Décret du 4 mai 1792 :
« L'assemblée nationale, voulant, au commencement d'une guerre entreprise pour la défense de la liberté, régler, d'après les principes de la justice et de l'humanité, le traitement des militaires ennemis que le sort des combats mettrait au pouvoir de la nation française; Considérant qu'aux termes de la déclaration des droits, lorsque la société est forcée de priver un homme de sa liberté, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne, doit être sévèrement réprimée par la loi ; Reconnaissant que ce principe s'applique plus particulièrement encore aux prisonniers de guerre, qui, ne s'étant pas rangés volontairement sous la puissance civile de la nation, demeurent sous la sauvegarde plus spéciale du droit naturel des hommes et des peuples, décrète ce qui suit : Art. 1er. Les prisonniers de guerre sont sous la sauvegarde de la nation et la protection spéciale de la loi. Art. 2. Toute rigueur, violence ou insultes commises envers un prisonnier de guerre, seront punies comme si ces excès avaient été commis contre un citoyen français. Art. 3. Les prisonniers de guerre seront transportés sur les derrières des armées, dans les dépôts que les généraux auront désignés. Art. 4. Ils seront ensuite répartis dans l'intérieur du royaume, à la distance de vingt lieues au moins des frontières, et placés principalement dans les chefs-lieux de district et les villes fermées. Art. 5. Il leur sera alloué provisoirement pour leur entretien, sur les fonds extraordinaires de la guerre, la totalité de la solde et des appointements de paix dont jouissent les grades correspondants de l'infanterie française. Art. 6. Les prisonniers de guerre seront admis à prendre, en présence des officiers municipaux, l'engagement d'honneur de ne point s'écarter du lieu qui leur aura été désigné pour demeure ; et, dans ce cas, ils auront la ville pour prison, et ne seront soumis qu'aux appels qui seront fixés par un règlement particulier. Art. 7. Ceux qui, outre l'engagement d'honneur, fourniront une caution, ne seront tenus de se représenter qu'à un appel par jour, sans pouvoir néanmoins s'écarter de la ville de plus de deux lieues. Art. 8. Les uns et les autres seront tenus d'être vêtus de leur uniforme, et ne pourront, en aucun cas, avoir ni porter des armes. Art. 9. Ceux qui ne fourniront point de caution et refuseraient l'engagement d'honneur mentionné en l'article 6, seront détenus dans les édifices nationaux fermés. Art. 10.Ceux qui, ayant pris l'engagement d'honneur ou fourni caution, manqueraient aux obligations qui leur sont imposées par les articles 6, 7 et 8 , seront traduits devant le tribunal de police correctionnelle, et condamnés à garder prison pendant un temps plus ou moins long, selon la gravité des circonstances, et qui pourra être indéfini si le projet d'évasion est prouvé. Art. 11. Les prisonniers de guerre jouiront, au surplus, du droit commun des Français. Ils pourront se livrer à toute espèce de profession , en remplissant les conditions prescrites par les lois. Ils seront traduits devant les tribunaux ordinaires en cas de délit, y seront poursuivis pour révolte, et y recevront la réparation des injures ou dommages dont ils auraient à se plaindre. Art. 12.Le pouvoir exécutif présentera, dans le plus court délai, un projet de règlement sur les lieux où les prisonniers de guerre seront transférés, sur le mode de leur translation, sur le nombre qui en pourra être réuni dans le même lieu, sur la manière dont ils y seront surveillés et gardés, sur les appels auxquels seront soumis ceux qui jouiront de la faveur des articles 6 et 7, sur la police des maisons où seront renfermés ceux qui ne jouiront pas de cette faveur, sur la correspondance des uns et des autres avec l'étranger, et, en un mot , sur tous les moyens d'exécution du présent décret. Art. 13.Le présent décret sera porté dans le jour à la sanction. »
En vertu de l'article 12, un règlement fut présenté le 20 juin suivant : « Art. 1er. Les prisonniers de guerre sont sous la sauvegarde de la nation et la protection spéciale de la loi. Art. 2. Toute rigueur, violence ou insultes commises envers un prisonnier de guerre, seront punies comme si ces excès avaient été commis contre un citoyen français. Art. 3. Les prisonniers de guerre seront d'abord transportés sur les derrières des armées, dans les dépôts que les généraux auront désignés. Art. 4. Ils seront ensuite répartis dans les villes d'Amiens, Châlons-sur-Marne, Langres, Mâcon, Romans, le Pont-Saint-Esprit, Toulouse, Angoulême, Angers et Evreux. Art. 5. Il ne pourra y avoir plus de deux cents prisonniers dans chacune des villes ci-dessus désignées ; et dans le cas où le nombre des prisonniers de guerre deviendrait trop considérable, ils seraient répartis dans les chefs-lieux de district qui seront alors désignés par le ministre de la guerre. Art. 6. Les prisonniers de guerre seront casernés, autant que faire se pourra, dans les villes qui leur sont désignées; en conséquence, les commissaires ordinaires des guerres commis pour cet objet par sa Majesté, disposeront dans les bâtiments militaires existant dans lesdites villes, et qui ne seront pas jugés nécessaires aux troupes, le logement pour deux cents prisonniers. A défaut de bâtiments militaires, les commissaires ordinaires des guerres se concerteront avec les officiers municipaux des villes, pour établir le logement des prisonniers, soit dans des bâtiments nationaux dont on pourrait encore disposer, soit dans des maisons louées à cet effet, et où il n'y aurait point de locataires. Art. 7. Les sergents, maréchaux-des-logis, caporaux, brigadiers et les soldats de toutes les armes, seront établis dans ces logements par chambrée, et coucheront deux à deux. Art. 8. Les adjudants et officiers de tous grades auront des logements suivant leurs grades; mais les adjudants, sous-lieutenants et lieutenants seront logés de deux en deux. Art. 9. Les prisonniers de guerre seront admis à prendre, en présence des officiers municipaux des villes où ils seront transférés, l'engagement d'honneur de ne point s'écarter du lieu qui leur aura été désigné pour demeure; et dans ce cas ils auront la ville pour prison, et seront seulement soumis aux appels déterminés dans l'article suivant. Art. 10. sera fait tous les jours un premier appel des prisonniers de guerre, à sept heures du matin, un second à midi, et le troisième à l'heure qui aura été fixée par le commandant militaire dans sa place, pour la retraite. Art. 11. Les prisonniers de guerre qui, outre l'engagement d'honneur prescrit par l'article 7 de la loi du 5 mai 1792, et 9 du présent règlement, fourniront une caution, ne seront tenus de se représenter qu'à l'appel de la retraite , sans pouvoir néanmoins s'écarter de la ville de plus de deux lieues. Art. 12. Les prisonniers de guerre, quels qu'ils soient, seront tenus d'être vêtus de leur uniforme, et ne pourront, en aucun cas, avoir ni porter des armes. Art. 13. Ceux qui ne fourniront point de caution, et qui refuseront l'engagement d'honneur mentionné en l'art. 7 de la loi du 5 mai 1792, et 9 du présent règlement, seront détenus dans les édifices nationaux, et ils seront soumis dans ces lieux de détention, aux mêmes appels prescrits par l'article 10. Art. 14. Ceux qui ayant pris l'engagement d'honneur, ou fourni caution, manqueraient aux obligations qui leur sont imposées par les articles 7, 8 et 9 de la loi du 5 mai, et 9, 10 et 11 du présent règlement, seront traduits devant le tribunal de police correctionnelle, et condamnés à garder prison pendant un temps plus ou moins long, selon la gravité des circonstances, et qui pourra être indéfini si le projet d'évasion est prouvé. Art. 15. Il sera alloué provisoirement aux prisonniers de guerre, pour leur entretien, sur les fonds extraordinaires de la guerre, la totalité de la solde et des appointements de paix dont jouissent les grades correspondants de l'infanterie française. Art. 16. Les prisonniers de guerre casernés et ceux détenus dans les édifices nationaux, vivront en commun par chambrée. Art. 17. Les casernes ou maisons destinées au logement des prisonniers de guerre et les lieux de détention, seront garnis des fournitures habituelles au casernement des troupes. Art. 18. Pour la surveillance particulière des prisonniers de guerre dans les différentes villes qui leur sont assignées, il sera nommé par le roi, un officier pour veiller à ce qu'ils vivent en bonne intelligence, discipline et police dans les casernes ou maisons où ils seront établis. Art. 19. Il sera établi par le commandant militaire dans lesdites villes, une garde de police dans les casernes ou maisons où seront réunis les prisonniers de guerre; la force en sera déterminée suivant leur nombre. Art. 20. Pour pourvoir à la garde des prisonniers de guerre, sa Majesté fera rendre momentanément dans les villes qui leur sont assignées, où il n'y aura point de garnison, de compagnies de vétérans. Art. 21. Les prisonniers de guerre, quels qu'ils soient, ne pourront entretenir de correspondance avec l'étranger, que par des lettres ouvertes et qui seront remises au commissaire des guerres chargé de leur police, ou, à son défaut, au maire ou autre officier municipal, pour les faire parvenir à leur destination. Art. 22. Les prisonniers de guerre jouiront, au surplus, du droit commun à tous les Français; ils pourront se livrer à toute espèce de profession, en remplissant les conditions prescrites par les lois; ils seront traduits devant les tribunaux ordinaires en cas de délit, y seront poursuivis pour révolte, et y recevront la réparation des injures ou dommages dont ils auraient à se plaindre. Art. 23. Les prisonniers de guerre seront transférés des lieux de dépôt désignés par les généraux d'armées, dans les villes indiquées par l'article 4 du présent règlement, sous l'escorte de la gendarmerie nationale. Art. 24. Les prisonniers de guerre seront logés, autant qu'il se pourra, pendant leur translation, dans un même lieu, afin d'en assurer la surveillance. Les officiers municipaux des lieux de leur passage pourvoiront, en conséquence de cette disposition, au logement desdits prisonniers. Ils vivront pendant leur route au moyen de l'étape. Art. 25. Le commissaire ordonnateur des guerres du département dans lequel il sera établi des prisonniers de guerre, chargera un commissaire ordinaire des guerres de leur police. Art. 26. Ce commissaire ordinaire des guerres sera chargé de recevoir les états de translation qui lui seront remis par les commandants d'escorte de la gendarmerie nationale, et de leur donner un reçu de la quantité et de la qualité des prisonniers qui auront été amenés par lesdites escortes. Il fera payer, sur des extraits de revue, la solde et les appointements aux prisonniers , ainsi qu'il est prescrit par l'article 15 ci-dessus ; il visitera souvent les casernes ou maisons qui en tiendront lieu, où seront établis les prisonniers de guerre, ainsi que les lieux où seront renfermés ceux qui n'auront pas joui de la faveur accordée par les articles 7, 8 et 9 de la loi du 5 mai 1792, afin de s'assurer de la salubrité desdits lieux, y maintenir la propreté, et de veiller à la sûreté des bâtiments. Il fera visiter journellement les prisonniers dans lesdits lieux par le chirurgien-major de l'hôpital, et y fera entrer ceux qui se trouveront malades et qui ne pourront être traités dans la chambre. Il prêtera enfin la surveillance la plus active sur les établissements des prisonniers de guerre. »
_________________ " Grâce aux prisonniers. Bonchamps le veut. Bonchamps l'ordonne ! " (d'Autichamp)
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