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Message Publié : 08 Déc 2013 15:31 
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Thucydide
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Concernant sa belle-fille Stéphanie, si Elisabeth, selon Brigitte Hamann, lui manifeste d'entrée de jeu beaucoup d'animosité, c'est d'une part parce que cette dernière est l'exacte opposée de Rodolphe qui, comme sa mère, est davantage tourné vers l'esprit et l'intériorité : l'impératrice se déchargera par ailleurs fort habilement de ses tâches de représentation sur elle car cette dernière "appréciait par dessus tout l'aspect extérieur et formel des choses". Stéphanie est décrite comme très aristocratique et soucieuse des marques de respect dues à son rang, ce qui fait se gausser d'ailleurs Elisabeth sur "ses longues fausses nattes" et "ses yeux matois à l'affût".
C'est aussi parce qu'Elisabeth mettra en parallèle le caractère de sa belle-fille avec celui de sa belle-soeur Charlotte (épouse de Maximilien du Mexique et tante paternelle de Stéphanie), toutes deux ayant, par la force des choses, eclipsé Elisabeth dans son rôle de représentation, qu'il faut comprendre ce comportement sans pour autant l'excuser.
Le peu d'enthousiasme porté à d'autres dynasties passe aussi à travers ses opinions en matière de politique extérieure de l'Autriche, notamment avec la tentative de rapprochement avec la Russie. Alors qu'Elisabeth compare la famille impériale russe à des singes, son fils fait, lors de l'entrevue de Kremsier, un portrait peu flatteur d'Alexandre III : "il est devenu colossalement gros, le grand-duc Vladimir et sa femme, tout comme la tsarine, paraissent vieux et décrépits. Leur suite et la domesticité, sont épouvantables ; avec leurs nouveaux uniformes, ils sont redevenus totalement asiatiques... "
Une telle convergence de vues entre le fils et la mère sont saisissants, lorsque l'on connaît l'absence quasi-totale de liens affectifs ayant existé entre eux, hormis une adoration absolue (et à sens unique) de Rodolphe pour la figure de cette mère absente.

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Message Publié : 08 Déc 2013 17:14 
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Philippe de Commines
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frenchinamst a écrit :
Concernant sa belle-fille Stéphanie, si Elisabeth, selon Brigitte Hamann, lui manifeste d'entrée de jeu beaucoup d'animosité, c'est d'une part parce que cette dernière est l'exacte opposée de Rodolphe

Pour avoir lu cette bio, je n'ai pas du tout l'impression que l'animosité venait de "l'exacte opposée"... mais peut être du fait que Rodolphe ait choisi son épouse sans en référer à sa mère, que le couple au début de son union fut fort attaché et bcp d'autres paramètres encore...

Citer :
qui, comme sa mère, est davantage tourné vers l'esprit et l'intériorité

Que définissez-vous par "esprit" et "intériorité" chez l'impératrice et chez son fils ?


Citer :
l'impératrice se déchargera par ailleurs fort habilement de ses tâches de représentation

L'impératrice n'a jamais su s'acquitter de ses tâches, à beaucoup de niveaux d'ailleurs. Tant l'épouse, que la mère, au final tout...
En ceci, elle restera très proche de sa fratrie. Deux sortiront du lot : Charles-Théodore et Hélène.

Citer :
Stéphanie est décrite comme très aristocratique et soucieuse des marques de respect dues à son rang

Le royaume de Belgique n'a pas l'ancienneté de l'empire austro-hongrois mais de naissance Stéphanie est d'un rang supérieur à sa belle-mère. C'est Elisabeth qui ne saura jamais se sentir à sa place.
Ce fut Stéphanie, ç'aurait été n'importe quelle autre femme, le résultat aurait été le même.

Citer :
C'est aussi parce qu'Elisabeth mettra en parallèle le caractère de sa belle-fille avec celui de sa belle-soeur Charlotte

En ceci les liens furent toujours tendus. L'archiduchesse Sophie n'a jamais caché sa préférence pour Maximilien. Les deux frères ne s'entendaient pas au mieux.
Charlotte de Belgique et sa nièce ne se ressemble en rien au niveau du caractère.
Charlotte n'a pas pu "briller" longtemps à la Cour, l'aventure mexicaine était beaucoup plus importante. Les deux époux avaient enfin un trône... On a vu...
On ne peut "éclipsé" un rôle de représentation qui n'est pour ainsi dire jamais assuré. D'ailleurs vous le notez vous-même.
Elisabeth sera toujours heureuse de pouvoir "laisser la place", l'étiquette Habsbourg ce n'est pas son truc, d'ailleurs au final rien n'était "son truc", elle excepté.

Citer :
Alors qu'Elisabeth compare la famille impériale russe à des singes, son fils fait, lors de l'entrevue de Kremsier, un portrait peu flatteur d'Alexandre III : "il est devenu colossalement gros, le grand-duc Vladimir et sa femme, tout comme la tsarine, paraissent vieux et décrépits. Leur suite et la domesticité, sont épouvantables ; avec leurs nouveaux uniformes, ils sont redevenus totalement asiatiques... "

Si les opinions politiques d'Elisabeth avaient eu un quelconque intérêt ceci se saurait.
Quant à Rodolphe, il faudrait ouvrir un fil...

Citer :
Une telle convergence de vues entre le fils et la mère sont saisissants

La convergence de vue possède un point commun : l'opposition à la politique de François-Joseph.
La simple opposition père/fils, quant au couple chacun sait maintenant ce qu'il en était : Elisabeth comparant son époux à Obéron (le roi avec des oreilles d'âne dans "Le songe d'une nuit d'été") et elle se garde le beau rôle, celui de Titania...
Haman là-dessus cite des passages écrits par Elisabeth, totalement ahurissants.

Citer :
hormis une adoration absolue (et à sens unique) de Rodolphe pour la figure de cette mère absente

Là encore, je pense que l'on est dans le cliché. Mais il faudrait ouvrir un fil sur Rodolphe, il y a trop de choses à souligner.

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"... Et si je te semble avoir agi follement, peut-être suis-je accusée de folie par un insensé." (Sophocle)


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Message Publié : 08 Déc 2013 19:11 
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Thucydide
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gaete59 a écrit :
frenchinamst a écrit :
Concernant sa belle-fille Stéphanie, si Elisabeth, selon Brigitte Hamann, lui manifeste d'entrée de jeu beaucoup d'animosité, c'est d'une part parce que cette dernière est l'exacte opposée de Rodolphe

Pour avoir lu cette bio, je n'ai pas du tout l'impression que l'animosité venait de "l'exacte opposée"... mais peut être du fait que Rodolphe ait choisi son épouse sans en référer à sa mère, que le couple au début de son union fut fort attaché et bcp d'autres paramètres encore...

Citer :
qui, comme sa mère, est davantage tourné vers l'esprit et l'intériorité

Que définissez-vous par "esprit" et "intériorité" chez l'impératrice et chez son fils ?
On ne peut pas leur dénier un intérêt plus poussé pour les qualités spirituelles et intellectuelles que pour l'apparât...


Citer :
l'impératrice se déchargera par ailleurs fort habilement de ses tâches de représentation

L'impératrice n'a jamais su s'acquitter de ses tâches, à beaucoup de niveaux d'ailleurs. Tant l'épouse, que la mère, au final tout...
En ceci, elle restera très proche de sa fratrie. Deux sortiront du lot : Charles-Théodore et Hélène.
Certes, mais je pense aussi qu'elle aurait pu les remplir avec plus de bonne volonté si la cour viennoise ne l'en avait pas dissuadée.

Citer :
Stéphanie est décrite comme très aristocratique et soucieuse des marques de respect dues à son rang

Le royaume de Belgique n'a pas l'ancienneté de l'empire austro-hongrois mais de naissance Stéphanie est d'un rang supérieur à sa belle-mère. C'est Elisabeth qui ne saura jamais se sentir à sa place.
Ce fut Stéphanie, ç'aurait été n'importe quelle autre femme, le résultat aurait été le même.
J'ignore comment on estime habituellement les quartiers de noblesse, sur la longévité de la lignée ou sur l'importance des titres ?(d'autant qu'Elisabeth reste de sang royal par sa mère...)

Citer :
C'est aussi parce qu'Elisabeth mettra en parallèle le caractère de sa belle-fille avec celui de sa belle-soeur Charlotte

En ceci les liens furent toujours tendus. L'archiduchesse Sophie n'a jamais caché sa préférence pour Maximilien. Les deux frères ne s'entendaient pas au mieux.
Charlotte de Belgique et sa nièce ne se ressemble en rien au niveau du caractère.
Charlotte n'a pas pu "briller" longtemps à la Cour, l'aventure mexicaine était beaucoup plus importante. Les deux époux avaient enfin un trône... On a vu...
On ne peut "éclipsé" un rôle de représentation qui n'est pour ainsi dire jamais assuré. D'ailleurs vous le notez vous-même.
Elisabeth sera toujours heureuse de pouvoir "laisser la place", l'étiquette Habsbourg ce n'est pas son truc, d'ailleurs au final rien n'était "son truc", elle excepté.

Citer :
Alors qu'Elisabeth compare la famille impériale russe à des singes, son fils fait, lors de l'entrevue de Kremsier, un portrait peu flatteur d'Alexandre III : "il est devenu colossalement gros, le grand-duc Vladimir et sa femme, tout comme la tsarine, paraissent vieux et décrépits. Leur suite et la domesticité, sont épouvantables ; avec leurs nouveaux uniformes, ils sont redevenus totalement asiatiques... "

Si les opinions politiques d'Elisabeth avaient eu un quelconque intérêt ceci se saurait.
Quant à Rodolphe, il faudrait ouvrir un fil...
Je vous trouve un peu dur avec eux, leur pensée politique est assez iconoclaste pour l'époque, et prémonitoire à plus d'un titre.

Citer :
Une telle convergence de vues entre le fils et la mère sont saisissants

La convergence de vue possède un point commun : l'opposition à la politique de François-Joseph.
La simple opposition père/fils, quant au couple chacun sait maintenant ce qu'il en était : Elisabeth comparant son époux à Obéron (le roi avec des oreilles d'âne dans "Le songe d'une nuit d'été") et elle se garde le beau rôle, celui de Titania...
Haman là-dessus cite des passages écrits par Elisabeth, totalement ahurissants.

Citer :
hormis une adoration absolue (et à sens unique) de Rodolphe pour la figure de cette mère absente

Là encore, je pense que l'on est dans le cliché. Mais il faudrait ouvrir un fil sur Rodolphe, il y a trop de choses à souligner.

Vous pourrez de vous-même nuancer votre opinion on relisant le chapitre que consacre Hamann à "Rodolphe et Marie-Valérie". La correspondance de Rodolphe et des proches de la familles est très éloquente. Je nuancerai pour ma part l'adoration à sens unique car après Mayerling, on s'apercevra que son fils tenait malgré tout pour elle une certaine place. Elle culpabilisera beaucoup sur son "sang bavarois et palatin". Après 1888, sa santé va lentement se déteriorer et elle "se nourrira de son désespoir". François Joseph lui rendra d'ailleurs un hommage appuyé dans le soutien qu'elle lui manifestera.
A peine Rodolphe enterré, elle cherchera à rentrer en contact avec lui via des séances de spiritisme.
Il y a un fil sur "la mort de Rodolphe" mais passablement pollué, et qui nécessiterait un petit nettoyage des admins...

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Message Publié : 09 Déc 2013 13:01 
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Philippe de Commines
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Bref, rien ne nouveau.
Toujours les bons vieux clichés aromatisés à la sauce perso du moment ou de l'intervenant.
Il serait plus intéressant de citer des passages de livres et de laisser chacun en tirer des conclusions.
J'ai ressorti cette bonne vieille bio de Hamann qui me semblait très novatrice à sa sortie : elle a mal vieilli et le livre me semble bien mal construit, un peu à l'image d'un roman.
Le sujet : "Elisabeth, impératrice d'Autriche"...
Est-ce bien un sujet "historique" ? Cette femme a-t-elle impacté l'histoire en quoi que ce soit ?
Non, rien au final... Le grand fantasme de l'adolescence... Le "truc" de la Mouette et de l'Aigle, pas foudroyé...
Une bonne base pour un roman Arlequin, avec même... Polichinelle...
Une femme qui n'a en rien marqué son temps, qui n'a rien laissé et sans les bons vieux films autrichiens serait passée à la trappe.
Le genre de personnage d'emblée détestable car elle veut tout, elle a tout et ne donne rien mais rate tout et sur toute la ligne : enfant, épouse, mère, grand-mère etc.
Comme ses soeurs, Hélène excepté, elle reproduit le schéma familial : du cirque et des scandales dont chacun peut se repaitre.
L'Autriche en fera une héroïne "fleur bleue" pour faire un peu oublier que quelques années auparavant, les fleurs autrichiennes avaient une odeur peu recommandable et voici "Sissi"...
Passé la pré-puberté, s'abstenir...
Pour le lien concernant "Rodolphe", je trouve déjà extraordinaire que l'équipe P-H ait laissé une marge de place... pour rien. :-|
Il a existé une autre Elisabeth d'Autriche : l'épouse de Charles IX, plus interpellante.
Concernant Stéphanie, sa mère est une Habsbourg. Son oncle Joseph se verra -pour faire gros- régent de Hongrie et en premières noces gendre du tsar Paul Ier par son épouse Alexandra Pavlovna.
Bref, on ne joue pas dans la même "cour". L'aïeul d'Elisabeth fut roi grâce à Napoléon, en 1806. Avant il était duc des Deux-Ponts, comte de Birkenfeld et électeur palatin puis du Rhin. Sa chance : beaucoup de filles et des unions judicieuses et juteuses. La moins bien lotie : Ludovica. Une sorte de crépuscule historique sur des royaumes de carton pâte érigé le temps de la domination de Bonaparte.
Les cartes seront redistribuées lors du Congrès de Vienne et certains micro-royaumes fossoyés lors de l'élection de Guillaume Ier comme Empereur d'Allemagne.
Il y a belle lurette que l'Autriche n'est plus dans la course politique.
Les Habsbourg d'Autriche s'élèvent lorsque s'éteignent ceux d'Espagne. L'apogée semble sous Marie-Thérèse ensuite l'Autriche devient passive de son destin.
A l'époque d'Elisabeth, c'est un trône mûr pour la pirouette... La guerre "incomparable accélérateur de l'histoire" (Lénine) rendra soudain à une mozaïque de peuples le choix de leur devenir.

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Message Publié : 09 Déc 2013 16:09 
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Disons qu'en bref vous ne lui reconnaissez pas son attitude de femme essayant de vivre suivant ses propres codes et qu'en cela elle avait une dimension originale...
Et donc qu'elle aurait dû se contenter de rester à sa place et de ne pas faire de vague.

Donc si on suit bien ce raisonnement, elle serait digne d'intérêt si elle s'était conformée à son milieu et avait été une impératrice "comme il faut"... Mais dans ce même cas, elle n'aurait sans doute pas été digne d'intérêt puisque conformiste...


Concernant le livre d'Hamann, ce n'est pas une étude historique mais une biographie très académique qui a le mérite au moins de citer ses proches, de donner des extraits de correspondance qui permettent de brosser un portrait un peu moins terne que vous semblez vouloir absolument donner d'elle.

Je trouve justement intéressant d'explorer ces personnages ayant eu un second rôle, de les mettre en perspective au-delà des apparences, que cela soit celles de carton-pâte comme celles qui voudrait les ensevelir au seul prétexte que leur apport à l'histoire aurait été anecdotique.

Je comprends bien cette dialectique de vouloir mesurer l'importance de personnages historiques au regard de leur apport au mouvement et aux transformations de société qu'ils apportent... et moi je considère qu'ils peut être tout aussi intéressant d'étudier (et de faire partager à d'autres) les raisons qui en ont fait qu'un mythe ait pu se construire à partir d'autres éléments que ces facteurs.

Autrement dit, c'est la mystère de ce mythe qui est intéressant, pas le mythe en lui-même. Entre le rejet matérialiste et la romance sirupeuse, il existe une troisième voie que je trouve digne d'intérêts pour ces personnages produits révélateurs d'une époque et d'un système.

Et cela constitue pour moi une difficulté moindre que de m'attaquer à des personnages plus éminents et plus complexes.

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Message Publié : 09 Déc 2013 21:44 
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Philippe de Commines
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frenchinamst a écrit :
Disons qu'en bref vous ne lui reconnaissez pas son attitude de femme essayant de vivre suivant ses propres codes et qu'en cela elle avait une dimension originale...

Je n'ai pas à entrer dans une analyse psycho/historico/empathiquo/fan.
Il y a les faits de l'époque, la manière d'occuper une place et je copie un intervenant en écrivant :
"Le reste n'est que littérature"
Le problème avec ce personnage est qu'il est complexe. J'essaie donc de peser chaque mot tout en remettant l'image véhiculée dans le contexte de l'époque et non avoir la vue d'une "femme visionnaire car libérée bien avant les autres" : ceci serait attribuer au personnage une volonté, un raisonnement qu'elle ne possédait pas. Dans ce milieu, il n'y a pas de places pour une "vie selon ses envies". Le piège est de ne pas mettre peut être les bons mots et de regarder avec nos critères d'aujourd'hui. Je l'écris de nouveau : j'ai été très fan du personnage, la lecture m'a fait revoir ma copie et très vite.
Là où les fans voient une femme libérée alors que l'époque semble à la soumission, je vois une femme capricieuse, incapable de raisonnement, instable, se jouant des sentiments autres que les siens. Je lui reconnais un présence lors d'évènements forts comme lorsqu'elle apprend le décès de son fils mais c'est pour mieux se poser en victime sans oublier de bien charger l'entourage (l'archiduchesse Stéphanie, la baronne Vetsera puis Marie Larisch).
Avant d'aborder Elisabeth, il est bon de connaître le parcours de la famille ainsi que de posséder très bien la fratrie et ce, sur au moins deux générations, donc sur le début de la royauté en Bavière.
Il est bon aussi de connaitre déjà l'Etiquette Habsbourg pour mieux comprendre et les contraintes et les avantages de la place. Il ne faut pas non plus oublier que nous sommes au XIXème siècle, pas plus qu'oublier les années chaotiques dues aux conflits napoléoniens.
Ludovica du sang royal ? Depuis 1806 simplement. Fruit de la seconde union de Maximilien Ier et de Caroline de Bade (dont la soeur est l'épouse du tsar Alexandre Ier -ça pose-) est la benjamine. Toutes ses soeurs et demi-soeurs ont été mieux loties. La famille a une grande importance. On peut noter chez les filles de Ludovica une incapacité chronique au bonheur dans leurs unions, comme la reproduction du schéma parental.
Ces femmes ne sauront jamais se "tenir". Si l'appel des sens est fort chez certaines, il semble manifestement impossible à endiguer et pour l'époque ça fait un peu "tache".

Citer :
Et donc qu'elle aurait dû se contenter de rester à sa place et de ne pas faire de vague.

Mais à l'époque, elle ne fait pas de vague, l'Autriche se sent lésée, orpheline avec une impératrice dans l'incapacité de tenir son rang, tout en s'octroyant un budget personnel assez incroyable et laissant son époux régler ses multiples tocades d'un moment (Villas etc.). C'est tout. C'est ensuite que viendront des analyses pipées du style : elle était en avance sur son temps.

Citer :
Donc si on suit bien ce raisonnement, elle serait digne d'intérêt si elle s'était conformée à son milieu et avait été une impératrice "comme il faut"...

Cette union est inespérée pour elle. Personne ne l'oblige à accepter. Ce devait être Hélène et voici que François-Joseph, pour la première fois de sa vie se laisse emporter comme un sous-lieutenant, oubliant devoir et raison. Il restera attaché à son épouse car comme chacun sait, tout ce qui échappe appelle à l'envie et comme Elisabeth brille par son absence...
Ceci est bon dans une maison de petite bourgeoisie mais à ce niveau on ne peut se le permettre d'autant que l'objet de la convoitise est très voire trop jeune, ignorante et ne souhaitant pas faire d'effort, se contraindre etc.
La convoitise passera vite chez l'Empereur, d'autant plus vite que l'épouse lui fermera sa porte, chacun sait le reste.
Il est certain qu'Elisabeth peut être intéressante par sa capacité à sortir de ce que vous nommez "conformisme".
Elle fut mauvaise épouse, incapable d'empathie, incapable de tenir son rang, mauvaise mère, mauvaise grand mère, méchange belle-mère, une montagne d'égoïsme, de narcissisme : en fait une femme malade, ce n'est que ceci le mythe...
Alors si pour vous ceci est attractif et à classer dans le non-conformisme de l'époque, je ne comprends pas.
Si elle avait possédé un peu d'intelligence, elle aurait pu être un soutien pour son époux -dans les paramètres de l'époque- au lieu de se gausser bêtement du paraître de Maria Feodorovna, d'autant plus que Dagmar, princesse de Danemark et tsarine était loin d'être une femme laide. Elle ressemble énormément à sa soeur Alexandra, épouse du Prince de Galles et femme renommée à l'époque pour sa beauté. Il est vrai qu'à ce moment Elisabeth est sur le déclin et pour une femme qui n'a vécu que pour son apparence, chacun sait combien ce peut être difficile.
A 40 ans, elle décide de ne plus poser pour les peintres : elle ne veut plus se voir sur les tableaux et au final, les photographies de cette femme autour de la cinquantaine montre combien les tableaux furent exagérés, tout comme cette obnubilation de minceur qui en faisait une femme "maigre". Vous avez j'imagine sa taille, son poids alors en vous basant sur les critères de l'époque nous sommes loin de l'image véhiculée par Winterhalter.

Citer :
Mais dans ce même cas, elle n'aurait sans doute pas été digne d'intérêt puisque conformiste...

Si le seul intérêt que vous dégagez du personnage est sa capacité à être ou non "conformiste" -mot anachronique pour l'époque-, vous n'êtes pas dans une démarche d'histoire. Il existe des sites ou le personnage est révéré. Je ne vous les conseillerai pas, on tombe dans le comique et la caricature de la vénération pour "Sissiâtres".

Citer :
Concernant le livre d'Hamann, ce n'est pas une étude historique mais une biographie très académique

Alors nous comprenons pas l'adjectif "académique" de la même manière.
Cependant puisque le titre du lien est Elisabeth, donnez-nous ces fameux extraits. C'est déjà une base de débat. Qui a écrit ? Il est par exemple évident que le livre de Corti est un livre "courtisant", il ne peut en être autrement vu la position du quidam. Je donne un exemple, le résumé d'un livre écrit par Bestenreiner, journaliste possédant un doctorat, ce livre évoque la fratrie d'Elisabeth.
Si l'on connait la vie mouvementée et errante de l'impératrice Elisabeth d'Autriche, dite Sissi...
Nous revoici dans les clichés. Des qualificatifs mille fois lus et la conclusion : et bien oui, sa vie est connue donc on passe à autre chose.
... marquée par la mort prématurée de sa fille aînée...
Diable, serait-elle donc la seule à pleurer un enfant en bas âge ? Je vous passe la liste du Gotha de l'époque ayant été marqué par ce genre de chose qui n'était pour l'époque que des incidents malheureux. Sa mère a perdu deux fils, son aïeule un fils et une fille de 11 ans. Elles semblent avoir tenu le coup et personne ne le mentionne...
Après tout, c'est peut être la perte de son fils qui a fait que Ludovica ne s'est pas sentie profondément impactée par l'éducation qui sera donnée à ses enfants et surtout ses filles...
... le suicide de son fils Rodolphe...
Le suicide fut plus problématique à gérer que la mort du fils, fils dont d'ailleurs elle ne s'était pour ainsi dire jamais occupée si ce n'est une fois afin d'exiger le renvoi d'un précepteur ensuite, le renvoi obtenu, elle partit pour de nouveaux voyages, sous d'autres cieux. Second problème, il n'y a pas de fils de rechange, l'impératrice ayant fermé sa chambre à son époux. Il eut mieux valu que l'enfant "hongroise", dite aussi "de la réconciliation" fut un garçon. Il aurait été encore plus positif d'être moins vénérée peut être et plus prolifique, ceci aurait évité bien des problèmes dynastiques. Le problème est aussi le suicide et de plus avec une toute jeune fille. Des négociations avec le Vatican sont à entreprendre pour des obsèques religieuses. On trouvera une porte de sortie bancale pour expliquer le geste.
Je comprends donc que l'on puisse se sentir un chouïa mal à l'aise, parce-que le moment est venu de se poser les bonnes questions et comme se remettre en cause est du domaine de l'impossible chez les deux époux.
... l'assassinat de son beau-frère, l'empereur du Mexique...
Là on atteint des sommets sachant l'entente qui régnait entre les deux frères et entre leurs deux épouses... A ce moment la seule à plaindre est l'impératrice douairière Sophie ; Charlotte aussi qui s'est démenée pour un peu d'aide et désormais est enfermée dans la folie, mais là encore c'est Sissi la plus à plaindre...
... Avant qu'elle-même ne périsse sous le couteau d'un anarchiste.
Et oui, sur ce coup là, elle n'a pas eu le temps de se morfondre.
Tiens on aurait pu charger la barque en évoquant Louis II, le fils de son cousin germain, son "âme soeur"...
Nous voici donc parés, la larmichette à l'oeil. La journaliste ratisse large et évoque la fratrie :
... Sophie duchesse d'Alençon, morte brûlée dans l'incendie du bazar de la charité à Paris...
Avant de brûler, la duchesse d'Alençon fut plusieurs fois "recommandée" à des "maisons de repos". Ses sens la portaient à s'égarer un peu... L'âge venant, elle donnera dans le caritatif. Lorsque l'on songe qu'elle fut fiancée à Louis II et que Louis II refusant soudain tout engagement plus avant il y eut des tractations entre l'Autriche et la Bavière. Elisabeth essaiera de convaincre Louis II en lui offrant sa soeur tout en étant consciente de ce qui attendait la benjamine. Ce sera le début d'une longue rupture entre l'impératrice et le roi de Bavière qui ne cédera pas.
... Marie, reine de Naples fut mariée à un souverain incapable...
Là encore, Marie n'avait nullement le couteau sous la gorge, preuve en est elle trouvera de quoi satisfaire ses sens avec qui bon lui semblera...
... Mathilde... qui s'associa au combat de sa soeur...
Tiens ? Il est vrai qu'elle avait épousé le frère. Le combat, quel combat ? Ah, peut être dans le choix des amants... Pas de chance, Mathilde se retrouvera engrossée. Elisabeth arrangera le tout et l'accouchement se fera le plus discrètement possible. C'est chouette une soeur qui se souvient soudain qu'elle peut exiger...
... l'aîné renonça à ses droits dynastiques pour épouser une comédienne...
Ludwig fait un mariage morganatique et là encore, François-Joseph ne peut refuser à son épouse de donner un nom à une actrice -dont Ludwig se séparera- et de doter sa "nièce", Marie. Encore un bon tuyau de son épouse lorsque l'on sait que pour problème de Mayerling, Marie est loin d'être très clean sans compter avec les mémoires qu'elle fera paraître où elle évoque sa tante impératrice...
Bref, que du beau monde... Sans doute Marie et Mathilde avaient elles aussi un comportement très anti-conformiste ainsi que Sophie, dommage qu'elles n'aient pas été associées à leur soeur pour l'indépendance sans l'autonomie mais bien heureuse de retrouver l'âge venant des époux bien compréhensifs : normal, c'était le conformisme de l'époque.

Je suis loin de brosser un tableau terne et j'évoque les personnages "second-rôles". Je passe Madame Schratt, un compromis très bien accepté par le couple : quel amour ! Ceci aussi est à classer dans l'anticonformisme ? Ou peut être déjà la vision de la liberté au sein du couple ?

Citer :
Je comprends bien cette dialectique de vouloir mesurer l'importance de personnages historiques au regard de leur apport au mouvement et aux transformations de société qu'ils apportent...

Simplement parce-que c'est un forum d'Histoire. J'imagine donc un forum évoquant les personnages qui font l'Histoire mais pas les histoires d'alcôves ou autres. Pour ceci, il existe d'autres forums j'imagine. Pourquoi évoquer des personnes qui n'apportent rien ? Et de plus rien à l'Histoire ? Le tour du sujet est fait, c'est bon. La complexité du personnage n'a pas inversé les pôles, pas même impacté sur la politique de son époux.

Citer :
et moi je considère qu'ils peut être tout aussi intéressant d'étudier (et de faire partager à d'autres) les raisons qui en ont fait qu'un mythe ait pu se construire à partir d'autres éléments que ces facteurs.

Devrait-on ouvrir un lien sur la mère de Charlemagne sous prétexte du mythe de ses grands pieds ? Et pourtant ce fut une maîtresse femme.

Citer :
Autrement dit, c'est la mystère de ce mythe qui est intéressant

Le mystère du mythe... Ceci va en effet de paire je vous l'accorde : il faut du mystère pour créer un mythe. C'est d'ailleurs au fur et à mesure que s'ouvrent les archives que les mythes tombent un à un. Rien de nouveau concernant Elisabeth, rien de nouveau concernant Mayerling, le tour est donc vite fait.
Je ne vois aucun mystère chez cette femme. De nos jours, on lui aurait indiqué un bon thérapeute et à ceci une médication, rien de mythique donc.

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J’ai effectué une sélection que j’espère « non-partisane » d’extraits de l’avant propos du livre, qui me semble être un bon équilibre entre les ouvrages courtisans de Corti et ses successeurs, et ceux plus "romantiques" de la période plus contemporaine et médiatique… Je mets à part l’ouvrage de Jean des Cars et de N. Avril qu’il faut que je relise une seconde –ou troisième fois ? je ne me rappelle plus en fait- lol .
J’entends par académique une étude documentaire dont on tire des conclusions à partir de connaissances plus générales permettant de mettre en perspective les faits et les personnages. C’est ce que fait B.H. à partir d’une chronologie qui me semble plutôt fiable, et qui se construit naturellement à travers des prismes que l’on peut juger un peu bancals –le traitement en chapitres romancés-, mais elle a sans doute dû composer avec les exigences de son éditeur. Son parti pris est de faire ressortir le côté iconoclaste du personnage et de percer certaines zones en demi-teintes ou inexplorées, là elle réussit moyennement son pari à mon avis.

« La femme dont cette biographie fait l'objet fut quelqu'un qui, refusant le plus consciemment du monde de se comporter selon son rang, sut viser et atteindre un but auquel seuL le mouvement des femmes devait de nos jours donner un nom : la 'réalisation de soi'.

E.A. ne joua aucun des rôles qui lui étaient impartis par la tradition de son milieu : ni celui d'épouse aimante et dévouée, ni celui de mère de famille, ni celui de première figure représentative d'un gigantesque empire. Elle revendiqua et parvint à faire prévaloir ses droits comme individu. Que cette 'réalisation de soi' ne lui ait pas apporté le bonheur, c'est bien ce qui constitue le tragique de son histoire personnelle - pour ne rien dire des tragédies que ses refus entraînèrent dans son entourage familial le plus proche.

Impératrice d'Autriche et reine de Hongrie et de Bohême -encore n'étaient ce là que ses titres principaux-, E. était républicaine dans l'âme ; elle qualifiait l'antique monarchie de "fossile des splendeurs passées", et la comparait à un chêne appelé à tomber après avoir "fait son temps". Fustigeant les abus du système aristocratique et raillant les rois et les princes, à l'exemple de son vénéré maître Henri Heine, elle était dépourvue de toute "conscience de classe", à tel point que l'impératrice et reine finit par apparaître, à la cour de Vienne, comme un corps étranger, comme une véritable provocation envers cette haute société dont toute l'existence obéissait à des règles consacrées par les siècles - et c'était bien là ce que cherchait E.


Cette impératrice gagnée à la démocratie constitue par elle-même une singularité, voire une curiosité et d'autre part, son cas fait bien apparaître toute la force qu'avaient acquise les idées antimonarchiques à la fin du XIXe siècle : elles atteignaient les princes eux-mêmes, qui commençaient à s'interroger sur la légitimité de leur position privilégiée, héritée et non point acquise.
...
En effet, la conscience de leur individualité poussait les aristocrates gagnés aux idées modernes à vouloir s'affirmer face à leurs semblables, essentiellement par ces vertus bourgeoises qu'étaient l'efficacité et la culture. Mais il leur fallait alors bien souvent se reconnaître incapables de soutenir la concurrence sur ce plan, du moins avec tout le succès qu'aurait exigé leur origine ; ils devaient admettre, par conséquent, puisque leur valeur personnelle n'était pas en rapport avec leur position sociale, qu'ils ne représentaient en définitive qu'un titre qu'ils n'avaient rien fait pour acquérir et une fonction à laquelle ils n'attachaient plus aucune valeur. Ce fut le drame d'E., puis de son fils Rodolphe.

Le destin d'E. est tout empli de cette tension, de cet acharnement à se définir comme individu. Sa première tentative -la mieux réussie d'ailleurs- fut d'acquérir la beauté : car cette légendaire beauté, loin d'être un don de la nature, résultait de la discipline de fer qu'elle s'imposa tout au long de son existence et qui confinait parfois à la torture physique.
...
Soulignons cependant que plus E. cherchait à se poser en personne privée, moins elle l'était en fait.
...
Particulièrement lourde de conséquence fut l'attitude d'E. à l'égard de son époux et de son fils -lesquels restaient en tout état de cause l'empereur et le prince héritier du plus grand empire d'Europe après la Russie.
...
Ce ne serait pas rendre justice à ces deux hommes, si importants dans l'histoire de l'Autriche, que de préserver à toute force de l'impératrice l'image qui a prévalu jusqu'ici en raison d'un choix timoré, voir d'une certaines dissimulation des sources disponibles. »
…Ici, B.H. met une distance entre son travail et celui dE. Corti et des auteurs thuriféraires ayant bâti à gros coup de truelle courtisane, l’image d’E.
Pour ma part, je m'estime tenue par une exigence scientifique : je considère, en outre, la figure d'E. -avec tout ce qu'elle comporte de problématique, de tout à fait singulier et d'étonnament "moderne"- comme très caractéristique du déclin de la monarchie austro-hongroise...
B.H. revient sur la jeune E. arrivée à Vienne avant son mariage
E. était d’un naturel chaleureux et sensible à l’injustice. Depuis son plus jeune âge, on l’avait incitée, de même que ses frères et sœurs, à se soucier des pauvres et des malades. Elle était dépourvue de toute arrogance de caste et connaissait les maisons des pauvres gens aux alentours de Possenhofen. Surtout, elle n’était pas superficielle ; tout au contraire, elle avait très tôt manifesté un penchant pour la réflexion et la recherche, derrière l’aspect formel des choses, de leur « nature », de leur « vérité », sur un mode enfantin certes et elle devait conserver toute sa vie ce trait de caractère précoce.
Toutes ces qualités, qu’elle devait à une enfance marquée par la tendresse plus que par la discipline, ainsi qu’à son tempérament sensible, n’étaient plus ici d’aucune utilité et apparurent même négatives. Son absence de hauteur aristocratique n’avait rien, à Vienne, de méritoire, mais était plutôt blâmable, tout comme le mépris vis-à-vis des formes. Car tout, à la Cour, reposait pour une large part sur le protocole et le cérémonial. De vérité, d’authenticité, il n’était en aucune façon question. Tout ce que Sissi considérait comme de pures formalités revêtait, en ces années d’après 1848, une grande signification politique : il fallait situer la famille régnante résolument au-dessus de l’humanité « ordinaire », la rendre inaccessible, inattaquable, manifester de manière concrète la grâce divine dont elle tirait son pouvoir.
Dès le lendemain des fiançailles, on entreprit donc de tranformer cet être chaleureux qui était tel que l’avaient espéré les peuples de l’empire, en un personnage de représentation, le plus magnifique que l’Autriche eût jamais connu, mais fait pour la seule Cour. Tous les conflits futurs étaient déjà là en germe pendant les mois qui précédèrent les noces, en raison de cette distorsion entre une personnalité sensible et sincère, et la façon dont la Cour tenterait de l’accaparer.

Je pense ici que B.H. aurait dû insister davantage sur l'enjeu énorme que représentait E. en regard des événements de 48 et comment la monarchie saisissait la l’une de ses dernières chances pour restaurer de façon éclatante, le retour et la confirmation de l’absolutisme des Habsbourg. C’est donc fortement pénétré de cet enjeu politique, que l’on doit lire la « prise en main » par Sophie de la jeune impératrice, et que d’un point de vue stratégique, sa formation constituait un enjeu considérable pour l’avenir de la monarchie.
Il est intéressant ici de voir comment le refus d’E. de jouer son rôle rejoindra d’une part le peu de considération politique qu’elle aura plus tard pour la monarchie , mais aussi une volonté précoce étonnante d’affirmation de son individualité contre la toute puissante Cour de Vienne. La prise en main de l’archiduchesse a commencé dès la présentation à Ischl et s’est poursuivie jusqu’aux années où Sophie se retirera de la cour après la mort de Maximilien. On peut aisément comprendre qu'elle ait choisi de fuir plutôt que d'avoir à affronter un tel dragon chaque jour et à subir des humiliations devant toute la Cour. A chaque fois qu’elle retournera à la Hofburg ou a Schonbrunn, il y aura des esclandres.
Je pense qu'on ne peut pas lui faire décemment le reproche de vouloir se défendre et de réagir, et j'estime que l'égoisme qu'elle manifeste peut sans doute s'expliquer comme une réaction. Mais je persiste à me questionner sur le fait qu'elle soit ou non une personne généreuse à l'origine, comme semble vouloir le démontrer B.H.
J’espère que les extraits permettront à d’autres d’apporter d’autres arguments à ce débat : Elisabeth d’Autriche mérite-t-elle qu’on s’intéresse à elle ou non ?

J'ai moi aussi beaucoup d'intérêt pour Louis II mais mis à part le livre de Jean Des Cars et le film de Visconti, je n'ai rien trouvé qui soit vraiment plaisant à lire tout en apportant le minimum d'informations nécessaire à la complexité du personnage.

Je ne veux surtout pas lire de bouquins d'experts médicaux...

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Historicus autodidactus
homines manentes apud Amestelledamme


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Message Publié : 10 Déc 2013 2:11 
Hors-ligne
Philippe de Commines
Philippe de Commines
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Inscription : 05 Juil 2011 14:39
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Localisation : Armorique
frenchinamst a écrit :
B.H. revient sur la jeune E. arrivée à Vienne avant son mariage

Hamann n'est pas historienne. Son livre ne s'inscrit pas -pour ce qui me concerne- dans une biographie. Tout au plus une analyse. De plus qui n'écoute qu'une cloche n'a qu'un son...

Citer :
E. était d’un naturel chaleureux et sensible à l’injustice. Depuis son plus jeune âge, on l’avait incitée, de même que ses frères et sœurs, à se soucier des pauvres et des malades.

D'où tient-elle ceci, quelles sont ses sources ? Les précepteurs ? Les gouvernantes ?

Citer :
Dès le lendemain des fiançailles, on entreprit donc de tranformer cet être chaleureux qui était tel que l’avaient espéré les peuples de l’empire, en un personnage de représentation, le plus magnifique que l’Autriche eût jamais connu, mais fait pour la seule Cour.

Et qu'espéraient les peuples de l'Empire ? Le paysan du fin fond de la Bohême ?

Citer :
La prise en main de l’archiduchesse a commencé dès la présentation à Ischl et s’est poursuivie jusqu’aux années où Sophie se retirera de la cour après la mort de Maximilien. On peut aisément comprendre qu'elle ait choisi de fuir plutôt que d'avoir à affronter un tel dragon chaque jour et à subir des humiliations devant toute la Cour.

Et nous voici de nouveau confrontés aux clichés de la méchante belle-mère voulant cadrer l'innocente agnelle...
Il existe une Etiquette incontournable et en ceci même François-Joseph s'opposera parfois à son épouse tout en ménageant sa mère. C'est un peu oublier combien fut difficile l'insertion de Sophie. Elisabeth, en tant que belle-mère sera -à mon avis- encore pire. Elle se trouve devant une princesse qui connait cette étiquette, qui n'a donc rien à apprendre, qui est rompue à son rôle et ne cherche pas à "tirer la couverture".
Et là, ce qui est étonnant est qu'il existe des écrits où l'on voit le fils (Rodolphe) se dresser contre la mère pour soutenir son épouse. Epouse qui sera toujours présente même dans les moments les plus difficiles, qui soutiendra son mari devant son beau-père, qui arrondira les angles chaque fois qu'il le faudra et au final qui se "tapera" les corvées dont sa belle-mère ne veut pas s'encombrer. Il est certain que les moments d'intimité ne pouvaient guère être "porteurs" dans de telles conditions...
On peut évoquer le parcours de Gisèle et même celui de l'enfant chérie Marie-Valérie, totalement étouffée. Contrairement aux souhaits d'Elisabeth qui se projette dans chacun de ses enfants et ne souhaite pas des unions trop tôt, tous seront mariés assez jeunes. Il faut croire que l'ambiance familiale n'était pas des plus chaleureuses pour vouloir quitter si vite un nid où une mère semble s'inquiéter du bien être de ses enfants. Mais non, là encore Elisabeth se projette...
Et puis, son narcissisme maladif fera que le fait d'être "grand-mère" n'arrangera en rien ses rapports familiaux.
En tout, partout et pour tous, elle veut imposer ses règles de vie qui consistent simplement à vivre sans règles sinon les siennes qui sont de plus à géométrie variable selon ses humeurs.
La question n'est pas de savoir si Elisabeth mérite que l'on s'intéresse à elle ou non mais plutôt, présente-t-elle un intérêt quelconque en tant que personne ? Si les deuils à répétition n'avaient pas marqué cette famille, si les films sirupeux de l'après-guerre ne nous avaient pas été passés en boucle ? Si l'actrice qui jouait l'impératrice n'avait simplement donné que dans ce genre de rôles et n'avait pas -de son côté- eu une vie "marquée", qui s'intéresserait à Elisabeth petite duchesse en Bavière, repérée par l'Empereur d'Autriche habitué "aux comtesses hygiéniques" et un moment charmé avant de s'attacher à son travail ?
Ce genre de "destin" plait toujours. Qui n'a pas été intrigué par l'apparition d'Anastasia ? Et soudain, le carnage d'Ekaterinenbourg a fait le buzz. Le "Martyr" dans "la haute" se vend toujours aussi bien.

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"... Et si je te semble avoir agi follement, peut-être suis-je accusée de folie par un insensé." (Sophocle)


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