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Message Publié : 21 Juin 2008 16:58 
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Jean Froissart
Jean Froissart
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A t-on gardé des témoignages de généraux carthaginois comme Hannibal sur les gaulois ?

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"L'histoire me sera favorable car j'ai l'intention de l'écrire". Winston Churchill.


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Message Publié : 23 Juin 2008 6:32 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

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Pas de témoignages directe, mais les chroniqueurs grecs qui accompagnaient Hannibal ont notés certains traits, transmis par les intermédiaires romains la plupart du temps... Bref, difficile de retrouver la part autentiquemen punique dans ces jugements.

A vue de nez, je n'ai pas l'impression que le portrait soit très flatteur, en particulier de la part d'Hannibal. Ses Gaulois sont dépeints comme brave mais peu endurants (cf. la traversée des marais étrusques), en gros, hâbleurs ou "grandes gueules"; mais surtout, Hannibal a été très déçu par la division des Gaulois de Cisalpine et leur versatilité, surtout après les promesses mirobolantes des Boïens. Parmi les anecdotes peut-être révélatrices, si véridiques: craignant à tout moment une trahison voire un assassinat de la part de ses bien peu fiables alliés, il aurait pris l'habitude de changer de vêtements et de perruques plusieurs fois par jour pour échapper à ses grognards gaulois ! lol Par ailleurs, il devait garder à l'esprit la mort de son oncle Hasdrubal, dont une des versions de la mort (dans Diodore, sans doute d'origine grecque et peut-être plus fiable que les légendes romantiques romaines popularisées par Fabius) en fait la victime d'un Gaulois (Polybe accuse un officier anonyme; s'agit-il de la même version ? un mercenaire ?).


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Message Publié : 12 Sep 2008 10:39 
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Plutarque
Plutarque

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Petit rectificatif : Hasdrubal le Beau était le beau frère d'Hannibal Barca (mari de sa soeur ainée)


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Message Publié : 05 Oct 2008 0:45 
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Jean Froissart
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Précisons quand même qu'à la bataille de Cannes, les ailes de l'armée d'Hannibal sont constituées de troupes gauloises et ibères. Ce sont ces ailes qui vont se refermer sur l'infanterie manipulaire et consommer la catastrophe pour les légions.

Tout celà pour dire que les gaulois, pas terribles peut-être, mais bien utiles malgré tout !

;)

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"Notre époque, qui est celle des grands reniements idéologiques, est aussi pour les historiens celle des révisions minutieuses et de l'introduction de la nuance en toutes choses".

Yves Modéran


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Message Publié : 14 Oct 2008 12:13 
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Plutarque
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Les Gaulois, dont Hannibal se méfiaient pour leur indiscipline et leur versatilité, servaient surtout de troupes de choc destinées à contenir les centres ennemis. A Cannes, plus qu'ailleurs, les Gaulois ont servi de "murs" pour encaisser le choc du centre romain : c'est la raison pour laquelle les Gaulois sont les plus nbreux parmi les qqs 6000 morts de l'armée punique lors de cette bataille


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Message Publié : 14 Oct 2008 20:19 
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Polybe
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Localisation : Sur une petite planète peuplés d'individus à la mémoire courte du passé
D'autre part, en effet, outre le fait que les Gaulois servent de première ligne dans une bataille, ils sont aussi au milieu de la ligne. Hannibal lui-même ne leur fait pas confiance, surtout dans la seconde partie de la seconde guerre punique...

Il en usait et abusait des guerriers gaulois. Et c'est justement à cause de cela, que les tribus cisalpines vont peu à peu se tourner vers Rome qui semblait garantir leur existence en échange d'une perte de liberté... Si les gaulois en sont arrivé à cette extrémité, eux qui sont si attachés à la liberté et à l'honneur, c'est que leurs territoires ont été ravagés par la guerre, et les forces vives épuisées par cette guerre, dont l'origine n'a rien à voir avec les celtes...

Ainsi, on peut dire que les Carthaginois, comme la plupart des peuples de la méditerranée, ont une mauvaise image des celtes : courageux guerriers, mais versatiles. Image forgée lors de la révolte des mercenaires celtes au lendemain de la première guerre punique.

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L'impossible est une vision de l'esprit

Il n'existe pas une histoire, mais des histoires qui font l'Histoire.


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Message Publié : 14 Oct 2008 22:17 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

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Maharbal a écrit :
Petit rectificatif : Hasdrubal le Beau était le beau frère d'Hannibal Barca (mari de sa soeur ainée)

:oops: :oops: Je sais pas pourquoi je le qualifie d'oncle, je le sais pourtant... Du fait de son âge peut-être... Je crois que j'ai fait le même lapsus à plusieurs reprises déjà sur ce cite...

Cernach a écrit :
Image forgée lors de la révolte des mercenaires celtes au lendemain de la première guerre punique.

Leur réputation peut être antérieure. Certes les 2000 Gaulois d’Autaritos ont joué un rôle non négligeable dans la révolte, mais il tient plus aux qualités propres à leur chef, en particulier le fait qu’il soit polyglotte, qu’à leur propre valeur ou leur nombre, restreint. Ils employaient les Celtes depuis plus de deux siècles déjà, sans anecdotes conservées, même si les révoltes de mercenaires sont monnaies courantes et ils ont dû y contribuer (cf. l’île des ossements de Diodore). Par contre, déjà au cours de la Première, Polybe nous conte à plusieurs reprises les tentatives de trahison de Gaulois (à Acragas, à Eryx), en particulier les aventures de la bande sans foi ni loi, qui après avoir trahis les Carthaginois, après avoir exaspéré les Romains par leurs rapines, finirent embauchés en Epire… où ils livrèrent la ville dont ils avaient la garde aux pirates illyriens !

Cernach a écrit :
cette guerre [la seconde guerre punique], dont l'origine n'a rien à voir avec les celtes...

Absolument pas d’accord. La révolte des Boïens est antérieure à l’invasion carthaginoise, qu’elle encourage et provoque. J’avais déjà tenté de développé mon point de vue ici ici (un hors sujet déplacé, sans lien avec ce qui précède :oops: ). Il me semble que les Boïens ont eu un rôle primordiale dans le choix d’Hannibal de porter la guerre en Italie, prenant le très gros risque de combattre loin de ses bases de ravitaillement, alors que la saison est déjà très avancé, sur la foi des promesses gauloises mirobolantes, laissant en plan une conquête de l’Espagne au nord de l’Ebre à peine entamée, en particulier sans contrôler la côte (Emporion, Tarragone), précipitation qui aura des conséquences gravissimes à long terme. Sans leur insistance et leurs promesses, la guerre aurait eu un tout autre visage.
Toujours est-il qu’il me semble évident que ce sont bien les Boïens (et les Massaliotes) qui sont à l’origine de l’escalade du conflit.

Cernach a écrit :
Si les gaulois en sont arrivé à cette extrémité, eux qui sont si attachés à la liberté et à l'honneur, c'est que leurs territoires ont été ravagés par la guerre.

Pas du fait d’Hannibal. Très déçu par les hésitations gauloises (une partie reste neutre, une partie rejoint clairement le camp romain comme les Cénomans et les Vénètes, ou accessoirement les Taurini en lutte contre les Insubres, tandis que ses alliés supposés, les Insubres justement, se font tirer l’oreille pour participer activement à la lutte et pour le ravitailler), Hannibal ne passe que quelques mois en Cisalpine, l’hiver 218/217. Dès le dégel au printemps suivant, il a compris que sa base arrière n’a pas la solidité qu’il espérait, et il renonce plus ou moins à la carte gauloise pour tenter de rallier le reste de l’Italie à sa cause, avec plus ou moins de succès. En tout cas, le Carthaginois peut difficilement être tenu pour responsable des dépravations ; au contraire, il a fait le maximum pour soulager son allié, préférant vivre sur l’ennemi que d’être un poids pour les Gaulois (tout en comprenant qu’il n’avait pas trop le choix, s’il ne voulait pas qu’ils se retournent rapidement contre lui ; c’est pendant ce premier hiver me semble-t-il qu’à lieu l’anecdote des perruques…).

Cernach a écrit :
les Gaulois servent de première ligne dans une bataille, ils sont aussi au milieu de la ligne. […] Il en usait et abusait des guerriers gaulois.

Ce n’est pas systématique. Bien sûr, on songe tout de suite à Cannes, où ils doivent absorber le choc (en compagnie des 6-8000 Ibères cependant, ne les oublions pas). Mais à la Trébie, lorsque Hannibal fait connaissance à la fois avec les légions romaine et avec ses alliés Gaulois, le centre est classique, tenu par les Africains, certes épaulés par les Gaulois (mais où les mettre ?), et ils subiront de lourdes pertes. A Trasimène, les Africains et les Espagnols reçoivent la mission de confiance : bloquer l’attaque romaine. Ce sont eux qui subissent l’assaut romain de front ; les Gaulois sont chargés de les envelopper et de réduire les poches de résistance. Mais jusque là, les combats les plus violents se livrent de front. Encore une fois, les pertes africaines et ibères seront très lourdes. Aussi, je ne pense pas qu’on puisse reprocher à Hannibal de se servir des Gaulois comme chair à glaive : les missions délicates sont toujours confiées aux vétérans, et les Gaulois sont simplement employés là où ils seront le plus efficace, dans la limite de leur possibilité : n’oublions pas qu’ils ne parlent pas le punique, qu’ils obéissent à leurs propres roitelets, etc. ; Hannibal ne pourrait leur confier le rôle des Libyens à Cannes, ils seraient incapable d’une telle coordination. Bref, il économise ses vétérans, mais ne sacrifie pas les Gaulois, nuance. Quant aux autres généraux carthaginois (Hasdrubal, Magon, puis Hamilcar après la paix), ils ne semble pas donner un rôle particulier à leurs Celtes. Mais eux-mêmes ne disposent plus non plus de vétérans…

Cernach a écrit :
Hannibal lui-même ne leur fait pas confiance, surtout dans la seconde partie de la seconde guerre punique...

Il se méfie de leurs divisions, de leur indécision politique. Mais au final, de 218 à 201, ni les uns ni les autres n’ont à se plaindre de leur allié. Certes, les troupes gauloises d’Hannibal vont très vite fondre comme neige au soleil après Cannes. Mais ils ont aussi leur propre guerre à livrer en Cisalpine, ils ne peuvent se permettre d’abandonner 20 000 fantassins et 6000 cavaliers à leur alliés ad vitam eternam : eux-même en ont besoin. Pendant tout la guerre, 4 légions sont concentrées à la frontière nord, 40 000 hommes. De plus à chaque passage (Hasdrubal, Magon, Hamilcar), les Carthaginois trouveront chez les Gaulois des alliés motivés, qui les rallient en masse en très peu de temps. A l’inverse, ces généraux puniques de passage ne sont pas une charge pour les Gaulois, ou peu de temps, et Hannibal soulage grandement la guerre gauloise en monopolisant le gros et le meilleurs des troupes romaines (en général, les recrues sont envoyées au nord, et après un an ou deux, sont renvoyées dans le sud face à Hannibal). Il n’y a pas vraiment de rupture ou de manque de confiance ; une fois passé la douche froide de la déception à l’arrivée, le Punique se fait une raison, et s’adapte, en faisant son possible pour soulager ses alliés militairement et économiquement. Chacun fera sa guerre dans son coin, avec quelques opérations communes si l'occasion se présente (arrivée d'une armée punique), mais leurs objectifs diffèrent trop pour permettre une plus grande coopération: les uns pratiquent une guerre défensive, les autres mènent l'offensive.

Cernach a écrit :
les tribus cisalpines vont peu à peu se tourner vers Rome qui semblait garantir leur existence en échange d'une perte de liberté...

Vraiment peu à peu alors… Les premiers affrontement en Cisalpine commencent bien avant l’intervention punique, et se poursuivront encore longtemps après. Et tous n’accepteront pas la domination romaine : les farouches Boïens abandonneront l’Italie aux Romains, s’exilant en masse pour s’installer en Bohême (avant, bien des années plus tard, de retrouver les Romains en Gaule, lors de la défaite des Helvètes qu'ils accompagnent).


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Message Publié : 15 Oct 2008 6:31 
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Pierre de L'Estoile
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Thersite a écrit :
Et tous n’accepteront pas la domination romaine : les farouches Boïens abandonneront l’Italie aux Romains, s’exilant en masse pour s’installer en Bohême (avant, bien des années plus tard, de retrouver les Romains en Gaule, lors de la défaite des Helvètes qu'ils accompagnent).

Hum... J'ai eu un doute pendant la nuit: cette remarque est à oublier. Certes, les sources ne mentionnent les Boïens de Bohème que bien après la défaite des Boïens d'Italie, mais rien ne me permet de supposer une migration d'origine italienne, le sources se taisent à ce sujet. Donc, non, des cousins sans doute, mais les Cisalpins se sont soumis comme les autres.
Désolé :oops:


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Message Publié : 15 Oct 2008 10:12 
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Polybe
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Localisation : Sur une petite planète peuplés d'individus à la mémoire courte du passé
En effet, les Boïens venaient de la Bohème ou des environs, mais, s'ils s'y sont retournés, on ne le sait pas vraiment. On sait juste qu'une partie de la population cispalpine a émigré vers le nord.

Mais, je tiens à remarquer qu'à la fin, la volonté des celtes s'est rapidement émousée. D'une part, par les ravages des légions, mais d'autre part, les ponctions faites par les Carthaginois. Je sais bien que les autres généraux carthaginois ont eu souvent un bon accueil. Mais, le fait est qu'Hannibal n'a su aller au delà des préjugés qu'il avait. Il les prennait pour des vantards peu dignes de confiance, tout juste à user et abuser. Sa décision d'aller en Campanie prouve justement qu'il leur faisait peu confiance. Je ne pense pas que c'est dans un souci d'épargner les populations celtes.

Hannibal préférait faire confiance à ceux qu'il connaîssait bien : les Grecs qui peuplaient la Campanie...

Les Gaulois le percevaient sûrement. Mais, la division des tribus le montre bien, les Cisalpins ne faisaient peu confiance aux Carthaginois, les utilisant pour espérer de faire affaiblir la pression romaine.

Le réel problème de cette période, c'est que les civilisations du nord de la Méditerrannée sont perçues comme des attardés, tout juste bons à manier l'epée. Ceci est une constante dans toute la période antique.

Néanmoins, ceci n'est pas à généraliser, car certains ont su aller au delà des préjugés.

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Message Publié : 15 Oct 2008 13:21 
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Pierre de L'Estoile
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Cernach a écrit :
En effet, les Boïens venaient de la Bohème ou des environs, mais, s'ils s'y sont retournés, on ne le sait pas vraiment. On sait juste qu'une partie de la population cispalpine a émigré vers le nord.

J’ai douté de mon doute en matinée ;) , et ai donc procédé à un recensement un peu plus exhaustif des textes. Strabon signale bien que les Boïens du Danube, victimes des Daces, sont les descendant des émigrés Boïens chassés par les Romains. Mais j’ai des soupçons; quand aurait eu lieu cette émigration massive ? Les décades de Tite-Live sont muettes, pourtant, si elle eu lieu, elle ne dût pas être très postérieure à leur soumission de 191, assortie de la confiscation de la moitié du territoire qui leur restait encore. De même, Polybe n’y fait pas la moindre allusion, alors que les occasions sont nombreuses, en particulier dans le livre II, où il insiste sur leur caractère farouche et hostile aux Romains. Mais il n’indique pas l’épilogue supposé de la migration, qui aurait eu pourtant du panache. Bref, mis à part Strabon, quelqu’un a autre chose ? A défaut, m’est avis qu’il se goure, trompé par l’homonymie. Ceci dit, cela mériterait peut-être un fil qui leur soit dédié...

Cernach a écrit :
Mais, le fait est qu'Hannibal n'a su aller au delà des préjugés qu'il avait. Il les prenait pour des vantards peu dignes de confiance, tout juste à user et abuser. Sa décision d'aller en Campanie prouve justement qu'il leur faisait peu confiance. Je ne pense pas que c'est dans un souci d'épargner les populations celtes.

C’est très excessif comme jugement. D’accord, en arrivant en Gaule, Hannibal s’attendait à bénéficier de la plus riche région d’Italie, la plaine du Pô, entièrement ralliée à sa cause, d’où il pouvait tirer son ravitaillement, des renforts, voire même faire venir des alliés gaulois d’au-delà des Alpes comme en 225. A partir de là, il pouvait espérer mener une guerre traditionnelle, avec de lourds coups de boutoir à chaque printemps puis hivernage pépère avec certitude d’être ravitaillé. Il a vite désenchanté, puisqu’il ne contrôlait même pas la moitié de la plaine, avec les Cénomans et les Vénètes agressifs à l’est, les Ligures attentistes au sud et à l’ouest, et le territoire Boïens menacé par les récentes colonies romaines, les Insubres hésitant (au moins jusqu’à ce que les Romains soit chassés de l’autre côté du Pô, donc après le Tessin). De plus, le peu qu’il reste est ravagé pratiquement chaque année par des campagnes romaines. L’évidence saute aux yeux de tous : les Gaulois, en dépit de la bonne volonté des Boïens (indéniable), sont incapables de soutenir économiquement 26 000 hommes, en sus des leurs et des 2, puis 3, puis 5 légions romaines. Hannibal se livre immédiatement à des expédients pour soulager ses alliés : assaut de l’oppidum des Taurini (à la fois pour se ravitailler, pour convaincre les hésitants, et pour plaire aux Insubres, tièdes) ; prise de Clastidium (avec Dasius de Brindes, qui éclaire aussi Hannibal sur le potentiel de ralliement de l’Italie du Sud, négligée jusque-là), pillage du territoire y compris celui des alliés à la veille de la Trébie), réduction des portions alimentaires destinées aux prisonniers romains, libération sans condition des alliés... La victoire de la Trébie lui assure enfin le soutien inconditionnel des Insubres et de leurs alliés : il était temps ! Mais cela reste insuffisant, et contrairement aux habitudes, en dépit du climat rigoureux, Hannibal doit poursuivre ses opérations en plein hiver (Victumulae).

D’où son impatience à partir au plus vite (« dès les premiers signes encore indécis du retour du printemps »), quitte à y perdre ses éléphants, pour rejoindre les Boïens, ses employeurs, qui l’accueillent certes chaleureusement… mais sont tout aussi incapables de tenir leur promesse. « Les Gaulois étaient mécontents parce que les opérations se déroulaient sur leur territoire » III.78.

Il faut peut-être se rappeler un précédent : en 237, une armée de transalpins rejoins les Boïens ; pour une raison non précisée, sans doute déjà le manque de ravitaillement, l’armée de Celtique se soulève contre ses rois Atis et Galatos qui se font étriper, et l’affaire fini en bain de sang, les mercenaires se font massacrer par leurs propres employeurs Boïens. Le mécontentement des deux armées ne doit donc pas être pris à la légère.

Aussi, Hannibal et les Gaulois prennent en commun la décision de porter la guerre en Italie. Il ne s’agit pas d’un abandon par le Carthaginois de la cause de ses alliés, mais d’une faveur et d’un choix tactique concerté. Quand au soi-disant manque de confiance des Gaulois envers les Carthaginois, il est largement démentie par les faits : outre l’accueil enthousiaste de tous les généraux carthaginois de passage, il suffit de jeter un coup d’œil à l’armée d’Hannibal à Cannes : le Punique dispose de sa propre armée, soit 20 000 fantassins et 6 000 cavaliers (auxquels il faut retrancher les pertes depuis l’arrivée en Italie) ; ses alliés gaulois se montent à plus de 20 000 fantassins et 4000 cavaliers, soit à peu près la moitié du potentiel militaire de ces peuples (qui n’alignent jamais plus de 50 000 homme). C’est une erreur de les considérer comme des mercenaires au service d’Hannibal : ils combattent à titre d’alliés (contrairement à la première Guerre Punique par exemple). On pourrait même dire que c’est l’inverse : ce sont bel et bien les Boïens qui se sont offerts les services d’un condotière et de ses 25 000 mercenaires, comme ils s’étaient offerts en 237 l’armée d’Atis et Galatos, ou en 225 les 20 000 Gaesates. Par conséquent, l’effort militaire Gaulois reste très important, en se rappelant qu’ils doivent au même moment faire face aux incursions des Cénomans, et que lorsque tous les regards se portent sur Cannes, les Boïens annihilent deux légions romaines, soit 20 000 hommes, au cœur de leur territoire, dans la forêt Litana. Pendant plus de deux ans, les Celtes accompagnent le Carthaginois de leur plein gré ; ils ne « l’abandonneront » qu’après Cannes, c’est à dire lorsque Hannibal bénéficiera enfin d’autres renforts, à savoir les Campaniens, les Bruttiens et autres Italiens méridionaux, ainsi que quelques renforts carthaginois. Leur présence n’est plus nécessaire, et ils disparaissent à peu près des annales, autrement dit, ils rentrent chez eux poursuivre la lutte sur leurs terres. Rien ne permet de supposer que ce retour s’est fait sans l’accord d’Hannibal, ou qu’à un moment où à un autre les relations entre Boïens et Carthaginois se soient détériorées, au contraire ; alors que Hannibal aurait pu être vexé ou ulcéré après ses désillusions en dépit des risques qu’il avait pris, il su prendre sur lui et s'adapter, poursuivant une coopération efficace pour les deux protagonistes de l’alliance. Même s’il est vrai qu’il n’a pas vraiment le choix, et eux non plus…
Cette coopération se poursuivit même après la guerre, puisque les irréductibles de l’armée punique poursuivirent la lutte au sein des armées gauloises pendant quelques temps encore.

Cernach a écrit :
Hannibal préférait faire confiance à ceux qu'il connaîssait bien : les Grecs qui peuplaient la Campanie...

Les Campaniens ne sont pas Grecs… et les quelques cités grecques de Campanie, comme Cumes, ou Naples, furent de farouches partisans des Romains : c’est sous leurs murs qu’Hannibal subit ses premières rebuffades sanglantes. D’ailleurs, le ralliement des Grecs fut encore plus cahotique que celui des Gaulois. D’accord pour Syracuse, Tarente ou Locres. A contrario… d’autres comme Crotone, Naples, Cumes, ou Rhégium, les villes de Sicile, se sont fait remarquer par leur fidélité inconditionnelle ! D’autres enfin comme Thurium tournent leur veste en fonction des évènements…
En fait, les grands alliés d’Hannibal se révèlent être encore une fois les peuples sabelliens (Bruttiens, Campaniens, Apuliens, Samnites), comme lors des guerres samnites, comme lors de l’expédition de Pyrrhus, les Grecs se faisant surtout remarquer par leurs divisions (pour changer lol ).


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Message Publié : 16 Oct 2008 6:23 
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Polybe
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Je vois. ainsi, j'ai mis à profit de vos informations pour mettre à jour mes archives. Je vous remercie.

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