En fait, les soviétiques parlent bien "d'explosion nucléaire". Elle pourrait être due à l'arrivée massive du corium dans une grande masse d'eau qui n'aurait pas le temps de se vaporiser (avant l'arrivée du corium). Des études ultérieures, il semble que cela soit plus compliqué. En fait, au fur et à mesure de son avancée, le corium agrège toutes les matières solides qu'il rencontre. Bref, il est bien constitué d'uranium en fusion, mais aussi des métaux de la structure qui contenait le cœur, des matériaux fondus provenant du béton. Bref, plus il descend, plus il se dilue. C'est pour cela que l'une des solutions pour renforcer les fonds des bâtiments-réacteurs des centrales qui dans le monde n'avaient pas de fonds assez épais a été d'injecter en sous-sol un béton dont la consistance et le dosage fond qui fondra en cas de besoin en s'amalgamant avec le corium. Mais, en faisant cela, les réactions nucléaires dans le corium diminuent et sa température baisse.
En fait, et c'est l'une des premières choses qu'on apprends quand on est initié à la physique nucléaire, c'est que la géométrie du cœur est importante. La masse critique, en ce qui concerne l'uranium 235 pur est d'environ 50 kg. C'est d'ailleurs le mécanisme d'une partie des bombes atomiques. On a 2 masses d'uranium 235, les plus pures possibles, mais inférieures à la masse critique. Il suffit ensuite de les rassembler, cela se fait en faisant exploser des explosifs classiques à la périphérie de la bombe. Quand la masse critique est atteinte, 50 kg d'uranium 235 dans le minimum d'espace possible, les réactions de fission s'enclenchent et la bombe explose. A contrario, si on veut diminuer les réactions de fission, il "suffit" d'éloigner les atomes d'uranium 235 les uns des autres. La géométrie d'un réacteur civil est calculée de manière à ce qu'il reste très faiblement critique. Juste ce qu'il faut pour qu'on puisse contrôler les réactions de fission. En fait, il est si peu critique qu'il faut aider les réactions quand on a un cœur neuf qui ne possède que de l'uranium 235 et 238.
Donc, d'après les études actuelles, le corium en fusion aurait pu s'attaquer à la dalle en faisant fondre le béton et le métal présent. En faisant cela, il aurait augmenté la température du sous-sol où se trouvait les réservoirs. L'eau aurait commencé à s'évaporer, la vapeur s’échappant par tous les passages possibles. Le corium aurait commencé a perler dans la zone des réservoirs, mais chaque goutte de corium trouvant une grande quantité d'eau se serait figée en vaporisant une très grosse quantité d'eau. Au fur et à mesure que la masse du corium présent dans le local des réservoirs aurait augmentée, on aurait eu de plus en plus de points qui auraient atteints la masse critique et le corium serait de nouveau entré en fusion. Mais, une bonne partie de l'eau se serait déjà évaporée.
On peut continuer l'exercice, car il y a une autre dalle en-dessous, puis environ 15 mètres de sables, puis la nappe phréatique. En fait, le corium en fusion se serait encore plus dilué au contact du sable, qu'il aurait vitrifié par sa chaleur. Actuellement, la meilleure méthode qu'on connaisse pour confiner les déchets radioactifs, c'est la vitrification.
Pour obtenir l'explosion nucléaire que redoutaient les soviétiques, il faut plonger d'un coup un corium relativement concentré dans une masse importante d'eau. En fait quand on a de la fission, l'uranium ou le plutonium qui fissionnent émettent environ 2,5 neutrons. Or, ces neutrons sont très énergétiques. Or, pour qu'un neutron puisse être capturé par un noyau d'uranium ou de plutonium pour une nouvelle opération de fission, il doit perdre une grande partie de cette énergie. On a besoin d'un modérateur, et l'eau est un très bon modérateur. En fait, surtout les noyaux d'hydrogène qu'elle contient. La peur des soviétiques étaient donc que toute la masse d'uranium contenue dans le corium fissionne si elle se trouve en présence d'une grande quantité de modérateur. Et là, on parle bien d'une explosion nucléaire. Mais, une explosion avec une bombe de plusieurs tonnes d'uranium...
_________________ Une théorie n'est scientifique que si elle est réfutable. Appelez-moi Charlie
|