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Pourtant, fin 1932 les caisses du parti sont vides, ce qui n'est pas compatible avec un large soutien du patronat allemand à la cause nazie.
1 - Je ne remets pas en cause cette affirmation, mais je n'ai trouvé aucune source qui confirme ce fait.
2 - Il n'a jamais été question de larges soutiens, mais simplement de soutiens, ce qui est suffisant. On peut toujours discuter de détails, comme le fait de savoir si Krupp était ou pas à la fameuse réunion de 1933. En admettant qu'ils ne furent que de petits coups de pouces, ces soutiens étaient suffisants pour permettre la montée en puissance d'un parti qui était à priori destiné à rester aux oubliettes.
3 - C'est mal connaître la politique que de penser que le financement se faisait exclusivement en numéraire.
4 - Les avantages en nature ne peuvent être évalués par une simple étude de trésorerie. Il faudrait l'examen d'archives anciennes d'entreprises, de flux bancaires et financiers, et encore, sans tenir compte d'éventuels maquillages de comptabilité...chose que Turner n'a probablement pas faite. Il s'agit quand-même du financement officieux d'un parti. Pensez-vous qu'il sera possible dans 60 ans de retrouver les traces d'un financement occulte de la période actuelle ? Le plus fiable reste encore le train de vie du parti.
5 - Si j'en crois William Manchester ("The arms of Krupp : the rise and fall of the industrial dynasty that armed Germany at war), le seul entretien des S.A. nécessitait environ 2 Millions de Mark par semaine en 1932. Encore une fois, le train de vie de la structure n'avait rien d'un petit parti : voyages en avion, publicité dans la presse ou au cinéma, frais de bouche, financement du Völkischer Beobachter, meetings, locations de salles ou de stades, entretien de milices de plusieurs millions d'hommes (SA, SS)...Proclamer que des cotisations d'adhérents puissent financer un tel train de vie risque de vous valoir un fou rire dans tout le sérail politique, de gauche comme de droite.
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Ce qui n'exclue pas d'ailleurs que certains patrons (par exemple Thyssen) aient graissé largement la caisse nazie.
Il ne faudrait pas se fixer sur Thyssen. S'il a été le soutien le plus emblématique, il y en a eu beaucoup d'autres, et de manière indiscutable. La contribution d'Hugenberg, maître d'une grande partie de la presse et du cinéma allemands, ne peut être balayée d'un revers de main : il a été l'un des hommes-clé ayant permis à la propagande nazie de trouver une caisse de résonnance.
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Prenez un ouvrage de Kershaw sur le nazisme ou Hitler et vous remarquerez que ces points là ont été largement étudiés.
Largement, ce n'est pas le mot. Je me répète, mais combien d'ouvrages intéressants comme ceux de Kershaw, Gossweiler, Mason, et même de Turner...comparés aux innombrables thèses sur la personne-même d'Hitler, sans parler de la multitude de documentaires radio ou télé du même profil ? Sans vouloir y percevoir une "main invisible", on ne peut que reconnaître que l'on a privilégié un angle d'étude au détriment d'un autre.
Quant à Kershaw proprement dit, il ne semble pas avoir eu la trajectoire rectiligne que vous lui prêtez. Il a eu plutôt une position intermédiaire, contestant notamment l'idée d'une quelconque faiblesse du rôle politique dans l'ascension d'Hitler. Il a même souligné le travail de Dietrich Eichholtz, pourtant loin d'être l'archétype, c'est le moins, des théories "libérales" de l'ascension du nazisme. Dans Nemesis, il utilise encore l'expression de "Grand capital".