Est-il strictement incontestable, ou y a-t-il eu possibilité de falsification ? On aurait quand même attendu Marc-Antoine…

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Quidquid latine dictum sit, altum sonatur

La question du testament de César a déjà été abordé dans plusieurs fils de discussion. Dont notamment celui-ci : viewtopic.php?f=39&t=6635&hilit=testament+C%C3%A9sar

Sur votre question de la falsification, je ne vois pas pourquoi il aurait été falsifié. C'eut été relativement difficile, vu qu'il était confié aux Vestales qui y risquaient leur vie.

Cela paraît d'autant moins envisageable que ce testament était un testament conforme au droit civil romain, c'est-à-dire un testament personnel et privé comme en faisaient tous les aristocrates romains. Il n'y a pas dedans la moindre clause politique et il ne pouvait pas y en avoir. C'eut été une monstruosité juridique : tout dictateur tout-puissant qu'était César, le cadre juridique pour désigner un héritier politique et pour régir les affaires politiques par voie testamentaire n'existait tout simplement pas.

Rien ne permet non plus d'étayer l'idée que César ait pu à un quelconque moment envisager d'avoir Antoine pour héritier, ni pour héritier à titre privé, ni même pour héritier politique.

Antoine avait été en semi-disgrâce pendant 2 ans, entre l'automne 47 (retour de César d'Asie où il sanctionne la gestion très médiocre de Rome et de l'Italie par Antoine en son absence) et l'automne 45 (César le remet dans le jeu à la fin de la 2ème campagne d'Espagne).

César misait sur d'autres personnes pour construire durablement son nouveau régime. Il avait bien sûr besoin d'Antoine qui était un des représentants du noyau des césariens des moments les plus fidèles (encore que, comme Trebonius ou Decimus Brutus), ceux qui sont venus vers lui ou restés à ses côtés quand sa cause paraissait avoir bien peu de chances de l'emporter. Mais ces césariens de la 1ère heure avaient aussi montré qu'ils n'étaient pas vraiment à la hauteur du gouvernement de Rome et de l'empire. Et César ressentait le besoin de se rallier des aristocrates modérés, dont la compétence était établie et dont le poids dans les élites et la société romaine était plus important, et donc de nature à rassembler des soutiens durables et solides pour son régime. C'est pour cela que César donne tant d'importance à Marcus Aemilius Lepidus (qui a été consul en 46 avec lui et qui est son seul maître de la cavalerie entre 46 et les ides de mars 44), mais aussi à Publius Servilius Isauricus, à Cneus Domitius Calvinus, à Servius Sulpicius Rufus, et Marcus Junius Brutus (le fils de Servilia et neveu de Caton d'Utique).

Ce que fait César en 47/44 est très proche de ce qu'a fait Sylla en 81/79.

Il cherche à rassembler autour de lui le coeur du coeur de l'aristocratie romaine la plus ancienne, et en particulier les gentes patriciennes les plus prestigieuses : le dernier des Fabii Maximi (dont l'un des fils sera un proche ami d'Auguste), les Aemilii Lepidi, les Valerii Messallae.
Il n'a pas encore vraiment sous la main de Claudii, et les Cornelii se sont trop grillés contre lui (le fils de Sylla, Metellus Scipio, les Lentuli tous dans le camp de Pompée). Mais il ressort de derrière les fagots Dolabella (qui contrairement à ce qui a été trop rapidement été interprété, a probablement plutôt un début de trentaine au milieu des années 40 que seulement 25 ans) et son ex-beau-frère Cinna.

Il me paraît très aventuré d'affirmer que César envisageait à ce stade de léguer son pouvoir monarchique à un héritier identifié. Qu'il ait eu en tête l'idée de tester plusieurs personnalités pour qu'elles fassent leurs preuves, c'est probable. Qu'il ait envisagé de tester le jeune Octavien dont personne (à commencer par Octavien lui-même) ne savait que César l'avait secrètement adopté par voie testamentaire à l'automne 45, cela me paraît aussi probable.

Au delà, on glisse dans la pure fiction.