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Message Publié : 20 Mars 2003 0:00 
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Grégoire de Tours
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Sources : L'armée du Nord, campagne du général Faidherbe par Edmond Dechaumes .

Le 18 novembre 1870, la délégation de Tours avait nommé le général Faidherbe au commandement de l'armée du Nord .

Le nouveau général en chef appartenait à la race de ces bons soldats qui se sont formés sur la terre d'Afrique; la meilleure part de sa vie s'était passée au Sénégal, sous un climat meurtrier, dans les travaux de l'organisation coloniale et les périls d'une guerre de ruse .

Pauvre, n'ayant à compter que sur son effort et son mérite, soldat et savant, ingénieur, pénétré de l'idée du devoir, de l'amour de la patrie et de celui de la liberté, cet homme que les ministres de la guerre de Louis-Napoléon n'avaient pas voulu utiliser au début des hostilités Franco-Prussiennes . Il avait pourtant provoqué le respect et l'admiration autour de lui par son courage .

Au moment de la déclaration de guerre, le général se trouvait en congé à Lille, sa ville natale, où il essayait de se reposer de ses fatigues et de combattre les incurables maladies qu'il avait contractées sous les climats les plus malsains .

Il offrit son concours au gouvernement et eut le chagrin d'être mis à l'écart . Il demandait à être envoyé sur le Rhin : on le renvoya en Afrique .

Après Metz, il ne fut plus maître de son indignation et la colère l'emporta : " Jurons, s'écria-t-il en terminant une violente proclamation aux officiers et soldats de sa brigade, jurons de nous dévouer au salut de la patrie, de laver les taches de notre drapeau et de refouler par tous les moyens la restauration du régime qui, en vingt ans, est parvenu à démoraliser la France et à la mener à sa ruine . Vive la France ! Vive le gouvernement républicain de la défense nationale ! "

Quand Faidherbe proposa son épée à la République, Gambetta le reçut avec enthousiasme . Sa tenue froide, son air de souffrance, ses allures de savant, ses lunettes, l'austérité de son visage furent très vivement appréciés . Il évoquait en sa personne l'idée d'un soldat-ingénieur . En lui, s'incarnait l'espoir de la venue d'un de Moltke Français . En voyant ce soldat qui n'avait " rien du militaire de parade " M. Rane s'écria : " celui-ci fera son devoir "

Le choix de Gambetta était doublement heureux . Il plaçait à la tête de l'armée du Nord un général solide, de persévérance inébranlable : il lui donnait en même temps pour chef un compatriote, un homme connaissant bien les ressources du terrain sur lequel il allait manoeuvrer et le caractère des soldats improvisés qu'il allait mener au feu .

Les trois principales batailles furent livrées à Pont-Noyelles, Bapaume et St-Quentin . Faidherbe remporta deux succès et subi une défaite . Observons les d'un peu plus près :

_ Bataille de Pont-Noyelles :

Les reconnaissances du 21 décembre ayant confirmé la concentration de l'armée Française au nord de la Somme, l'armée Prussienne tout entière se massa le lendemain à Amiens et sur la rive gauche de la rivière .

Le commandant en chef Prussien avait rappelé par chemin de fer six bataillons de Rouen . Les deux premiers arrivèrent le 22; les quatre derniers ne débarquèrent que dans les journées du 23 et du 24 . Une brigade de la Garde, nouvellement constituée sous les ordres du prince Albert fils, avait été appelée également à Amiens, et le général Senden annonçait de Montcornet qu'il arriverait à St-Quentin le 24 . D'autre part, le général comte Lippe, à Beauvais depuis le 21, recevait l'ordre de marcher sur Ham .

Ces dispositions montraient que Manteuffel s'attendait à une action des plus chaudes : il l'engagea dans la matinée du 23 par un temps très froid, mais très clair .

Les Français occupaient une ligne courbe, de 12 à 13 km, depuis Daours jusqu'à Contay, sur des hauteurs où leurs artillerie était admirablement placée .

Les indications principales que comportait l'ordre d'armée du général Prussien Manteufell faisait penser à une offensive pour emporter les positions Françaises .

Dès 8 heures, la 15eme division Prussienne ( général Kummer) traversa la Somme sur des ponts jetés à Camon, tandis que le général Barnekow, à la tête de la 16eme divisions Prussienne, passant la rivière à Amiens même, filait par la route de Rainne-ville et de Pierregot pour nous combattre sur le flanc droit . Les cuirassiers et les uhlans de la brigade Dohna reliaient les divisions Prussiennes 15 et 16 .

La division Prussienne du général Kummer s'avançant sur la route d'Albert se trouva nécessairement engagée la première . Les avant-postes Français se retirèrent devant les colonnes Allemandes . Querrieux, d'où le major Bock avait été chassé dans la journée du 20, ne leur fut pas disputé . Faidherbe avait appuyé sa première ligne sur la ligne et les villages de l'Hallue, mais il comptait principalement tirer parti des hauteurs qui dominent la vallée pour prolonger sa résistance .

La 15eme division Prussienne qui marchait par la route d'Albert et sur la droite de cette route avait, en sortant de Querrieux, le village de Pont-Noyelles en face d'elle, et, sur sa droite, les villages de Bussy et de Daours . La division Française du général Du Bessol se trouvait seule alors sur le terrain de bataille, la division Française du général Moulac n'ayant pu occuper encore ses positions de combat .

L'absence momentanée de l'amiral Moulac obligea la division du Bessol à étendre son front plus qu'il n'aurait convenu . La brigade Prussienne de Bock, après une lutte vivement soutenue, profita de cet avantage et resta maîtresse de Pont-Noyelles .

Le colonel Witzendorff, chef d'état-major du 8eme corps d'armée Prussien, porta cette nouvelle à Manteuffel qui se tenait à la ferme des Alençons, et le pria en même temps de faire soutenir à sa droite l'attaque sur Daours dirigée par le colonel Loë . Le général en chef envoya sur ce point le major Lewinski avec les troupes de réserve laissées en observation à Lamotte . Le major arriva avec ce renfort vers 3 heures .

Les marins Français de l'amiral Moulac tenaient encore dans Daours, mais les canons Prussiens du major Lewinski forcèrent notre artillerie Française très maltraitée à reculer en laissant sur la place beaucoup d'hommes et de chevaux . L'infanterie Prussienne du colonel Loë, ranimée par un secours si efficace, reprit la lutte avec une nouvelle ardeur et s'empara finalement du village en l'occupant maisons par maisons .

Tous les villages à notre gauche et au centre étaient enlevés aux Français, mais la bataille n'en demeurait pas moins indécise .

Daours occupé par les Allemands, pour menacer Corbie, devaient percer notre seconde ligne . Le major Lewinski risqua cette attaque à la tête de deux de ses bataillons d'infanterie Prussienne qu'il avait prudemment tenus en réserve . Mais le feu de nos tirailleurs et la force de nos positions le forcèrent à reculer et à revenir s'abriter dans les maisons de Daours .

Au Nord de Pont-Noyelles s'élevait une hauteur couronnée d'un bois, offrant l'aspect d'un bastion . Le général du Bessol avait armée de canons cette position si redoutable .

Les Prussiens, après avoir occupé Pont-Noyelles, n'osèrent se briser sur ce formidable ouvrage . Le général Kümmer résolut alors de tenter de le prendre par son flanc droit, ce qui lui aurait permis de s'allonger au nord dans la direction de la division Barnekow .

Ce dessein une fois formé, le général Kümmer fit avancer la brigade Strubberg sur Fréchencourt qu'elle occupa; mais il reconnut aussitôt que l'attaque de la hauteur, garnie d'artillerie et d'épaulements, n'était pas plus réalisable du côté de Fréchencourt que de celui de Pont-Noyelles .

Vers 3 heures et demie, les Prussiens s'élancèrent en avant de Pont-Noyelles sur les pentes que nous défendions pour frapper un coup décisif sur notre centre .

Les soldats Français du 33eme de ligne et la compagnie du capitaine d'Hauterive se précipitèrent à la baïonnette sur les Prussiens et les ramenèrent sur Pont-Noyelles où notre artillerie les canonna violemment .

A ce moment, sur notre gauche et au centre, voici comment se résumait la première phase de la bataille : A gauche, l'ennemi occupait Daours sans être assez fort pour en sortir . Au centre, il avait enlevé Pont-Noyelles et s'était brisé sur notre seconde ligne . Si rien n'était compromis pour nous, les Prussiens n'en avaient pas moins occupé trop facilement les villages dont Faidherbe n'avait pas estimé suffisamment la possession .

Sur notre droite, nos opérations avaient été beaucoup plus heureuses . Le général Français Derroja avait fait complètement échouer, de ce côté, le plan de bataille du général Prussien Manteuffel . En effet, le général Prussien Barnekow, allant de Raineville sur Beaucourt, s'était emparé de ce village ainsi que de Montigny et de Béhencourt, mais il n'avait pu même songer à attaquer les hauteurs fortifiées qui prolongeaient notre seconde ligne jusqu'à l'extrémité de notre aile .

Non seulement, le mouvement tournant de la 16eme division Prussienne n'avait pu aboutir, mais la brigade Française du général Pittié, débordant la gauche Prussienne du général Barnekow, menaça soudainement de la tourner par Contay et la route d'Arras .

A 4 heures, Le général Prussien Manteuffel ne comptait plus sur une victoire, bien que ses troupes se fussent bravement battues et nous barrassent les routes menant à Amiens . Sachant du reste qu'il lui parviendrait d'importants renforts dans la journée du lendemain, il n'avait pas de raisons pressantes pour chercher à gagner du terrain .

Les Français, qui n'avaient pas les mêmes motifs de suspendre la lutte, n'avaient pas abandonné la partie . Du sommet des hauteurs, notre artillerie tonnait sur les malheureux villages que nous avions perdus et y mettait le feu . L'incendie éclairait le front de bataille de l'armée Prussienne et permettait à nos pointeurs de tirer juste .

Bientôt les clairons sonnèrent et les tambours Français battirent la charge . Notre jeune armée Française reprit l'offensive . Faidherbe, avec l'insouciance d'un sous-lieutenant, parcourait à cheval son front en bataille . Les soldats Français poussaient des cris terribles . Leurs généraux, payant intrépidement de leur personne, les conduisaient à l'ennemi .

A droite, le général Français Derroja, après un combat très vif, chassait les Prussiens des villages de Bavelincourt et Béhencourt .

Au centre, le général Français Du Bessol livrait dans Pont-Noyelles un combat sans merci, à l'arme blanche . Le soldats Prussiens se firent massacrer à coups de crosses et de baïonnettes par les soldats Français dans les maisons et les caves de la ville . Enfin, les Prussiens se retirèrent en désordre sur Querrieux .

Malgré la nuit, malgré les ordres de leurs chefs, nos mobiles exaspérés par la lutte et perdant tout sang-froid s'élancèrent à la poursuite de l'ennemi sur la dangereuse chaussée de Querrieux qui se déroule entre les marais .

Des murailles crénelées, des maisons, de tous les abris qui s'offraient à eux, les soldats Prussiens ouvrirent un feu terrible sur ceux qui les poursuivaient et jonchèrent le sol de morts et de blessés . Surpris de cette résistance qu'ils auraient dû prévoir, effarés par cette fusillade contre laquelle ils ne pouvaient se couvrir, les mobiles se débandèrent, certains se réfugièrent sur la Houssaye .

A l'aspect de cette débandade, les Prussiens, avec une très grande présence d'esprit, reprirent immédiatement l'offensive . Tandis que leurs tirailleurs sillonnaient la vallée, leurs colonnes d'attaque se reformaient dans Pont-Noyelles .

Dans ce nouveau péril, le général Français Du Bessol fit mettre la baïonnette au canon aux soldats Français d'un bataillon du 69eme de marche qui consistait sa suprême réserve . En même temps, il fit battre la charge par les clairons et les tambours et commanda : " en avant, marche ! "

Il avança au son des tambours et des trompettes, à travers la nuit, sur le champ de bataille; et, de tous les côtés, les hommes entendant la charge accoururent se joindre à la troupe .

Une batterie de douze servie par des marins Français fut appelée par le général et canonna le village . Les Prussiens furent de nouveau repoussés après des combats à la baïonnette, mais les Français eurent cette fois la présence d'esprit de s'arrêter avant les premières maisons crénelées .

A sept heures du soir, la bataille de Pont-Noyelles était terminée . Nous ne pouvons attribuer une victoire stratégique à Faidherbe puisque la bataille n'eu aucune conséquence . Cependant Faidherbe, n'en déplaise à ses détracteurs, avait bel et bien remporté une victoire tactique car il avait repoussé tous les assauts des Prussiens .

Les Prussiens n'avaient pas rempli leurs objectifs puisqu'ils n'avaient pas pu empêcher les Français de conserver leurs positions . Manteuffel ne pouvait se venter de l'avoir défait . Les Français avaient couché sur leurs positions et enterraient les morts .

La suite plus tard...

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Charles Baudelaire


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Message Publié : 23 Mars 2003 18:22 
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_ Bataille de Bapaume :

La nuit fut très dure . La température était glaciale . Une neige épaisse couvrait la terre . Notre artillerie demeura prête à marcher, sans dételer; plusieurs de ses chevaux périrent de froid .

Le matin, après les mouvements en arrière opérés pendant la nuit, les Prussiens, avaient occupés les villages de Grevillers, Biefvillers, Favreuil et Beaugnâtre, pour couvrir Bapaume .

Le général Prussien de Groeben, qui était à Combles, ordonna au général Kummer, commandant la 15eme division, de défendre énergiquement la ville, tandis que la cavalerie de Groeben, avec de l'artillerie, prendrait de flanc notre aile droite .

Le prince Albert, resté à Fins avec ses trois régiments de cavalerie Prussienne renforcés de trois batteries et de trois bataillons, se portait à Berlincourt . Trois bataillons et l'artillerie du corps d'armée accouraient de Péronne, se tenant en réserve à Sailly .

Le général Prussien de Groeben quittait lui-même Combles et s'avançait jusqu'au Transloy, village situé en arrière de Bapaume sur la grande route de Péronne . Par ses soins, une réserve de deux bataillons et de deux batteries était installée dans cette localité .

C'était devant Bapaume et à Bapaume même que le général de Groeben avait compris que la bataille devait porter son plus rude effort . C'était au centre et à l'aile gauche des Prussiens que Faidherbe se préparait à porter toute la violence de l'attaque .

Tandis qu'à sa gauche, contre Beugnâtre, il déployait la division Robin, complètement formée de mobilisés dont on n'osait trop mettre la fermeté à l'épreuve, le général Du Bressol et le général Derroja combattaient à droite à la tête des troupes Françaises qui s'étaient déjà si vaillamment conduites à Pont-Noyelles .

A neuf heures et demie, sur notre droite, l'action s'engagea à coups de canons . A ce moment, le général Du Bressol lança le 69eme de marche sur le village de Biefvillers . Nos jeunes soldats escaladèrent les pentes fort raides par lesquelles on arrive au village et se jetèrent dans la grande rue .

A la vue des Français, les Prussiens, poussant des cris terribles, sortirent des maisons et se précipitèrent sur nos soldats pour les refouler par un effort énergique . Les soldats Français du 69eme de marche tinrent bon et repoussèrent à la baïonnette, après de furieux corps à corps, plusieurs charges de l'infanterie Prussienne .

Bientôt, le 2eme bataillons de Chasseurs à pied, sous le commandement de Buchis, aborde les Prussiens avec un entrain superbe et les repousse de maisons en maisons à la baïonnette . Le village est enfin arraché par les troupes Françaises . Ce fut en vain que les Prussiens essayèrent de nous reprendre cette position . Le 2eme Chasseur et le 69eme de marche, fiers de ce premier avantage, n'étaient pas disposés à reculer d'une semelle .

Plus à droite, le général Derroja avait été également heureux . Il avait tourné et occupé Grévillers; puis il avait posté son artillerie à droite de ce village, tandis que celle du général De Bessol ouvrait son feu du haut des crêtes qui relient Grevillers à Biefvillers .

L'artillerie Prussienne soutint ce terrible duel pendant une heure . Des tireurs d'élite Français du 2eme Chasseurs se postèrent alors dans le clocher de Biefvillers et firent tellement de mal aux servants des batteries Prussiennes que celles-ci se retirèrent au galop de leurs attelages .

Profitant de ce moment de recul, le général Français Derroja fit enlever au pas de charge le village d'Avesne-lès-Bapaume . Alors notre droite frémissante, sentant la victoire se dessiner, s'avança sur Bapaume et les soldats de du Bessol envahirent le faubourg d'Arras .

Sur la grande route de Bapaume, l'action avait été moins vive . Bien que sa seconde division ( général Robin) ne l'eût pas appuyé comme l'ordre d'armée le comportait, le général Paulze d'Ivoy avait gagné du terrain sur les Prussiens et occupait Favreuil .

Par conséquent, les Prussiens cédaient sur tous les points .

Nos soldats Français s'avançaient rapidement dans le faubourg d'Arras malgré la vive résistance de l'ennemi à l'entrée de Bapaume . Le colonel Foerster, qui amenait le 69eme de marche et un bataillon du 91eme, se heurta, sur l'emplacement des anciens remparts, à un ouvrage assez solide .

Convaincu de la possibilité d'enlever cet ouvrage, le colonel ne voulut pas l'aborder avant de savoir si les général Du Bessol l'approuvait et se tenait en état de le soutenir . Il lui fut répondu que le général en chef venait de donner l'ordre de ne rien entreprendre contre Bapaume .

Dans les conditions où s'était livrée la bataille, toute l'armée Française supposait que Péronne était l'objectif de notre marche . Par conséquent Bapaume devait être enlevée, puisque c'était la clef de la route que nous devions suivre . Mais, au moment où une victoire complète pouvait être remportée, le général Faidherbe se trouvait en proie aux plus inquiétante conjectures .

Les Prussiens, redoutant les progrès du général Deroja venaient de prononcer sur Ligny, contre sa division Française, un mouvement qui avait pour but de la déborder . Pendant que ce mouvement se dessinait contre notre droite, on venait d'apercevoir vers la gauche de très fortes colonnes qui manoeuvraient dans la direction de Favreuil .

Ce ne fut qu'après avoir reconnu ces masses que l'on sut à l'état-major qu'elles appartenaient à la division Robin, mais l'arrivée des mobilisés Français causa un moment d'hésitation et de retard qui ne serait pas produit si l'armée Française du Nord avait disposé de quelques escadrons pour l'éclairer .

Quant à la tentative des Prussiens contre notre aile droite, elle fut repoussée par le général Derroja qui fit enlever par le brigade Pittié le village de Tilloy .

Avant que la nuit fut venue, l'armée Française avait conservé l'avantage sur tous les points . Malgré les beaux résultat de la journée, le général en chef voulut épargner à la ville de Bapaume les horreurs d'une attaque et fit camper ses troupes Françaises dans les villages qu'elles avaient pris .

Une raison très forte avait déterminé Faidherbe à ne pas surmener cette armée qui venait de combattre par un froid cruel . Il avait appris que son offensive inattendue avait eu pour conséquence d'attirer sur lui toutes les forces ennemies disséminées dans la région et, principalement, celles qui étaient réunies autour de Péronne .

Il est impossible de contester l'avantage des Français dans cette journée du 3 janvier 1871 . Nous pouvons attribuer une victoire tactique Française mais l'on ne peut lui attribuer le résultat d'une victoire stratégique . Pour qu'il y ait victoire stratégique, il faut qu'il y ait conséquence et profit .

Nous avions enlevé une partie des positions Prussiennes . Soit ! Qu'avions nous tiré de cette avantage ? Avions nous ouvert la route de Péronne ? Avions nous obligé Barnekow à repasser la Somme pour ne pas être pris entre la ville assiégée et les têtes de colonne de l'armée du Nord ? Non .

Bien que nous eussions des troupes fraîches et des régiments qui n'avaient pas brûlé une cartouche dans la bataille, Faidherbe n'osa recommencer la lutte le lendemain . Ses meilleurs soldats étaient épuisés de fatigue et de froid, les subsistances étant difficiles . Pénétré de l'idée que Péronne était momentanément débloquée et saurait l'attendre, il préféra accorder à ses troupes Françaises un peu de repos avant de renouveler ses efforts contre l'armée Prussienne .

Le soir de la bataille, les Prussiens s'étaient évidemment considérés comme battus . L'évacuation de Bapaume en est la preuve manifeste . Les réticences de l'ouvrage du comte Wartensleben en font foi ( un militaire Prussien ) .

L'officier d'état-major Prussien reconnaît, en effet, qu'en continuant immédiatement la lutte contre un ennemi dont la contenance avait été si ferme jusqu'à la fin, on s'exposait, en cas d'insuccès, à une défaite sérieuse .

Groeben, dominé par cette crainte, s'empressa de donner dans la matinée du 4 janvier le signal de retraite . Il fila sur Roisel avec le gros de son corps et envoya, sur la gauche, la division de cavalerie Goeben, appuyé de 5 escadrons, occuper Albert d'où elle menacerait notre flanc si nous continuions notre mouvement sur Péronne .

Pendant que le général Prussien Groeben prenait ces mesures défensives, l'armée Française était sur pied à sept heures du matin et recevait l'ordre de rebrousser chemin vers Arras, alors que les habitant de Bapaume nous apportaient la nouvelles de l'évacuation de leur ville . Ainsi, ces deux armées qui s'étaient heurtées si rudement la veille se tournaient le dos maintenant et marchaient en sens inverse .

Groeben, à cette nouvelle inespérée, fit immédiatement réoccuper Bapaume et lança quelques escadrons de cavalerie Prussienne sur nos derrières pour ne pas perdre le contact avec nous et bien s'assurer de notre retraite définitive .

Au final, cette campagne s'était soldée par deux bons succès tactiques à Pont-Noyelles et à Bapaume sur les Prussiens mais le résultat stratégique était néant puisque, faute de vivre suffisantes, Faidherbe devait abandonner Bapaume pour se replier sur Arras . L'objectif principal de cette campagne, qui était de délivrer Péronne, n'avait pu être atteint .

La suite plus tard..

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Message Publié : 28 Mars 2003 18:18 
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Grégoire de Tours
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_ Bataille de St-Quentin :

Après avoir talonné si vivement Faidherbe, Groeben éprouvait la joie de l'avoir atteint, de le tenir, de le contraindre à combattre et souhaitait offrir à son souverain, dans cette ville de St-Quentin, " une victoire à la Sedan " .

Pendant la nuit, les Français harassés par une journée de combats et de marche avaient pris leurs positions autour de St-Quentin . Ils avaient le dos à la ville et formaient un demi-cercle qui allait du sud à l'ouest .

Le 22eme corps Français ( général Lecointe ), établi entre Gauchy et Grugies, veillait à la défense du sud . Le 23eme corps Français ( général Paulze d'Ivoy ), renforcé de la brigade Isnard, couvrait la ville sur sa gauche au moulin de Rocourt, sa droite au village de Fayet, s'étendant du canal à la route de Cambrai, avec la division Payen à droite, la division Robin à gauche et la brigade Isnard reliant les deux divisions Françaises .

La rapidité des événements n'avait pas laissé à nos hommes le temps d'améliorer leurs positions par la construction de quelques ouvrages de campagne . C'est à peine s'ils avaient pu prendre, pendant la nuit, quelques heures d'un repos plus que nécessaire .

Dans son ordre d'armée pour la grande journée qui se préparait, Groeben déclarait, avec une impatiente ardeur, qu'il fallait terminer la guerre d'un seul coup . Cependant, redoutant encore que son adversaire ne parvint à se dérober au dernier moment, il concluait par ces lignes caractéristiques :

" Dans le cas où l'ennemi n'attendrait pas notre attaque, on le poursuivrait énergiquement en employant la totalité de nos forces . L'expérience a appris, en effet, que, contre des troupes si faiblement organisés, c'est moins par le combat lui-même que par le profit que l'on sait en tirer que l'on obtient les plus grands résultats "

Le plan du général Prussien était donc de déborder notre extrême-gauche au sud, et notre extrême-droite au Nord-Nord-Ouest, de nous refouler en même temps dans St-Quentin par un effort général et de nous enlever toute possibilité de gagner la région du Nord ou de l'Est par les routes de Cambrai, de Bohain, du Cateau et de Guise .

Tirant de Rouen, du gouvernement de Reims, de l'armée de la Meuse et de l'armée du siège de Paris toutes les ressources momentanément disponibles, le général de Groeben avait amené ces forces imposantes autour de St-Quentin, avec la ferme conviction d'écraser l'armée du Nord, de l'envelopper et de la faire entièrement prisonnière .

A l'ouest, le général-lieutenant de Kummer devait s'avancer avec toutes ses forces et son artillerie par les routes de Vermand et d'Etreillers . Son objectif était de tout culbuter devant lui, de tourner St-Quentin et de s'en emparer, tandis que le général de Groeben devait s'étendre sur sa gauche jusqu'à la route de Cambrai .

Au sud, le général-lieutenant baron de Barnekow avait ordre de marcher sur St-Quentin avec la 16eme division d'infanterie Prussienne et la division Prince-Albrecht le long de la voie de fer et par la route de la Fère, en cherchant à tourner notre gauche .

Enfin, le général en chef devait assurer les communications entre ces deux fractions de l'armée Prussienne, qui combattaient l'une au sud et l'autre à l'Ouest, en s'avançant de Ham sur Roupy, avec la réserve placée sous les ordres du colonel de Bocking .

Le major Von Schell évalue les forces de l'armée Prussienne à 23 400 soldats d'infanterie en 38 bataillons , 6200 chevaux en 48 escadrons et 161 pièces d'artillerie .

Selon l'estimation du même major, la force totale de l'infanterie des 22eme et 23eme corps Français opposés à ces troupes Prussiennes aurait été de 48 000 hommes, sans compter la brigade Isnard et la brigade Pauly; mais cette évaluation semble plus flatteuse pour la valeur Prussienne que véridique !

Les marches épouvantables accomplies par l'armée Française du Nord, que commandant le brave Faidherbe, et les combats qu'elle venait de soutenir avaient fondu ses effectifs . Dans ses mouvements précédents et à la suite des rencontres avec l'ennemi, elle avait toujours semé derrière elle des masses de traînards qui ne la rejoignaient que plus tard en très fortes proportions . Les choses venaient de ses passer de même pendant les préliminaires de la bataille de St-Quentin .

Les militaires Français sont d'ailleurs fort loin d'admettre la manière de compter du major Von Schell et il faut reconnaître que toutes les forces dont disposa Faidherbe, le 19 janvier, devaient former environ un total de 30 à 35 000 hommes .

Par conséquent, les Prussiens ne peuvent pas se vanter d'avoir triomphé du nombre . Ils combattaient dans d'excellentes conditions, dans des conditions d'autant meilleures que Faidherbe ne faisait guère état de la division de mobilisés Robin et ne pouvait davantage compter sur la brigade Pauly qui arrivait de Cambrai, armée de vieux fusils à piston transformés dont l'effet ne pouvait être bien terrible entre les mains de tireurs inexpérimentés .

A 8 h 00 du matin, le général Prussien Barnekow avait dirigé, de Lizerolles sur Essigny-le-Grand, une forte avant-garde composée du régiment de hussards numéro 9, de la brigade Rosenzweig, de deux batteries et de la brigade de cavalerie de Strantz, faisant suivre cette avant-garde de la brigade colonel de Hertzberg et de la division de réserve Prince Albrecht ( fils ) .

En même temps, le 2eme bataillon du régiment numéro 29 marchait de Castres sur Grugies, tandis que le lieutenant-colonel de Hymmen, détaché de la division Prussienne du prince Albrecht, avait mission d'enlever le Grand-Séraucourt avec le régiment des hussards de la Garde Prussienne, le 1er bataillon du régiment numéro 19, le bataillon de fusilliers du régiment numéro 81 et une batterie d'artillerie légère .

Par cette opération, les communications de l'aile droite allaient être assurées avec le quartier général .

L'avant-garde Prussienne dépassa Essigny-le-Grand qui était inoccupé et le détachement de Hymmen occupa Grand-Séraucourt . Les deux batteries de l'avant-garde du général Prussien Barnekow ouvrirent aussitôt le feu sur l'infanterie Française qui s'avançaitt à l'Esr de Gauchy .

Les avant-postes de la 2eme brigade de la division Française du général Du Bessol avaient été les premiers attaqués en avant de Castres . Le chef de cette brigade, le lieutenant-colonel de Gislain, étudiait en ce moment le terrain avec ses officiers d'ordonnance et faillit être enlevé par les cavaliers Prussiens .

La division Du Bessol, solidement établie à Grugies, avait du monde dans la direction Sud-Ouest jusqu'à Contescourt . Les feux de la batterie Collignon, qui tirait du " Moulin à Tout-Vent ", et le tir de nouvelles batteries qui ne tardèrent pas à prendre part à la lutte indiquèrent au général Prussien de Barnekow que la clef des positions Françaises était le village de Grugies .

Dès lors, le combat redoubla d'intensité . Le général Prussien Banekow lança du Grand-Sérancourt le détachement de Hymmen sur Grugies, ainsi que la brigade de Rosenzweig qui était parvenu au Nord d'Essigny-le-Grand .

Plus à droite l'attaque sur l'aile gauche Française se prolongeait par l'entée en ligne de la division du comte de Lippe . Le colonel de Carlowitz, à la tête de l'avant-garde Prussienne de ce corps, était arrivé à 11 h 00 au " Cornet d'Or "; ( route de la Fère ) avec le régiment des Reîtres de la Garde Prussienne, deux compagnies du bataillon de chasseurs Prussiens numéro 12 et deux pièces de canon .

Ce mouvement menaçait donc les points stratégiques d'Itacourt de la Neuville-Saint-Amand .

De ce côté se trouvaient les meilleurs troupes Française du Nord, conduites par des chefs énergiques . Leur résistance fut acharnée, officiers et soldats Français connaissant tous l'importance de la journée .

Une pluie fine voilait l'horizon et rendait le tir de l'artillerie Française extrêmement difficile et chanceux . Le 2eme bataillon du régiment Prussien numéro 69 de la brigade Rosenzweig s'élança sur Grugies et fut arrêté, près de la voie ferrée, par les Français qui s'étaient fortifiés dans la fabrique de sucre . Ce bataillon Prussien attaqua quatre fois la fabrique, quatre fois il fut repoussé par les Français .

Le combat s'étendit alors de Contescourt jusqu'à l'Est de la voie ferrée; mais, malgré les plus grands efforts, les Prussiens ne purent nous déloger ni de Constescourt, ni de la fabrique à sucre .

En cette phase de la lutte, l'arrivée de la division Prussienne du comte de Lippe avait nécessité un prolongement de front de l'armée Française sur sa gauche . La brigade Aynés, accourue en toute hâte de St-Quentin, s'étendit tout d'abord jusqu'à la route de la Fère .

A ce moment, les progrès de l'aile droite Prussienne, avaient été compétemment paralysés par l'excellence de notre tir et par la belle tenue des défenseurs Français de la fabrique à sucre . Par contre, notre résistance sur le flanc Ouest de St-Quentin avait été beaucoup moins sérieuse .

L'aile gauche Allemande avait fait de réels progrès . La brigade Prussienne de Strubberg, sans s'être engagée à fond, nous disputait les petits bois qui se trouvent à peu de distance de Savy .

Le lieutenant-colonel de Pestel, à la tête de l'avant-garde de la division d'infanterie combinée du 1er corps, avait poussé sur Vermand, ramassé une centaine de traînards, rejeté les troupes Françaises qui défendaient les bois, occupé ensuite Holnon et une partie du village de Séleney .

En même temps, le général comte de Groeben avait dirigé la brigade Prussienne de cavalerie comte Dohna dans la direction de Bellenglise et de Gricourt, afin de menacer la route de Cambrai .

Vers midi, le mouvement concentrique de l'armée Prussienne était parfaitement dessiné . A l'aile droite, le général baron de Barnekow avait très vivement combattu sans obtenir de résultats appréciables; mais l'aile gauche Prussienne, a peine engagée, avait pu réaliser un progrès qui devenait déjà menaçant pour notre flanc droit et pour notre ligne de retraite .

Bien que la division Française du général Du Bessol fut privée de son chef, grièvement blessé en indiquant l'emplacement d'une batterie, elle continuait à défendre le terrain pied à pied, entre Castres, Grugies et la fabrique à sucre .

La brigade Prussienne de Rosenzweig renouvela vainement ses attaques de la matinée . Les trois bataillons de cette brigade Prussienne employées sur ce point se replièrent sur ce point se replièrent bientôt, momentanément, pour remplacer leurs cartouches qu'une fusillade des plus nourries avait rapidement épuisées .

Les renforts que venait d'amener de Grand-Séraucourt le colonel Prussien de Bocking, commandant la réserve, allaient néanmoins améliorer la situation du baron de Barnekow .

Le colonel de Bocking s'était avancé au Sud-Est de Constescourt, qui fut évacué à son approche, et s'empara de Castres d'où les Français se retirèrent sur les hauteurs de Giffécourt, en s'entêtant toutefois à ne pas abandonner la position de la fabrique à sucre .

A la suite de ce pas en avant, les Prussiens appuyèrent fortement leur infanterie par du canon . Cinq batteries tonnèrent sans interruptions sur une ligne allant du canal au chemin de fer . Bientôt, remarquant que les Français semblaient vouloir abandonner Gifflécourt, le colonel de Bocking fit attaquer cette position et l'emporta .

Malgré les efforts de l'attaque et la prise de Gifflécourt, rien de décisif n'avait été obtenu . Vers deux heures, les troupes Prussiennes de la brigade de Hertzberg, qui venaient de se heurter inutilement contre les défenseurs Français de la fabrique à sucre, devaient reculer à leur tour devant un retour offensif des Français .

A deux heures et demie la bataille gardait toujours son caractère d'indécision et de violence devant Grugies, quand le général Baron de Barnekow, qui surveillait les opérations sur sa droite, constata que le feu de notre artillerie Française perdait notablement de sa force .

En effet, des événements d'une extrême-gravité s'étaient passés sur le prolongement de notre aile gauche qu'il avait fallu considérablement étendre pour couvrir le flanc Est-Sud de St-Quentin .

Les troupes Prussiennes de la division du général comte de Lippe s'étaient rencontrées sur la route de la Fère avec celles de la brigade Française d'Aynès . Le lieutenant-colonel Aynès avait été blessé et sa brigade, menacée d'être débordée par la Neuville-Saint-Armand, recula jusqu'aux premières maisons du faubourg de l'Isle .

Le 68eme de marche de la brigade Pittié accourut au secours de la brigade Aynès en si grand péril et le commandant Tramond, un de nos officiers les plus énergiques et sur lequel l'armée Française avait fondé tant d'espoir, reconduit rudement les Prussiens par une héroïque charge à la baïonnette .

L'artillerie Prussienne à cheval essaya de balayer le terrain que nous venions de reconquérir; elle eut tellement à souffrir du feu de nos batteries Françaises de Gauchy qu'elle abandonna la partie .

Le colonel Prussien de Carlowitz essaya alors une attaque de flanc à la tête du régiment des Reîtres de la Garde Prussienne appuyée des deux pièces de l'artillerie Prussienne à cheval; mais cette troupe d'élite fut reçue si vigoureusement par nos soldats Français retranchés dans les fermes voisines du faubourg de l'Isle qu'elle tourna bride précipitamment .

Il était environ trois heures à cet instant . Si la division Prussienne du comte de Lippe avait gagné du terrain sur notre extrême-gauche, le général baron de Barnekow n'avait pu avancer qu'avec lenteur, au prix des plus lourds sacrifices et sans réussir à nous déloger ni de la fabrique de sucre, ni de la position de Grugies .

A leur aile gauche, les Prussiens avaient ralenti leur attaque pour mieux coordonner leurs mouvements et pour remplacer les munitions de l'artillerie du général de Kummer; bientôt, ils furent en état de marcher de nouveau d'ensemble .

La 15eme division d'infanterie Prussienne réussit au prix de grands efforts à demeurer maîtresse des bois de Savy et soutint ensuite une lutte acharnée contre les brigades de Bock s'emparait du bois planté au Sud d'Holnon .

Le bataillon de fusiliers Prussiens et un détachement du 2eme bataillon du régiment Prussiens Prince Royal numéro 1 enlevèrent Francilly où ils firent un grand nombre de prisonniers . Plus à gauche, un détachement Prussien du régiment numéro 44 pénétrait dans le village de Fayet et en occupait une partie .

L'approche des Prussiens sur St-Quentin par Selency et Francilly et leur mouvement sur Fayet, par lequel ils menaçaient la route de Cambrai, avaient attiré l'attention de Faidherbe .

Il fit nettoyer immédiatement Fayet par la 1ere brigade Française de la division Payen, tandis que la brigade Pauly, marchant au canon, arrivait de Bellicourt et venait couvrir la route de Cambrai .

Le déploiement de ces troupes Françaises et la fermeté de leur marche intimida les Prussiens, bien que leur mouvement sur notre droite se prolongeât fort utilement par l'arrivée de la brigade de cavalerie Prussienne du comte Dohna à Fresnoy-le-Petit . Cette intervention de la brigade Française de Pauly devait avoir des conséquences encore plus heureuses pour l'issue de la journée .

Les opérations du général Baron Prussien Barnekow, à l'aile droite, et celles du général de Kummer, à l'aile gauche, avaient été solidement reliées par une colonne centrale agissant sous les yeux mêmes du général en chef sur la route de Roupy-Saint-Quentin ( route de Paris ), enlevé une ferme sur la hauteur qui court de Savy à Fontaine-aux-Clercs et maintenu ainsi les relations de l'aile droite et l'aile gauche Prussiennes .

De la ferme, le major poursuivit ainsi Dallon et la vallée de la Somme . La prise du hameau de l'Épine de Dallon, qui concordait pour les Prussiens avec l'attaque de Francilly, resserrait le cercle de fer dans lequel ils cherchaient à envelopper Saint-Quentin et l'armée Française .

Sans notre retour offensif à Fayet, sans l'arrivée par Gricourt des mobilisés du Pas-de-Calais de la brigade Française de Pauly, le général Prussien de Groeben n'eût pas hésité à lancer toute son aile gauche sur notre flanc Ouest et sur la route de Cambrai .

Si ce mouvement avait été exécuté, il est probable que le 23eme corps Français n'eût pu soutenir un tel choc . C'était alors Saint-Quentin pris d'assaut, la retraite par la route de Cambrai coupée, les soldats Français de Du Bessol et de Derroja placés entre le feu des troupes Prussiennes de Barnekow et des soldats victorieux de Kummer .

Mais, trompé par la vigueur du retour offensif de la brigade Française de Payen et supposant que les Français marchaient avec un si bel entrain parce qu'ils connaissaient l'arrivée de puissant renforts, le général de Groeben craignit de voir son aile gauche déborder vers Gricourt et ralentit sur toute la ligne le mouvement en avant jusqu'à ce que des précautions efficaces eussent été prises contre les troupes Françaises nouvellement arrivées sur le champ de bataille .

Fayet fut énergiquement canonné par les Prussiens . La brigade de cavalerie du comte Dohna et la cavalerie de la division combinée du 1er corps d'armée, prêtes à charger, observèrent attentivement notre attaque; toute l'infanterie disponible fut massée de façon à protéger le flanc de l'aile gauche que le général en chef croyait en danger .

Ces précautions prises, toute la gauche Prussienne reprit sa marche en avant, se dirigeant sur la ligne Fayet-Saint-Quentin . Le général de Kummer, exécutant un mouvement analogue à celui du major de Bronikowski, attaqua avec la 15eme division d'infanterie Française la hauteur dont les crêtes courent de Francilly à l'Épine de Dallon .

Appuyées à droite et à gauche par trois batteries divisionnaires et par trois batteries à pied d'artillerie de corps, les troupes Françaises de la 15eme division longeaient la route de Saint-Quentin-Savy et la flanquaient au Nord et au Sud, une partie de la brigade Strubberg formant réserve un peu en arrière .

Tandis que le major Prussien de Bronikowski s'emparait successivement des hauteurs d'Oestre et de Rocourt, le général Prussien de Jummer, progressant toujours, arrivait à un moulin au Sud-Est de Francilly d'où son artillerie Prussienne poursuivit de ses boulets, jusqu'à la nuit, les détachements Français en retraite .

Plus à gauche, les Prussiens avaient obtenu mêmes succès . Le feu de 26 pièces d'artillerie Prussienne tonnant sur Gricourt et Fayet arrêta le mouvement en avant des brigades Pauly et Payen .

Lorsque le général de Groeben ordonna à la tombée de la nuit l'attaque de Fayet livrée aux flammes, son infanterie, qui avait regagné sous la protection de cette puissante artillerie la plus grande part du terrain qu'elle avait perdu, trouva le village abandonné .

Les 1er et 2eme bataillons du régiment numéro 4 et le 2eme bataillon du régiment numéro 44 occupèrent Fayet et s'apprêtèrent à y coucher .

La nuit qui avait arrêté la marche du général de Groeben suspendit également celle du général de kummer et du major de Bronikowski .

Le premier général Prussien se borna à expédier sur St-Quentin le 2eme bataillon du régiment Prussien numéro 68, un demi-bataillon du régiment Prussien numéro 33 et un escadron du régiment de hussards Prussiens numéro 7 .

Le second, après avoir repoussé plusieurs tentatives des défenseurs du faubourgs de St-Martin contre Rocourt, s'avança jusqu'aux premières maisons de ce faubourg . Le chef de bataillon du génie Richard y avait fait élever de fortes barricades qui furent vaillamment défendues par les Français .

Finalement, enveloppé par les Prussiens, le commandant Richard ne réussit à se dégager et à s'enfuit qu'en faisant usage de son révolver .

Pendant que les Prussiens occupaient Fayet et parvenaient sur le flanc Ouest de St-Quentin, le 23eme corps mettant aussi à profit l'obscurité de la nuit battait précipitamment en retraite sur Cambrai .

Dès l'instant où le détachement Prussien de Bronikowski avait occupé le poste de l'Epine de Dallon, le général de Groeben avait pu, de ce poste, suivre de ses propres yeux le mouvement de l'aile droite de son armée Prussienne .

Cette droite Prussienne s'était ressentie cruellement de la qualité des troupes Françaises du 22eme corps, bien supérieures à celles du 23eme .

Nos mobiles Français avaient rivalisé d'ardeur avec la ligne et nos jeunes soldats avaient fait la belle résistance que l'on sait à Contescourt, à Castres, à la fabrique de sucre, à Giffécourt et à Grugies . Officiers et soldats Français du corps de Lecointe avaient payé de leurs personnes : les blessures de Du Bessol et de l'intrépide Aynès l'attestaient .

Tout cet épisode de la bataille de St-Quentin est la preuve manifeste de la fermeté et du patriotisme de l'armée Française du Nord et c'est avec un sentiment de tristesse profonde qu'il faut songer que tout ce dévouement et ce courage ne pouvaient ni arrêter ni modifier la fatalité des événements .

Le général de Barnekow n'avait pas besoin des nouvelles envoyées par le comte de Lippe pour être stimulé, et il avait préparé avec la plus grande vigueur son attaque sur Grugies, dès qu'il vit clairement que la victoire était là .

Il avait donné l'ordre à la division Prussienne de réserve du Prince Albrecht et à la brigade de Rosenzweig de marcher vivement sur cette position décisive, quand il eut lui-même à repousser l'offensive des Français . Le colonel Prussien de Hertzberg ayant été ramené en arrière, le baron de Barnekow accourut en personne d'Urvilliers d'où il appela à son aide la brigade de cavalerie Prussienne de Strantz .

De la hauteur située entre la fabrique de sucre et la chaussée, les tirailleurs Français embusqués derrière des tas de betteraves dirigeaient sur les Prussiens un feu terrible . Rassemblant toute l'infanterie Prussienne qui se trouvait sous sa main, le général de Barnekow la lança à l'attaque de cette hauteur et fit appuyer cet assaut par un mouvement de la brigade Prussienne de Strantz .

Cette cavalerie Prussienne, ayant contourné l'hauteur, put prendre à revers nos fantasins et son chef nous chargea à la tête de deux escadrons du régiment de dragons numéro 1 . Le général baron de Barnekow, qui se prodiguait pour enlever ses hommes, eut son cheval blessé sous lui .

Les difficultés que le terrain offrait à la marche de la cavalerie Prussienne permirent à nos soldats Français d'échapper par la fuite à une perte certaine et de se réfugier sur les hauteirs de Gauchy . Néansmoins, les Prussiens firent plus de 400 prisonniers dans cette seule affaire .

Le commandant de l'aile droite Prussienne, mettant à profit son succès, lança à la poursuite de notre infanterie la brigade Prussienne de Hertzberg et les dragons et hussards Prussiens du général de Stranz, sans se laisser arrêter par la nuit qui tombait .

Désireux de pousser jusqu'au bout l'avantage obtenu, il prescrivit au colonel Prussien de Hertzberg et au général de Stranz de s'engager vivement à la suite des Français jusque dans le faubourg de l'Isle .

Après tant d'efforts énergiques, la fortune des armes souriait au baron de Barnekow en cette fin de bataille .

Toutes ses troupes Prussiennes, ramenées en avant, combinaient leur action et pressaient de près les Français . Entamé dans ses positions, épuisé par sa résistance désespérée, le corps Lecointe avait à combattre, en ce moment suprême, la brigade Prussiennne de Rosenzweig qui venait de refaire ses munitions, la brigade de Goeben et le détachement de Bocking .

L'opération décisive qui nous avait fait perdre la hauteur à l'Est de la fabrique de sucre avait permis à l'ennemi d'enfoncer un coin dans notre front et ce fut comme l'effet d'une percée irrésistible .

La brigade de Goeben trouva évacué ce village de Grugies où nous avions fait une si belle résistance, et la fabrique de sucre devint intenable pour nous . Sept compagnies d'infanterie Prussienne l'occupèrent immédiatement .

Il ne nous fut pas possible, non plus, de nous maintenir sur les hauteurs de Gauchy et nos troupes Françaises, tout en tiraillant, se replièrent sur le faubourg de l'Isle .

Le lieutenant-colonel de Hüllessem occupa à cinq heures un quart de la gare de St-Quentin et put, quelques instants après, franchir le pont du canal qui relie le faubourg à la ville, tout en ramassant dans ce trajet un grand nombre de prisonniers .

A la suite des troupes Prussiennes du lieutenant-colonel Hüllessem, les brigades Hertzberg, de Goeben, de Rosenzweig étaient entrées à leur tour dans le faubourg de l'Isle; le général baron de Barnekow marchait avec l'avant-garde de la brigade d'Hertzberg . Les Prussiens commencèrent alors dans les rues de la ville la poursuite des soldats Français qui s'y étaient attardés .

Le commandant Prussien de l'aile droite avait avisé de St-Quentin le général comte de Lippe de sa situation et celui-ci s'était appliqué à compléter la victoire; mais, fort heureusement, ses efforts n'aboutirent pas, grâce aux dernières mesures prises par le général Lecointe .

Le chef du 22eme corps Français avait fait occuper Harly et Homblières puis installé de l'artillerie entre ces deux villages, sur la hauteur de Bellevue .

Le tir de notre artillerie Française arrêta la marche des Prussiens du comte de Lippe et l'empêcha de réaliser son dessein de prendre en flanc notre aile gauche pour la rejeter dans St-Quentin .

Le soir même de la bataille, le général de Groeben avait télégraphié au grand quartier général de Versailles que les Français étaient battus et que les troupes du baron de Barnekow avaient occupé St-Quentin .

On ne pouvait refuser aux Prussiens de reconnaître qu'ils s'étaient bien battus . Ils étaient loin cependant d'avoir tiré de cette journée le parti qu'ils en espéraient . Groeben qui avait battu Faidherbe n'avait pas terminé la guerre d'un seul coup, ainsi qu'il s'était vanté de le faire . Le filet qu'il avait tendu pour envellopper son adversaire ne s'était pas fermé assez vute et l'armée Française du Nord lui avait échappé une fois de plus .

St-Quentin est un succès tactique Prussien mais Groeben n'avait remporté qu'une demi-victoire stratégique puisqu'il n'avait pas pu, come le prévoyait ses objectifs, faire capituler toute l'armée de Faidherbe .

Le vainqueur de Pont-Noyelles et de Bapaume, le général Faidherbe, terminait par ce dernier acte sa belle campagne du Nord . Il arriva le 20 janvier 1871 à 2 h 00 du matin à Cambrai et descendit à l'hôtel de France, Place-au-Bois .

Ce fut là que brisé de douleur et de fatigue, il annonça le résultat de la bataille de St-Quentin que l'on ignorait encore . Il repartit ensuite pour Lille, à deux heures de l'après-midi, dans un tel accablement que ses officiers le portèrent à son wagon .

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Bien qu’on ait du cœur à l’ouvrage, l’Art est long et le Temps est court.

Charles Baudelaire


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