Karolvs a écrit :
En vérité, une majorité d’Allemands souhaitaient plus. Un opposant libéral de Mayence, critiquant l'alliance de son Prince Electeur de Mayence avec la "bureaucratique et particulariste" armée de son voisin de Hesse-Darmstadt, a dit ceci : «Je préfère la plus dure des armées prussiennes à cette misère micro-étatique » ("Lieber das schärfste preußische Militärregiment als diese kleinstaatliche Misere." Cette opinion était assez largement partagée en Allemagne. La majorité des Allemands (on appelait ce « parti » les "néo-prussiens" ont salué leur annexion avec plus de soulagement que de réticence, malgré la politique aggressive de Bismarck.
Goya a écrit :
Comme je ne connais pas suffisamment l'histoire de l'Allemagne , je dois
vous faire confiance pour ces précisions . Je m'étonne quand même qu'un
libéral choisisse militarisme et bureaucratie . Pour quelle raison le faisait-il ?Les protectionnismes entre ces petits états avaient-ils créé de la misère économique ?
Pour quelle raison il le faisait ?
Sans doute parce qu'une certaine union douanière et une prospérité du micro-commerce entre micro-Etats avait une portée limitée et atteindraoient à terme une limite problématique, dans un monde où 3 ou 4 grandes nations se partageaient la planète.
Sans doute parce qu'il pensait –et la plupart des Allemands pensaient ainsi- que la nation allemande unifiée était mieux à même d'assurer la sécurité des Allemands.
Et sans doute parce que si lui, roi de Prusse, ne le faisait pas, d'autres risquaient de le faire : certainement l'empire autrichien si les autres -russe à l'est et français à l'ouest- le toléraient.
Et nous qui voyons cette histoire une fois qu'elle est passée, nous pouvons nous demander si le puzzle allemand divisé n'aurait pas donné une autre "poudrière" en Europe, par le fait même que certains Etats allemands moribonds (une bavière de Louis II, par exemple) ou minuscules (un évêque-électeur de Mayence) auraient attiré la convoitise des grands empires voisins.
Parce que la construction d'une Allemagne unifiée forte était le seul moyen d'assurer la sécurité de la Prusse elle-même.
Parce que Guillaume de Prusse n'avait aucune raison de ne pas suivre l'exemple que les grandes puissances lui donnaient…
Etc…
Karolvs a écrit :
Pourquoi, selon vous, les Etats allemands ont-ils voulu améliorer leurs échanges commerciaux ? Pour faire joli ?
Goya a écrit :
Ne pouvez-vous concevoir qu'on développe des échanges commerciaux sans bureaucratie et appareil militaire ?
Moi, je peux le concevoir, mais eux, à l'époque, beaucoup moins... En effet, il était difficile de concevoir un commerce mondial sans colonies. Les colonies au XIXème-XXème, ne fallait-il pas il fallait les conquérir, puis les défendre ?
Goya a écrit :
Comment s'est ensuite fait le passage à une toute autre conception ? Est-ce par des "prises de conscience " ? Ou par la montée en puissance d'un lobby qui voulait autre chose ? L'émergence d'un lobby militaro-industriel ?
Karolvs a écrit :
Il n’y a pas eu de passage d’une conception de l’Allemagne (Zollverein) à une autre conception de l’Allemagne (unification), déclenchée par une subite « prise de conscience ».
Les Allemands étaient conscients de la «misère micro-étatique » depuis assez longtemps.
Par ailleurs, Zollverein (union douanière) et unification ont ceci de commun, qu’ils consistent tous deux, en quelque sorte, à «supprimer» des frontières intérieures. Le Zollverein n’était pas une autre conception ; c’était un pas vers l’union.
Goya a écrit :
Vous n'avez pas répondu sur le lobby militaro-industriel....
Le lobby industriel –je suppose qu'il existait en Allemagne dans les années 1850-1860- ne pouvait qu'approuver l'unification allemande, parce que seul un Etat centralisé fort pouvait relever le challenge de la révolution industrielle qui se profilait. De ce côté là, aussi, les micro-Etats étaient des "has been".
Goya a écrit :
Il n'y a pas beaucoup d'exemples de puissances qui ne soient aggressives (peut-être la Confédération Suisse au moyen-âge ) mais en règle générale elles disent ne faire rien d'autre que se défendre !
Karolvs a écrit :
C’est parce que la puissance est davantage une dynamique qu’un état. C’est comme le vélo : si tu n’avances pas, tu tombes.
Goya a écrit :
Il ne faut pas oublier qu'à la base de ces dynamiques , il y a des personnes et des groupes ....L'explication sera à ce niveau .
Certes. Ce sont des hommes qui sont le moteur de l'histoire. L'histoire n'est pas une mécanique.
Karolvs a écrit :
« Gott mit uns » ne signifie pas «Dieu est avec nous», mais «Dieu soit avec nous».
Goya a écrit :
Littéralement , cela veut dire aussi bien l'un que l'autre . Qu'est-ce qui fonde votre interprétation ?
Je n'interprète pas. Mon affirmation est fondée sur une connaissance de l'Allemand que je crois pas trop mauvaise.
Il est vrai que si on traduit "Gott mit uns" littéralement ont pourrait le traduire par "Dieu
est avec nous". Mais il ne faut pas le traduire littéralement.
La devise "Gott mit uns" qui était inscrite sur la boucle du ceinturon du soldat allemand en 14-18 puis 39-45 (quid de 1870 ?) est à prendre dans la forme exclamative. Regardez l'affiche ci-dessous. Vous y voyez le point d'exclamation.
Pour moi, il n'y a aucun doute : "Gott mit uns" ne peut pas signifier "Dieu
est avec nous", car un allemand s'exclamerait "Gott
ist mit uns!"
Et regardez attentivement ce cantique et l'hymne bavarois ; ils contiennent les mots Gott mit uns ; regardez bien la forme grammaticale. Ces chants n'ont rien de belliqueux.
1. Gott mit uns, und wir mit Gott,
So setzen wir die Schiffahrt fort.
Jeder tut, was sich gebührt,
Dann wird das Schiff recht gut geführt.
2. Jetzt fahr ich hin in stillem Frieden
Und laß die Meinen hinter mich…Le "Bayernhymne" :
Gott mit dir du Land der Bayern,
Heimaterde, Vaterland!
Über deinen weiten Gauen
Walte seine Segenshand!
Er behüte deine Fluren,
Schirme deiner Städte Bau
Und erhalte dir die Farben
Deines Himmels, Weiß und Blau!
2. Gott mit uns, dem Bayernvolke,
Wenn wir, unsrer Väter wert,
Stets in Eintracht und in Frieden
Bauen unsres Glückes Herd… Karolvs a écrit :
En tous cas, cela n’a rien à voir avec les théories racistes hitlériennes.
Goya a écrit :
Ils étaient quand même vachement gonflés ! Ma famille qui les a connus en 14 en savait quelque chose ....
Rien à voir avec la théorie nazie de la hiérarchie des races. Ici, c'est d'arrogance prussienne qu'il s'agit. Les officiers du kaiser étaient extrêmement hautains et sévères. Et les troufions allemands qui avaient été à leur "école" ont été plus ou moins formatés en ce sens (service militaire obligatoire de 7 ans, dont 3 ans de service actif ininterrompu et de 4 ans dans la réserve).
Karolvs a écrit :
A cette époque (et aujourd’hui encore) il n’y a pas de « puissance » sans d’importants moyens militaires. C’est un fait, une donnée objective.
Goya a écrit :
L'Europe depuis 60 ans démontre justement le contraire . Le Japon aussi .
Pourquoi ne concevez-vous la puissance que militairement ? Et le jeu des alliances , alors , pour les besoins de protection ?
Je maintiens ce que j'ai dit : à cette époque (XIXème-début du XXème siècle, il n’y a pas de « puissance » sans d’importants moyens militaires. Si vous connaissez une grnade puissance ou même une moyenne qui n'avait pas une armée forte, dites-nous laquelle.
En ce qui concerne les nouvelles formes de "puissance" que vous évoquez, celles d'aujourd'hui, je veux bien admettre que la puissance puisse se concevoir autrement que militairement. La Japon moderne est une puissance économique et l'europe en sera une demain. Mais pour l'instant, les plus grandes puissances au sens "classique" de ce terme sont les USA et la Chine. Non ?
Karolvs a écrit :
- l’unité allemande visait-elle à bouleverser l’équilibre existant ?
- les peuples allemands avaient-ils le droit légitime à s’unir dans un ensemble politique unifié ?
- devaient-ils renoncer à cette unification sous prétexte qu’elle venait déranger un certain ordre établi ?
- le militarisme a-t-il fait de l’Allemagne des Kaisers une puissance plus aggressive que les autres puissances ?
Goya a écrit :
C'est le dernier point qui pose problème . La politique d'armement et les
projets annexionistes sous Guillaume II étaient plus qu'une simple réaction à des actes que les autres auraient posés .
J'en conviens volontiers. L'Allemagne prussienne voulait être une grande puissance.
Mais y a-t-il vraiment une très grande différence avec ce que faisaient l'empire français ou l'empire russe ?
Karolvs a écrit :
-Mais le « système des valeurs » n’a-t-il pas changé en Europe ? Qui a peur de l’Allemagne récemment réunifiée ?
Goya a écrit :
Il semble avoir profondément changé . Touchons du bois !
Moi, je suis persuadé que l'Allemagne unie n'est plus un danger pour personne, car elle a maintenant des frontières sures et reconnues et, dans le concert des nations européennes, la place qu'elle mérite.