte que Sparte eut à chercher une alliance avec elle. Le dynamisme militaire de Sparte qui a amené le traité de Milet de 412 avec les Perses l’a conduit à intervenir plusieurs fois lors de la révolte de 400 en Ionie. Je pense que cette intervention rapprocha sparte avec les Perses et cela a constitué une grande menace pour Athènes.

Cette menace est d’autant plus perçue par Athènes que le souvenir des guerres médiques est très fort. Les Perses ont vaincu les Athéniens à plusieurs reprises (499 Le général perse Artapherne remporte la victoire sur les Grecs devant Éphèse, 479 Juin Mardonios -perse- lance une offensive sur l’Attique puis sur la Béotie).

Cela a amené la création en 478 de la ligue de Délos contre la menace Perse et qui eut en 469 une victoire navale sur les Perses à l’Eurymédon. L’affaiblissement de la ligue de Délos ( marqué par le transfert en 454 de son trésor sur l’Acropole d’Athènes) a conduit les athéniens a recherché l’alliance d’autres puissances face à Sparte et aux Perses. A cet égard, on peut citer :

-462 l’alliance entre Athènes et Argos contre Sparte.
-461 l’alliance entre Athènes et Mégare.

Il est également frappant de constater que Athènes est restée pratiquement seule face à ces menaces qui l’ont conduit à plusieurs défaites : Face aux Perses ont a la fameuse expédition athénienne de 460 en Egypte pour soutenir la révolte d’Inaros et qui se termina par l’anéantissement de l’armée athénienne en 450.
Face au spartiates plusieurs guerres et plusieurs défaites (-459 Défaite des Athéniens faces aux armées Spartes & Béotiennes à Tanagra) résigna les athéniens a recherché des alliances loin de la Grèce.

Pallas

_________________
« La guerre qui fut jadis cruelle et glorieuse est aujourd'hui cruelle et sordide » Winston Churchill.

En 367 les Guerres Médiques (depuis près de 100 ans) comme la Guerre du Péloponnèse sont terminées et Athènes est...en pleine reconstruction! Si Denys cherche un allié contre Carthage (qui menace la Sicile et elle-seule, certainement pas Athènes) il ferait mieux de se rapprocher de l'ancien allié de Syracuse, Sparte dont l'hégémonie a commencé.

Si on relit P. Carlier page 190, on trouve
Carlier ne développe pas effectivement les raisons de cette recherche d'alliance. On peut toutefois noter que Denys recherchait une reconnaissance littéraire (dans ce domaine Sparte n'était d'aucun secours là où Athènes a toujours brillé) quant à Athènes elle pouvait effectivement trouver l'hégémonie spartiate pesante mais Sparte l'avait épargnée 40 ans plus tôt en souvenir dit-on de son rôle dans les Guerres Médiques. Denys n'avait pas besoin des Athéniens, dès 387 il est le maître du détroit de Messine et après la défaite de Crotone en 378-377 plus aucune cité de Grande Grèce ne le conteste. On peut même dire qu'il constitue un risque pour la Grèce continentale où il apparaît comme un rustre et un danger pour la liberté des Grecs. Donc en résumé, cette recherche d'alliance athénienne apparaît plus comme un traité de non-agression que comme un traité d'alliance en échange duquel Athènes lui donne un "brevet de culture grecque". On est loin de la grande manoeuvre de géopolitique...

_________________
"Lisez, éclairez-vous, ce n'est que par la lecture qu'on fortifie son âme." - Voltaire
"Historia vero testis temporum, lux veritatis, vita memoriae, magistra vitae." De oratore - Cicéron

Je vous remercie pour ces renseignements.

Je suis plutôt d'accord avec vous Clio, je pense aussi que Denys n'avait pas besoin des Athéniens et que l'estime culturel était très important pour lui. Il a fait venir à Syracuse plusieurs philosophes, tel que Platon, Aristippe de Cyrène. C'est une tradition qui est commune avec de nombreux souverains de son temps. Il existait peut-être une certaine compétition entre eux ?

Junod Janine

Je pense que vos arguments sont un peu courts, Denys avait besoin d'une alliance car la menace carthaginoise a été toujours pesante. N'oubliant pas que dès son accession au pouvoir, il dut affronter ces derniers jusqu'à leur expulsion. Par ailleurs, la menace perse sur l'Attique n'est pas à négliger.

Pallas

_________________
« La guerre qui fut jadis cruelle et glorieuse est aujourd'hui cruelle et sordide » Winston Churchill.

Il est clair qu'à cette époque les pressions étaient importantes et le fait d'obtenir un brevet de culture grecque n'est qu'une des raisons de cette alliance entre Denys de Syracuse et Athènes.

Janine Junod