Barbetorte a écrit :
Narduccio a écrit :
Barbetorte a écrit :
Il y avait un élément qui tendait à donner du crédit aux soupçons d'intelligence avec l'Allemagne portés contre Dreyfus : son frère était un industriel de nationalité allemande vivant à Mulhouse, donc en Allemagne.
Vous risquer de fâcher une bonne partie des alsaciens qui suivent ce forum.
Ce n'est aucunement mon intention. Je crois, pour l'avoir entendu dire et cela me semble tout à fait plausible, que les enquêteurs ont prêté une certaine attention à cet élément de fait. Je sais, à titre de comparaison, qu'au temps de la guerre froide, avoir des parents ou un conjoint originaire d'un pays du pacte de Varsovie pouvait handicaper des militaires pour certaines affectations ou certaines autorisation d'accès au secret de défense.
Les enquêteurs n'ont apporté aucune attention à ces accusations ridicules.
Seules les feuilles nationalistes et antisémites se sont appuyés pour partie sur ces divagations afin de charger Alfred Dreyfus.
Par ailleurs, et pour être précis, Alfred avait deux frères, Mathieu et Léon, associés dans l'entreprise familiale de filature à Mulhouse. La famille Dreyfus était de nationalité allemande de fait après l'annexion de l'Alsace en conséquence du traité de Francfort de 1871. Ce qui n'empêchait pas ces neo-allemands d'exprimer leurs sentiments pro-français. Attitude connue et conséquence directe de l'engagement d'Alfred Dreyfus sous l'uniforme d'officier français.
En outre il faut signaler le nombre très important d'officiers et soldats d'origine alsacienne dans l'armée française, dont une nombreuse famille résidait encore dans les territoires annexés. Les officiers étaient légion à l'état-major de l'armée, et on en trouve en nombre dans l'affaire Dreyfus elle-même. Ils étaient notamment précieux pour leur connaissance approfondie de la langue allemande.
Pour n'en citer que quelques uns: le colonel Picquart que tout le monde connaît, le colonel Sandher (chef du contre-espionnage) le capitaine Lauth (membre du contre-espionnage), mais aussi le général Billot ministre de la guerre ou le général Zurlinden au même poste.
Vous comprenez que prendre en compte une pareille accusation eût porté l'opprobre sur une bonne partie du corps des officiers français, et qu'il fallait un esprit tordu comme celui de Drumont ou de Rochefort pour y prêter un quelconque intérêt. alors que ces militaires avaient une réputation de patriote modèle.
Je rappelle que seule une ressemblance d'écritures a orienté les soupçons sur Alfred Dreyfus et que l'antisémitisme a joué un rôle dès les instants qui ont suivi, en neutralisant tout esprit critique de la part des enquêteurs et en provoquant une enquête uniquement à charge . Le Juif étant coupable de fait.
Pour finir, un mot sur Jaurès. On peut ressortir les sentences définitives de n'importe quel acteur politique ou social suivant le jugement du Conseil de guerre de décembre 1894. Elles sont unanimes : une condamnation sans réserve du traître.
Pourquoi ? Parce que, fait rare, la sentence a été rendue à l'unanimité. C'était le signe d'une certitude absolue. On sait qu'un dossier secret truqué est à la base de ce verdict, mais à l'époque évidemment, personne n'en savait rien.
Donc tous ces politiques, ou publicistes comme on disait à l'époque, ont été trompés, et ce n'est qu'au moment où on a pu expliquer relativement clairement les raisons de ce verdict, c'est à dire le mensonge, que ces hommes se sont engagés en faveur d'Alfred Dreyfus, à partir de l'automne 1897 pour Clemenceau, et la fin du procès Zola pour Jaurès.