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 Sujet du message : Re: Sicanes et Sicules
Message Publié : 27 Déc 2009 20:55 
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Jean Froissart
Jean Froissart

Inscription : 08 Déc 2009 18:21
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Je cite donc ici le livre de Frétigné que je viens d'avoir. Voici en gros ce qu'il dit :
-selon les fouilles archéologiques de Luigi Bernabo Brea, deux aires culturelles sont distinctes entre 850 et 750 avant la colonisation gracque avant de s'atténuer et de disparaître : celles des Sicanes au centre et Sud et celles des Sicules à l'est.
-malgré la divergence des textes, ils s'accordent sur trois points : l'origine italique des Sicules, la superposition de leur culture sur celles des Sicanes et enfin la présence des Sicanes dans le centre et l'est.
-liens affirmés entre Achéens et Sicanes selon l'archéologie, sans que la Sicanie-Sicile ne bénéficie d'un appareil étatique formée.
-Possibilité (là tout est au conditionnel) que les Sicules se soient installés au moment de l'effondrement du monde mycénien. preuves archéologique dans ce sens. la disparition de village non-fortifié sur la côte et apparition de forteresse défensive dans le centre de l'île.

Quant aux Elymes, voici les hypothèses :
-la tradition antique la plus marquante en fait des descendants de troyens, ce qui a conduit les romains en ce souvenir à donner l'immunitas aux habitants de Ségeste.
-autre tradtion moins célèbre celle d'Hellanicos de Lesbos (480-395) : Elymes peuple italique ayant débarqué quelques années avant les Sicules. Nouvelles découvertes de Ségeste peut éclairer d'un jour nouveau cette théorie.
-Hypothèse autre : les Elymes sont ddes Sicanes qui se sont autonomisés sous l'influence des Carthaginois.

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 Sujet du message : Re: Sicanes et Sicules
Message Publié : 27 Déc 2009 21:47 
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Polybe
Polybe

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THERSITE : les preuves crétoises sont les restes découverts lors de fouilles et datant de la fin de l'âge du bronze.
Ces restes sont d'origine du bassin oriental de Méditerranée : mycénien, crétois, égéen sont trois origines possibles.


Sur la Sicile, il y a le spécialiste français Georges VALLET qui a écrit plein de bouquins dessus.


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 Sujet du message : Re: Sicanes et Sicules
Message Publié : 27 Déc 2009 23:46 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 11 Juin 2007 19:48
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Merci de nous tenir au courant Polycarpe et de donner suite.
J’ai eu ce livre entre les mains très rapidement en librairie il y a quelques jours, j’avais jeté un rapide coup d’œil. Il résume visiblement des synthèses incomprises… Ainsi il nous invente des Sicules chassés d’Italie par les Celtes… Il met en relation l’origine ibère des Sicanes rapportée par Thucydide avec les Ibères du Caucase… Il y avait encore deux trois autres remarques assez abracadabrantes que j’ai oublié qui m’avaient poussées à le reposer très vite. Sur ce sujet précis, je ne lui accorde pas grand crédit, il a bâclé son travail.

Polycarpe a écrit :
liens affirmés entre Achéens et Sicanes selon l'archéologie,

A quoi fait-il référence exactement ? A quelle date ? Alors qu’il ne date pas l’apparition des Sicanes me semble-t-il. A quoi correspondent ces liens ? Une filiation (nouvel ersatz du mythe des peuples de la mer) ou juste des contacts commerciaux plus ou moins denses, comme pour les Minoens d'Apprenti ?
D’ailleurs, fait-il référence aux Achéens homériques = Mycéniens ou simplement aux cités achéennes d’Italie du Sud, si puissantes au VIIe-VIe ?

Polycarpe a écrit :
Possibilité (là tout est au conditionnel) que les Sicules se soient installés au moment de l'effondrement du monde mycénien.

Ce qui rejoindrait certaines chronologies antiques qui les placent dans les environs de la chute de Troie (plutôt avant d’ailleurs). Par contre, il n’y a aucun lien entre l’effondrement mycénien en Hellade et l’invasion sicèle en Sicile ! Quel intérêt de mettre en relation des évènements si distants et dissemblables ? A moins que cela fait référence aux « liens entre Achéens et Sicanes » que tu mentionnais ? Il établirait ainsi une causalité directe entre affaiblissement mycénien provoquant un affaiblissement sicane ?? Bizarre.

Citer :
la tradition antique la plus marquante en fait des descendants de troyens, ce qui a conduit les romains en ce souvenir à donner l'immunitas aux habitants de Ségeste.

Cette tradition n’est pas forcément la plus ancienne, et a pu se développer en même temps que les autres (les innombrables !) colonisations troyennes mythiques en Occident. Je ne sais pas s’il existe une étude, chronologique en particulier, de cette colonisation mythique. Ce serait intéressant.
Toujours est-il, les Elymes sont intégrés tôt aux cycles des travaux d’Héraclès, et peut-être des Argonautes, antérieurs à la chute de Troie, où ils apparaissent déjà comme une entité politique avec leur roi Eryx, fils de Boutès et d’Aphrodite, ou bien de Poséidon, tué par Héraclès. Ce mythe justifiera la colonisation de Dorieus à la fin du VIe, qu’il préfigure (les Héraclides succédant à Héraclès… avec un succès diamétralement opposé !). Il n’est là nulle part question de Troyens, ces traditions ne sont pas compatibles, par contre le mythe sera déjà populaire au Ve.
A remarquer aussi que Thucydide (VI.2) fait une obscure allusion à une participation phocidienne, dans le cadre des Retours. Je n’ai pas trouvé jusqu’à présent d’autres allusions à cette légende, et n’ai pas la moindre idée de l’interprétation à en faire (mais je n’ai pas eu beaucoup de temps pour creuser la question depuis la dernière fois).

Polycarpe a écrit :
autre tradtion moins célèbre celle d'Hellanicos de Lesbos (480-395) : Elymes peuple italique ayant débarqué quelques années avant les Sicules. Nouvelles découvertes de Ségeste peut éclairer d'un jour nouveau cette théorie.

Comme je l’avais déjà signalé, Antiochos reprend exactement le même schéma (un peuple italien chassé par les Oinotriens, c’est-à-dire de Campanie) mais en fait des Morgètes conduits par Sicélos (originaire d’une certaine cité nommée… Rome et réfugié auprès de Morgès, roi et éponyme des Morgètes), amalgamant ainsi les deux invasions contemporaines d’Hellanicos. Le Lesbien au contraire faisait des Sicèles un peuple chassé de Calabre par les Iapyges. Ces traditions contradictoires sont un joyeux boxon !
J’aimerai bien en savoir davantage sur ces « nouvelles découvertes de Ségeste ».

Polycarpe a écrit :
les Elymes sont ddes Sicanes qui se sont autonomisés sous l'influence des Carthaginois.

Cette hypothèse me semble assez séduisante, d’autant que les traditions relient les uns aux autres. Même dans les légendes troyennes, les réfugiés troyens sont accueillis par les Sicanes. Contrairement à ces derniers, complètement divisés et en lutte les uns contre les autres, les Elymes sont structurés autour d’un centre urbain dominant, Egeste, et autour d’un sanctuaire majeur, Eryx. Par contre, je crois qu’il faut relativiser l’influence carthaginoise, car les Elymes sont structurés bien avant l’intervention carthaginoise en Sicile (balbutiante lors de la colonisation de Dorieus ; les cités phéniciennes sont alors encore indépendantes et s’appuient sur l’alliance élyme avant de se jeter dans les bras de Carthage à l'issue de la crise). Egeste et les Elymes bénéficient surtout, culturellement, d’une très forte et précoce hellénisation, achevée au Ve où Egeste a tout d’une cité grecque, théâtre compris. En fait, à la croisée entre les sphère punique (= Phéniciens d’Occident, pas uniquement Carthage) et grecque, les Elymes vont alterner les alliances, essentiellement pour se protéger des politiques agressives de ses voisins grecs immédiats et à l’occasion pour étendre son influence sur les cités sicanes des environs. Si influence étrangère il y a dans la création d’une entité politique élyme, j’accorderais la première place aux Grecs, et tout particulièrement à Sélinonte qui exerce une pression continue et jette les Elymes tantôt dans les bras des Puniques, tantôt dans ceux d’Athènes ou des cités grecques hostiles à Sélinonte.

APPRENTI a écrit :
les preuves crétoises sont les restes découverts lors de fouilles et datant de la fin de l'âge du bronze.
Ces restes sont d'origine du bassin oriental de Méditerranée : mycénien, crétois, égéen sont trois origines possibles.

Je connais au moins de réputation la présence de ces artefacts, en Sicile comme dans la moitié du bassin méditerranéen, mais leur présence ne justifie en aucune manière une colonisation minoenne. Bâtiments ? Tombes ? Non, tessons et produits de luxe. Et justement, la dispersion des origines atteste une origine commerciale, et non une colonisation disparue sans laissée de traces, ni historiques ni archéologiques (rappelons qu’à l’époque historique, il n’y a aucune cité crétoise sur l’île, alors qu’aucune destruction n’est envisagée…). Et en l’occurrence, je doute que Vallet affirme l’existence d’une colonisation crétoise en Sicile au XIIIe siècle. A défaut, ses arguments m’intéressent.
Je précise que quand je dis « Crétois » ici, je songe « Etéocrétois » ou Minoens ; les Crétois de Géla au VIIe par exemple sont Doriens.


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 Sujet du message : Re: Sicanes et Sicules
Message Publié : 27 Déc 2009 23:54 
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Polybe
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Thersite a écrit :
une origine commerciale, et non une colonisation disparue sans laissée de traces, ni historiques ni archéologiques

Ou une occupation très courte du genre un siège de 5 ans.
Et, parmi les objets retrouvés figurent des épées ; pratiques pour un siège.


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 Sujet du message : Re: Sicanes et Sicules
Message Publié : 28 Déc 2009 0:14 
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Pierre de L'Estoile
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 Sujet du message : Re: Sicanes et Sicules
Message Publié : 28 Déc 2009 20:07 
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Jean Froissart
Jean Froissart

Inscription : 08 Déc 2009 18:21
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Bon, bon Thersite, long commentaire appelle à longue réponse !
pour la question générale sur la thématique de la Sicile originelle, pour avoir lu ces chapitres dans l'ensemble, il ne sont certes pas précis. Comment le pourrait-on dans l'approche d'une histoire générale ? Enfin il est certain que le manque de donées précises quant aux dates des fouilles, aux noms des archéologues peut s'avérer problématique. je donnerais la bibliographie offerte par l'ouvrage sur la période. Il est certain qu'il reprend les légendes, les remet en contexte et les commente. Je serais donc plus nuancé sur le terme "bâclé". Voilà mon opinion.

Ensuite question des liens Achéens-Sicanes : ces relations sont celles existant entre un centre l'Égée et une périphérie. Echange de nature économique et technique. Pas de filiation affirmée. Cette relation se verrait largement mythifiée au travers de la légende de Minos-Kokalos, puisuqe Kokalos est un terme de la langue mycénienne. Il parle ensuite d'Homère afin d'expliquer que si on ne peut se abser sur ce dernier pour avoir un réel regard historique et géographique comme nous l'entendons sur la Sicile de cette épouqe, c'est son épopée qui fait rentrer la Sicile dans l'histoire.
A l'établissement des Sicules, voici ce qui est dit plus précisément : L'apparition des Sicules en Sicile se fait au moment de la rupture des relations entre sicile et l'égée, et que mycènes tombe en déclin. Donc cela a eu des effets : fortification que jai déjà cité plus haut. Mais Frétigné, n'argue pas que c'est ce déclin qui a conduti à la conquête. Il montre juste la concomittance des faits.

Enfin il explique que els mythes de Kokalos comme celui d'Héraclès et de Géryon sont riches d'interprétation et qu'il ne faut pas les réduire à tel ou telle position. Lui particulièrement aborde ces légendes dans l'axe des mythes des influences de puissances. Kokalos est l'image du commerce avec les égéens, mycéniens ou crétois, et montre une certaine réticence de la part des peuples de sicile du moins dans un premier temps. Enfin Héraclès culte très répandu et un des premiers à s'installer en Sicile. La symbolique du grec colonisateur face à géryon, le dieu berger, le pâtre, dont la fonction va peu à peu varié au cours la colonisation grecque et géryon devient une divinité monstrueuse liée au monde des ténèbres, pour reprendre la formule de Frétigné.

Enfin moi j'ai une question (avant de donner la biblio), il parle des divinités sicules les frère Palice comme symbole du feu de l'Etna. Enfin ça je le dis de mémoire je ne retrouve plus le passage dans mon bouquin. Qu'en est-il et que fut l'influence de ce culte en SIcile ? Pour ce que j'ai lu il a servi pendant la révolte de Doukétios contre els colons grecs et enfin leur sanctuaire fut un refuge à esclave.

Bibliographie maintenant, je donne que les titres et auteurs si Thersite tu veux les références complètes tu me le dis je te les enverrais par mp:
-CHRISTEN (de) A., Italie, terre de création, de la parole à la création artistique, l'Italie et la Sicile grecques.
-Finley, Storia della Sicilia antica
-GABBA et VALLET, La Sicilia antica
-GRAS, la méditerranée archaïque
LEPORE Ettore, La Grande-Grèce: aspects et problèmes d'"une colonistation" ancienne.
Vidal-Naquet, Le monde d'homère
Will, Moss, Le Monde grec et l'orient

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 Sujet du message : Re: Sicanes et Sicules
Message Publié : 29 Déc 2009 12:15 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 11 Juin 2007 19:48
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Polycarpe a écrit :
Je serais donc plus nuancé sur le terme "bâclé".

Ce qui m’a choqué, c’est qu’il saupoudre son résumé des manuels de base, ce qui était son travail, de théories personnelles absurdes (des Celtes en Italie du Sud à la fin du IIe millénaire, faut oser... comme faire intervenir dans le prose de Thucydide des Ibères caucasiens inconnus des Grecs avant quatre siècle ! Et comme dit, il y en avait d’autres, mais je n’avais guère le loisir de les noter), elles n’apportaient strictement rien et dénotaient une connaissance plus que superficielle du sujet. La biblio que tu donnes est très bonne, ce sont des synthèses réputées, mais aucun article précis pour les étayer ?

Polycarpe a écrit :
Kokalos est un terme de la langue mycénienne. (...) Kokalos est l'image du commerce avec les égéens, mycéniens ou crétois, et montre une certaine réticence de la part des peuples de sicile du moins dans un premier temps.

Le fait que Kôkalos soit un terme mycénien m’intrigue. Je vais tâcher en janvier d’en apprendre plus. Par contre, d’une manière générale, je suis sceptique sur un point méthodologique : pourquoi diable croire que les aventures de héros mycéniens (Héraclès) ou minoens (Minos) sont des échos de mythes mycéniens ou minoens ? Les mythes sont les reflets de l’époque à laquelle ils sont rédigés, pas forcément de l’époque à laquelle ils sont sensé se dérouler. Et à ce titre, la guerre de Troie est un repère, la référence qui signale que l’on quitte l’histoire pour entrer dans le mythe. Entre les « Retours » et les premières fondations coloniales au VIIIe, il y a un trou béant. Toutes les aventures mythologiques se placent systématiquement au-delà de cette césure. C’est une astuce littéraire, pas un indice historique.
En l’occurrence, pour Cocalos, aucune trace à ma connaissance avant le Ve, ni dans Homère ou Hésiode ni dans les Lyriques. Aussi, en déduire une allusion à des relations commerciales, une réticence des Sicanes, une chronologie dans ces relations, etc. antérieurs au XIIIe me paraît bien fragile. Ce mythe me semble refléter les préoccupations des rédacteurs athéniens, prasiens et siciliens du Ve, pas celles des marchands mycéniens 10 ou 8 siècles avant.

Polycarpe a écrit :
La symbolique du grec colonisateur face à géryon

Mais Géryon n’est pas du tout une figure sicilienne ! Les péripéties du retour d’Héraclès sont d’ailleurs sans doute plus tardives que le mythe des travaux en soit, qui à l’origine n’a aucune base géographique. Lorsqu’il sera placé au cœur d’une géographie de la Méditerranée orientale, il sera relégué à l’extrémité ouest, vers le Détroit, et affirmera alors sa présence... dans toutes les zones coloniales grecques. Mais au VIIIe encore, rien de tel. Le mythe du retour est donc intrinsèquement lié, chronologiquement, à la colonisation, qu’il accompagne et justifie, pas forcément d’ailleurs de manière anticipée, au contraire. Bref, les étapes se mettent en place aux VIII-VIe (et se poursuivront d’ailleurs jusqu’à l’Empire). Encore une fois, rien à voir avec les Mycéniens me semble-t-il.

Polycarpe a écrit :
Il parle ensuite d'Homère afin d'expliquer que si on ne peut se abser sur ce dernier pour avoir un réel regard historique et géographique comme nous l'entendons sur la Sicile de cette épouqe, c'est son épopée qui fait rentrer la Sicile dans l'histoire.

Avant tout, peut-être un rappel : chez Homère, les Cyclopes et les Lestrygons ne sont pas du tout Siciliens, ils n’ont pas de géographie précise. Ce n’est que bien plus tard que les Grecs situeront ces mythes précisément en Sicile, et les enrichiront peu à peu d’un mythologie plus locale (Galatée et Polyphème par exemple).
Dans l’Odyssée donc, seules quatre mentions (1 fois la Sicanie, 3 fois la Sicélie), une fois au livre XX, 3 fois au livre XXIV.
En XX.383, Télémaque introduit dans le palais Ulysse, qui ne se fait pas reconnaître, se faisant passer pour un mendiant ; les Prétendants se moquent de lui et du voyageur qu’il accueille. L’un d’eux interpelle Télémaque et lui conseille narquois de vendre le mendiant aux Siciliens qui en donneraient un bon prix.
Au chant XXIV, le vers 389 semble une redondance du vers 211, même si le procédé est courant. Le vieux Laerte tout comme le vieux Dolios finissent leurs jours en compagnie d’une fidèle esclave sicilienne. Tous deux bénéficient d’« une vénérable Sicilienne qui prodiguait les soins les plus tendres » à l’un ou à l’autre (même formule). Enfin, en XXIV.302 lorsque Ulysse se présente devant son père qui ne le reconnaît pas, il se fait lui aussi passer pour un Sicilien, un Sicane d’Alybante, repoussé par la tempête sur les rivages d’Ithaque.
Il témoigne donc de relation commerciales réciproques poussées entre les îles de la mer Ionienne et la Sicile au VIIIe. Je dirais même que la Sicile constitue en XX.383 la référence commerciale de base pour les Ithaciens, étape sur la route qui mène à la Sicile via Corcyre et l’Italie du Sud. 3 fois, il est fait mention d’esclavage, mais concerne aussi bien des esclaves siciliens en Grèce que des esclaves grecs en Sicile, et les navires faisant la liaison sont une fois grec, une fois sicilien.

Polycarpe a écrit :
il parle des divinités sicules les frère Palice comme symbole du feu de l'Etna. (...) Qu'en est-il et que fut l'influence de ce culte en SIcile ? Pour ce que j'ai lu il a servi pendant la révolte de Doukétios contre els colons grecs et enfin leur sanctuaire fut un refuge à esclave.

Il existe quelques allusions à ce culte, mais les plus complets sont Diodore et l’excellent Macrobe.
Diodore XI.88-89 :
Quelque temps après, Doucétios, chef des Sicèles, réunit en un seul Etat toutes les villes de même origine, excepté Hybla. Doué d'un esprit actif, il entreprit de nouveaux travaux : il tira de la république des Siciliens un corps d'armée considérable ; il transplanta Ménas, sa ville natale, dans la plaine, et fonda, dans le voisinage du temple des dieux appelés Paliques, une ville importante qu'il appela Palica, du nom de ces dieux.
89. Puisque nous venons de mentionner ces dieux, il est convenable de dire un mot de l'antiquité de leur temple et des merveilles qu'on raconte des cratères particuliers qui s'y trouvent. Suivant la tradition, le temple des dieux Paliques se distingue des autres par son antiquité, sa sainteté et les choses curieuses qu'on y observe. D'abord on y voit des cratères d'une largeur, il est vrai, peu considérable, mais qui lancent, d'une immense profondeur, d'énormes étincelles ; on dirait des chaudières posées sur un grand feu et pleines d'eau bouillante. L'eau qui jaillit de ces cratères a l'apparence de l'eau bouillante ; mais on n'en a pas la certitude, car personne n'a encore osé y toucher, et la terreur qu'inspire cette éructation aqueuse semble y attacher quelque chose de surnaturel et de divin. Cette eau répand une forte odeur de soufre, et l'abîme d'où elle s'échappe fait entendre un bruit effroyable. Ce qu'il y a de plus surprenant, c'est que cette eau ne déborde jamais, ne cesse jamais de couler, et est lancée avec force à une hauteur prodigieuse. Le temple est si vénéré qu'on y prononce les serments les plus sacrés, et les parjures reçoivent aussitôt le châtiment divin : quelques-uns sont sortis aveugles de ce temple. Enfin, la crainte superstitieuse attachée à ce lieu est telle que l'on termine des procès difficiles par les serments que l'on y fait prononcer. Le temple des Paliques est devenu depuis quelque temps un asile inviolable, surtout pour les malheureux esclaves qui sont tombés au pouvoir de maîtres impitoyables; car les maîtres n'ont pas le pouvoir d'arracher de cet asile les esclaves qui s'y sont réfugiés; ceux-ci y demeurent inviolables, jusqu'à ce que les maîtres, s'en rapportant à des arbitres généreux, se soient engagés, sous la foi du serment, de les laisser sortir réconciliés. Jamais, que l'on sache, ces serments n'ont été violés, tant la crainte des dieux fait respecter même les esclaves ! Ce temple est situé dans une plaine digne de la majesté des dieux; il est entouré de portiques et d'autres ornements convenables. Mais ces détails doivent suffire. Reprenons maintenant le fil de notre histoire.


Macrobe, Saturnales, V.19 :
On trouve, dans le neuvième livre de l'Énéide, les vers suivants « Le fils d'Arcens , revêtu d'armes somptueuses, était là, avec sa chlamyde brodée à l'aiguille, tout brillant de pourpre d'Ibérie ; il était beau ; son père Arcens, qui l'avait envoyé [à la guerre], l'avait élevé dans le bois sacré de Mars, sur les bords du Symèthe , où l'autel placable de Palicus est arrosé du sang des victimes »
Quel est ce dieu Palicus, ou plutôt quels sont ces dieux Paliques (car ils sont deux), dont il n'est fait mention, que je sache, dans aucun écrivain latin ? C'est dans les sources les plus profondes de la littérature grecque que Virgile les a trouvés.
D'abord le fleuve Symèthe, dont Virgile fait mention dans ces vers, est situé en Sicile ; et c'est aussi en Sicile que les dieux Paliques sont honorés. Le premier écrivain qui en ait parlé est le tragique Eschyle, Sicilien de naissance, qui donne dans ses vers la signification, ou, comme disent les Grecs, l'étymologie de leur nom. Mais avant de rapporter les vers d'Eschyle, il convient d'exposer en peu de mots l'histoire des Paliques. Sur les bords du fleuve Symèthe, qui coule en Sicile, Jupiter rendit mère la nymphe Thalie, qui, par crainte de Junon, souhaita que la terre l'engloutît ; ce qui arriva : mais à l'époque où les enfants qu'elle avait portés dans son sein eurent atteint leur terme, la terre se rouvrit, et les deux enfants parurent sortant du sein de Thalie, et furent appelés Palici, de ἀπὸ τοῦ πάλιν ἱκέσθαι, parce qu'ils étaient revenus de la terre dans laquelle ils avaient été engloutis. Non loin de là sont des lacs de peu d'étendue, mais d'une immense profondeur, et où l'eau surgit à gros bouillons. Les habitants du pays les appellent des cratères, et les nomment Delloï. Ils pensent que ce sont des frères des dieux Paliques : ils les honorent d'un culte solennel, à cause d'une divinité qui manifeste sur leurs bords, relativement aux serments, sa présence et son action. En effet, lorsqu'on veut savoir la vérité touchant un larcin nié ou quelque action de cette nature, on exige le serment de la personne suspecte ; celui qui l'a provoquée s'approche avec elle des cratères, après qu'ils se sont lavés tous deux de toute souillure, et après que l'inculpé a garanti par une caution personnelle qu'il restituera l'objet réclamé, si l'événement vient à le condamner. Invoquant ensuite la divinité du lieu, le défendeur la prenait à témoin de son serment. S'il parlait conformément à la vérité, il se retirait sans qu'il lui fût arrivé aucun mal ; mais s'il jurait contre sa conscience, il ne tardait pas à trouver dans les eaux du lac la mort due au parjure. Ces circonstances recommandaient tellement les deux frères à la piété publique, qu'on les surnommait placables, tandis que les cratères étaient surnommés implacables. De plus, le temple des dieux Paliques est favorisé d'un oracle. En effet, une année que la sécheresse avait rendu la Sicile stérile, ses habitants, avertis par un avis miraculeux des dieux Paliques, offrirent à un certain héros un sacrifice particulier, et l'abondance revint. Les Siciliens, par reconnaissance, entassèrent sur l'autel des Paliques des fruits de toute espèce; ce qui fit donner à leur autel lui-même la qualification de pinguis. Voilà toute l'histoire des Paliques et de leurs frères, qui ne se trouve que dans les écrivains grecs, chez lesquels Virgile n'a pas moins puisé que chez les Latins.
Maintenant il faut rapporter des autorités en faveur de ce que nous avons raconté. Il est une
tragédie d'Eschyle, intitulée Etna, dans laquelle il s'exprime ainsi, en parlant des Paliques : « Quel nom leur donnent les mortels ? Zeus veut qu'on les nomme Paliques, et ce nom leur est attribué avec justice, puisqu'ils sont retournés des ténèbres à la lumière. »
Voici maintenant un passage de Callias, livre septième de son histoire de Sicile : « Éryx est éloigné de Géla d'environ quatre-vingt-dix stades. C'est une montagne aujourd'hui entièrement déserte, et jadis ce fut une ville de la Sicile. Là sont situés deux gouffres que les Siciliens appellent Delloï, qu'ils croient frères des Paliques et dont les eaux sont continuellement bouillonnantes. »
Voici actuellement un passage de l'ouvrage de Palémon, intitulé Des fleuves merveilleux de la Sicile : « Les dieux, dit-il, que (les Siciliens) appellent Paliques, sont regardés comme étant originaires de l'île ; ils ont pour frères deux gouffres très profonds, dont on ne doit s'approcher, afin de leur rendre les honneurs religieux, que revêtu de vêtements nouveaux et purifié de toute souillure charnelle. Il s'exhale de ces gouffres une forte odeur de soufre, qui excite une ivresse effrayante dans ceux qui s'approchent de leurs bords. Leurs eaux sont troublées, et d'une couleur très ressemblante à celle d'une flamme blanchâtre; elles s'agitent et font le même bruit que si elles bouillonnaient modérément. On dit que la profondeur de ces gouffres est incommensurable, tellement que des bœufs y étant tombés y disparurent, ainsi qu'un chariot attelé de mulets, et des cavales qui étaient sautées dedans. Il est, chez les Siciliens, une sorte de serment qui est la plus solennelle des justifications que l'on puisse exiger. Les juges du serment lisent sur un billet, à ceux qui doivent le prêter, le serment qu'on exige d'eux; ceux-ci , brandissant une branche d'arbre, ayant à la tête couronnée, le corps sans ceinture et ne portant qu'un seul vêtement, s'approchent du gouffre et font le serment requis. S'ils retournent chez eux sains et saufs, leur serment est confirmé; mais s'ils sont parjures, ils expirent aux pieds des dieux. Au reste, (ceux qui jurent ) sont tenus de constituer entre les mains des prêtres des cautions qui leur garantissent, en cas d'événement, les frais des purifications qui doivent être pratiquées à l'égard des assistants. Auprès de ces gouffres habitèrent les Paliciens, dont la ville fut surnommée Palicina, du nom de ces divinités. »
Ainsi s'exprime Polémon. Xénagoras, dans le troisième livre de son Histoire des lieux où existent des oracles, dit ce qui suit : « La Sicile ayant été affligée de stérilité, ses habitants, par l'ordre de l'oracle des Paliques, sacrifièrent à un certain héros ; et après le retour de la fertilité, ils comblèrent d'offrandes le temple des Paliques. »
Voilà, je pense, pleinement terminée, et appuyée sur de graves autorités, l'explication d'un passage de Virgile, que nos littérateurs ne regardent pas même comme obscur, et sur lequel ils se contentent de savoir et d'apprendre à leurs disciples que Palicus est le nom d'une certaine divinité. Mais quelle est cette divinité, et d'où vient son nom ? Ils l'ignorent et ils ne cherchent pas à le savoir, ne soupçonnant pas même où ils pourraient le trouver, dans l'ignorance où ils sont des ouvrages grecs.


En tant qu’asile pour esclave, le sanctuaire joua effectivement un rôle important lors du déclenchement de la seconde guerre servile en 104. En effet, les premiers esclaves révoltés se réfugièrent dans le sanctuaire, qui servit alors de point de ralliement des esclaves en fuite. Voir encore Diodore, dans le premier fragment du livre XXXVI.

Pour approfondir, je signale l’édition récente d’une synthèse sur le sujet :
A. Meurant, Les Paliques, dieux jumeaux siciliens, Louvain-la-Neuve, 1998, 123 p. (Bibliothèque des Cahiers de l'Institut de Linguistique de Louvain, 96).
Tous les textes doivent y être recensés (pour ma part, je n’en ai que 12) et analysés, à la lumière éventuelle des dernières fouilles.


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 Sujet du message : Re: Sicanes et Sicules
Message Publié : 29 Déc 2009 12:22 
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Jean Froissart
Jean Froissart

Inscription : 08 Déc 2009 18:21
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Ok, je vais regarder plus amplement cette synthèse sur les frères Palice, quant à la bibliographie, il n'ya rien de plus détailé. Quant à la lecture, je ne l'ai aps terminé loin s'en faut, mais je comprends ce que tu veux dire. J'ai un peu le même sentiment. mais dans le même temps, les manques me poussent à creuser plus avant. Au final, ça met l'eau à la bouche,et ça pousse ceux qui veulent en connaître plus à apprendre. C'est édité chez FAYARD. Une synthèse, même si il est vrai que ces approximations sont dommageables.
Enfin au final nous serons plus doctes sur la question!

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