le lecteur a écrit :
Oui, bien sûr, le Japon a des intérêts économiques dans la zone, et y a implanté des entreprises, en les mettant sur le leadership de fait de la SMR. Mais de la même façon que les russes ont aussi des intérêts dans la zone, ou que les anglais en ont ailleurs en Chine, etc.
Vous mettez justement en avant l'aspect compétitif de cette aire géographique : un marché explosé entre Japon, Chine, Russie et puissances occidentales ! D'où la nécessité de mettre en place une action rapide, d'où la nécessité, encore, de planifier une telle invasion à l'avance et de réfléchir à la politique à mettre en place sitôt la phase militaire de l'invasion terminée.
le lecteur a écrit :
On remonte à 1906 en suggérant que 25 ans auparavant déjà le Japon voulait annexer la Mandchourie; et en sautant par dessus une génération de politiciens, d'industriels et de militaires comme s'il y avait une continuité.
Je vous invite à relire mon propos car j'ai écrit qu'une réflexion avait été faite en amont (sûrement vers le milieu voire la fin des années 1920) mais pas que l'invasion était le résultat d'un plan pensé depuis des décennies. De même, le propos d'Alain.g., qu'il défendra mieux que moi-même, visait à montrer une continuité dans les visées mais il ne cherchait pas à développer l'idée que les plans de 1906 ont été repris pour l'invasion de 1931 : l'idée, c'est que les plans de 1906 ont instillé des idées qui, développées par une nouvelle génération de politiciens, industrialistes, de cadres militaires, etc, ont donné naissance au plan d'invasion de 1931.
La nécessité de l'invasion de 1931, c'est de contrer l'expansion soviétique vers le Sud et de relancer une économie ralentie par l'arrêt des importations américaines de la soie japonaise.
le lecteur a écrit :
On voit que l'approche industrielle à appliquer en Mandchourie fait l'objet de débats, avec des 'aller-retour', jusqu'en 1934 je crois. De nouveau, on n'a pas la sensation qu'il y ait eu un plan pré-conçu, mais qu'au contraire la puissance coloniale japonaise n'a commencé à développer une stratégie cohérente seulement longtemps après la conquête. (Le fait que cette stratégie n'ait pas eu les résultats escomptés est un autre problème).
Je pense qu'il y avait des enjeux réfléchis : s'emparer de ressources, s'imposer sur un nouveau marché économique (interactions avec l'espace colonial français avec l'Allemagne de Weimar puis l'Allemagne de Hitler), relancer une économie et penser la délocalisation de populations. Je ne pense pas, par contre, que les Japonais aient pensé à des plans plus précis que ces grands enjeux. Je le disais dans mon dernier message : il y a une nécessité d'agir et les plans sont pensés dans les questions générales. La mise en place, elle, est plus pratique (ce qui souscrit à votre propos, Lecteur) et chaotique.
le lecteur a écrit :
Autant que je me souvienne, la question de la SDN, et de la réaction des autres puissances en général, ne s'est pas posée et n'a pas été discutée avant l'invasion de la Mandchourie. Le gouvernement ne s'est pas dit 'on risque d'avoir des sanctions, tant pis, on passera outre'. Ils n'ont abordé le problème que quand il s'est manifesté. C'est pragmatique - mais ce n'est pas une stratégie planifiée.
Au contraire, la réaction des autres puissances est longuement pensée : il s'agit d'attirer le regard, de contrer la diplomatie appliquée depuis 1922 et de redéfinir l'équilibre des puissances. Le gouvernement a pensé les sanctions et les menaces de la Société des Nations mais (1) le Japon apparaissait comme un puissant rempart contre le communisme en Asie ; (2) le Japon, un allié de la Première Guerre mondiale, avait été brimé par les traités navaux de l'après-guerre et plusieurs spécialistes de la Société des Nations s'accordaient à considérer une expansion géographique du peuple nippon comme un incontournable de l'époque.
le lecteur a écrit :
e suis surpris de lire "la facilité du Japon à exploiter les ressources économiques de la Mandchourie (dès son invasion), non seulement dans l'intérêt de la péninsule nippone mais aussi dans son économie d'exportations".
Au contraire, le Japon n'y est pas arrivé. La tâche était énorme, et les japonais y ont mis beaucoup de moyens. Prétendre que les 'fruits étaient à portée de main' est vivre dans le rêve.
C'est pourtant le cas : le Japon considère très tôt, dès les plans d'invasion en fait, la Mandchourie comme un espace de matières premières à exporter. Il faut relancer une économie en légère berne après les arrêts d'importations américaines. Il s'agit, aussi, de délocaliser une main d'oeuvre en surnombre.
le lecteur a écrit :
PS: je veux bien la référence de René Arnaud. Le sujet m'intéresse, je lirai volontiers un texte qui s'y rapporte.
Très volontiers : c'est une conférence de René Arnaud tenu devant le Comité d'Etudes du Pacifique dans la première moitié des années 1930. Bonne lecture !