Jerôme a écrit :
Le traité pourrait être vu aussi comme un tentative (ratée en pratique mais qui représente une étape importante de l'histoire des relations internationales) de trouver un équilibre entre les grands principes (au nom du droit des peuples le Reich n'est pas dissous) et un certain réalisme (on donne à la Pologne un accès à la mer).
Je suis d'accord mais je pense que cette tentative ne résulte pas d'une volonté claire mais d'un compromis bancal entre les vainqueurs, en gros entre la ligne Clemenceau (pour le "réalisme", ou disons les pratiques traditionnelles) et la ligne Wilson (pour les grands principes) (même si ces deux personnages sont plus complexes que ça, le maintien d'une Allemagne en un seul morceau ne répondant pas seulement à un but idéaliste...). De là les nombreuses contradictions, notamment celles dont saura se servir Hitler dans les années 30 (Autriche indépendante de l'Allemagne, Sudètes, Couloir de Dantzig) ou qui alimenteront les autres rivalités (Pologne/Tchécoslovaquie, Italie/Yougoslavie, Hongrie/tous ses voisins...). Sans même parler du Proche-Orient.
Jerôme a écrit :
Mais d'un point de vue historique, une absurdité évidente fut d'avoir fabriqué ce traité avec les américains et ensuite d'avoir cru pouvoir l'appliquer sans eux. Maladroit aussi a été de ne pas négocier avec les Allemands. Ils auraient sans doute appliqué de meilleur gré des dispositions qu'ils auraient discutées. Conclusion
: il aurait mieux valu se passer de Wilson et inviter le chancelier (j'ignore son nom
)
On n'a guère eu le choix.
Il n'était pas possible de faire le traité sans les Américains car 1) leur aide avait été indispensable, et 2) habilement, les Allemands avaient annoncé leur volonté de discuter sur la base des 14 points, ce qui mettait Wilson au centre du jeu.
Je ne pense pas qu'il était possible de prévoir que le traité ne serait pas ratifié par les USA, et même si on l'avait prévu, qu'aurait-on pu faire ? Dire à Wilson de rentrer chez lui ?
Il faut se rappeler que les dispositions finales, qui reposent sur des garanties illusoires des Britanniques et des Américains, n'étaient pas le premier choix de la France. Franchement je pense que le problème était insoluble dès avril 17 et l'entrée en guerre des USA, qui venaient avec leurs buts de guerre propres, et dont la participation était indispensable à la victoire.
Quant à inviter le chancelier : d'après ce que j'ai lu, il était bien prévu fin 1918 de rédiger d'abord des préliminaires de paix, sur lesquelles l'Allemagne pourrait discuter les points de détails. Cela conformément aux "traditions" en la matière (1814, 1870...). Je ne peux qu'imaginer les raisons pour lesquelles cela n'a finalement pas eu lieu : les "préliminaires" sont devenus une affaire de longue haleine du fait des divergences majeures entre alliés, sans compter que la responsabilité de l'Allemagne a été inscrite dans le projet de traité... Et de fait, les Allemands ont bien été invités à faire des remarques sur le traité.
Et puis discuter de quoi ? Le précédent de 1870 serait intéressant à regarder : je ne crois pas que Bismarck ait fait grand cas des remarques que la France aurait pu émettre au sujet de l'annexion de l'Alsace-Lorraine ou du montant de l'indemnité de guerre.