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 Sujet du message : La succession d'Auguste
Message Publié : 15 Nov 2005 1:01 
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Hérodote
Hérodote

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La succession d'Auguste... un sujet bien compliqué ! j'ai beaucoup de mal à m'en sortir avec la généalogie !
Il est vrai qu'Auguste n'a vraiment pas eu de chances... Marcellus, Drusus, Agrippa, Caius et Lucius, Agrippa Postumus, tous décédés les uns après les autres jusqu'à ce qu'il finisse par se rabattre sur Tibère. Je voudrais comprendre quels sont les moyens qu'il a mis en place pour assurer sa succession : mariages, adoption, association à l'exercice du pouvoir... et leurs enjeux. L'un des topics parle de la chance exceptionnelle d'Auguste, on ne peut pas dire que ce fut le cas pour la question de sa succession ! Cette question était d'ailleurs fondamentale pour assurer la continuité du (jeune) principat !


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Message Publié : 15 Nov 2005 18:17 
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Eginhard
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Il est vrai qu'Auguste n'eut pas de chance à propos de sa descendance mâle. Mais eut-il eu un fils légitime que les choses n'auraient pas été beaucoup plus simples, à mon avis. Car la succession est vraiment le problème majeur du principat pour la simple et bonne raison qu'on ne peut léguer ce qu'on ne possède pas. Or le régime repose sur le compromis d'un rétablissement factice de la République.
Si Auguste avait eu un fils qu'il aurait désigné comme héritier, la nature monarchique du régime aurait éclaté au grand jour, ce qu'il ne voulait pas, et que les sénateurs voulaient encore moins. La position du fils d'Auguste aurait été très dure à tenir.
L'adoption est un moyen que les sénateurs du second siècle glorifieront, car il permet un choix, et donc finalement le choix du meilleur. Peut-être peut-on dire que le fait qu'Auguste n'eut pas de fils fut une chance pour le principat, dans la mesure où il retarda la prise de conscience d'une monarchie héréditaire.
Mais il est sûr qu'Auguste fit tout pour choisir dans sa famille son successeur, et à cet égard le rôle des femmes est éclairant, en particulier sa fille Julie.
Quoi qu'il en soit, Tibère est une solution par défaut, comme l'était probablement la propre adoption d'Octave par César.


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Message Publié : 15 Nov 2005 23:46 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

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Sujet passionnant, Kuroe. :)

Sujet que je me plairai à compliquer en réagissant au post d'Helios par deux questions. :wink:

Croyez-vous vraiment, Helios, qu'Auguste voulait dissimuler la nature monarchique de son pouvoir au point qu'il aurait été particulièrement embêté s'il avait eu un fils (par exemple de Livie) ?

Et ne pensez-vous pas que cette image de l'adoption du meilleur successeur comme étant le système de succession idéal est tout simplement le résultat de la déformation opérée sciemment par la propagande de la mal nommée "historiographie" sénatoriale ?

Pour ma part, je n'ai aucun doute sur le fait qu'Auguste aurait choisi comme successeur son fils s'il en avait eu un. Il a toujours cherché comme successeur le plus proche mâle de son sang.

Marcellus était son neveu.

Agrippa n'a, je pense, jamais été envisagé que comme un régent de transition, chargé de chauffer la place à ses fils qui se trouvaient, ô étonnante coïncidence :wink: , être les 2 seuls petits-fils d'Auguste, via sa fille unique Julie. Petits-fils qu'Auguste s'est empressé d'adopter dès la naissance du 2ème, Lucius.

Je ne crois pas que Drusus ait jamais été un successeur envisagé par Auguste, même s'il l'aimait beaucoup, en tout cas beaucoup plus que Tibère. Car enfin, dès la mort de Marcellus en 23 BC, c'était Agrippa qui était le successeur envisagé. Agrippa qui fut marié à Julie, quasiment dès que le délai de viduité fut écoulé. Et qui se fit conférer la puissance tribunicienne aux côtés d'Auguste dès 18.

Les petits-fils d'Auguste furent rapidement faits "princes de la jeunesse". Je trouve qu'on fait plus discret en matière de monarchie dissimulée. Il n'y avait pas de manière plus explicite de les désigner à l'avance comme les héritiers choisis par le Prince.

En effet manque terrible de chance, comme disait Kuroe, Auguste perd ses 2 petits-fils/fils adoptifs.

Que lui reste-t-il ? Deux petites filles : Julie la jeune et Agrippine (née après Julie la jeune).

Prenant acte, comme Auguste, que son dernier petit-fils, Agrippa posthumus, était probablement limité intellectuellement et particulièrement désagréable et colérique, voire peut-être d'un père autre qu'Agrippa compte tenu de la légèreté de moeurs de Julie l'aînée, j'écarte tout de suite Agrippa. (Auguste ne fit jamais à son petit-fils la carrière qu'il fit à Caius et Lucius et préféra très vite confier des missions importantes à quelqu'un d'autre dont on reparlera, et déchut Agrippa de ses droits dès 8 AD)

Evidemment, on ne peut pas désigner une fille comme héritière d'un pouvoir politique, dans la société romaine. Mais comme dans toute les monarchies, la fille, à défaut de pouvoir exercer le pouvoir, peut néanmoins le transmettre et apporter à celui que son père aura choisi comme époux la légitimité dynastique en le faisant entrer dans la famille.
Confère le rôle de Julie l'aînée, mariée d'abord à Marcellus, puis à Agrippa, puis à Tibère, lequel Tibère était néanmoins fort contrarié de savoir qu'il n'était là que pour chauffer la place à ses beaux-fils Caius et Lucius, au point que (devant subir en plus un cocufiage méthodique de son épouse Julie) Tibère décida de se retirer de la vie politique et de s'exiler à Rhodes.

J'ajoute d'ailleurs que les empereurs romains n'adopteront un hérotier que quand ils n'auront pas de fils de leur sang à qui transmettre le trône. Chaque rare fois (hasard de l'histoire et forte mortalité à l'époque) qu'un empereur aura un fils, ce fils en âge de le faire (voire pas en âge), celui-ci lui succédera (Claude n'étant pas vraiment une exception puisque quasi certainement victime prématurée d'un assassinat commandité par Agrippine la jeune, mère de Néron).

Je reviens à Julie la jeune et à Agrippine, les 2 petites filles de Julie. Comment choisir entre 2 petites-filles qui ont toutes les deux des atouts maximaux et égaux pour prétendre à la succession ?

Eh bien en regardant les atouts respectifs de leurs époux.

Julia la jeune était mariée à Lucius Aemilius Paullus qui était petit-fils de Scribonia, la 2ème épouse d'Auguste, répudiée dès la naissance de Julie, fin 39. Rien que des grandes familles parmi ses ancètres : les Cornelii Scipiones et les Aemilii Paulli.

Agrippine était mariée à Germanicus, qui était le fils de Drusus Claudius Nero et d'Antonia la cadette. C'est-à dire le petit-fils de Livie (bingo !) et le petit-fils d'Octavie, la soeur d'Auguste (superbingo, belote, rebelote et dis de der, poker d'as, la banque saute).
Si j'ajoute que Germanicus et Agrippine ont très vite eu des fils, autrement dit les uniques arrière petits-fils d'Auguste, vous comprendrez la raison du choix. :wink:

Tibère fut donc obligé d'adopter Germanicus.

Dans l'esprit d'Auguste, Tibère ne devait être qu'un empereur temporaire, chargé d'assurer la transition au profit de Germanicus. Après tout, Tibère était déjà âgé de 55 ans en 14 AD. On pouvait penser que son règne durerait 10 ans. Mal jugé ! C'est Germanicus qui lâcha le premier et Tibère régna près de 23 ans.

Bref, je pense qu'il ne faut pas faire de ce qui n'est qu'une série d'accidents et morts prématurées une conduite à laquelle les empereurs se seraient astreints pour continuer de dissimuler la nature monarchique du pouvoir.

Surtout que mis à part le fait qu'il était insupportable aux grandes familles et à certains des sénateurs, les romains, y compris sous la république, avaient la politique héréditaire. Ils pensaient que les fils avaient des chances d'hériter des vertus de leurs pères et c'est pour cela qu'il était si difficile pour un homo novus d'atteindre le sommet. Beaucoup plus qu'une république, Rome était avant tout une aristocratie. Ce qui a été scandaleux pour les sénateurs, c'est que Rome passe d'une république sous tutelle de l'aristocratie (dont le Sénat était le siège) à une république sous tutelle d'un seul aristocrate : l'empereur.



PS : En revanche, je suis entièrement d'accord sur le fait qu'Octavien n'était probablement qu'un héritier par défaut, mais probablement aussi un héritier temporaire dans l'esprit de César. Ce n'est qu'une hypothèse de ma part mais elle s'appuie sur le testament de César, rédigé en septembre 45 BC. Dans ce testament, César adoptait certes Octavien et lui léguait les 3/4 de sa fortune, déduction faite des divers cadeaux et donations. Mais il prévoyait par ailleurs qu'un certain nombre de personnes, dont son assassin Decimus Brutus, devrait être le tuteur de son éventuel fils. En effet, ce tuteur ne pouvait être que le tuteur d'un enfant mineur, et donc en bas-âge, puisqu'Octavien était déjà majeur en 45.


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Message Publié : 16 Nov 2005 1:46 
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Hérodote
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merci pour vos réponses.

Je n'ai pas autant de connaissances que vous deux, mais je pense également, Caesar Scipio, que si Auguste avait eu un descendant mâle il n'aurait eu aucun scrupule à le désigner directement comme successeur.

Par contre une question me tracasse : pourquoi Auguste n'a-t-il pas adopté directement Germanicus plutôt que de le faire adopter par Tibère qu'il n'appréciait guère ? Pensait-il réellement que Tibère décèderait rapidement ? Pourtant, quand Auguste adopte Tibère et Agrippa Pothumus en 4 ap. J.-C., Germanicus est déjà majeur depuis 2 ans (si je ne me trompe pas il est né en 15 av. J.-C.). En tant que petit-fils de Livie et surtout d'Octavie, de plus comme vous l'avez égalemement précisé, marié à Agrippine et ayant une descendance... il semblait tout désigné ! Je ne comprends donc vraiment pas pourquoi Auguste ne l'a pas adopté lui-même, malgré vos explications (Tibère empereur temporaire chargé d'assurer la succession). Germanicus n'était peut-être pas suffisamment formé pour exercer le pouvoir ? J'ai besoin de vos lumière à ce propos !


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Message Publié : 16 Nov 2005 8:07 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

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Pourquoi Germanicus n'a-t-il pas directement succédé à Auguste en 14 AD ?

Probablement parce qu'il était trop jeune. En 14, il n'avait que 28 ans.

Il ne faut pas oublier qu'Auguste devait certainement avoir une conscience aïgue des immenses difficultés que lui-même a rencontrées du fait de son très jeune âge (même pas 19 ans) en 44BC.

C''est très difficile d'imposer un héritier quand il est jeune. C'est très difficile de bien gouverner un empire quand on est jeune. Confèrent les règnes de Caligula et Néron.

Il faut aussi reconnaître que Tibère était un gouvernement éprouvé, un très grand militaire, alors que Germanicus n'avait pas encore cette expérience.

Et avoir conscience que Germanicus n'était quand même pas le petit-fils d'Auguste.

Il est probable que sur les dernières années de sa vie, le souhait d'Auguste était d'abord et avant tout de réussir le passage de témoin qui ancrerait solidement le mode de gouvernement qu'il avait élaboré. Car enfin, pendant tout le règne d'Auguste, le principat a pu être présenté comme un régime d'exception justifié par les qualités exceptionnelles d'Auguste. Qu'il y ait un successeur à Auguste désigné par Auguste, c'était parachever la fondation du régime.

Et en plus, si on prend en compte le fait que Germanicus est mort jeune, en 19, et probablement pas assassiné ni empoisonné, on se dit qu'Auguste a tout compte fait eu de la chance.


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Message Publié : 17 Nov 2005 14:03 
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Eginhard
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Caesar Scipio a écrit :
Pour ma part, je n'ai aucun doute sur le fait qu'Auguste aurait choisi comme successeur son fils s'il en avait eu un. Il a toujours cherché comme successeur le plus proche mâle de son sang.

Je pense aussi.
Je voulais juste dire qu'a posteriori, peut-être finalement ce n'était pas si mal pour le régime qu'il n'eut pas de fils. Mais j'avoue que c'est en effet tiré par les cheveux, et que l'idée (saugrenue) m'est venue au moment même où j'ai écrit le message.


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Message Publié : 17 Nov 2005 21:27 
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Grégoire de Tours
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Que sait-on des bâtards d'Auguste ?

Des rumeurs indiquent qu'Auguste raffolait des vierges et que Livie fermait les yeux sur ce caprice de son époux. Il régna 44 ans et dut engendrer tellement de bâtards qu'il doit être l'aïeul d'une bonne fraction des Européens ...

Auguste ne pouvait adopter ou reconnaître le fils d'une esclave, mais il a dû veiller sur le sort de quelques-uns de ses rejetons ?

_________________
Spartacus avait raison ...


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Message Publié : 17 Nov 2005 21:48 
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Philippe de Commines
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Inscription : 17 Mars 2004 23:16
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Ce n'est pas le sujet Hérodote. Rien, à ma connaissance, dans les sources historiques n'évoque le cas d'un bâtard d'Auguste, même si les rumeurs prétendaient que Livie fournissait même des jeunes filles à son époux. Le sujet est la succession d'Auguste.

Pour répondre à Hélios, vous disiez qu'il n'était finalement pas su mal pour le régime qu'Auguste n'ait pas eu de fils. Je n'en suis pas sûr.

En effet, Tibère a eu un problème de légitimité parce qu'il n'avait pas de liens de sang avec Auguste et parce qu'il était peu aimé d'Auguste.

Il a été contesté et par ce qu'on pourrait appeler le parti légitimiste, qui se rattachait à Agrippine et par mariage à son époux Germanicus et à ses enfants Nero César et Drusus César.

Il a aussi été contesté par le peuple, parce que d'une certaine façon, Tibère était un empereur optimate, alors que le régime césaro-augustéen était fondé sur le fait que l'empereur était aussi l'héritier du parti popularis. Tibère nous est décrit comme particulièrement hautain et distant, ce qui n'aide pas à se rendre populaire.

Il a enfin été contesté par les sénateurs puisque pour beaucoup de sénateurs, un empereur, même optimate, était difficilement acceptable.

Peut-être aurait-il fallu que le successeur d'Auguste, à défaut d'être forcément de son sang, se rattache ostensiblement à la tradition popularis pour ne pas être contesté à ce point.

Peut-être aussi que si Auguste avait eu un fils qu'il avait élevé dans la logique de sa pratique politique aurait-il réussi à enraciner et à fortement légitimer une pratique augustéenne du principat (monarchie relativement dissimulée). Tibère, par son problème de légitimité et de popularité, a fragilisé la pratique augustéenne du pouvoir à laquelle il se voulait pourtant très fidèle.
Peut-être est-ce cela qui a rendu si populaire la pratique antonienne du pouvoir d'une monarchie beaucoup moins cachée, qui était incarnée par Germanicus et par ses fils et petits-fils, Caligula et Néron.

Mais c'est vrai que je ne fais là que me perdre en conjectures.


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 Sujet du message : Re: La succession d'Auguste
Message Publié : 07 Mars 2010 11:27 
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Hérodote
Hérodote

Inscription : 07 Mars 2010 11:13
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Bonjour,

J'ai un commentaire à faire sur la succession d'Auguste (Tacite, Annales, I,3) et j'ai beaucoup de mal à trouver une problématique. Je pensais faire un plan en deux parties. La première qui porterait sur la gens Julia avec les mariages de Julie avec Marcellus puis Agrippa, Gaius et Lucius, Agrippa Postumus. Et la deuxième sur Tibère, Drusus, les "machinations de Livie" pour favoriser Tibère. Enfin il faut que je revoie tout ça car c'est très embrouillé. Mais pensez-vous que c'est un bon début?

Je me demandais aussi si je devais parler de Claude, car il n'est pas du tout mentionné dans le texte.

Merci d'avance.


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 Sujet du message : Re: La succession d'Auguste
Message Publié : 07 Mars 2010 11:44 
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Jean Mabillon
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Auguste est considéré par l'historiographie moderne comme le fondateur de l'empire et donc comme le premier empereur.

Or tel n'est exactement le point de vue antique :
- Suétone a commencé son recueil de biographies par le vie du divin Jules, vu implicitement comme le fandeteur de la dynastie
- Tacite commence ses annales avec l'avènement de Tibère à la mort d'Auguste.

Pour ma part, je serais assez favorable à une vision atypique faisant d'Auguste le dernier des "imperatores" républicains : un chef charismatique et brutal sur le modèle de César, Sylla, Marius, Cinna ...même s'il n'était pas un grand chef militaire, il est arrivé au pouvoir par la guerre civile et s'y est maintenu sous les apparences de la République.

En revanche, Tibère est arrivé au pouvoir par la double légitimité de l'hérédité (ou plus exactement de l'adoption) et de la ratification (libre en apparence) du sénat. Il définit un modèle qui sera à peu près suivi jusqu'au IIIè siècle. Les questions délicates sous Auguste des bases juridiques de son pouvoir semblent effacées - il me semble que tous les pouvoirs civils, militaires et religieux d'Auguste lui furent conférés en bloc et sans débat.

Qu'en pensez vous ?


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 Sujet du message : Re:
Message Publié : 07 Mars 2010 13:20 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 26 Juin 2006 20:03
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Caesar Scipio a écrit :

PS : En revanche, je suis entièrement d'accord sur le fait qu'Octavien n'était probablement qu'un héritier par défaut, mais probablement aussi un héritier temporaire dans l'esprit de César. Ce n'est qu'une hypothèse de ma part mais elle s'appuie sur le testament de César, rédigé en septembre 45 BC. Dans ce testament, César adoptait certes Octavien et lui léguait les 3/4 de sa fortune, déduction faite des divers cadeaux et donations. Mais il prévoyait par ailleurs qu'un certain nombre de personnes, dont son assassin Decimus Brutus, devrait être le tuteur de son éventuel fils. En effet, ce tuteur ne pouvait être que le tuteur d'un enfant mineur, et donc en bas-âge, puisqu'Octavien était déjà majeur en 45.


Je voulais faire une précision. Lors de l'assassinat de César, Octave n'a que 18 ans. Il est donc encore mineur en droit romain. En effet, la majorité chez les romains est portée à 25 ans, avant cet âge là ils sont justement assisté(un curator)). Vous avez sans doute confondu avec l'autorisation de mariage qui était portée à 12 ans pour les filles et 14 pour les hommes, et qui dans l'ancien droit romain correspondait aussi à la majorité.

(ce n'est qu'un détail, je sais)


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 Sujet du message : Re: La succession d'Auguste
Message Publié : 07 Mars 2010 20:05 
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Philippe de Commines
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Je croyais plutôt que le passage à la majorité intervenait au moment où, s'agissant des aristocrates, le jeune homme revêtait la toge virile, soit aux alentours de 16/17 ans. Je n'avais jamais entendu parler d'une majorité à 25 ans. Et cet âge de 25 ans m'étonne dans la mesure où il ne serait pas compatible avec l'exercice d'actions qui relèvent forcément d'un citoyen majeur jouissant pleinement des droits civiques et politiques. Or on a un très grand nombre d'exemples où de jeunes fils de sénateurs, âgés de 18 à 22 ans, font leur rentrée sur la scène politique en intentant un procès à un sénateur plus chevronné. Or en cas de succès, le jeune homme prenait le rang du condamné eu Sénat.

Ca m'intéresserait de connaître la source précise à laquelle vous avez trouvé cette référence de 25 ans.


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 Sujet du message : Re: La succession d'Auguste
Message Publié : 07 Mars 2010 20:50 
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Grégoire de Tours
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Inscription : 26 Juin 2006 20:03
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Caesar Scipio a écrit :
Je croyais plutôt que le passage à la majorité intervenait au moment où, s'agissant des aristocrates, le jeune homme revêtait la toge virile, soit aux alentours de 16/17 ans. Je n'avais jamais entendu parler d'une majorité à 25 ans. Et cet âge de 25 ans m'étonne dans la mesure où il ne serait pas compatible avec l'exercice d'actions qui relèvent forcément d'un citoyen majeur jouissant pleinement des droits civiques et politiques. Or on a un très grand nombre d'exemples où de jeunes fils de sénateurs, âgés de 18 à 22 ans, font leur rentrée sur la scène politique en intentant un procès à un sénateur plus chevronné. Or en cas de succès, le jeune homme prenait le rang du condamné eu Sénat.


En droit romain, il faut distinguer la personnalité juridique(ce qu'on appelle capacité de jouissance), et la capacité d'exercice. En théorie, à cet âge là, Octave n'a pas la capacité d'exercice. Si l'âge est de 25 ans, c'est tout simplement à cause de l'expansion économique de Rome, il ne faudrait pas que le mineur s'endette, donc avant 25 ans, il peut passer des contrats, mais les risques seront à charge de son cocontractant. D'où l'apparition d'un curator qui assiste le mineur.
Dans le cas d'Octave, en principe son héritage aurait dût être géré avec l'aide d'un curator. Sauf si il avait été émancipé.
Maintenant, il s'agit de pure langage juridique, dans la société romaine les jeunes étant assez rapidement mature(on s'entraine par exemple aux armes très jeunes). Et comme je l'ai dis plus haut on peut se marier dès 12 ou 14 ans selon le sexe.

Caesar Scipio a écrit :
Ca m'intéresserait de connaître la source précise à laquelle vous avez trouvé cette référence de 25 ans.


Mon cours de droit romain, avec un livre écrit par le professeur de ma faculté. Si vous voulez vraiment savoir lequel, demandez le moi par MP, je ne sais pas si mon professeur aime qu'on le cite à tout va. ;)


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 Sujet du message : Re: La succession d'Auguste
Message Publié : 08 Mars 2010 18:55 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 17 Mars 2004 23:16
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Merci pour l'explication sur les principes et règles de droit. :-)

Je comprends ce à quoi vous faisiez référence. Néanmoins, cela ne me semble pas couvrir l'objection que je mentionnais dans le cas d'espèce évoqué, à savoir le cas d'Octavien/Auguste.

Si les règles de droit que vous évoquez étaient en vigueur au 1er siècle avant notre ère, selon toute vraisemblance, Octavien avait déjà été émancipé. En effet, son père génétique est mort en 59 av JC quand le jeune Caius Octavius était âgé de 4 ans. Il a revêtu la toge virile en 48 ou en 47 et jouit alors pleinement du patrimoine paternel.
L'adopation testamentaire d'Octavien, effectuée en secret par César en septembre 45, qui n'est entrée en vigueur qu'au plus tôt à la date du décès (en pratique, il faudra une loi curiate fin 43 ou début 42 pour la valider) me paraît devoir plutôt être comparée à l'adoption testamentaire de Publius Cornelius Scipio Nasica (95-46, consul en 52) par Quintus Caecilius Metellus Pius (consul en 80 et grand pontife jusqu'à son décès en 43). Elle portait certes sur un jeune homme, un adulescens, mais celui-ci disposait alors pleinement de ses droits civiques et politiques.

C'est vraiment un point intéressant à creuser, à charge comme à décharge. Ce type de clause était-il introduit dans tous les testaments rédigés par des pères avant le 25ème anniversaire de leurs fils ou bien ne visait-il que le cas des fils mineurs plutôt que non émancipés ?

J'ai tendance à pencher pour la 2ème hypothèse.

Dans le cas précis de César et Octavien, je crois plutôt que c'était une clause de précaution dans l'hypothèse où César aurait eu sur le tard un enfant de son épouse Calpurnia, laquelle en 45 devait avoir entre 29 et 32 ans maximum (cf. épousée en 59 et fille d'un homme né vers 101).


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 Sujet du message : Re: La succession d'Auguste
Message Publié : 08 Mars 2010 19:08 
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Philippe de Commines
Philippe de Commines

Inscription : 17 Mars 2004 23:16
Message(s) : 1659
Aigle a écrit :
Auguste est considéré par l'historiographie moderne comme le fondateur de l'empire et donc comme le premier empereur.

Or tel n'est exactement le point de vue antique :
- Suétone a commencé son recueil de biographies par le vie du divin Jules, vu implicitement comme le fandeteur de la dynastie
- Tacite commence ses annales avec l'avènement de Tibère à la mort d'Auguste.

Pour ma part, je serais assez favorable à une vision atypique faisant d'Auguste le dernier des "imperatores" républicains : un chef charismatique et brutal sur le modèle de César, Sylla, Marius, Cinna ...même s'il n'était pas un grand chef militaire, il est arrivé au pouvoir par la guerre civile et s'y est maintenu sous les apparences de la République.

En revanche, Tibère est arrivé au pouvoir par la double légitimité de l'hérédité (ou plus exactement de l'adoption) et de la ratification (libre en apparence) du sénat. Il définit un modèle qui sera à peu près suivi jusqu'au IIIè siècle. Les questions délicates sous Auguste des bases juridiques de son pouvoir semblent effacées - il me semble que tous les pouvoirs civils, militaires et religieux d'Auguste lui furent conférés en bloc et sans débat.

Qu'en pensez vous ?


En fait, on peut répondre par oui comme par non à votre question.

Il y a dans Auguste les 2 sources d'arrivée au sommet du pouvoir.

Certes, il y a incontestablement la dimension conquête du pouvoir par un individu remarquablement intelligent et implacable, fauteur de guerre civile, qui a recours à tous les moyens pour atteindre un pouvoir monarchique à un âge jeune et complètement contraire aux valeurs de la république romaine.

Mais rien de tout cela, absolument rien selon moi, n'aurait été possible si Octave n'avait pas été le fils adoptif de César. Pendant les 15 premières années de sa carrière politique, le principal atout politique, le principal message politique d'Octavien, c'est "je suis le jeune César" et "je suis le fils du divin César". Pour une raison évidente, à savoir que, ce faisant, il héritait de la magie du nom, d'une large partie (à défaut de la totalité) des clientèles et du capital de sympathie et de fidélité acquis par César auprès des vétérans.

Le simple fils de Caius Octavius, chevalier né à Velitrae, préteur en 61, n'aurait jamais pu faire une telle carrière ni même nourrir la moitié du vingtième d'une telle ambition. Il aurait été au mieux consul au plus tôt à l'âge légal.

Même maquillées par les soin de ses affidés, les sources montrent que, des 3 triumvirs, c'est le jeune Octavien qui était le plus implacable, voire le plus cruel. Il a largement martyrisé l'Italie pendant une décennie avant de faire valider son opération de propagande anti-antonienne par la victoire militaire.

Et ensuite, une fois seul maître à bord, il a fait comme s'il n'avait plus grand chose à voir avec le jeune Octavien, jouant le rôle de pseudo-restaurateur d'une république qu'il avait pourtant plus que quiconque contribué à achever et à enterrer.


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