J'ai oublié de signaler le documentaire "Vietnam" de Ken Burns, qui est passé en 5 épisodes sur Arte.
Absolument remarquable par la qualité des témoignages, le travail documentaire sur les images de combat, et par le parti-pris de rapporter en détail tous les évènements qui se produisent en même temps aux Etats-Unis. (Au passage, le comportement des politiques américains, et d'abord de Nixon, est effarant : c'est pire que ce qu'en disaient les contestataires américains, qui ne savaient pas tout. Par exemple, en 68, Johnson est sur le point de conclure un accord de paix juste avant de quitter le pouvoir. Nixon, qui n'est alors que le candidat républicain, fait échouer l'accord en promettant secrètement divers avantages militaires, et de l'argent, à Thieu - le président sud vietnamien - pour qu'il refuse sa signature. Nixon prolonge donc délibérément la guerre pour assurer son élection comme président.)
je signale aussi cet article du colonel Goya, une analyse passionnante des raisons
militaires de l'échec américain :
https://lavoiedelepee.blogspot.fr/2017/12/datapocalypse-big-data-et-guerre-du.htmlPour ceux qui ont vu "Nous étions soldats" de Mel Gibson, on voit, et c'est la tactique adoptée par l'état-major, que l'accrochage avec une unité ennemie déclenche un appui aérien terrifiant, ce qui est conforme à la stratégie américaine conçue par Mc Namara : infliger aux Nord-Vietnamiens un niveau de pertes très élevé, pour les décourager de poursuivre leurs opérations contre le Sud.
Goya décrit la dérive de cette tactique :
Citer :
On s’aperçoit cependant au niveau micro-tactique que la guerre en mode « recherche et destruction » ne se passe pas aussi bien que prévu et, notamment ,que quelques obus et des bombes ont une fâcheuse tendance à frapper la population (d’où l’idée de déplacer et regrouper ces gêneurs) ou encore les troupes amies. Les contrôles, vérifications et autorisations qui s’accumulent pour éliminer ce 1% de bavures finissent par faire perdre une grande partie de son efficacité aux 99 % restants. Alors qu’au début du conflit, la moitié des appuis aériens étaient disponibles en 15 minutes, après deux ans il n’est plus possible de voir tomber une bombe d’un avion avant une heure. Dans le même temps, Nord-Vietnamiens et Viet-Congs ont appris à jouer de l’espace-temps disponible entre le contact et les frappes pour échapper aux coups. En 1968, la moitié des combats sont trop rapides pour même générer une demande d’appui de la part des Américains.
Il met aussi en cause, tout simplement, la stratégie décrite ci-dessus : il fallait mal connaître les Nord-Vietnamiens pour espérer les "décourager" du fait des pertes. Et cette stratégie provoque des dérives comme celle du "body count" qui sont la négation de tout art militaire, et amènent un reporting qui tourne à l'absurde. ("if it's dead and Vietnamese, that's VC" - Si c'est mort et vietnamien, alors c'est des Viet-Congs.)