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Message Publié : 07 Juil 2010 15:34 
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Hérodote
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Selon Cesare Rossi de l'université Federico II de Naples, le grand génie Archimède aurait utilisé des cannons à vapeur pour mettre le feu aux bateaux romains lors du siège de Syracuse en 214 Av. JC, et non pas de miroirs convexes comme le veut la légende. J'ai écrit un petit résumé en français de l'article beaucoup plus détaillé paru en anglais sur LiveScience.com. A votre avis, l'utilisation de balles de 6kg remplies de "feu grec" est-elle envisageable ?

http://lebuzzdelamar.blogspot.com/2010/07/les-cannons-darchimede.html

http://www.livescience.com/history/archimedes-set-roman-ships-afire-with-cannons-100627.html


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Message Publié : 07 Juil 2010 18:13 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 11 Juin 2007 19:48
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8-| :rool:
Ou comment remplacer une fable médiévale, qui repose sur un amalgame avec les travaux d'Archimède sur les miroirs, par un délire contemporain qui ne repose sur... rien, strictement rien. Archimède a mis a point un grand nombre de machine de guerre, scorpions et compagnie de tailles variées, adapté à la distance à laquelle il souhaitait projeter ses caillasses, allant jusqu'à percer les murailles de meurtrières pour la première fois pour faciliter l'emploi des plus petits. L"allusion de Plutarque (Vie de Marcellus) fait justement référence à ces machines de toutes les tailles, et au §15 il mentionne les grosses pierres de plus de 10 talents projetés sur la sambuque des Romains. Au troisième coup au but, la machine de Marcellus se démantèle, mettant fin à l'assaut. Nulle mention d'un incendie, nulle mention de vapeur, encore moins de canons.... Le sifflement signalé à l'arrivée du projectile est celui des pierres, comme les balles de frondes sont réputés siffler aux oreilles, c'est une image littéraire ultra courante.
Autant le signaler tout de suite : ni Plutarque ni personne d'autre ne décrit non plus des obus de 75, de fusils à balles électriques électriques, ou des lasers spatiaux de StarWars...


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Message Publié : 07 Juil 2010 18:22 
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Thucydide
Thucydide
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Inscription : 07 Juil 2010 15:36
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Exactement. Ce qui me choque, ce n’est évidemment pas tellement le concept, l’aspect scientifique.
Non, ce à quoi je me suis heurté tout de suite en lisant les premières lignes de l’article, c’est de m’être dit tout haut : « Sur quelle(s) base(s) M Rossi peut-il affirmer cela ? »
Voyons plutôt (les mots mis en emphase l’ont été par moi) :
Citer :
Indirect evidence for the steam cannon also comes from the Greek-Roman historian Plutarch, who tells of a pole-shaped device that forced besieging Roman soldiers to flee at one point from the walls of Syracuse.

The Greek-Roman physician and philosopher Galen similarly mentioned a burning device used against the Roman ships, but used words that Rossi said cannot translate into "burning mirror."

Deux remarques :
1. On devrait apparemment se contenter de croire sur parole M Rossi.
2. Qu’Archimède n’ait pas pu mettre feu aux navires avec des miroirs, ce n’est plus à prouver (ça a déjà été fait) ; dire qu’il ne s’agit pas de miroirs ardents est inutile.

Je vais tout de même, par pure curiosité, essayer de retrouver les extraits « incriminés » de Plutarque et de Galien.

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Pone merum et talos. Pereat qui crastina curat !
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Message Publié : 07 Juil 2010 18:58 
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Pierre de L'Estoile
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Tu n'auras pas de mal à trouver le texte et la traduction de Plutarque.Voici celle de Galien
Galien, Peri Kraseon, III.2 (657-658) (texte grec) :
C’est de cette manière, du moins je le pense, qu’Archimède brûla les trières des ennemis. Car, à l’aide d’un miroir ardent, on enflamme avec facilité de la laine (erion), de l’étoupe (stupeion), une mèche (thruallis, mèche de lampe à huile), de la férule (ou objet en vois de férule, narthex), et enfin tout ce qui est sec et léger.

J'en profite pour corriger une de mes bêtises : la légende des miroirs ardents n'est pas médiévale mais postérieurs de quatre siècles aux évènements, inconnus des historiens de la guerre punique (Polybe, Tite-Live, Plutarque). Si le sujet intéresse, je pourrais présenter ces textes, ils sont recensés dans un de mes dossiers, cela commence discrètement avec Lucien et Galien, puis prends de l'ampleur à partir du VIe avec des descriptions plus complètes (et encore plus imaginaires).
Les Miroirs Ardents existaient, mais ils ne marchent qu'à très faible distance et qu'avec des matériaux facilement inflammables comme listés par Galien. Ils étaient en particulier utilisés pour allumer les feux sacrés, afin d'obtenir une flamme "pure".


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Message Publié : 07 Juil 2010 19:12 
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Thucydide
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Oui, en effet, dans mon emportement j'ai manqué de finesse ; quand j'affirmais que les miroirs ardents n'existaient pas, je parlais bien sûr de ceux ayant les effets décrits dans la légende.
Il n'y a rien à dire, pour ce genre de questions, le mieux reste encore d'essayer (ce qui a été fait dans une émission télévisée américaine). De toute manière, il ne faut pas être savant clair ni le fils naturel de Héron d'Alexandrie pour réaliser qu'il est plus facile de mettre feu à un bateau avec des traits enflammés qu'avec des miroirs !

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Message Publié : 07 Juil 2010 20:33 
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Hérodote
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@Thersite je suis passionnée par la naissance de la légende des miroirs ardents! Ce serait donc Gallien qui aurait le premier parlé de miroirs? Aussi, j'aimerai en savoir plus sur le "feu grec" (même si il n'est plus en cause dans ce cas précis): étais-ce du goudron enflammé, ou une "mixture chimique" comme je l'ai lu par ailleurs? Je trouve le sujet des machines et des technologies de guerre antiques absolument fascinant, si vous connaissez des textes de référence, j'aimerai étoffer mes connaissances sur cet aspect (je suis sûre qu'il y a des dizaines d'études modernes publiées, laquelle lire?) Ce que je sais vient essentiellement de la lecture de César.


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Message Publié : 07 Juil 2010 20:47 
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Thucydide
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@Lamar :
Parlez-vous des feux dits grégeois, quand vous dites « feux grecs » ?
De ce que je sais des feux grégeois ou « feux liquides », ils serait apparus au VIIIe siècle à Byzance, sous l’égide de l’Empereur Léon III, et consistaient en un mélange de naphte, de soufre, d’oxyde de calcium et de salpêtre. Cependant, bien que ce feu automatique dit « grégeois » ne soit pas antérieur au VIIIe siècle, il semble qu’il existait déjà un prototype romain dès le IIIe siècle, si on en croit les écrits de Sextus Julius Africanus (sur lequel je n’ai hélas aucun renseignement en dehors de son existence, mais il m’intéresserait d’en découvrir).

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Message Publié : 07 Juil 2010 21:23 
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Hérodote
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En effet, j'avais le "prototype" du III siècle à l'esprit. Les anglais l'appellent "greek fire", et la composition serait,dit-on, encore un secret de nos jours ? Le salpêtre devait surement faire partie de la formule perdue...


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Message Publié : 07 Juil 2010 22:23 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

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Pour la chronologie du mythe des miroirs ardents :

La plus ancienne trace dont nous disposons est une allusion dans l'Hippias de Lucien, §2, à la fin du IIe : Mon but est de prouver que les constructeurs de machines qui méritent le plus notre admiration sont ceux qui, distingués par leur science théorique, ont laissé en outre à la postérité des monuments de leur art et des œuvres de leur génie, tandis que les hommes, qui se sont seulement exercés dans la parole méritent plutôt le nom de sophistes que celui de savants. C'est sur la liste traditionnelle de ces artistes que nous voyons figurer Archimède et Socrate de Cnide, qui inventèrent, l'un les moyens de soumettre à Ptolémée la ville de Memphis, sans recourir à un siège, mais en détournant et en divisant le cours du Nil ; l'autre, ceux d'incendier les galères des ennemis.
Il est le premier à mentionner l'incendie des navires romains, ce que aucun des historiens précédent n'a fait, ni Polybe, ni Tite-Live, ni les sources de Plutarque ou celles des compilateurs de recueils de stratagèmes (Frontin, Polyen, etc.), des érudits comme Athénée ou Cicéron (fasciné par le personnage, il alla jusqu'à mener l'enquête pour retrouver sa tombe lors de son séjour en Sicile !), etc ; des architectes comme Vitruves, Héron, etc. et même un poète aussi fantasque que Silius Italicus ne mentionne pas cette merveille lors du siège de Syracuse ! Tous ces silences éloquents rendent cette rumeur particulièrement douteuse, et très tardive, isolée.

Il est donc est suivi ou précédé de peu par son contemporain Galien dans l'extrait donné plus haut. Galien ne parle pas explicitement de "miroirs ardents" mais de pyreion, "un truc pour allumer le feu", que ce soit deux bouts de bois, un briquet, ou autre. Mais le contexte ne laisse guère planer de doute. Or Galien signale expressément qu'il s'agit là d'une théorie personnelle ; ce serait donc lui qui le premier aurait créer le mythe, par déduction.
Son raisonnement n'est pas idiot : à partir du moment où, à tort, Archimède est réputé avoir enflammé par un moyen ingénieux des navires, quelqu'un d'aussi cultivé que Galien ne peut que songer aux traités, perdus, d'Archimède sur les Miroirs (allusions dans Apulée, Apologie de Socrate : Pourquoi dans les miroirs plans les images apparaissent-elles vis-à-vis de l'observateur avec une parité presque identique ? pourquoi dans les miroirs convexes et sphériques sont-elles rapetissées ? pourquoi sont-elles, au contraire, agrandies dans les miroirs concaves ? Quand et pourquoi dans ces derniers ce qui était à droite se trouve-t-il transposé à gauche ? Dans quel cas l'image se forme-t-elle derrière le même miroir ? dans quel cas se reproduit-elle en avant ? Pourquoi les miroirs concaves, s'ils sont placés en face du soleil, enflamment-ils un corps combustible placé à leur foyer ? Comment se fait-il que souvent apparaissent dans les nuages des arcs de diverses couleurs, et deux soleils qui rivalisent de ressemblance ? Il existe encore en ce genre d'autres questions, qui font la matière d'un gros volume dans les oeuvres du Syracusain Archimède. Génie supérieur que celui-là, dont l'admirable sagacité s'étendait, il est vrai, à toute la géométrie, mais dont pourtant le principal titre peut-être à la célébrité est d'avoir assidûment consulté des miroirs !).

Il est possible que l'historien Dion Cassius, la génération suivante, ait évoqué ces miroirs placés explicitement dans le contexte du siège de Syracuse, puisque son abréviateur Zonaras (XIIe siècle) y fait référence en IX.424 et qu'il est mentionné par Tzetzès (Chiliade, II.119). Mais sans certitude, puisque Zonaras conte la même histoire de miroirs sept siècles plus tards, employés cette fois par Proclus au siège de Byzance par Vitalien... et que les contemporains décrivent en fait comme des machines lançant du souffre. Il est très probable que ces deux anecdotes, fausses, sont tirés d'une source commune et intégrée au récit général inspiré de Dion. Quant à Tzetzès, il n'attribue pas à Dion spécifiquement l'anecdote des miroirs ardents, mais cite Dion comme une source sur le siège de Syracuse en général, au côté de Diodore.

Mais l'étape principale qui assura la pérennité de la légende provient d'Anthémios de Tralles (mort en 534), un des plus grands mathématiciens et ingénieurs de son temps, architecte de la Basilique Sainte-Sophie (ce qui donne une haute idée de ses capacités ; il est mort au cours des travaux et d'autres achevèrent son ouvrage). S'il est assez peu connu de nos jours et ses travaux quasi tous perdu, son influence chez ses contemporains étaient très importante.
Or lui s'est intérogé non pas tant sur la réalité de l'historiette, mais de manière théorique sur la manière dont Archimède aurait pu se débrouiller. On a conservé quelques fragments, y compris celui où il traite de ce problème :
IIe problème
Construire une machine capable d’incendier, à un lieu donné distant de la portée du trait (k), par le moyen des rayons solaires.

Ce Problème paraît comme impossible, à s'en tenir à l'idée de ceux qui ont expliqué la méthode de construire ce qu'on appelle miroirs ardents, car nous voyons toujours que ces miroirs regardent le Soleil, quand l'inflammation est produite, de sorte que si le lieu donné n'est pas sur le même alignement que les rayons solaires, s'il incline d'un côté ou d'un autre, ou s'il est dans une direction opposée, il est impossible d'exécuter ce qu'on propose, par le moyen de ces miroirs ardents. D'ailleurs, la grandeur du miroir, laquelle doit être proportionnée à la distance où il s'agit de porter le feu au point d'incendier, nous force de reconnaître que la construction, telle qu'elle est exposée par les Anciens, est presque impraticable. Ainsi d'après les descriptions qu'on en a données, on a raison de croire que le Problème proposé est impossible, Néanmoins, comme on ne peut pas enlever à Archimède la gloire qui lui est due, puisqu'on s'accorde unanimement à dire qu'il brûla les vaisseaux ennemis par le moyen des rayons solaires, la raison nous force d'avouer que par ce moyen même, le Problème est possible. Pour nous, après avoir examiné la matière, après l'avoir considérée avec toute l'attention dont nous sommes capables, nous allons exposer la méthode que la théorie nous a fait découvrir, en faisant précéder quelques préliminaires nécessaires au sujet.

Solution du IIe problème
Soit le miroir plan hexagone ΑΒΓΔΕΖ, & d'autres miroirs adjacents, semblables, hexagones, & attachés au premier suivant les lignes droites AB, ΒΓ, ΓΔ, ΔΕ, EZ par le plus petit diamètre (s), de manière qu'ils puissent se mouvoir sur ces lignes, au moyen de lames ou bandes appliquées qui les unissent & les collent les uns aux autres, ou à l'aide de ce qu'on appelle des charnières. Si donc nous faisons que ces miroirs d'alentour se trouvent dans le même plan que le miroir du milieu, il est clair que tous les rayons éprouveront une réflexion semblable & conforme à la position commune de toutes les parties de l’instrument. Mais si le miroir du milieu reliant comme immobile, nous inclinons sur lui avec intelligence, comme cela est facile, tous les autres miroirs qui l'entourent, il est évident que les rayons qui en réfléchiront, tendront vers le milieu de l'endroit où est dirigé le premier miroir. Répétons la même opération, & aux environs des miroirs dont nous avons parlé, plaçant d'autres miroirs pareils, dont ceux d'alentour peuvent s'incliner sur le central, rassemblons vers le même point les rayons qu'ils renvoient, de sorte que tous ces rayons réunis produisent l'inflammation dans le lieu donné.
Mais cette inflammation se fera bien mieux si vous pouvez employer à cet effet quatre ou cinq de ces miroirs ardents, & même jusqu'au nombre de sept (t), & s'ils sont entre eux à une distance analogue à celle de la matière à brûler, de manière que les rayons qui en partent, se coupant mutuellement, puissent rendre l'inflammation plus considérable. Car si les miroirs sont dans un seul lieu, les rayons réfléchis se coupent selon des angles très aigus, de sorte que tout le lieu autour de l’axe étant échauffé………………………. l'inflammation ne se fait pas au seul point donné. On peut aussi à l’aide de la construction de ces mêmes miroirs plans, offusquer les yeux des ennemis, qui dans leur marche ne les apercevant point, tombent sur ceux qui les portent attachés au haut & en dedans de leurs boucliers. Ces derniers tournent à propos & dirigent la réflexion des rayons solaires vers un ennemi qui ne peut que difficilement se garantir de leur action, & la surmonter (u).
Il est donc possible, par le moyen des miroirs ardents dont on a parlé, & dont on a décrit la construction, de porter l'inflammation à la distance donnée………………… Aussi ceux qui ont fait mention des miroirs construits par le divin Archimède, n'ont pas dit qu'il se fût servi d'un seul miroir ardent, mais de plusieurs; & je pense qu'il n'y a pas d'autre moyen de porter d'un lieu l'inflammation à une distance ………………..
Mais comme les Anciens, en traitant des miroirs ardents ordinaires, n'ont exposé que par un procédé organique de quelle manière il faut tracer les emboles, sans présenter à cet égard aucune démonstration géométrique, sans dire même que c'étaient des sections coniques, ni de quelle espèce, ni comment elles se formaient, nous allons essayer de donner quelques descriptions de pareils emboles, non sans démonstration, mais par des procédés géométriques & démontrés.


Cette description réaliste aura un grand retentissement, et sera colporté, abrégé par les Byzantins au Moyen-Age (Zonaras et Tzetzès déjà mentionnés, ainsi que parait-il Eustathe selon une note. Je dis parait-il car je n'en pas trouvé trace dans son commentaire à l'Iliade, ni à la référence donnée E.338, ni dans l'index).
Je me contente de citer Tzetzès, de loin le plus dissert, dans son poème les Chiliades, II.119 sq. car il a l'avantage de citer ses sources : Lorsque la flotte de Marcellus fut à la portée de l'arc le vieillard (Archimède) fit approcher un miroir hexagone qu'il avait fabriqué. Il plaça, à une distance convenable de ce miroir, d'autres miroirs plus petits, qui étaient de la même espèce, et qui se mouvaient à l'aide de leurs charnières et de certaines lames quarrées de métal. Il posa ensuite son miroir au milieu des rayons solaires du midi d'été et d'hiver. Les rayons du soleil étant réfléchis par ce miroir, il s'alluma un horrible incendie dans les vaisseaux qui furent réduits en cendres, à une distance égale à celle de la portée de l'arc [... ] Dion et Diodore qui ont écrit l'histoire d'Archimède, et plusieurs autres en ont parlé, principalement Anthémius qui a écrit sur les prodiges de la mécanique ; Héron, Philon, Pappus et enfin tous ceux qui ont écrit sur les mécaniques : c'est dans leurs ouvrages que nous lisons l'histoire de l'embrasement occasionné par le miroir d'Archimède».
Dion et Diodore ont disparus (je regrette en particulier la disparition de Diodore, qui annonce à plusieurs reprises, au livre I et au livre V, son projet de s'étendre sur Archimède par la suite...) mais rien ne permet de penser, y compris dans la tournure de Tzetzès, qu'il décrivait des miroirs.
Anthémius a été cité plus haut, il apparait nettement que c'est lui qui inspire cette description, avec l'emploi de plusieurs miroirs qui semble être sa contribution personnelle.
Mais sont cités trois ingénieurs archi-célèbres, Héron d'Alexandrie (Ier ap.) qui a beaucoup travaillé sur la catroptique, la réflexion des rayons lumineux, et les machines de guerres ; Philon de Byzance (IIIe ap.) qui a entre autre rédigés un traité sur les machines de guerre et plusieurs ouvrages de Poliorcétique ; enfin Pappus d'Alexandrie (début IVe ap), mathématicien, mais je ne vois pas trop dans quel contexte il aurait pu aborder ce sujet.
Si Pappus et Philon ne sont pas une surprise (ils sont postérieurs à Galien), il est par contre étonnant que Héron d'Alexandrie soit mentionnés : un auteur aussi célèbre et aussi lu de ses contemporains aurait popularisé très vite cette légende, ce qui n'est pas le cas. Je présume que l'unique source de Tzétzès est Anthémius, qui lui-même se référait à ses illustres prédécesseurs sans que forcément, il les relie aux miroirs, mais d'une manière plus générale aux inventions d'Archimède lors de ce siège (ainsi justement Héron rend hommage aux travaux sur les machines de siège d'Archimède dans le Chiroblaste, §156, et surtout à plusieurs reprises dans son Traité sur la défense des places fortes, §17, 26 et surtout 69sq. où il décrit en détail sur plusieurs pages les diverses machines mise en place par Archimède pour repousser l'assaut naval des Romains : aucune mention des miroirs.)

Pour le feu grégeois, par contre, je ne peux aider : je ne dispose pas des sources byzantines et son utilisation n'est véritablement attestée sous cette forme qu'au VIIIe. Il existe des préparations souffrées/résinées/bitumées en Orient, en particulier en Cappadoce je crois lors des campagnes romaines du Ier av., mais je doute que ce soit du feu grégeois proprement dit... Je me demande s'il n'existe pas un sujet sur le forum traitant du feu grégeois.
De même, je ne peux aider en donnant une bibliographie contemporaine sur ces "miroirs ardent" : je ne m'amuse qu'avec les sources et elles seules !


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Message Publié : 07 Juil 2010 22:56 
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Hérodote
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Inscription : 10 Nov 2009 11:47
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@Thersite je vous remercie vraiment pour les textes et les sources citées, ce sont des informations précieuses!


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Message Publié : 02 Août 2010 18:36 
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Pierre de L'Estoile
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Inscription : 11 Juin 2007 19:48
Message(s) : 2289
L. Albus Lupus a écrit :
Il n'y a rien à dire, pour ce genre de questions, le mieux reste encore d'essayer (ce qui a été fait dans une émission télévisée américaine).

Je ne suis absolument pas de ton avis. Que l'expérience soit techniquement réalisable ne signifie nullement que l'anecdote est historique, surtout que ce genre d'amusement fait la part belle aux anachronismes (j'ai vu la semaine dernière sans doute la même émission consacrée à "reconstituer" le canon à vapeur d'Archimède, alias une "invention" de Léonard de Vinci si j'ai bien compris, qui se contente de faire allusion au Syracusain dans une marge de son croquis; j'ai trouvé l'émission risible, cela ne ressemblait à rien du tout, à grand renforts de matériaux contemporains; même pour Léonard l'imitation était bidon, alors Archimède...).
Le fait qu'on soit capable de construire un deltaplane ne rend pas la fable de Dédale et d'Icare plus réaliste, la fabrication de robots ne rend pas Talos plus historique. C'est un exercice intellectuellement stimulant, je suis d'accord, et c'est celui auquel se livre Anthémios de Tralles. Mais la valeur historique de la méthode et de ses conclusions est tout à fait nulle: ce n'est ni une preuve d'authenticité ni même un argument.


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Message Publié : 04 Août 2010 21:42 
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Thucydide
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Inscription : 07 Juil 2010 15:36
Message(s) : 48
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Je me suis très parfaitement exprimé sur le sujet ; je parlais bien sûr d'essais qui impliquaient les moyens d'époque, ou par défaut des moyens antérieurs si ceux d'époque sont peu ou mal connus. Et de même, la réussite de la reconstitution ne prouve pas nécessairement l'historicité de l'anecdote, mais peut alléger le scepticisme.

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