Klodion a écrit :
Par contre, et pour revenir au thème principal, le fait qu´ils aient fait le tour de l´Afrique me parait tout à fait possible et très interressant. J´aimerais bien avoir d´autres sources sur cette expédition.
Malheureusement, le texte de Hérodote (IV.42) donné par Antinéa plus haut est notre seule et unique source. Posidonios, cité par Strabon II.3.4, ne connaît ce récit que par l’intermédiaire d’Hérodote (il fait d’ailleurs l’amalgame avec un autre voyage, celui d’un Perse, conté par Hérodote par la suite).
Strabon II.3.4:
3.4. Au sujet maintenant des prétendus voyages exécutés naguère autour de la Libye, voici ce qu'on peut reprocher à Posidonius : après avoir rappelé qu'Hérodote croyait à une circumnavigation de ce genre accomplie par certains émissaires de Darius [comprendre Nechao], et qu'Héraclide du Pont, dans un de ses Dialogues, introduisait à la cour de Gélon un mage qui prétendait avoir fait le même voyage, il a soin d'ajouter que ces traditions ne lui paraissent pas suffisamment avérées;Quant à Polybe, il n’est même pas tout à fait sûr qu’il fasse référence à cette expédition-ci, c’est surtout à Pythéas qu’il s’en prend.
Polybe III.38 :
Personne, jusqu'à nos jours, n'a encore pu dire d'une manière certaine si la région où se rejoignent l'Asie et l'Afrique (c'est en Éthiopie que se trouve ce point de jonction) constitue un continent qui se prolonge vers le Midi ou si elle est entourée par la mer ; de même, les contrées qui s'étendent vers le Nord, entre le Tanaïs et la rivière de Narbonne, nous sont jusqu'ici complètement inconnues ; peut-être dans I'avenir, en multipliant nos recherches, en apprendrons-nous quelque chose ; mais on peut affirmer que ceux qui parlent ou écrivent à ce sujet le font à la légère, sans rien savoir, et ne débitent que des fables.Donc seul Hérodote a eu connaissance de ce voyage. Il faudrait s’interroger sur ses sources et le degré de confiance que l'on peut leur accorder, or ce sont les mêmes conteurs qui lui ont décrit les expéditions internationales de Sésostris jusqu’en Inde, en Thrace et au-delà, etc. Ces braves prêtres égyptiens ont un peu tendance à fantasmer.
Passons.
Quelles preuves apporte-t-il ?
«
entre autres, qu'en tournant autour de la Libye, ils avaient le soleil à leur droite. »
Qu’est-ce que ça veut dire ? la droite par rapport à quoi ? Fait-il référence au soleil levant, au couchant, au zénith ? Veut-il expliquer que le soleil levant, à gauche en « descendant » vers le Cap, est passé à droite lors de leur remonté vers Gibraltar ? La belle affaire ! C’est le cas pour quiconque contourne une île, on peut le déduire depuis Thèbes… Par contre, pas un mot sur les difficultés de la navigation, sur les régimes des vents, sur les populations rencontrées (étonnament absentes), le climat, le relief, etc.
Hérodote ne nous fournit donc pas d’arguments positifs.
Par contre, il nous indique leur façon de faire : chaque automne, ils touchent terre, ensemencent, et attendent la récolte pour repartir.
Et ça, cela me semble douteux : du fait de la variété des climats et des terres traversés, je doute que les mêmes grains puissent s’adapter et prospérer partout.
Je rejoins pour ma part les opinions de Posidonios et de Polybe : cette tradition n’est pas suffisamment avérée, et ressemble à une fable concoctée à la gloire de Pharaon en fonction des connaissances théoriques de l’époque.
Mais a contrario, il sera tout aussi difficile de démontrer la fraude, puisque qu’il ne donne aucun détail qui puisse le mettre en tort.