Cela dit, un lecteur ne cherchant pas forcément la nuance pourra, peut-être, en accepter l'idée à la fin de sa lecture.
En réalité, la maison d'édition est assez claire à ce sujet :
Passés composés a écrit :
"Dans une logique de MEDIATION assumée, et afin que les réflexions des historiens investissent la cité, Passés composés ne souhaite pas s’adresser uniquement aux professionnels de l’histoire. Nos livres auront ainsi vocation à rendre la connaissance accessible, en valorisant notamment la dramaturgie intrinsèque de l’histoire. Le PLAISIR de lecture sera notre souci constant ; nos auteurs, s’ils sont historiens, se feront aussi écrivains."
Je ne pense pas que ce sous-titre ait dérangé l'auteur - véritable spécialiste de la période et du personnage en France -, qui, sans l'écrire explicitement, aurait sans doute bien aimé que Stresemann survive pour affronter les conséquences de la crise économique et sociale de 1929, qui frappait alors l'Allemagne, puis la NSDAP et, surtout, Hitler. Mais on tomberait ainsi dans l'uchronie, ce que ne fait naturellement pas Baechler, même s'il peut se laisser aller à quelques spéculations ici ou là.
Cependant, le sous-titre choisi constitue un beau raccourci (d'autant que Stresemann meurt en octobre 1929), faisant tomber le lecteur dans une perception de l'histoire quelque peu manichéenne et fort réductrice. Et, finalement, si Stresemann avait rallié le bloc conservateur à l'hiver 1932/1933 qui a tenté aussi maladroitement que vainement de contrôler Hitler en l'intégrant dans un cabinet commun ? Ou alors sa figure d'homme fort, vainqueur de l'hyperinflation et artisan du traité de Locarno aurait rassuré à la fois les conservateurs, mais également la SPD, aurait été suffisante pour envoyer les sbires d'Hitler dans les cordes ?
Bien entendu, nous n'en savons rien...
Ce qui est certain c'est que les libéraux de droite (la DVP) ne résistèrent pas à la mort de leur chef et le parti sombra dans les grands fonds de la vie politique allemande, passant de 8,7% des suffrages en 1928 à 1,9% aux élections de novembre 1932.
Plus largement, la question posée - mais mal posée car souffrant d'un anachronisme patent - ici sur la personne de Gustav Stresemann conduit à interroger le lecteur sur la posture des fondateurs de Weimar - voire de ceux, comme Stresemann, qui l'avaient acceptée de manière pragmatique, mais qui ne voulaient ni des communistes, ni des nazis -, face à la crise et à la montée du nazisme, ou à leur combat lorsque ses représentants furent entrés en masse au
Reichstag en 1930.
Un article intéressant à ce sujet :
https://books.openedition.org/enseditions/41758?lang=fr