En 1990, je crois, j'avais vu à la télé un reportage sur les combattants croates qui faisaient face avec des moyens ridicules aux unités de l'armée yougoslave (serbe, en réalité) stationnées en Croatie dans les casernes de l'armée.
Constitués en milice, ils faisaient des patrouilles, spécialement de nuit, pour intervenir, autant que possible, si l'armée serbe sortait des casernes pour essayer de mettre au pas la toute nouvelle république croate, qui venait de proclamer son indépendance.
Grosse surprise : parmi ces volontaires diversement armés (y compris avec des fusils de chasse) un jeune homme venu de Vesoul pour combattre pour la liberté croate. Il était interviewé et expliquait à quel point ils étaient en infériorité sur le plan des effectifs et des armements.
Le reportage n'en disant pas plus, je me suis demandé d'où venait sa détermination. J'y ai souvent pensé par la suite, en me demandant ce qu'était devenu ce garçon dans la guerre entre Serbes et Croates. (Au passage, la proximité de ces combats, à quelques heures de voiture pour ce garçon - il suffisait de traverser l'Italie du nord - soulignait davantage encore l'incapacité choquante de l'Europe à envoyer des troupes pour mettre fin à ce conflit, ce qui me rendait fou de rage, alors que son potentiel militaire était 10 niveaux au dessus.)
Hé bien je viens de retrouver ce jeune homme, en me renseignant sur les débuts de l'indépendance croate et la bataille de
Vukovar.
Bataille en complète infériorité, qui s'est terminée, après la capitulation de la ville, par le massacre des hommes en âge de combattre : les Serbes n'ont décidément pas attendu Srebrenica.
Ce jeune Vésulien,
Jean-Michel Nicollier, blessé dans les combats, a été achevé, comme tous les blessés, à l'hôpital de Vukovar.
ça m'a serré le coeur, rétrospectivement. Les Croates ne l'ont pas oublié, et il a une statue à Vukovar, soulignée par la formule "né comme un Français, mort comme un Croate."