Afin de clarifier ce point instutionnel de la double monarchie danubienne, je m'arrête un instant dans le détail de celle-ci :
Le seul contrôle parlementaire commun qui existe porte sur les trois ministères communs à la Cisleithanie et à la Transleithanie, c'est-à-dire les Affaires étrangères, la Guerre et les Finances.
Ces ministres sont nommés par l'Empereur-roi et chacun des deux Etats envoie, une fois dans l'année, une Délégation de 60 parlementaires. Leurs prérogatives sont simples - et limitées ! - : elles votent les dépenses communes (elles ne peuvent toucher aux recettes...) et posent des questions aux ministres.
Comme monarchie parlementaire on aura vu mieux...
Concernant la Cisleithanie :
Elle est partagée en 17 provinces, dotées chacune d'un Landtag élu par un système de curies, comprenant les grands propriétaires, les chambres de commerce, les urbains et les paysans.
Au niveau central, l'Empereur peut utiliser les pleins pouvoirs lorsqu'il le souhaite et le Parlement est composé d'une Chambre basse (
Reichsrat), désignée par les diètes locales et d'une Chambre haute (
Herrenhaus), formée par des membres héréditaires ou nommés à vie.
Concernant la Transleithanie :
Il y a aussi deux Chambres en face du dépositaire de la couronne de Saint-Etienne : la Chambre des Magnats, formée par des membres héréditaires, issus de la noblesse et la Chambre des Représentants, élue au régime censitaire étroit.
Par ailleurs, les nationalités ne sont pas du tout représentées dans ces belles assemblées toutes magyares...
Les ministres sont, en effet, responsables devant deux Chambres de hoberaux hongrois, où se trouvent leurs éventuels successeurs.
Mais, il n'y a rien de "démocratique" dans cette parodie de parlementarisme.
La réforme de 1906 ne change pas grand chose à cet édifice complexe.
En Autriche, la majorité du
Reichsrat demeure allemande, malgré le fait que le suffrage universel soit proclamé et Francois-Joseph continue de gouverner grâce à l'article 14, qui lui permet d'ignorer le Parlement, où les Tchèques mènent une guerre sans merci face au pouvoir allemand.
En Hongrie, la réforme ne change pas grand chose non plus : malgré une ouverture de la Chambre des Représentants aux nationalités, les Croates refusent d'aller y siéger et les Hongrois jouent toujours sur leurs rivalités avec les Serbes.
En somme, on peut dire que ces réformes institutionnelles ont surtout été décidées pour calmer les nationalités et que le résultat ne fut pas très positif.
Mais, il est impossible de parler d'un régime parlementaire pour deux raisons majeures : la place de la noblesse hongroises dans les Chambres de Budapest et l'habitude prise par François-Joseph d'utiliser ses "pleins pouvoirs" et de gouverner par décret, court-circuitant ainsi les parlementaires.
Bien à vous,
duc de Raguse.