Je me doute que tout chiffre en la matière procède plus de la divination que de la science, néanmoins j'aimerais avoir une idée, la moins fausse possible, de ce que pouvait être la population de l'Asie Mineure et/ou de ses différentes composantes à cette époque (VIIe siècle avant notre ère).

Parmi les éléments comparatifs que j'ai trouvés :
- Egypte : env. 3 millions d'habitants sous Ramsès II
- Royaume d'Israel sous les Omrides : 350.000 h. (Achab lève une armée de 10.000 hommes à la bataille de Mesha contre Salmanazar III d'Assyrie, lequel lui en a 20.000)
- Syrie : 6 millions à l'époque romaine
Je n'ai pas trouvé de chiffres pour la Grèce, la Macédoine, Babylone ou l'empire achéménide.

Sur un aspect strictement militaire, à la bataille de Qarqar (-853), Salmanazar III d'Assyrie aurait aligné entre 50 000 et 70 000 fantassins + 5 000 à 8 000 cavaliers et 1 500 chars. Ses adversaires (rois de Damas, de Hama, d'Israel, villes phéniciennes et divers secondaires) coalisaient 70 000 fantassins, 2 000 cavaliers, 1 000 méharistes et 4 000 chars légers.

Peut-on se faire une idée "démographique" pour :
- la Phrygie
- l'Ourartou
- la Lydie
- l'Assyrie
voire même l'empire hittite 500 ans auparavant ?

Vu l'état de connaissance très lacunaire des régions de l'Asie mineure antique, on ne peut même pas raisonnablement estimer leur population. Certaines parties de cette région sont quasiment des déserts archéologiques, peu on été parcourues par des prospections archéologiques, leurs populations sont très mal connues par les textes. A la rigueur vous pourrez trouver une estimation pour le centre de l'Assyrie, mais pour les autres régions, vous n'aurez rien à mon avis vu que ça n'a même pas dû être tenté.

Si on dit 1 million pour l'Assyrie, cela vous semble aberrant ?

Vraiment aucune idée, en plus il faudrait savoir l'extension de l'Assyrie. Ninive ferait dans les 120 000 habitants à son apogée, estimation considérée comme plausible par un spécialiste de la ville (Stronach). J'ai pas mieux.

Dur, dur de se représenter mentalement la société dans l'Asie Mineure du VIIe siècle, l'occupation réelle de l'espace, les densités, les flux commerciaux réguliers, les organisations sociales "profondes", le nomadisme, les paysages humains...
Quoi qu'il en soit, j'ai le sentiment, en termes relatifs que :
- l'Assyrie était plus peuplée (en densité et dans l'absolu) que l'Urartu, lui-même de poids équivalent à la Phrygie, eux-mêmes supérieurs notablement à la kyrielle de petits peuples et "royaumes" du Pont et de Transcaucasie proche : Chalybes/Khaldoi, Mushki/Mossynoikoi/Meskhi du littoral pontique oriental, Zydretes/Colches au dessus, Macrones entre littoral et Urartu (Diaueqi ?)...

Quant à la nébuleuse Tabal, Hillaku, Gurgum, Kummukhi, Que, Karkemish et consorts de Cilicie et proches, j'ai l'impression qu'on est plus en face de cités-états avec un arrière-pays que de vrais royaumes au sens confédération de tribus.

L'Urartu n'est connu que pour deux grandes régions : celle du lac de Van et celle de la vallée de l'Araxe. Et encore même là je ne sais pas s'il y a eu des prospections pour évaluer les densités de peuplement à cette période. Selon P. Zimanski, l'Urartu est constitué de plusieurs noyaux agricoles situés dans des vallées défendues par des forteresses, reliés entre eux par des voies de communication traversant des espaces peu aménagés. On aurait donc un territoire très discontinu, mais ça reste à voir en l'absence de fouilles importantes hors des deux régions principales et de quelques centres isolés.

Pour le reste de l'Anatolie, je dois avouer que je connais mal la question. En plus si on évalue la démographie à cette période il y a un souci : celui des déportations effectuées par les Assyriens. On sait que localement cela a pu modifier le peuplement de certaines régions, par exemple dans la vallée du Tigre autour de Diyarbakir en Turquie actuelle, où des prospections et des fouilles accomplies par B. J. Parker ont permis de se faire une meilleure idée de la façon dont les Assyriens organisaient leurs frontières dans ces régions montagneuses, notamment en trouvant des objets de provenance levantine montrant que des déportés Phéniciens avaient manifestement été installés là, et en repérant les forteresses destinées à contrôler la région. Cf. par exemple l'article suivant, entre autres publications liées à ces fouilles très intéressantes : http://arcserver.usc.edu/reports/report ... rs2001.pdf et d'autres publications accessibles là : http://arcserver.usc.edu/team/parker_publications.html

D'après Hérodote et son détail des satrapies achéménides (postérieures donc), le tribut versé par les unes et les autres auraient été :
- Ière : Ionians, Asian Magnesians, Aeolians, Carians, Lycians, Milyans, Pamphylians : 400 talents d'argent
- IIème : Mysians, Lydians, Lasonians, Cabalians, Hytennians : 500 talents
- IIIème : the southern shore of the Hellespont, Phrygians, Asian Thracians, Paphlagonians, Mariandynians, Syrians : 360 talents
- IVème : Cilicians : 500 talents
- IXème : Mesopotamia (Babylonia and Assyria) : 1000 talents
- XVIIIème : Matienians, Saspires, Alarodians : 200 talents
- XIXème : the Mushki, Tibareni, Macrones, Mossynoeci, Mares : 300 talents

Même à considérer avec beaucoup de précautions, notamment si on le "transpose" deux siècles plus haut, il est intéressant de constater que la Mésopotamie pèse moyennement lourd par rapport à ce qu'on en imaginerait volontiers. Inversement la Cilicie (sûrement élargie à la Syrie du nord) apparait forte. Et je trouve que l'existence même de la XIXe satrapie et son tribut significatif est instructif en ce qu'il montre que la région orientale du Pont, assez méconnue à bien des égards, devait déjà avoir une population relativement nombreuse (et probablement stable depuis un bon bout de temps, étant donné qu'on en parle jamais).