Narduccio a écrit :
Bref, pour les tribunaux français, il y avait lieu à condamner Noël Mamère puisqu'il travestissait la vérité en donnant corps à une fable urbaine.
Ce n'est pas pour avoir travesti la vérité que Noël Mamère et France 2 ont été condamnés mais pour avoir diffamé Pierre Pélerin comme le dit la cour d'appel de Paris dans son arrêt du 3 octobre 2001 :
Imputer à M. Pellerin d’avoir en tant que spécialiste des problèmes de radioactivité, donné, en connaissance de cause, des informations erronées voire mensongères quant à un problème grave tel que la catastrophe de Tchernobyl qui pouvait avoir des incidences sur la santé des Français, constitue incontestablement une atteinte à l’honneur et à la considération de la partie civile et est par conséquent diffamatoire. Le fait que les propos de M. Mamère, comme le prétend son conseil, aient une tonalité humoristique, constituent une boutade, ne leur enlève pas leur caractère diffamatoire et il n’est pas contraire à l’article 10 de la Convention (...) de leur reconnaître cette caractéristique.Ce n'est donc pas pour avoir travesti la vérité que Noël Mamère a été condamné mais pour avoir diffamé Pierre pélerin en tenant des propos insultants à son égard, ces propos ne pouvant être excusés par la véracité de ce dont Noël Mamère l'accusait.
En effet, Noël Mamère avait traité Pierre Pélerin de « sinistre individu » qui « n'arrêtait pas de raconter ... », ce qui est indéniablement insultant et diffamatoire mais ce qui aurait pu néanmoins être jugé excusable si les incidences de la catastrophe de Tchernobyl sur la santé des Français ne pouvaient faire de doute. Or la cour d'appel avait jugé que les propos de Pierre Pélerin sur l'absence d'incidence n'étaient pas réfutés avec certitude.
Narduccio a écrit :
Noël Mamère à porté l'affaire devant la Cour des Droits de l'Homme de Strasbourg. Mais, il faut bien voir qu'il l'a porté parce qu'il estimait que l'on violait ainsi son droit à sa liberté d'expression. Et le jugement de la Cour Européenne ne porte pas sur le fond, elle ne s'est pas intéressée au sujet de savoir qui avait raison et qui avait tort.
La Cour Européenne des Droits de l'Homme a pour mission de vérifier que les Etats adhérents à la convention européenne des droits de l'homme respectent cette convention. Elle juge généralement seulement en droit mais il ne lui est pas interdit d'examiner le fond. Elle n'est pas tenue de s'en tenir à l'appréciation des juges du fond comme l'est la cour de cassation française. Dans l'examen du recours de Noël Mamère, elle intervient bien sur le fond en infirmant l'appréciation des faits arrêtée par la cour d'appel de Paris : «
Il faut en outre replacer ces déclarations dans leur contexte : le requérant enchaînait spontanément sur l’évocation par une autre des personnalités invitées d’un ouvrage consacré aux victimes de la catastrophe de Tchernobyl et de l’émotion qu’elle avait ressentie à sa lecture, dans le cadre d’une émission qui tient moins de l’information que du spectacle et qui a construit sa notoriété sur l’exagération et la provocation.», «
Selon la Cour, les motifs retenus par le juge interne pour conclure à l’absence de bonne foi mettent en exergue une particulière raideur dans la lecture des propos du requérant, qui se concilie mal avec le droit au respect de la liberté d’expression.»
Narduccio a écrit :
Lors d'un débat public, la liberté de parole doit être pleine et entière. C'est ce qu'à rappelé la Cours de Strasbourg. Ensuite, pour d'autres affaires, elle a mis certaines limites à ce droit, ...
Il n'y a pas de liberté sans limite. Comme le dit l'adage, la liberté de l'un s'arrête où commence celle des autres. La convention européenne des droits de l'homme admet que la législation d'un Etat pose des limites à la liberté d'expression à la condition que ces limites soient proportionnées au but à atteindre. Les lois protégeant la vie privée et réprimant la diffamation sont déjà des limites à la liberté d'expression.
Narduccio a écrit :
...puisque des associations ont cru qu'elles allaient pouvoir s'attaquer aux lois mémorielles et supprimer la répression du négationnisme. Les lois mémorielles ne sont pas considérés comme une limitation du droit d'expression. La Cour a aussi rejeté les recours des négationnistes en ce qui concerne leur liberté d'expression. Bref, la liberté d'expression est garantie, sauf quand cette liberté va à l'encontre de certaines valeurs fondamentales de la démocratie.
Plusieurs lois mémorielles ont été adoptées par le parlement français :
- la loi du 13 juillet 1990 réprimant la négation du génocide perpétré par le régime nazi,
- la loi du 29 janvier 2001 reconnaissant le génocide arménien,
- la loi du 21 mai 2001 qualifiant l'esclavage pratiqué jusqu'en 1848 de crime contre l'humanité,
- la loi visant à réprimer la contestation de l'existence des génocides reconnus par la loi votée par l'Assemblée Nationale et le Sénat les 22 décembre 2011 et 23janvier 2012.
Cette dernière a été déclarée anticonstitutionnelle par le conseil constitutionnel et n'a donc pas été promulguée. Les lois sur le génocide arménien et sur l'esclavage n'ont pas fait l'objet de recours et ont été promulguées mais le conseil constitutionnel a néanmoins donné son avis qu'elles étaient dépourvues de portée normative.
Ce qui distingue juridiquement le génocide des nazi d'une part et le génocide arménien et l'esclavage d'autre part est que le premier a été qualifié comme tel par une autorité judiciaire reconnue. Les seconds sont des réalités historiques mais ne sont pas des vérités juridiques, seule l'autorité judiciaire ayant qualité à juger des faits en vertu du principe de la séparation des pouvoirs.