Bonjour Cisar, je peux essayer d'apporter quelques éléments de réponse à tes questions, en attendant que d'autres me complètent.
La mort de Périclès eut effectivement des conséquences sur la vie politique athénienne, principalement parce que Périclès avait réussi, pendant ses quinze années de stratégie, à gagner la confiance du peuple et à installer un semblant de continuité dans la politique de la cité, puisque ses avis étaient généralement suivis par l'Assemblée. A sa mort, il n'y avait plus de "leader naturel" qui se détachait du lot (un peu comme aujourd'hui en France, dans un certain parti politique
), ce qui laissa le champ libre à des "hommes politiques" nouveaux, qui luttèrent parfois violemment pour imposer leurs idées.
Parmi ces hommes (plus ou moins) nouveaux, certains étaient effectivement de condition bien plus modeste que Périclès ; je pense évidemment à l'exemple de Cléon, dont Aristophane n'eut de cesse de critiquer la basse extraction (Cléon était fils de tanneur). Je te renvoie ici au livre de Connor,
The New Politicians of Fifth-Century Athens, qui traite de l'apparition de ces nouveaux hommes politiques à la fin du Ve siècle. Il semble que les Athéniens eurent alors moins de mal qu'auparavant à octroyer leur confiance à des stratèges ou à des orateurs qui n'étaient pas issus des plus prestigieuses lignées. Il faut aussi ajouter qu'à cette époque, la terre n'était plus l'unique moyen de faire fortune pour une famille athénienne : le développement du commerce et le contrôle par Athènes de nombreuses voies maritimes, en Egée et en Méditerranée, permirent à certains individus d'acquérir rapidement de grandes richesses (on pense à la famille de Cléon, et plus tard à celle de Démosthène), égalant parfois celles des vieilles familles aristocratiques. Ces nouvelles élites firent logiquement leur apparition sur la scène politique, puisqu'il était préférable d'être riche pour s'investir à fond dans les affaires politiques de la cité.
Il ne faut cependant pas généraliser et penser qu'après Périclès, les leaders politiques de la cité ne furent plus que des "hommes nouveaux". Les grandes familles continuèrent à donner des hommes politiques influents. Pour ne prendre que trois exemples, Nicias et Alcibiade, qui participèrent à l'expédition de Sicile et furent des personnages importants de la fin de la guerre du Péloponnèse, étaient tous deux issus de lignées prestigieuses (Alcibiade était un Alcméonide comme Périclès). Plus tard au IVe siècle, l'orateur Lycurgue, qui mena une politique de redressement d'Athènes après Chéronée, appartenait à la vieille famille sacerdotale des Etéoboutades.
Enfin, pour ce qui est de l'accroissement du pouvoir de l'Assemblée, je serai un peu moins bavard. C'est un phénomène que certains historiens appellent parfois la "démocratie radicale", dont le point culminant me semble être 406 et le procès des Arginuses, où l'Assemblée passa outre la législation athénienne pour condamner à mort 8 stratèges qui avaient pris part à la bataille navale des Arginuses. Après 403, on tenta d'empêcher ce genre de dérive en instaurant ce que Hansen appelle une "démocratie modérée" (où l'Assemblée avait moins de pouvoir qu'au Ve siècle). Je sèche un peu pour te répondre sur les causes d'une telle "dérive" après la mort de Périclès, j'imagine que la peur de la défaite, qui semblait de plus en plus inéluctable depuis la débâcle de Sicile, poussa les Athéniens à prendre des décisions parfois peu réfléchies.