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Message Publié : 08 Juil 2013 20:16 
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Georges Duby
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Il est connu que l'URSS a apporté à plusieurs reprises son soutien à des candidats de droite contre des candidats socialistes même quand ils avaient le soutien du PCF au premier ou second tour. L'ambassadeur est venu à chaque fois en faire part au candidat. Pompidou et Giscard en ont notamment fait état autour d'eux, sidérés par l'aspect officiel du soutien.
Comment expliquer un geste aussi inattendu ? Soutenir de Gaulle d'accord, il y a des raisons envisageables, mais Pompidou ou Giscard ? C'était donc un principe ? Tout sauf le socialiste et sauf Mitterrand en particulier. Pourquoi ; En 1981, Mitterrand avait offert des ministères aux communistes ?

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Message Publié : 09 Juil 2013 5:09 
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Les soviétiques ont une préférence pour les candidats gaullistes, compte-tenu de la politique d'indépendance de De Gaulle à l'égard des Etats-Unis.

Miterrand est perçu par les Russes comme atlantiste et antisoviétique. (De fait pendant la crise des euromissiles il saura clairement choisir son camp.) De plus il est évident en 81 - depuis les élections de 74 et 78 - que la progression du PS se fait aussi au détriment du PCF.

Pour Giscard il est sans doute perçu par les Soviétiques comme plus malléable que Miterrand. On se souvient de l'épisode où le PS le baptise "le petit télégraphiste de Moscou" parce qu'il s'est fait l'écho de pseudo-propositions soviétiques à propos de l'Afghanistan.

Curieuse élection que celle de 81 : les militants communistes font discrètement voter Giscard et les militants RPR font discrètement voter Miterrand ! Dans chaque camp il y a un outsider qui veut la mort du leader.

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Message Publié : 09 Juil 2013 11:47 
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Pierma a écrit :
Pour Giscard il est sans doute perçu par les Soviétiques comme plus malléable que Miterrand. On se souvient de l'épisode où le PS le baptise "le petit télégraphiste de Moscou" parce qu'il s'est fait l'écho de pseudo-propositions soviétiques à propos de l'Afghanistan.

Tout à fait : une telle position est notamment défendue par Michèle Weinachter dans son ouvrage sur Mitterrand et l'Allemagne.
Giscard fait état d'une certaine admiration pour la stabilité et la puissance du régime soviétique. Il n'écarte pas la possibilité de partenariats commerciaux avec l'URSS et se positionne donc, dans la lignée de ses prédécesseurs, en faveur d'un rapport direct. Il apparaît comme un homme ouvert au dialogue, prêt à entreprendre des relations plus intimes avec la puissance orientale. Mitterrand, au contraire, est un homme plus mystérieux, plus discret dans son rapport à l'Union soviétique.
En outre, la victoire d'un candidat socialiste impliquerait l'apparition de régime mixte (socialiste-communiste), ce que Moscou n'est pas encore prête à tolérer au milieu des années 1970. Le vieux rêve du monopole communiste sur la conduite des affaires de l'Etat demeure fort à Moscou.

Alain.g a écrit :
L'ambassadeur est venu à chaque fois en faire part au candidat. Pompidou et Giscard en ont notamment fait état autour d'eux, sidérés par l'aspect officiel du soutien.

Pour Giscard, encore, sa visite Rue de Rivoli est un fait notable de l'intérêt que lui porte l'ambassadeur soviétique (et le régime de Moscou) mais est-ce vraiment là une marque de leur soutien, je suis plus dubitatif.

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Message Publié : 09 Juil 2013 12:26 
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Jadis a écrit :
.. mais est-ce vraiment là une marque de leur soutien, je suis plus dubitatif.
Très juste, aucun des candidats n'a d'ailleurs été dupe d'une démarche importante dans son aspect formel mais ne signifiant pas obligatoirement que l'URSS allait exercer une pression réelle sur le PCF.
Pompidou et Giscard n'ignoraient rien du souhait de real politik du PCF dont l'intérêt n'était pas la victoire d'un socialiste, surtout de Mitterrand.
Ce qui est amusant est que la visite de l'ambassadeur d'URSS à Giscard, rue de Rivoli en plus, a amené une protestation du PCF !
Sur le fond, l'argumentaire soviétique est intéressant: crainte de troubles en cas de victoire de Mitterrand compliquant son évolution historique irréversible vers le communisme; désir que le PC reste fort en restant dans l'opposition (très juste), qu'il ne soit pas terni par des échecs prévisibles (juste aussi); crainte que l' échec de Mitterrand n'amène une droite dure qui romprait avec l'URSS.
On connait le résultat final: Marchais faisant campagne pour ... Giscard mais avec des raisons propres apparemment du moins. Il l'avait fait déjà en 1978 aux législatives.
Déjà en 1969, L'URSS avait choisi Pompidou contre Poher, très atlantiste.
Un autre élément, tout le monde a su sous la 4è, que la SFIO et FO avaient reçu d'importantes aides américaines.
Il y a donc eu de nombreux précédents à des interventions étrangères dans la politique française. Depuis très longtemps ...

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Message Publié : 10 Nov 2013 8:41 
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D'accord avec vous Alain
En ajoutant une observation personnelle : il peut y avoir eu double jeu de la part des Soviétiques .

Si VGE avait été réélu l'URSS aurait pu lui dire " dites merci tovaritch Valéry"

Mais comme il a été battu, le PCF est entré au Gouvernement, ce qui est aussi une forme de succès pour l'URSS.

Et si l'URSS avait appuyé publiquement Mitterrand celui ci aurait été fortement exposé à l'emploi de l'argument anticommuniste, très fort à l'époque à droite. Or la défaite de VGE est pour partie due au non report de voix gaullistes.car je suis convaincu que dans le fond de leur cœur les militants gaullistes avaient peu apprécié l'ouverture à l'est du Général .


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Message Publié : 10 Nov 2013 12:49 
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Aigle a écrit :
Mais comme il a été battu, le PCF est entré au Gouvernement, ce qui est aussi une forme de succès pour l'URSS.

Succès très limité. L'URSS et le PCF ne se faisaient aucune illusion sur l'intérêt pour eux d'avoir trois sous-ministres au gouvernement, la participation au gouvernement empêchant le PCF de critiquer Mitterand, dont pourtant il souhaitait l'échec.
Au premier prétexte (ce sera le "tournant de la rigueur" en 83) le PCF se positionna à nouveau dans l'opposition et n'épargna aucune critique contre les socialistes.

Au passage, ça ne suffit pas à les sauver : Mitterand a pillé les voix communistes, victimes également d'une baisse historique du PCF, perçu par les jeunes comme ringard et langue de bois, et représenté de plus par la personnalité caricaturale de Georges Marchais. Le PCF s'est suicidé en s'enferrant dans le stalinisme - au contraire des communistes italiens - et ce n'est pas moi qui vais le regretter.

J'ai déjà cité Coluche : " La différence entre le beaujolais et les communistes c'est que le beaujolais est sûr de faire 12,5." :mrgreen:
(j'en rigole encore de satisfaction, mais j'ai moins ri quand on a commencé à s'apercevoir que la baisse du PCF se transformait en partie en voix ouvrières pour le FN, et pas seulement pour le PS. VDM !)

La présence de communistes au gouvernement n'a inquiété que... les militaires, et les Américains.

Les militaires n'aimaient pas voir le communiste Fitermann au ministère des transports, parce que ce ministère était chargé de la réquisition des transporteurs privés et de la réservation des routes en cas de guerre contre les Russes. Mitterand a trouvé une formule, que j'ai oubliée, qui lui ôtait cette responsabilité, et les militaires se sont rassurés.

Tout comme les Américains, qui ont vite compris de quel côté se trouvait Mitterand. Au cours de sa première rencontre avec Reagan - très inquiet de voir des communistes dans le gouvernement français - celui-ci est arrivé avec dans ses bagages les renseignements secrets fournis par la taupe Farewell, un officier du KGB retourné, fourniture qui comprenait entre autres le nom d'agents soviétiques aux Etats-Unis et des renseignements sur ce que l'URSS savait des secrets militaires de l'OTAN : une vraie mine d'or pour la CIA.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Farewell

Citer :
Or la défaite de VGE est pour partie due au non report de voix gaullistes.car je suis convaincu que dans le fond de leur cœur les militants gaullistes avaient peu apprécié l'ouverture à l'est du Général .

Le mauvais report des voix gaullistes a d'autres raisons. Je me souviens de mon grand-père, résistant et gaulliste de toujours, qui expliquait à quel point il avait du mal à voter pour Giscard. Giscard est l'homme qui en 69, au moment du référendum qui allait mettre fin à la carrière de De Gaulle, avait dit qu'il ne se prononcerait pas pour le non, mais pour le "oui, mais..."
Une belle formule à la Giscard, pour exprimer un maximum de réticences sans avoir l'air de trahir De Gaulle, avec un effet potentiellement dévastateur : les vrais gaullistes n'avaient pas oublié.

Mon grand père allait donc voter Giscard la langue dans la joue en 74, sachant que Mitterand était un adversaire de toujours du Général, et que les communistes c'est le diable.
Il est mort avant les élections de 81, et j'ai eu une pensée pour lui le 10 mai, en me disant qu'au moins il avait échappé à cette épouvante ! :mrgreen:

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Message Publié : 13 Nov 2013 12:39 
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En fait, L'URSS qui pratique la realpolitik depuis Lénine, ne penche pas du tout pour de Gaulle, Pompidou, VGE, mais affiche sa préférence pour tout régime qui ne favorise pas l'ennemi absolu, le socialiste, celui qui prend des voix au PC.
Seul compte le choix d'une solution qui favorise l'arrivée du communisme à terme.
Personne n'est dupe en réalité d'un côté comme de l'autre.
Comme le savent tous ceux qui ont fait un peu de politique, le vrai ennemi en politique est dans votre camp. C'est une loi implicite de toutes les élections. L'essentiel est d'être le premier de son camp et de le demeurer. Sinon on disparait.
Mais il est également exact qu'on a besoin en démocratie pour atteindre la majorité d'un complément de voix, à condition d'être en tête au premier tour toutefois.
On est , Aigle, à mon avis, au delà du double jeu. Seul compte le résultat final. Il ne faut rien attendre des positions d'un moment. Un PC peut soutenir un candidat de droite pour faire battre le socialiste, mais une fois le premier élu, on le combat vigoureusement en cherchant à apparaitre alors comme son premier et meilleur ennemi et on se rapproche du socialiste, de préférence s'il est affaiibli.
La physique politique a ses lois, pas toujours comprises par les électeurs d'ailleurs.

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Message Publié : 13 Nov 2013 13:27 
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Alain.g a écrit :
En fait, L'URSS qui pratique la realpolitik depuis Lénine, ne penche pas du tout pour de Gaulle, Pompidou, VGE, mais affiche sa préférence pour tout régime qui ne favorise pas l'ennemi absolu, le socialiste, celui qui prend des voix au PC.
Seul compte le choix d'une solution qui favorise l'arrivée du communisme à terme.

Non, dans le cas de De Gaulle et de Pompidou, l'URSS préfère la solution la moins atlantiste et la plus indépendante des Américains.

C'est aussi de la realpolitik : tout ce qui peut diviser le camp occidental et affaiblir l'OTAN est le bienvenu, et d'autre part on espère une collaboration industrielle et technique avec la France. (Ce qui permet en prime un espionnage industriel très efficace.)

Je pense que les Russes sont sans illusion sur la possibilité de voir le communisme s'imposer en France, sauf évènements hors norme. (Il est significatif que le PC de mai 68 soutienne en sous-main le général De Gaulle : ni les Russes ni le PC ne croient à la révolution en France.)

Que le PC ait une stratégie politique qui le conduise à affaiblir Mitterand pour rester le premier parti de gauche est un fait (Mitterand a d'ailleurs très logiquement l'objectif inverse.) mais ils n'ont pas besoin de l'URSS pour leur souffler cette évidence.

L'URSS raisonne en termes de géopolitique mondiale, et pour elle Mitterand est anticommuniste et atlantiste.

L'URSS a une préférence pour Giscard qu'elle estime falot et éventuellement influençable. Raymond Aron disait de lui que "ce jeune homme ignore que l'histoire est tragique." (Je suis d'accord avec cette appréciation : Sur le plan international Giscard manque d'épaisseur.)

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Message Publié : 13 Nov 2013 15:00 
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Votre thèse est valable pour de Gaulle, mais ne s'applique pas à Pompidou qui est atlantiste et encore moins à VGE qui l'est totalement.
Pour Mitterrand, vous avez raison mais en partie seulement, car si l'URSS vise l'atlantiste, elle cherche aussi à conserver un réseau communiste en europe de l'ouest comme relais. Il ne s'agit pas de prendre le pouvoir, mais d' éviter une élimination du communisme au profit de la social-démocratie européenne qui est un ennemi de l'URSS et qui semble en essor au temps de Mitterrand.

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Message Publié : 13 Nov 2013 16:28 
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Alain.g a écrit :
Votre thèse est valable pour de Gaulle, mais ne s'applique pas à Pompidou qui est atlantiste et encore moins à VGE qui l'est totalement.

Diable, Alain, vous dites là une horreur ! Pompidou cherche, certes, la réconciliation avec les Etats-Unis mais sa politique est confrontée à deux obstacles de poids : (1) La menace d'un condominium Etats-Unis/URSS risque de minimiser l'influence croissante de la France, cette nation ayant brisé ses chaînes et portant sa voix dans le monde depuis le brillant éclat du Général de Gaulle ; (2) Les affronts américains se multiplient sans cesse (Crise du dollar, Année de l'Europe de Kissinger, Critique pendant la Guerre de Kippour, Crise de l'énergie, Crise des Açores) au point que Pompidou, soutenu par Jobert, incarne un renouveau de l'anti-américanisme à partir de 1973 ! Pompidou atlantiste, je ne pense pas, désireux de mettre fin à une querelle gaullienne, peut-être, mais enfermé dans une confrontation à cause de l'intransigeance américaine de Nixon-Kissinger, certainement !

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Message Publié : 13 Nov 2013 18:38 
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Alain.g a écrit :
et encore moins à VGE qui l'est totalement.

Ais-je écrit le contraire ?

Le problème avec VGE est son manque de culture historique et d'armature personnelle. (le mot de Raymond Aron me paraît tout à fait justifié.) On peut être un brillant financier et ne rien comprendre aux enjeux géopolitiques de son temps.

Lorsque Kouchner et Rony Brauman rencontrent Giscard à l'Elysée, parce qu'il a financé les opérations du paquebot "Ville de lumière" en mer de Chine pour y recueillir les boat-people à la dérive, il stupéfie ses interlocuteurs avec cette question : " Mais au fait, pourquoi fuient-ils, tous ces Vietnamiens ? "

Bien sûr il a des conseillers, et le Quai d'Orsay comme l'armée ont une culture de la politique gaulliste, devenue traditionnelle dans de nombreux domaines - politique arabe, africaine, dissuasion - qui constitue pratiquement un balisage de la ligne à suivre.

Reste que le personnage est trop léger et constitue une cible de choix pour les agents d'influence soviétiques. C'est ainsi qu'on le verra revenir de Moscou brandissant triomphalement une offre soviétique de négociations sur l'Afghanistan - à proposer aux Etats-Unis - qui se révèle être en réalité de la poudre aux yeux.

Je ne parle même pas de son contact avec le peuple en politique intérieure : les soupers médiatisés dans des familles ouvrières sous prétexte de se montrer proche du peuple, l'incapacité à comprendre que l'affaire des diamants lui fait du tort dans l'opinion, 3 ou 4 exécutions de condamnés après avoir dit qu'il n'utiliserait pas la guillotine par éthique personnelle, bref un invertébré du 16ème. (A une époque où je ne regardais la politique que de loin, j'étais persuadé que Balladur était le patron de l'UDF, tant les styles coïncidaient.)

C'est le genre de reproche qu'on ne risque pas de faire à Mitterand, qui lui est d'une autre trempe : florentin, machiavélique, secret, et dûment prévenu contre l'URSS.

Et dans les faits un allié fiable des Etats-Unis, même si ce n'est jamais dit comme cela en France.

Les Soviétiques préfèrent VGE à Mitterand ? tu m'étonnes !

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Message Publié : 13 Nov 2013 19:23 
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Jadis a écrit :
Pompidou atlantiste, je ne pense pas
C'est à discuter. Pompidou ne se dévoile pas pendant sa présidence, car il ne peut se dissocier encore de la politique gaullienne, il est sous surveillance des gaullistes historiques. J 'interprète ainsi son voyage à Moscou et sa réception de Brejnev comme une volonté de prolonger la politique de de Gaulle. Il se rend en parallèle aux EU.
Mais sa pensée est pro-américaine, c'est un libéral formé à la banque qui sait que les EU dominent le monde réel de l'économie et de la finance. Il montrera ses convictions en revenant, à la demande des EU, sur le blocage gaulliste de l'entrée de la GB dans la Communauté européenne, prenant toutefois la précaution de faire décider par référendum.
Ceci dit, l'URSS a pu penser qu'il y avait une chance d'amener Pompidou à conserver la politique d'équilibre de de Gaulle, sans trop s'interroger sur sa probable évolution.

Pierma a écrit :
Le problème avec VGE est son manque de culture historique et d'armature personnelle. ... Reste que le personnage est trop léger et constitue une cible de choix pour les agents d'influence soviétiques. ... bref un invertébré du 16ème.
. Vous sous-estimez Giscard qui est au contraire un passionné d'histoire, il en parle sans cesse dans la conversation, et très intéressé par les relations internationales, pas léger mais homme plus de la synthèse que de l'analyse. Son tandem avec Schmidt a été jugé essentiel en europe. C'est un grand connaisseur des EU à la différence de Mitterrand qu'il surclasse dans le domaine international.

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Message Publié : 14 Nov 2013 8:20 
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D'accord avec Alain G ( qui d'ailleurs a personnellement et directement travaillé avec Chirac comme avec Giscard ce qui doit être un cas unique sur notre forum) pour souligner la culture stratégique de VGE.

Mais sur les élections je conserve ma position . L'anticommunisme était un facteur important pour expliquer le vote à droite. L'anticommunisme pouvait amener des poujadistes , des nostalgiques des colonies et de l'Algérie française à voter pour le général ou pour VGE. De même des socialistes modérés mais sincèrement démocrates et donc anticommunistes , des radicaux, des centristes de gauche pouvaient faire de même ou au moins s'abstenir pour éviter la victoire d'un FM appuyé par le PCF. De Gaulle en a d'ailleurs joué dans son discours du 30 mais 68.

Au passage vous noterez que FM candidat unique de la gauche a perdu deux fois, FM chalengé par le PC et faisant une campagne antisovietique a été élu. En 1981, le réflexe anticommuniste ne jouait plus. VGE l'avait euthanasié à Varsovie, et FM avait sauté sur l'occasion ( "le petit télégraphiste") avec l'aide involontaire de Marchais.


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Message Publié : 14 Nov 2013 11:52 
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Alain.g a écrit :
Mais sa pensée est pro-américaine, c'est un libéral formé à la banque qui sait que les EU dominent le monde réel de l'économie et de la finance. Il montrera ses convictions en revenant, à la demande des EU, sur le blocage gaulliste de l'entrée de la GB dans la Communauté européenne, prenant toutefois la précaution de faire décider par référendum.
Ceci dit, l'URSS a pu penser qu'il y avait une chance d'amener Pompidou à conserver la politique d'équilibre de de Gaulle, sans trop s'interroger sur sa probable évolution.

Je ne pense pas que sa pensée soit "pro-américaine". Il fait plutôt état d'un réalisme diplomatique, que Schumann et Jobert ne partagent pas toujours : les Etats-Unis et l'URSS approchent d'une entente mondiale, l'Europe reste un espace politiquement divisé et la France est, avant tout, dans le camp atlantique. Le Général l'a bien montré à l'occasion de la Crise des missiles de 1962 et Pompidou s'inscrit dans cette droite lignée de membres du camp atlantique mais à l'esprit frondeur et avide de faire montre de leur liberté. Je suis d'accord quand vous dites qu'il a conscience de la puissance financière et économique des Etats-Unis mais je ne suis pas d'accord quand vous dites qu'il s'y rallie de bon gré.

Je ne pense pas, non plus, que sa décision en faveur de l'entrée du Royaume-Uni dans l'Europe soit si démonstrative de sa pensée pro-américaine. D'une part, oui, Pompidou accepte cet élargissement européen pour apaiser la relation avec les Etats-Unis, mais d'autre part, il reste très méfiant et le dit à nombre de ses ministres et conseillers parce qu'il a conscience du Cheval de Troie que représentent les Anglais. Cependant, Pompidou fait le pari que la construction de l'Europe et sa montée sur la scène mondiale fera obstacle à l'entente Etats-Unis/URSS.

Sur le rapprochement France/URSS, il me semble plus un rapprochement de dépit (face à l'attitude américaine) qu'un rapprochement de volonté. Il y a, vous le disiez bien, ce souhait de poursuivre ce que le Général avait créé entre ces deux Etats et de faire de la France un entre-deux entre Etats-Unis à l'Ouest et URSS à l'Est. Ceci étant, sous Pompidou, la France n'a plus ce rôle d'entre-metteur.

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Message Publié : 14 Nov 2013 11:58 
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Alain.g a écrit :
C'est un grand connaisseur des EU à la différence de Mitterrand qu'il surclasse dans le domaine international.

Aigle a écrit :
D'accord avec Alain G ( qui d'ailleurs a personnellement et directement travaillé avec Chirac comme avec Giscard ce qui doit être un cas unique sur notre forum) pour souligner la culture stratégique de VGE.

J'espère que vous allez laisser des archives orales et écrites pour nos amis historiens, Alain, que ces souvenirs de collaboration avec deux anciens présidents ne soient pas perdus.
Je m'étonne, cependant, de la place diplomatique à laquelle vous reléguez Mitterrand. Beaucoup d'historiens et d'historiennes ont montré sa capacité à être "un homme du monde", "chez lui dans chaque capitale", "habile stratège des relations internationales" (El Moustaoui, Tiersky, Baumann-Reynolds).
Ceci étant dit, nul doute que Mitterrand termine la boucle en revenant à l'anti-américanisme du Général : la puissance économique et financière américaine est une menace égale à la puissance militaire soviétique et la France refuse ce que Pompidou et Giscard avaient engagé, à savoir la réconciliation avec le bloc atlantique.

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