Alain.g a écrit :
Il y a un rapport entre alcoolisme et suicide comme entre alcoolisme et dépression.
Je pense que c'est beaucoup plus complexe. On ne peut pas faire de tels raccourcis.
Au niveau suicide, il y a trois facteurs (primaires, secondaires, tertiaires) et aucune hiérarchie dans la souffrance psychique. Ensuite, les rapports à la mort sont très différents selon l'individu.
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http://boutique.lepoint.fr/produit/233/penser-la-mort-
http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_de_personnes_suicid%C3%A9esSur la liste de Wikipedia (personnes connues) pour la plupart, les causes semblent évidentes. Durkheim évoque le "
suicide altruiste", sujet disséqué par M-F Hirigoyen :
- Malaise au travail. Harcèlement moral : démêler le vrai du faux
- Les nouvelles solitudesLa pression entraîne le stress et le fruit est un mal-être qui se fait de plus en plus lourd. La souffrance engendrée par ce mal-être devient alors telle qu'elle dépasse le mal-être lui-même et la seule "
porte de sortie" semble le suicide. Ce cheminement entre déjà dans une pathologie.
Au tout début du XXème, il y eut une vague de suicides chez des personnes de religion juive.
"...
Les Juifs hollandais qui constituaient jusqu'alors une microsociété de 50 000 âmes au sein du peuple hollandais, se retrouvent subitement aux portes du monde moderne, ce qui sera perçu par certains Juifs de la communauté comme la voie vers l'assimilation. Mais la communauté juive dans son ensemble – des plus aisés jusqu'aux plus prolétaires – n'a jamais eu comme dessein de briguer des droits qu'on voulait soudain leur octroyer. Ils comprennent instinctivement que cette égalité des droits s'accompagnera indubitablement d'un processus d'assimilation et d'une perte identitaire partielle voire totale. Certains parmi les responsables communautaires craignent déjà d'assister à la fuite des Juifs de leur cadre communautaire. De plus, de par leur fidélité à la couronne hollandaise, c'est avec un certain recul que les Juifs hollandais abordent ces nouvelles idées importées de France.
Les Juifs hollandais ayant obtenu finalement leurs droits, ces derniers ne leur seront plus jamais retirés, même après le retrait de la France des frontières hollandaises et la chute de Napoléon. Ils sont d'un coup intégrés au sein de la communauté hollandaise et doivent en conséquent réformer l'organisation interne de la communauté au vu des lois hollandaises de l'époque. Mais ce n'est que progressivement que la mentalité des Juifs hollandais s'adaptera à ce nouveau statut de vie. Et même si l'accès aux études universitaires leur est intégralement ouvert, même si l'obtention de la totalité des droits civiques leur est accordée avant tout autre pays européen, pour le commun des membres de la communauté l'intégration ne s'effectuera que par étape. Peu parmi les Juifs hollandais sont ceux qui exploiteront de fait leur droit sur l'ouverture aux études supérieures. Leur intégration sera la plus lente parmi l'intégration des communautés juives européennes, pour cette communauté qui paradoxalement aura été la première à accéder à la pleine égalité sociale en Europe occidentale. À l'image de cette laborieuse intégration, le deutsh-teitsh (patois néerlando-yiddish) sera parlé aux Pays-Bas jusqu'au XIXe, et pour certaines régions jusqu'à la fin du même siècle. On mentionne, jusqu'au XIXe encore, une pointe d'accent et certaines tournures de phrase, caractéristiques des Juifs hollandais..."
L'exemple donné est la Hollande mais les cas sont nombreux en France, Allemagne, Autriche. La cause semble toujours être semblable : perte des repères pour une intégration.
Gustav Mahler avait été souhaité comme Maître de chapelle à Vienne, il dut faire face à Cosima Wagner dont les idées orientées et entendues firent que le poste fut obtenu mais lourd "à porter". Je retiens sa phrase fameuse échangée avec Freud : "...
Je suis trois fois apatride. Comme natif de Bohême en Autriche, comme Autrichien en Allemagne, comme juif dans le monde entier...".
Aponie mentionne les Protestants, pourrais-je connaître dans quels pays plus précisément au XIXème ? Je vous en remercie.
L'analyse et la thèse -"
De la division du travail social" (
1897)- de Durkheim sont novatrices pour l'époque mais toutes deux sont à connotation "
sociale". Emile Durkheim est un pionnier de la sociologie, il a donc l'approche d'un sociologue et non celle d'un psychiatre. Il évoque les "
conditions" par exemple l'alcoolisme mais son étude sociologique démontre que l'alcoolisme seul n'amène que très peu souvent au suicide et encore moins dans les couches populaires où il sévit le plus. Là, l'alcoolisme n'est pas perçu -au XIXème- comme remède à un état dépressif et bien souvent on décède "
d'usure" (travail, conditions de vie, dommage engendrés par l'alcoolisme, non suivi médical etc.). Dans des couches plus aisées où l'alcoolisme existe sous une autre forme, plus souvent l'état dépressif semble en être le vecteur et non l'inverse. Sont à noter déjà l'emploi de substances comme l'opium -très en vogue- à l'époque qui crée une addiction et s'accompagne souvent d'alcool (ceci se recense le plus souvent dans le milieu artistique : écrivains, peintre etc.). Le fameux "
spleen" du XIXème semble déjà être -pour certains- un état dépressif avancé mais étonnement créateur (Heine, Musset, Chopin, Baudelaire, Verlaine, Rilke, Rimbaud, Mahler etc.).
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http://www.sanp.ch/pdf/2002/2002-05/2002-05-023.PDFLe sujet est très intéressant mais il faut avoir en tête le niveau de souffrance psychique atteint pour un passage à l'acte fut-il "
raté" hors démarche volontaire, pensée, réfléchie, analysée.