Réponse simple : l'occupation a commencé avant que la capitulation soit signée en baie de Tokyo.
Mais il n'y a pas que le Japon, et là il faut voir les choses avec réalisme : (On parle d'une zone d'opérations qui va de la Birmanie à la Nouvelle-Guinée, en passant par les Philippines, et du centre de la Chine à la Mandchourie et à la Corée, pour les engagements terrestres.)
- Il faut le temps que tous les généraux japonais commandant sur tous les théâtres d'opération reçoivent une délégation alliée pour fixer les modalités de leur reddition, de la remise de leurs armes, de leurs prisonniers, de leur rapatriement, etc...
- Ensuite, on organise une cérémonie de reddition.
- Ensuite il faut que les troupes reçoivent des ordres et acceptent d'y obéir. Le problème : il y en a partout.
- enfin, la reddition effective et le débarquement de troupes alliées demandent des précautions (contre les mines, par exemple)
En pratique les Japonais dans certains secteurs refusent de cesser le combat, en particulier il y a des acharnés face aux Soviétiques. Et puis malgré le cessez le feu, la flotte américaine à Okinawa doit encore faire face à des kamikazes isolés : ce sont des officiers qui se suicident. Les deux généraux commandant les escadrilles kamikaze, qui ne veulent pas survivre à leurs hommes, s'offrent le luxe d'utiliser deux Jinraï
Baka. (Pierre Closterman a fait le récit de cette dernière mission.)
Ici
un éphéméride complet, dont je ne résume que les faits principaux :
18/08 Deux appareils américains sont attaqués au-dessus de Tokyo par 14 chasseurs japonais. Un photographe américain est tué et deux membres d'équipage sont blessés au cours de l'attaque.
Philippines : Arrivée à Manille des missions de lord Mountbatten et de Tchang Kaï Chek pour une conférence avec les émissaires japonais. (Nota : MacArthur s'y trouve déjà.)
19/08 Arrivée d'une délégation du gouvernement japonais à Manille pour fixer les détails de la capitulation japonaise et de l'occupation du Japon.
20/08 Retour à Tokyo de la délégation japonaise, qui emporte les propositions des Alliés relatives à l'occupation et à la signature de la capitulation.
22/08 Les Soviétiques prennent Dairen et entrent dans Port-Arthur, dans la péninsule de Sakhaline. En Mandchourie, l'armée japonaise capitule à Harbin, mais des combats se poursuivent par endroits, le quartier général japonais étant incapable de contacter l'ensemble de ses divisions qui se replie en désordre face aux troupes soviétiques.
Iles Marshall : Cérémonie de capitulation de la garnison japonaise de l'atoll Mili à bord d'un contre-torpilleur d'escorte américain. (Forcément, ils ont joué à saute-mouton avec les garnisons neutralisées - du point de vue naval et aérien - il y a donc des garnisons japonaises sur une flopée d'iles.)
Pour info, certains groupes de soldats isolés refusent de croire à la capitulation, ou refusent d'y obéir, il faudra que des officiers japonais se dérangent. Amusez-vous à chercher, je crois que le dernier s'est rendu, aux Philippines, à son (ancien) colonel fin des années 60, et le Japon, qu'il a trouvé un peu changé, lui a fait un triomphe.
24 août : Nouvelle-Guinée
L'ordre de cessez-le-feu est donné aux troupes de la 18e armée japonaise, mais les chefs militaires ne donnent pas l'ordre de reddition, attendant de recevoir des instructions du maréchal Terauchi, commandant en chef de la région du Pacifique Sud.
(Là ils font des manières : ils piquent-niquent là depuis la mi-43, et s'ils dépendent dans l'absolu d'un théorique "chef de la région Pacifique Sud" - basé sur quelle ile ? - où ils ne doit plus guère rester de Japonais, il faut encore s'assurer qu'il dispose d'une radio.)
Etc... (Birmanie, Hong-Kong, Singapour, ça délègue, ça discute, ça signe, mais les troupes n'ont pas reçu les ordres de la bonne autorité...)
28 août :
Japon. Arrivée au Japon des premiers Américains, 150 techniciens de l'aviation, qui atterrissent sur l'aéroport d'Atsugi, près de Yokohama. Leur arrivée a été retardée de 48 heures par un typhon.
(pourquoi là ?)
L'éphéméride ne le mentionne pas, mais des bombardiers américains, quelques jours après la capitulation, ont parachuté des vivres sur les camps de prisonniers et d'internés civils, dont on savait qu'ils crevaient de faim. Steven Spielberg a raconté le destin d'un jeune garçon américain, séparé de ses parents au moment de l'évacuation de Shanghaï - et donc interné pendant toute la guerre - dans le film
l'Empire du Soleil.29/08 : Japon
Le cuirassé américain Missouri vient mouiller dans la baie de Tokyo. (pas tout seul, j'imagine, et cela suppose que la baie a été déminée.) Il est le navire amiral, mais j'ai toujours pensé que la capitulation aurait été signée sur l'Enterprise - le "survivant du Pacifique" - s'il n'avait pas été endommagé par un kamikaze au large d'Okinawa.
30/08 :
Début de l'occupation du Japon par les forces américaines : le 4e régiment de marines de la 6e division débarque à la base navale de Yokosuka, alors que la 11e division aéroportée arrive à l'aéroport d'Atsugi. Le général MacArthur quitte Manille pour venir organiser l'occupation. Le croiseur américain San Juan commence à évacuer les prisonniers de guerre alliés détenus dans les îles japonaises. [lesquelles ?]
31/08
À Yokohama, MacArthur établit le commandement suprême allié. (On comprend pourquoi c'est sur cet aérodrome que s'est posée la première équipe américaine, le 28. Et une division parachutiste la veille.) Au cours d'une discussion sur les préparatifs de la cérémonie officielle de la capitulation japonaise, fixée au 2 septembre, il déclare que "'la mise en oeuvre du plan d'occupation se déroule merveilleusement bien. Plusieurs signes montrent que l'occupation continuera sans effusion de sang ou autres frictions". Les troupes d'occupation, acheminées par avion, débarquent au rythme de 300 appareils par jour.
Remarque : l'Indochine n'est pas mentionnée - sauf pour signaler que Ho Chi Minh y déclare l'indépendance - mais elle est transitoirement occupée pour moitié par les Anglais et pour l'autre moitié par les Chinois de Tchang Kaï Chek. (De Gaulle, dès qu'il le pourra, enverra un corps expéditionnaire en reprendre possession.) A noter qu'un nombre significatif d'officiers japonais continueront d'y combattre les Français aux côtés du Viet-Minh.