Le panachage des tenues est un fait marquant de la guerre de 14. Ne croyons pas que toute notre armée est passée du tout au tout du pantalon garance au bleu horizon. Depuis 1872, il y a un réel effort de modernisation de l'équipement, dont les tenues changent à peu près tous les 10 ans pour faire simple, mais là encore les traditions ou tout simplement les goûts des soldats (des officiers du moins) ont la dent dure : je fais au plus rapide...
- le beau dolman du modèle 1882, dont disposent un bon nombre d'unités a été supprimé en 1893 au profit d'une tunique, elle-même légèrement remodelé en 1907 mais totalement reconfigurée en 1913. A en voir les photos et à en lire les témoignages, et ce jusqu'au défilé de la Victoire, tous les modèles sont présents, y compris parfois le fameux dolman ! Sans compter les tenues d'essai et les innombrables effets de style variant d'un tailleur à l'autre pour les confections à partir de l'entrée en guerre... Il faudra attendre 1931 au mieux pour que tout ceci se rationalise quasi-définitivement (enfin jusqu'à 1940...).
Le pantalon garance, s'il est une réalité, n'est pas une généralité: l'artillerie, le génie, la gendarmerie, les pompiers, les douanes, les chasseurs, la coloniale, certaines unités indigènes n'en sont pas pourvues.
- les casques, en particulier ceux des dragons et des cuirassiers, ainsi que ceux (rares) de la gendarmerie à cheval avaient une utilité via la "crinière": éviter de fâcheux coups de sabres à la nuque. Leur handicap est dû à l'ornement, ostentatoire et lourd (au sens propre) et si le cimier a été un temps enlevé par la troupe, le casque Adrian (remanié en 1926) fut vite généralisé. Mais là encore, il n'est pas rare de voir des exceptions, souvent personnelles.
Le shako est encore présent dans la cavalerie légère.
- la cuirasse n'est pas l'apanage de la France: l'Allemagne dispose aussi d'une troupe cuirassée. Effectivement, elle permet de préserver un certain "panache" hors charges mais l'encombrement de l'équipement sur un front qui ne lui sied plus l'a vite remisée. Certains ne garderont que la matelassure de la cuirasse, qui protège entre autres du froid.
- Depuis la disparition du corps des lanciers en 1872, les dragons et les hussards, à l'instar des uhlans allemands, ont hérité de la lance et entrent en guerre avec. A noter que les anglais re-doteront de cette arme leurs unités de lanciers en ... 1928. Les dragons d'ailleurs sont les véritables polyvalent de la cavalerie: dès l'Empire, ils sont à cheval entre le cavalier et le fantassin (notez le jeu de mots
): une fois leur monture devenue inutile, ils sont formés pour se battre à pieds. Napoléon ne manquait pas de sarcasme face à ce double emploi... Avec la gendramerie, ils furent les premiers dotés à ce titre de la carabine modèle 1890.
- A cette époque, la France ne fait pas figure d'exception archaïque vis à vis des autres belligérants: il suffit de voir les équipements et uniformes des autres armées étrangères, en particulier de l'Allemagne et de la Russie. Seuls les pays du Commonwealth, s'approchent des standards modernes, bien que les écossais montent en charge avec kilts et cornemuses et que les australiens ont une coiffure empruntée parfois à Crocodile Dundee...
- Un autre débat dans la cavalerie de ligne, au moins aussi important que la cuirasse voire plus est l'adoption du sabre: quel modèle utiliser?
Seul les sabres de cavalerie légère modèle 1822 (encore en service dans la Garde Républicaine) et de carabiniers modèle 1854 ainsi que le modèle 1854/1882 (lame du 1854 et poignée du 1882) donnent satisfaction.
Pour autant, d'autres modèles censés remplacer à chaque fois les précédents encombrent les casernes.
En effet, le sabre de cavalerie de ligne modèle 1822, dit "bancal" ne donne pas satisfaction: lame trop courbe pour l'estoc et pas assez pour la taille.
Idem pour le sabre de cavalerie modèle 1882: avec une lame de 95cm pour les cuirassiers et 92.5 cm pour les dragons, ils n'ont pas été distribués en raison de la faiblesse de la lame (seul le modèle pour la cavalerie légère à lame de 87 cm va à peu près).
Face à ce florilège d'échecs de modèles pour la ligne, un nouveau sabre sera adopté en 1896. Doté d'une garde plus protectrice, il égale pour autant les faiblesses du modèle du 1882....
Pour résumer, sur les 6 sabres de cavalerie en service, dont 3 destinés expressément à la ligne, seuls 3 donneront satisfaction, tous destinés plus ou moins à la cavalerie légère: modèle 1822 cavalerie légère, modèle 1854 carabiniers, modèle 1854/1882... et c'est avec ceux-ci et le malheureux "bancal" que la cavalerie de ligne entrera en guerre. Les autres sont conservés pour l'instruction.
Dans l'infanterie, les choses vont beaucoup mieux: le sabre d'officier d'infanterie modèle 1882 s'est généralisé et donne satisfaction. Il sera utilisé jusqu'à la 2nde guerre mondiale malgré l'abolition du port du sabre en 1934 et est encore l'arme d'apparat des officiers de pompiers.
Notons que le sabre n'est pas mort avec la 1ère guerre. Si la cuirasse paraît obsolète en 1914, que dire des sabres modèle 1923, de cavalerie modèle 1961, d'infanterie modèle 1961, d'officier de marine modèle 1957 et de prise d'armes modèle 1974 ?
Rassurons-nous, ce ne sont que des pastiches simplifiés et de moindre qualité destinés à l'appart. Bien que...