On semble oublier que dernier poilu ne veut pas dire dernier témoin. Il y a sûrement encore des gens qui étaient trop jeunes pour avoir été mobilisés mais qui s'en souviennent, c'est quand ils auront eux-aussi disparu que la Grande guerre sera rangé avec les multiples autres guerres qui ne sont que de l'histoire et plus de la mémoire vivante. Et encore après la disparition des derniers témoins qui étaient enfants pendant la Grande Guerre, il y a ceux dont je fais partie qui ont entendu les anciens poilus raconter leur guerre. Il faut du temps avant de passer de de la mémoire vivante à celle de l'histoire.

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Alceste

Que les petites différences entre les vêtements qui couvrent nos débiles corps, entre tous nos langages insuffisants... ne soient pas des signaux de haine et de persécution...

La prière de Voltaire, Traité sur la tolérance, Chapitre XXIII

Oui, bien sur, j'ai entendu mon grand-père en parler, mais en ai-je parlé à mes enfants. Un peu, certes, mais si peu.

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Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer (Guillaume le Taciturne)

Justement il me semble que c'est à nous que cela s'arrête nous avons reçu leur vécu mais nous ne pouvons pas le transmettre. J'ajouterai que la pudeur les empêchait de parler de l'horreur. Ils racontaient plutôt des anecdotes plus souriantes. Encore que quand il me parlait de l'état de ses fesses après huit jours d'entraînement intensif de cavalier pour l'artillerie montée, je ne saisissais pas bien ce qu'il y avait de douleur dans cette arme pour les hommes et pour les chevaux.

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Alceste

Que les petites différences entre les vêtements qui couvrent nos débiles corps, entre tous nos langages insuffisants... ne soient pas des signaux de haine et de persécution...

La prière de Voltaire, Traité sur la tolérance, Chapitre XXIII

Mon grand père, mes grands oncles en parlaient fort peu. J'étais impressionné par un grand-oncle qui avait une jambe en moins, mais j'étais trop jeune quand il est mort pour parler avec lui. Ce n'est que récemment que j'ai appris en rangeant divers papiers de famille qu'il était chevalier de la Légion d'honneur et croix de guerre. Quel a pu être son parcours, je n'en sais rien, et ceux qui savaient se sont tus à jamais.

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Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer (Guillaume le Taciturne)

Moi j'ai la chance d'avoir eu mon grand père jusqu'à l'âge de 24 ans. Lui c'était à l'estomac qu'il avait été blessé. Un éclat d'obus fiché dans la parois. Un demi-millimètre de plus, perforation, les sucs gastriques se répandaient dans le corps et mon grand père n'aurait jamais été grand père. Parfois aussi il me provoquait en racontant qu'il avait utilisé la cathédrale d'Amiens pour régler le tir dans sa batterie. C'est plat la Somme pas beaucoup de points de mire et la vie de beaucoup d'hommes dépend d'un tir bien réglé. Je me demande si ce ne serait pas une jolie idée de faire un site mémorial, on pourrait rassembler nos souvenirs et nos photos.
Il me parlait aussi de son frère mort au "chemin des dames".

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Alceste

Que les petites différences entre les vêtements qui couvrent nos débiles corps, entre tous nos langages insuffisants... ne soient pas des signaux de haine et de persécution...

La prière de Voltaire, Traité sur la tolérance, Chapitre XXIII

Jean-Marc: Pour votre grand-oncle, vous le savez peut être déjà, mais vous pouvez obtenir son fichier matricule (où l'on trouve déjà pas mal d'info) dans le département de son lieu de recrutement à ses 20 ans.
Si il était officier, un dossier existe au archives militaires.
Une fois que vous aurez son numéro matricule, il vous suffira d'écrire au bcaam pour obtenir la liste de ses citations, et à un autre organisme pour avoir son dossier médical si il a été conservé.

J'ai fait cela pour deux de mes ancêtres (mes arrières-arrières-grands-pères), et je suis très content des informations que j'ai pu récolté...

Mon père avait été un témoin"privilégié"vivant au milieu des troupes dans un camp retranché. Les lignes étaient à moins de 20 kilomètres....Il m'a donc parlé de son vécu ,de sa volonté de s'engager à 17 ans pour devenir pilote.....de la seule paire de claques que mon grand-père lui avait jamais décernée quand il avait présenté le papier d'engagement à contresigner par les parents,accompagnée par cette phrase ' tu ne crois pas que deux tués déjà dans la famille ça suffit ?"
Mon oncle maternel était une "gueule cassée"...Il était ancien fusilier-marin,il avait fait l'Yser,il m'avait parlé des patrouilles de nuit dans le "nomansland "dans l'eau,la boue,les cadavres,les rats....la mort qui frappait les copains dont le sang ou la cervelle,les viscères vous éclaboussaient......
J'en ai parlé à mes fils et j'ai l'intention de laisser un souvenir écrit pourmon unique petit fils : la dernière personne de ma famille.....Après lui,je crains fort que le souvenir soit balayé par l'extinction définitive....d'ici 100 ans....quand.d'autres "Français" vivront en ce pays

Je sais tout ça, c'est le temps qui manque. Et puis honnêtement, si les citations peuvent m'intéresser, le dossier médical me laisse indifférent. Et les 120 ans ne seront que dans deux ans.

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Il n'est pas nécessaire d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer (Guillaume le Taciturne)

Ne désesperez pas, un jeu vidéo sortira certainement pour l'évènement ...

Cela dit, oui le souvenir, le symbole du 11 novembre se perd. Comme exemple, l'une de ces "initiatives citoyennes" bien belge lancée par de jeunes universitaires dans l'espoir d'avoir un gouvernement, avait choisi la date du 11 novembre l'année dernière. Au Soldat inconnu ? Non, place des Palais,devant le Palais de justice, à un kilomètre de là sur la même rue (rue du Congrès). Alors que chaque année, il y a une cérémonie en présence du roi avec le traditionnel défilé militaire et un défilé de divers mouvements de jeunesses. J'ai demandé des explications aux organisateurs, réponse : ils n'y avaient pas pensé

Aujourd'hui en Belgique, il n'y a plus guère que les flamingants pour manifester à la Tour de l'Yser et se "souvenir" des méchants francophones. Jolie façon de massacrer l'histoire et, une deuxième fois, nos Jas* morts pour la patrie.

*Jas = poilu belge

C'est un problème de groupes, de professions, d’intérêts... En soit la guerre, en histoire, garde ces zones d'ombres... le symbole, lui, est définitivement mort. Faute à une "souvenite", "mémorite" aigüe; le souvenir, la mémoire ce n'est pas de l'histoire. Mais, au contraire, l’Histoire de la Grande Guerre à de beau jour devant elle (si quelqu'un veut bien la faire!)... les dons, les achats, les ouvertures d'archives complète les paroles et les écrits... restent les silences...