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Message Publié : 15 Déc 2015 0:19 
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Pierre de L'Estoile
Pierre de L'Estoile

Inscription : 27 Déc 2013 0:09
Message(s) : 2243
marc30 a écrit :
Beaucoup d'intellectuels style Sartre militaient pour l'indeoendance algérienne.

1- Comment la concevaient ils ? Précisément je pose trois questions

Avec un régime économique de type socialiste ?
Avec un régime politique démocratique ?
Avec quelle place pour les pieds noirs ?
Ils militaient pour l'indépendance mais dans le cadre fumeux d'une révolution fantasmée de type maoïse contre le pouvoir, les capitalistes, les colonialistes, les sociaux-traîtres, les staliniens etc. Ils ne concevaient concrètement rien du tout. Quelques années plus tard ils militeront pour la Gauche prolétarienne, groupuscule violent et fumeux qui finira par se dissoudre spontanément en 1973.

Les intellectuels français, tout comme les politiques, ont pris le train en marche. La gauche communiste et l'ultra-gauche non parlementaire avec des personnalités comme Sartre ont milité pour l'indépendance dès que des mouvements indépendantistes ont commencé sérieusement à se manifester. L'ultra-gauche comme dit plus haut, la gauche communiste en suivant la ligne dictée à Moscou.

En dehors de la gauche révolutionnaire, et encore, celle-ci tardivement, quasiment personne dans la société française n'avait pris conscience qu'il y avait un très gros problème avec l'Algérie. Sur l'échiquier politique, personne, ou presque, n'imaginait l'indépendance. L'intégration de l'Algérie était un fait acquis. Dans l'esprit de tout le monde, et peut-être même dans l'esprit du Général lui-même, de Gaulle était simplement venu remettre de l'ordre dans la chienlit algérienne. Pour les uns, il allait mater les indépendantistes, pour les autres, il allait mater les militaires insubordonnés. D'où l'équivoque du : "Je vous ai compris !. En fait, il allait venu mater les uns et les autres. L'Algérie français étant une évidence, les divergences d'opinion portaient sur l'évolution des institutions. La droite la plus dure, dont l'état d'esprit était celui de la majorité des pieds-noirs, voulait le statut-quo, à savoir un quasi apartheid. Sur le reste de l'échiquier, on souhaitait une évolution, avec plus ou moins de détermination, vers l'égalité des droits politiques. Mais, comme la population algérienne d'origine européenne ne voulait pas en entendre parler, on restait timide.

C'est de Gaulle parmi les hommes d'Etat de l'époque qui, le premier, a pris conscience qu'il fallait donner l'indépendance à l'Algérie. Comme c'était de Gaulle qui le disait, et comme en plus on se rendait bien compte qu'il avait raison, en moins de quatre ans on est passé de l'Algérie française fait acquis pour presque tout le monde à l'Algérie effectivement indépendante. Les intellectuels ont bien sur phosphoré mais seulement après que de Gaulle les eut tiré de leur léthargie. La lecture des romans de Camus est frappante : on se croirait presque à Marseille. Alger, Oran sont des villes françaises peuplées de Français, un peu plus cosmopolites toutefois, beaucoup sont notamment d'origine espagnole. Mais où sont les Algériens arabes ? C'est à peine si on les entre-aperçoit. La société française, intellectuels et hommes politiques compris, n'ont pris réellement conscience qu'à partir des années 1950 que l'Algérie était peuplée à 90% d'Arabes, Sartre n'étant en fait pas plus lucide que les autres.

Quintero a écrit :
De Gaulle n'avait pas d'intérêt outre-mer ? La françafrique démontre le contraire.
Les colonies ont bel et bien été utiles. Il s'agissait de sécuriser des approvisionnement en matières non disponibles en métropole (utile pendant une guerre ou une crise), et par ailleurs d'en faire profiter les entrepreneurs et leurs contacts politiques .
Cela pouvait servir de bases militaires pour contrôler les quatre coins du monde, de base arrière en cas de défaite militaire.
Les populations autochtones servaient de contingents de soldats.
Et puis c'était le fantasme des chefs d'état de diriger un empire pour leur prestige de grandes puissances .
Lisez les mémoires de de Gaulle où il explique pourquoi il faut donner leur indépendance aux colonies africaines : une influence politique, des liens économiques particuliers, oui, mais sans le boulet financier que représentait l'empire colonial. Pour l'Algérie, c'est une autre question. Ce n'était pas une charge financière. Mais les Algériens voulaient leur indépendance, il était impossible de la leur refuser. Et puis, comme le rapporte Alain Peyrefitte (je cite de mémoire) : " Je finirai par habiter Colombey-les-deux-mosquées ".


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Message Publié : 15 Déc 2015 3:15 
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Jean Froissart
Jean Froissart

Inscription : 19 Fév 2011 17:03
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Quintero a écrit :
De Gaulle n'avait pas d'intérêt outre-mer ? La françafrique démontre le contraire.

Oliviert mentionnait évidemment des intérêts personnels. D'autres personnages importants avaient investi en Algérie depuis le XIXè siècle, certains étaient des propriétaires terriens considérables, notamment dans les familles d'officiers (politique de Bugeaud de donner des terres aux militaires). De Gaulle venait d'un autre monde, et à ce titre n'avait pas d'affect sur place.
La Françafrique est un sujet autre, d'ailleurs postérieur.

Quintero a écrit :
Les colonies ont bel et bien été utiles. Il s'agissait de sécuriser des approvisionnement en matières non disponibles en métropole (utile pendant une guerre ou une crise), et par ailleurs d'en faire profiter les entrepreneurs et leurs contacts politiques .
Cela pouvait servir de bases militaires pour contrôler les quatre coins du monde, de base arrière en cas de défaite militaire.
Les populations autochtones servaient de contingents de soldats.
Et puis c'était le fantasme des chefs d'état de diriger un empire pour leur prestige de grandes puissances .

Il me semble que vous vous répondez vous-même, en mentionnant le prestige d'un empire ou des bases militaires: ce sont justement des exemples d'objets de coûts et non de revenus. Fonds perdus pour la gloire, qui flattent l'égo national, mais font bisquer le contribuable en métropole: "la Corrèze avant le Zambèze".
Dans le monde anglo-saxon, le surcoût des colonies pour la métropole faisait consensus me semble-t-il. Il a été théorisé aux Pays-Bas lorsque ceux-ci ont été forcés par la révolution à lâcher l'Indonésie en 1945 et qu'ils se sont rendus compte qu'ils s'en portaient mieux ensuite.

En France, en dernier, c'est par exemple un Jacques Marseille qui s'était attelé à ce chantier de montrer que:
1. Économiquement, le système colonial ne génère de valeur que si l'on prend la somme Métropole + colonie. Si l'on regarde par entité, le bilan pour la métropole est globalement négatif. Attention, on ne parle ici que d'économie. Pas de considération de prestige, encore moins de morale.
2. Bien entendu, au niveau micro (celui d'un entrepreneur, d'une entreprise, d'une dynastie de colons...) il y a des opportunités considérables et de grandes fortunes se sont faites. (Rarement sans travail, précisons-le tout de même. Être maraicher dans la Mitidja n'est pas une sinécure, même sur 500 hectares).

Pour revenir au sujet initial de Kurnos, parmi les partisans de l'indépendance, il y avait donc un nombre significatif de personnes sensibles à cet aspect économique. Évidemment elles étaient moins audibles que les indépendantistes révolutionnaires et tiers-mondistes. Ceux-ci disposaient de puissants relais médiatiques -le mot est quasi anachronique vu la période.


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Message Publié : 15 Déc 2015 5:21 
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Jean Froissart
Jean Froissart

Inscription : 19 Fév 2011 17:03
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Trop tard pour éditer, j'affine donc ce que je souhaitais dire:

Le coût économique de l'Empire colonial concerne avant tout l'AOF-AEF. Comme le dit Barbetorte, pour l'Algérie, vu l'intégration réciproque, c'était beaucoup moins évident.
Mais il y avait eu les précédents du Maroc et de la Tunisie => à terme l'indépendance de l'Algérie devait être une suite logique pour ceux qui étaient capables d'envisager les indépendances du Maghreb pour des raisons économiques.


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Message Publié : 15 Déc 2015 19:10 
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Polybe
Polybe

Inscription : 23 Mai 2015 14:22
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Barbetorte a écrit :
Lisez les mémoires de de Gaulle où il explique pourquoi il faut donner leur indépendance aux colonies africaines : une influence politique, des liens économiques particuliers, oui, mais sans le boulet financier que représentait l'empire colonial. Pour l'Algérie, c'est une autre question. Ce n'était pas une charge financière. Mais les Algériens voulaient leur indépendance, il était impossible de la leur refuser. Et puis, comme le rapporte Alain Peyrefitte (je cite de mémoire) : " Je finirai par habiter Colombey-les-deux-mosquées ".

Les propos de De Gaulle ne reflètent pas la politique qu'il a entrepris en Afrique.
Des liens politiques suggèrent une coopération diplomatique étroite mais respectueuse des souverainetés. On peut considérer factuellement que c'était loin d'être le cas.


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Message Publié : 15 Déc 2015 19:47 
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Polybe
Polybe

Inscription : 23 Mai 2015 14:22
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Vézère a écrit :
En France, en dernier, c'est par exemple un Jacques Marseille qui s'était attelé à ce chantier de montrer que:
1. Économiquement, le système colonial ne génère de valeur que si l'on prend la somme Métropole + colonie. Si l'on regarde par entité, le bilan pour la métropole est globalement négatif. Attention, on ne parle ici que d'économie. Pas de considération de prestige, encore moins de morale.
2. Bien entendu, au niveau micro (celui d'un entrepreneur, d'une entreprise, d'une dynastie de colons...) il y a des opportunités considérables et de grandes fortunes se sont faites. (Rarement sans travail, précisons-le tout de même. Être maraicher dans la Mitidja n'est pas une sinécure, même sur 500 hectares)..

Dès le 19e siècle, les économies avaient déjà commencé à s'interconnecter. Les grandes crises avaient une répercussion immédiate dans l'ensemble du monde industrialisé.
L'impact économique de la colonisation doit donc se mesurer à l'échelle globale, car la finance et l'industrie n'étaient plus à strictement parler nationales, elles dépendaient de flux internationaux .

Toutefois, si on veut étudier le cas français, je pense que des statistiques apporteraient plus au débat.
- Quelles étaient réellement les dépenses publiques de la métropole dans ses colonies.
- Quelle était la part de ces dépenses dans les conflits militaires, lesquelles ne relèvent pas du coût du développement économique colonial mais de divisions géopolitiques.

La croissance des grandes, moyennes industries et du secteur bancaire est un fondement du capitalisme, puisque qu'elle impacte le crédit et l'investissement sur le territoire.
- Dans quelle mesure, les secteurs industriel et financier ont-ils profité des économies des colonies. Par rapport à cela, on peut évaluer l'apport indirect des colonies dans la métropole et son tissu économique.


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Message Publié : 15 Déc 2015 21:03 
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Jean Mabillon
Jean Mabillon

Inscription : 07 Sep 2008 15:55
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Je ne comprends pas bien vos références à l'Afrique francophone. Il me semble que le Général ne visait pas tellement un espace de croissance économique (il comptait le trouver à juste raison dans la CEE) qu'un espace de rayonnement politique et culturel, évitant aux Africains de tomber sous la coupe des Russes ou des Américains...

Le recours à l'Afrique pour financer Partis politiques et train de vie de nos dirigeants est plus tardif . Je le daterais de 1981...


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Message Publié : 15 Déc 2015 21:32 
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Polybe
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Inscription : 23 Mai 2015 14:22
Message(s) : 103
Aigle a écrit :
Je ne comprends pas bien vos références à l'Afrique francophone. Il me semble que le Général ne visait pas tellement un espace de croissance économique

Je n'ai pas évoqué cela.
Je répondais à l'affirmation selon laquelle les colonies ont constitué un poids économique négatif. Je pense qu'on manque d'éléments sur tous les impacts pour pouvoir trancher.
Des statistiques sont publiées mais sont incomplètes ou pas assez détaillées pour dresser un tableau représentatif .
L'apport des colonies sur la croissance du système bancaire et industriel reste également négligé .


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Message Publié : 16 Déc 2015 10:54 
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Eginhard
Eginhard

Inscription : 12 Mai 2012 3:13
Message(s) : 775
Citer :
En dehors de la gauche révolutionnaire, et encore, celle-ci tardivement, quasiment personne dans la société française n'avait pris conscience qu'il y avait un très gros problème avec l'Algérie. Sur l'échiquier politique, personne, ou presque, n'imaginait l'indépendance. L'intégration de l'Algérie était un fait acquis. Dans l'esprit de tout le monde, et peut-être même dans l'esprit du Général lui-même, de Gaulle était simplement venu remettre de l'ordre dans la chienlit algérienne.


Si on se place du point de vue français colonial et métropolitain, probablement.

Mais du point de vue algérien, pas du tout, l'idée d'indépendance a toujours été présente. Une Algérie française "acquise" était inconcevable chez les Algériens depuis la lutte de l'émir Abdelkader donc depuis la période de la conquête en elle-même (1830-1857). Pour les Algériens, le fait de rester sous tutelle française indéfiniment était inimaginable hormis chez quelques élites comme Ferhat Abbas qui changea de position par la suite face à l'aveuglement colonial auquel il a fait face.


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Message Publié : 16 Déc 2015 11:31 
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Jean Froissart
Jean Froissart

Inscription : 26 Août 2008 7:11
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Localisation : Corsica
Saladin a écrit :
Mais du point de vue algérien, pas du tout, l'idée d'indépendance a toujours été présente.

Le contraire serait bien étonnant, ce serait les prendre pour des imbéciles heureux. Pour quelle raison seraient-ils idiots au niveau des responsables politiques ? ( le peuple fait ce qu'il peut)
Il est quasiment impossible qu’il n’y ai pas eu de tous temps des partisans d’une indépendance et de défense culturelle.
Même vis à vis des turcs ottomans qui précédaient les français pendant plusieurs siècles.
La question que l’on peut se poser est le nombre de ces partisans du rejet du colonialisme ... dans toute l'histoire de l'Algérie.


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Message Publié : 16 Déc 2015 13:42 
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Jean Mabillon
Jean Mabillon

Inscription : 16 Jan 2010 19:18
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Il me semble bien qu'en fait depuis les "rois" des tribus numides,le territoire avait été toujours plus ou moins rattaché à une entité autre,au moment de la venue des Français sous Louis XIV pour Djerjeri comme sous Charles X,c'est une dépendance ottomane avec des zones très agitées Les Turcs avaient pris la succession de l'empire romain d'orient sur toutes les terres islamisées du pourtour méditerranéen sauf à l'ouest marocain......Avant 1939 les comptes des lignes maritimes la reliant à la métropole étaient tout justes équilibrés il n'y avait pas de bénéfices sauf les subventions gouvernementales pour le maintien des liaisons.La seule "colonie"pour laquelle il y avait de bons bénéfices était l'Indochine.Seul pays de notre"empire"pour lequel les cargos partaient et revenaient à pleine charge.A cette époque mon père travaillait pour la tenue des" comptes d'escales" de compagnies,mes oncles étaient commandants de cargos et de paquebots,jeune enfant ,tout de suite après guerre,j'entendais les conversations autour de la table familiale...
Quand je suis devenu militaire, je me suis trouvé à l' EM en Algérie et j'ai pu lire les prévisions envisagées par l'armée française elle même:avenir du pays très difficile car le taux d'accroissement démographique était en explosion et personne ne pouvait se dire capable de donner du travail à ce niveau. La conclusion de cette étude économique par nos services était en filigrane :"partons,avant qu'il ne soit trop tard"


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Message Publié : 27 Déc 2015 23:34 
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Jean Froissart
Jean Froissart

Inscription : 26 Août 2008 7:11
Message(s) : 1339
Localisation : Corsica
Au moins d’un point de vue culturel la Kabylie attend toujours une certaine indépendance ou liberté.


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Message Publié : 28 Déc 2015 10:50 
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Jean Mabillon
Jean Mabillon

Inscription : 16 Jan 2010 19:18
Message(s) : 2953
Eh oui,la belle Kabylie,le Djurdjura comme un sombréro mexicain sur l'horizon et,sur le bleu profond du ciel, ses sommets blancs couverts de neige jusqu'en début mai, jadis,quand j'y étais de passage.....


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