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Message Publié : 11 Avr 2013 7:30 
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Salluste
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Non. Aujourd'hui, à Genève on occulte l'histoire suisse tout court. Dans les écoles primaires, on ne mentionne plus que l'Escalade de 1602 qu'on fête chaque année. Quant au secondaire, l'histoire nationale n'est même pas au programme. C'est désolant.

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Message Publié : 12 Avr 2013 11:34 
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Il y a quoi de bien publié sur le sujet?

Je connais deux trois références principalement sur Genève, sa conversion au calvinisme, son développement économique et sur l'histoire économique plus récente avec le développement des secteurs chimiques et financiers, mais qu'est ce que vous conseilleriez sur l'histoire suisse soit en articles soit en livres.

Evidemment, je ne parle pas d'historiettes sur les hauts de Guillaume Tell et ses gais compagnon ou le courage fantastique des petits suisses contre les ignobles Habsbourg, mais des truc un peu plus sérieux. Il y a-t-il un Braudel pour les montagnes helvétiques en quelque sorte?

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Labore Fideque


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Message Publié : 14 Avr 2013 7:17 
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Mais bon sang mais c’est bien sûr ! J’ai eu une vision…toute cette histoire relative à ces paysans qui se seraient libérés dans la violence et non doctement, c’est du bidon. En fait j’ai tout vu, voici comment cela s’est vraiment passé.
Il était une fois un peuple de paysans, de bergers, qui se tenaient en plein milieu de l’Europe (géographique par la CE actuelle), mais vraiment en plein, autour d’un lac doté de plusieurs bras tentaculaires et tout ça au pied de très hautes montagnes qui avaient l’avantage ou le désavantage, c’est selon, de rendre compliqué l’accès au sud, à l’Italie. Problème, ces paysans du genre plutôt têtus, ce qui n’est pas un scoop dans ce métier, en avaient un peu raz le bol de ne pas pouvoir en faire à leur tête, normal ils étaient têtus comme je l’ai dit. En clair ils étaient un peu soumis à une autorité laquelle autorité avait la délicatesse de leur fournir des baillis, genre de petit despote qui sévit toujours aujourd’hui.
C’était embarrassant de se débarrasser de cette autorité parce que ces paysans s’imaginaient, les rustres, qu’ils seraient probablement mieux servis que par eux-mêmes. Seulement voilà, comment expliquer à ces autorités, qu’on les aime bien (un brin de diplomatie et une pincée de pommade ça sert dans ces occasions) mais…de loin. Pas facile vous en conviendrez. Donc ils ruminèrent (pour cela ils avaient des exemples tout proche) quelques idées et projets pour arriver à leur fin, donc je rappelle : pouvoir en faire à leur tête. C’est ainsi que des soirs durant ils se réunirent dans les troquets et comme c’est souvent le cas en pareil circonstance, apparaît alors qui ? Le penseur du coin. Vous me direz que c’est impossible, pas là ? Mais si mais si même là, que voulez-vous c’est un mystère de la nature comme tant d’autres. Beau causeur le penseur leur tint ce discours. Ah mais j’oubliais de vous dire que ces gros bras, les rustres, s’imaginaient qu’il suffisait de quelques gourdins et hallebardes pour effrayer l’autorité. Tss tss, pas du tout, répliqua Causeur, bas les pattes, j’ai beaucoup mieux et ça ne fait pas de mal à personne. Méthode pacifique. Un brin sceptiques, nos bergers, mais bon ils écoutent la proposition. Voilà, poursuit Causeur, nous allons organiser une belle fête en l’honneur de nos maîtres. Quoi ? T’es devenu fou ? Taisez-vous et écoutez la suite, pour bien montrer qu’on les aime on leur proposera, au cours de cette fête, un petit concours d’adresse consistant en un tir à l’arbalète. Ah bon et on les butte à ce moment ? Osa Werner. Pas du tout, bien au contraire, on s’arrange pour qu’ils gagnent le concours. Et après demanda Werner ? Après, c’est simple on passe à l’apéro et c’est là qu’il faut y mettre le paquet, à savoir servir ce qu’on a de mieux et puis ne pas oublier de continuellement les flatter et nous fendre en compliments et reconnaissance. Vous pigez ? Bof tu crois vraiment que c’est plus efficace que de les trucider ? Bien entendu mais il faut persévérer dans ce sens pendant le plantureux banquet qu’on leur servira ensuite et alors on arrive au moment crucial, u n peu après les pousse cafés où il s’agit d’appliquer le coup de grâce consistant à remettre une compresse alcoolique, mais toujours le meilleur. Certes ça va engendrer quelques frais mais c’est pour la bonne cause, à savoir notre liberté. Donc une fois complètement saouls mais encore assez lucides pour promettre n’importe quoi, on leur fait signer un pacte comme quoi ils nous foutent la paix et débarrassent les lieux, mais il faut bien enrober cela afin qu’ils soient persuadés que c’est pour la bonne cause. Voilà, une fois le pacte signé, ils n’auront qu’à tenir leur promesse et se barrer.
Bien qu’encore sceptique on finit par se rallier au plan de Causeur, on fit appel à Guillaume Tell pour organiser le tir et conseiller la manière de perdre sans que l’autorité soupçonne une machination et c’est parti.
Le succès fût foudroyant, tout fonctionna à merveille, l’autorité, émerveillée de tant de délicatesse, signa tout ce qu’on lui présenta. Puis le lendemain, encore mal rétablie, on connaît ça, dû bien reconnaître sa signature et …débarrasser les lieux.
C’est ainsi que les populations de Uri, Schwyz et Unterwald acquirent leur liberté qui se répandit ensuite aux villes avoisinantes et même plus lointaine si l’on songe à Berne et Fribourg.
C’est beau non ?

Et dire que dans années cinquante, à l’école on nous parlait de batailles, Morgarten, Sempach, Näfels…c’est fou comme l’on pouvait manipuler l’histoire.

Heureusement aujourd’hui la vérité est rétablie, j’ai pu le constater lorsque j’attendais une personne dans la salle d’entrée à l’arrière du Palais fédéral à Berne. Là, on trouve une petite documentation en libre service dans laquelle est justement expliqué ce que je viens de décrire, sous forme raccourcie certes, mais la manière y est.


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Message Publié : 15 Avr 2013 12:25 
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Christian, je ne suis pas sûr d'avoir compris. Est-ce que c'était une manière ironique de se moquer de la vision que l'on peut avoir de l'histoire suisse ou est-ce la manière dont on l'enseigne aujourd'hui ?

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Message Publié : 15 Avr 2013 15:24 
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Non non je ne moque nullement de l'héroïsme des néo historiens suisses, qui ont dans un combat épique, remis à sa juste place, c'est-à-dire au mythe, toute la soi disant self-libération des bergers... Aujourd'hui on sait que cela était parfaitement impossible,mais pour camoufler tout ceci on a construit des milliers de hallebardes et morgenstern que l'on a entreposé dans des musées.

Mais non..j'ironise...cela ne se remarque pas ?


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Message Publié : 15 Avr 2013 15:35 
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Christian27 a écrit :
Mais non..j'ironise...cela ne se remarque pas ?


Par expérience, je sais que l'ironie passe très mal à l'écrit et donc sur le web. Parfois on gagne a être explicite.

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Une théorie n'est scientifique que si elle est réfutable.
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Message Publié : 15 Avr 2013 16:06 
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Bof, j'avais bien senti l'ironie.

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Message Publié : 15 Avr 2013 16:33 
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A Narduccio: Tout à fait, ne pas en abuser, mais parfois il est impossible de dialoguer sérieusement lorsque la partie adverse se cantonne dans sa position et refuse le dialogue...

Donc revenons à l'histoire et laissons la gaudriole

La question est donc quel est le ou les événements qui ont provoqué le début de la construction de la Suisse ?
Aujourd'hui, en Suisse, on lit de plus en plus que la Suisse n'a existé que depuis 1848 et qu'auparavant il ne s'agissait que de régions (cantons) disparates qui pactisaient plus ou moins, avec parfois de sérieuses querelles. De plus il n'y avait pas la démocratie partout puisque des cantons dominaient d'autres. Mais en plus on affirme que tout cela et dès le début, et c'est là-dessus où il s'agit de se focaliser, que tout n'a été que pactes et accords.
Aujourd'hui, comme je l'ai mentionné, on fait abstraction des batailles qui ont provoqué la libération des 3 cantons (mythe) et ce qui est choquant, c'est que manifestement ce révisionnisme de bas étage, ne provoque aucune réaction, ni dans les médias, ni chez les historiens.

Ce qui est clair c'est que cela s'est fait en deux temps, le premier celui des paysans de Suisse centrale et ensuite celui des villes et particulièrement de Berne.
Il y eut donc deux forces très puissantes, les Waldstaetten et Berne, la première précédant la seconde et c'est cela qui est important: les villes se sont libérées suite à l'exemple des Waldstaetten.

On pourrait maintenant se poser la question de savoir ce qui se serait passé sans que les Waldstaetten se libèrent, est-ce que Berne l'aurait fait ? Si oui, on aurait alors un mini pays bernois englobant une partie du sud de la Suisse avec en tout cas le Pays de Vaud. Au lieur de guerres avec la Habsbourg il y aurait eu guerre avec la Savoie.

Ce qui certain par contre, c'est que la Suisse romande (Vaud et Genève en particulier) est Suisse uniquement par Berne.

Donc si l'on fait abstraction des combats, des guerres, la Suisse allemande serait restée ou devenue Allemande ou Autrichienne, le Tessin Italien et la Suisse romande Savoyarde puis Française

Dans cette construction de la Suisse je conseille le texte de l'historien Emile Dürr
1315 - 1515 De Morgarten à Marignan
Histoire militaire de la Suisse , volume 2, cahier 4 (dans les bibl uni)

Aussi Jean-François Bergier: Guillaume Tell (excellent)

Je précise qu'il existe certainement des ouvrages contemporains qui ne nient pas ces combats, j'en suis certain, mais ce que je déplore c'est encore et toujours le manque de débats entre historiens n'ayant pas la même conception, ceci à la radio ou TV.


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Message Publié : 18 Avr 2013 7:31 
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Salluste
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Christian, j'avais compris l'ironie, mais aujourd'hui on ne sait jamais. Peut-être qu'un historien a vraiment écrit quelque chose dans le genre.

L'"histoire bataille" a été reléguée aux oubliettes pendant de nombreuses années. Mais il me semble qu'elle commence à reprendre son importance. D'ailleurs, je suis un cours au sujet de la confédération durant la guerre de 30 ans.

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Message Publié : 18 Avr 2013 7:53 
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Mon texte était un peu gros pour ne pas y voir de l'ironie, votre doute, je l'ai compris, venait de savoir s'il s'adressait aux historiens révisionnistes ou aux historiens relatant ces faits bien réels.

Croire qu'un pays nation s'est forgé au cours des siècles sans guerres de libération (Waldstaetten) ou de conquête, pensons aux E-U, est une mascarade. Et la France, elle ne s'est faite que par des pactes elle aussi ? Pas de guerres tant qu'on y est...

Cependant certains pays, en effet, mais cela a été imposé, ont été construits sur le papier, pensons à la Tchécolslovaquie ou à pratiquement tous les pays africains, là on a mélangé allégrement les ethnies sans qu'elles aient eu le temps de construire un modus vivendi...


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Message Publié : 18 Avr 2013 9:52 
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Polybe
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L'historiographie est beaucoup revenue depuis les années 1990 sur le caractère arbitraire des frontières africaines. Elles se sont construites selon un processus long, beaucoup plus par l'expérience du terrain que par la seule conférence de Berlin de 1884/1885. Les colonisateurs n'ont pas cherché à tout prix à détruire les structures existantes, même si des contre-exemples existent.
Désolé pour le hors-sujet.


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Message Publié : 05 Juin 2013 20:57 
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Grégoire de Tours
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Voilà un sujet intéressant, mais qui est complexe et, comme le dit Christian 27, oppose un peu des visions qui ne se rencontrent guère. Je ne reviendrais que sur les éléments qui sont antérieures au XVe siècle et, j'espère ces prochains jours, je contribuerai comme je peux sur le coeur de la discussion, à savoir la période mise en avant par notre camarade.

Car, première remarque sur le titre du sujet, il faudrait parler du XVe siècle puisque il est mention d’événements qui se sont déroulés dans les années 1400 et quelques.

Ensuite, plusieurs précisions (en vrac) sur le pacte de 1291, bien qu’il soit antérieur au 15e siècle.

1) Le texte : http://icp.ge.ch/po/cliotexte/la-confed ... .1291.html
2) Comme dit plus haut, il a été choisi en 1891 comme acte fondateur de la Suisse. Sa redécouverte, à la fin du XIXe siècle s’inscrivait dans les mouvements nationalistes de l’époque. Tandis que l’Allemagne et l’Italie devenaient un Etat propre et unifié, que le nationalisme était très fort en Europe, la situation était plus difficile en Suisse car il s’agit d’un Etat-volonté et non pas d’un Etat-nation. Mais il y a eu cette volonté très forte de remonter aux origines du pays et les historiens ont épluché les archives cantonales et cherché de vieux documents. La mise en valeur de ce texte est le résultat de cette période où l’imaginaire national s’est en partie construit et surtout renforcé.
3) Le Pacte a été rédigé en latin et est donc l’œuvre d’une élite , pas de simples paysans qui (qu’on me corrige si je m’avance trop), pour la plupart, devaient être analphabètes.
4) Il s’agit du renouvellement d’une alliance (mais on ne sait rien sur un texte antérieur qui a existé).
5) Il a un caractère principalement défensif et de résolution des conflits. Mais il est plutôt vraisemblable de penser aux conflits domestiques, une sorte de « droit supérieur aux intérêts particuliers » (Nouvelle histoire de la Suisse et des Suisses, p.158)
6) Il ne s’agit pas de la fondation de la Suisse. Il n’est fait aucune mention de la volonté d’indépendance totale ou de création d’un nouveau territoire, juste de défense en cas d’agression et de juridiction interne
7) Il ne s’agit pas d’une libération du territoire puisqu’il stipule bien que « cela sous réserve que chacun, selon la condition de sa personne, soit tenu, comme il sied, d'être soumis à son seigneur et de le servir. » (texte du pacte)
8) Ce texte n’est pas unique et totalement inédit pour l’époque puisqu’il existe une alliance de ce type faite dans la région actuelle du Tessin et qui est antérieur au pacte de 1291.
9) Il y avait d’autres types d’alliances qui ont existé à l’époque sur le territoire actuel de la Suisse
10) Néanmoins, c’est un pacte très intéressant car « il a été conclu par des communautés de vallée agissant avec une étonnante indépendance et il atteste, chose unique à lépoque, la vigoureuse conscience d’elles-mêmes qu’avaient ces communautés ou, du moins, les familles dirigeantes des Waldstaetten » (opus cit, p.159)

Je me permets également de citer le Dictionnaire Historique de la Suisse, sur la question des « pactes »

Citer :
Depuis la fin du XIXe s., il est usuel d'appeler pactes fédéraux les chartes d'alliance des Confédérés, considérées dans leur ensemble ou isolément. Cette expression est quelque peu trompeuse. Elle suggère l'existence d'un groupe distinct d'accords d'un genre particulier qui auraient régi l'institution confédérale sans changement durant des siècles. Il est plus correct de se représenter les nombreuses alliances des Confédérés comme des éléments au milieu d'une multitude d'accords analogues, dont quelques-uns seulement survécurent à long terme, pour se voir attribuer finalement une importance qu'ils n'avaient pas à l'origine.

Source : http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F9600.php

Pour la suite, il faudra que je me replonge un peu dans mes anciennes notes et anciennes lectures.

Jean-Marc Labat a écrit :
Que ces faits soient à l'origine de la Suisse, nul n'en disconviendra, mais c'est une longue maturation, avec des reculs, des avancées, des hésitations et des élans. Une Révolution, c'est soudain, c'est brutal, ça ne s'étend pas sur des siècles. Le but premier, c'est de s'affranchir d'une tutelle féodale, pas autre chose.


Voilà la situation bien résumée je trouve. Il faut vraiment mettre en avant cette notion de durée (normal sur un forum d’histoire ;-) ), car entre les alliances originelles, les différentes périodes de tension et l’apparition d’un sentiment de se sentir « suisse » (et non pas schwytzois, bernois ou membre du St. Empire), il faut compter de nombreuses décennies.

Christian27 a écrit :
Aujourd'hui, en Suisse, on lit de plus en plus que la Suisse n'a existé que depuis 1848 et qu'auparavant il ne s'agissait que de régions (cantons) disparates qui pactisaient plus ou moins, avec parfois de sérieuses querelles. De plus il n'y avait pas la démocratie partout puisque des cantons dominaient d'autres. Mais en plus on affirme que tout cela et dès le début, et c'est là-dessus où il s'agit de se focaliser, que tout n'a été que pactes et accords.



A vrai dire, la remise en question que je tire de mes lectures récentes, c’est bien que le Pacte de 1291 (associé au Grütli) et les fondements mythiques de la Confédération sont justement… mythiques. Leur mise en avant date de la fin du XIXe siècle et ils ne reflètent pas la réalité historique. Par contre, je n’ai trouvé mention de remise en question de ce processus de formation sur le long terme. Je risque peut-être de m’attirer les foudres de Christian, mais la bonne méthode historique est bien de déconstruire (et non pas détruire) l’histoire mythique qui a été martelée pendant tellement d’années pour essayer, à travers les sources, de reconstruire une histoire plus « scientifique » et proche de la réalité.

A ce sujet, je suggère de lire, avec un esprit d’ouverture et sans préjugé aucun à cause du titre du livre l’introduction de l’ouvrage suivant :
HUMAIR, Cédric, 1848, naissance de la Suisse moderne, Lausanne : Editions Antipodes, 2009.

(Je me permets de souligner qu’il parle bien de Suisse « moderne »).

Maharbbal a écrit :
Il y a quoi de bien publié sur le sujet?
Je connais deux trois références principalement sur Genève, sa conversion au calvinisme, son développement économique et sur l'histoire économique plus récente avec le développement des secteurs chimiques et financiers, mais qu'est ce que vous conseilleriez sur l'histoire suisse soit en articles soit en livres.

Evidemment, je ne parle pas d'historiettes sur les hauts de Guillaume Tell et ses gais compagnon ou le courage fantastique des petits suisses contre les ignobles Habsbourg, mais des truc un peu plus sérieux. Il y a-t-il un Braudel pour les montagnes helvétiques en quelque sorte?


Voici quelques références récentes :

Le Dictionnaire historique de la Suisse, très complet, récent, gratuit et en ligne : http://www.hls-dhs-dss.ch/index.php

Une introduction très courte : http://www.histoiresuisse.ch/walter/cou ... walter.pdf

Du même auteur (François Walter), un de ces petits livres illustrés, très (trop) court :
La Suisse : au-delà du paysage, Paris : Gallimard, 2011, 127 p. (Découvertes Gallimard Histoire, 573).

Toujours de lui, une histoire en 5 volumes qui se lisent très vites, intéressant car elle utilise l’historiographie récente est assez mesurée:
Histoire de la Suisse, 5 volumes, Neuchâtel: Editions Alphil, Presses universitaires suisses, 2010.

Plus ancien, mais écrit par un des « maîtres » de l’histoire suisse : Jean-François Bergier, Europe et les Suisses. Impertinences d'un historien, Editions Zoé, 1992.

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Message Publié : 06 Juin 2013 5:44 
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Tout ça c'est très beau mais il y manque l'essentiel, qui est, hélas, violent puisque c'est du sang qu'il s'agit, de guerres, de batailles et pas qu'une. Je n'ai pas envie de toutes les résumer mais ça bien pris une centaine d'années:
De tête:
Contre le pouvoir des Habsbourg:
Morgarten
Naefels
Sempach
Contre l'Empereur et Habsbourg:
Guerre de Souabe
Contre la France (Charles 7 qui a envoyé son fils Louis XI
bataille de St Jacques sur la Birse
Contre la Bourgogne (Charles le Téméraire)
Grandson
Morat
Nancy

et la dernière perdue contre la France 1515...Marignan

sans oublier les peu glorieuses mais probablement utiles doubles invasions de la Suisse, prélude à la Suisse moderne.

Il n'est certainement pas inutile de montrer le rôle ou l'action des pactes mais d'ici à se passer des rapports de forces qui ont émaillé l'histoire et ce n'est malheureusement pas fini, il y a un pas que je ne franchirai jamais.

Désolé, mais depuis la révision de l'histoire Suisse/SGm je goûte peu les historiens suisses contemporains (à de très rares exceptions), je m'appuie uniquement sur les anciens fort brillants, très brillants que j'ai déjà cités.


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Message Publié : 06 Juin 2013 7:53 
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Grégoire de Tours
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Vous mentionnez en effet une liste intéressante mais non exhaustive de batailles ayant impliqué les Confédérés. Ce que je critique surtout de votre premier post, c’est la simplification de la « lutte des Waldstaetten ». Car cette appellation ne concerne que les habitants des cantons « primitifs », alors que durant cette période, de nombreux autres territoires ont été concernés.

Entrons dans le vif du sujet. Peut-on parler de révolution paysanne suisse au XVe siècle ? A mes yeux, non car, comme l’ont dit les autres intervenants, les événements mentionnés dans le premier message se sont étalés sur la durée et ne constituent pas une « révolution » stricto senso. De plus, d'autres régions européennes ont connu, plus ou moins à la même époque, des révoltes similaires, quoiqu'encore plus violentes. Enfin, on ne peut pas vraiment parler de réelle démocratie qui résulte de ces révoltes. Outre le fait que les femmes n'aient pas de droits, il n'y a jamais eu à cette période la disparition des différentes classes sociales. L'égalité, comme on se l'imagine de nos jours avec des droits égaux pour tous, n'était que fiction à l'époque. Ce qui était différent dans les vallées, c'était la nature différente du lien qui unissait ces différentes couches sociales.

Deuxième élément, je suis l’opinion de la Nouvelle histoire de la Suisse et des Suisses qui dit que pour cette période, l’évolution du territoire qui deviendra la Suisse doit être envisagée régionalement, « car elle n’est pas homogène » et parce que « des forces différentes s’y manifestent » (p.163) Il ne fait donc pas sens de généraliser et de dire "les Suisses".

Par contre, il y a bien un ensemble qui forme la Confédération à la fin du XIV. Il est ressenti comme tel à l’interne et à l’externe. Mais, précision importante il ne s’agissait pas d’un Etat et « il n’y avait pas de concertation organisée et régulière de ses membres ; il n’y avait même jamais eu d’assemblée où ils fussent tous représentés » p.194, la Diète ayant été établie au XVe siècle.

Si l’on prend l’exemple de la lutte contre les Habsbourg et la fameuse bataille de Sempach, qui était en fait le résultat d’autres escarmouches, on peut mentionner en vitesse Winkelried, qui lui relève du mythe, ceci afin d’entrer en résonnance avec mon précédent message. Cette bataille de Sempach fait suite à la Ligue de Constance qui était composée de différents territoires suisses mais aussi de villes du sud de l’Allemagne (http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F17157.php). A noter que Schwytz avait refusé d’y participer (à la ligue, pas à la bataille). Mais, lors de cette bataille, les Confédérés se sont retrouvés seuls et en sous-nombre. Et là, on peut en effet mentionner que la défaite autrichienne fit perdre à cette dernière ses territoires en Suisse actuelle au profit des Confédérés (mais s’agit-il de libération ou de conquête confédérée ?). Dans ce cas, la bataille fut donc en effet plutôt orientée vers l’extérieur, comme vous le disiez. Et personne ne nie l’importance de ces événements.

L’ennui, c’est que les autres batailles que vous mentionnez sont plus ou moins du même acabit, ce sont des luttes contre des seigneurs étrangers à la Confédération. Ces batailles ont été menées pour des raisons différentes : défense, appât du gain, alliances, etc. Mais vous ne citez pas les batailles que vous mentionnez pourtant dans votre premier message

Christian27 a écrit :
Ainsi en plus des trois batailles contre les Autrichiens, Morgarten en 1315 contre le duc Léopold, Sempach en 1386 contre le duc Léopold III qui y trouve la mort et Naefels en 1388 contre le duc Albert III, eurent lieux d’importants et continuels combats de libérations
- combats contre les seigneurs laïcs et ecclésiastiques
- combats contre la noblesse
- incitation aux cerfs de désobéir et de se libérer en leur accordant la combourgeoisie


Je ne comprends donc pas pourquoi, l’essentiel pour vous est cette liste de batailles alors que votre premier message s’intéressait aussi et surtout aux révoltes internes. Je vous saurais gré de compléter la liste et mentionner quelles batailles et combats ont permis de lutter contre les seigneurs, la noblesse, etc. J’ai bien entendu noté celle précisée par Emile Dürr sur Saint-Gall, dans votre premier message.

Je suis également sceptique sur l’expression suivante de cet historien « démocraties paysannes à tendance autonomistes ». Il faudra à tout prix que j’aille dans une bibliothèque consulter cette fameuse Histoire militaire de la Suisse, mais entretemps, est-ce que vous pourriez développer un peu, Christian ? Je suis particulièrement intéressé de savoir sur quoi il s’appuie pour affirmer une telle chose car il me semble que les sources pour cette période sont pour le moins lacunaires.

La Nouvelle histoire de la Suisse et des Suisses nous éclaire un peu :
« Tous les historiens l’ont noté. Les rapports de seigneurs à paysans, en Suisse, au bas Moyen Age, paraissent doués, à la montagne, d’une flexibilité, d’un degré d’accommodement réciproque qui contrastent avec les tensions enregistrées plus souvent dans les campagnes du bas. » (p.222)

« Et c’est main dans la main que hobereaux et paysans se sont dressés parfois contre les empiètements excessifs du souverain – évêque de Coire ou évêque de Sion – contre l’ingérence des puissances étrangères. » (ibid)

« Au reste, aucun soulèvement de la classe paysanne, en Suisse, au XVe s., n’a jamais atteint les paroxysmes, ni suscité les excès de répression que connurent, à la même époque, d’autres nations européennes. »

Je ne résiste pas à la tentation de citer quelques courts passages de l’article « Paysannerie » du DHS (http://www.hls-dhs-dss.ch/textes/f/F16370.php)

„Dès le milieu du XIIIe s., diverses organisations sociales sont de mieux en mieux perceptibles. Elles avaient pour base les communautés paroissiales d'usagers, dont le but était l'exercice commun de droits et devoirs dans les domaines agricoles (alpages, biens communaux, assolement) et religieux (entretien de l'église et de son desservant). Dans les villages et dans les communautés de vallée, les diverses formes de coopération (économiques, juridiques et politiques) aboutissaient à un système complexe d'obligations mutuelles et d'interdépendances entre voisins.“

„La population paysanne médiévale ne formait pas un groupe homogène et il serait faux d'imaginer une "paysannerie" unie dans la défense de ses intérêts, alors qu'elle était profondément divisée. Toutes sortes de facteurs déterminaient la position sociale: le statut personnel (libre, non libre, serf) était l'un d'eux, mais il perdit peu à peu de son sens, tandis qu'en gagnaient les disparités économiques.“

„Dans les villages comme dans les communautés de vallée, on trouve généralement au bas Moyen Age une petite élite locale (mayor ou Meier, cellérier, sous-bailli), qui se distinguait par ses ressources matérielles et son prestige social, et faisait fonction d'intermédiaire entre le seigneur et les villageois.“

„La vie quotidienne et la mentalité de la population rurale, surtout celles des paysans pauvres, restent obscures, car les sources, d'ailleurs rares, sont encore peu étudiées.“

„La paysannerie s'est longtemps vu attribuer par l'ancienne historiographie suisse un rôle moteur dans la naissance de la Confédération. Celle de Suisse centrale, en particulier, passait pour une force agissante tendue vers la liberté et l'indépendance, voire pour la fondatrice d'"Etats paysans". Mais rien dans les sources ne corrobore cette vision d'une paysannerie qui aurait eu une participation décisive dans le mouvement communal du bas Moyen Age. On a donc aujourd'hui abandonné l'idée de communautés paysannes donnant naissance à des Etats territoriaux libres et démocratiques. Même les communautés de vallée, attestées dès les XIIe ou XIIIe s., n'étaient pas des collectivités égalitaires et démocratiques; un petit nombre de vieilles familles y faisaient la loi; le reste de la population est à peine connu.“

« Le développement des seigneuries territoriales et les mutations de l'agriculture entraînèrent au bas Moyen Age une accélération des changements sociaux et une aggravation des tensions politiques. Ces évolutions aboutirent d'une part à des conflits entre paysans ou entre villageois (à propos des droits d'usage, des frontières communales, etc.) et d'autre part à des querelles sur la définition des droits et devoirs respectifs des villageois et des seigneurs territoriaux (nobles, abbayes, villes), par exemple à Zoug en 1404 (Siegel- und Bannerhandel), à Grüningen en 1441, dans l'Oberland bernois en 1445-1451 (Böser Bund), à Fribourg en 1449-1452, à Wädenswil en 1467-1468.“

« Ces conflits ne peuvent pas être réduits à une opposition ville-campagne; ils s'inscrivent dans le cadre plus large d'un processus de concentration des pouvoirs au détriment des sujets, tant citadins que ruraux. Ils touchaient parfois à la vie quotidienne de tout un chacun (conflits sur les dîmes), mais plus souvent aux droits et privilèges des villageois. Or ces privilèges profitaient surtout aux élites campagnardes; leur défense répondait donc aux intérêts d'une minorité, même lorsqu'elle prenait la forme de ce que l'on nomme, un peu abusivement, révoltes paysannes.“

N’étant pas un spécialiste de la période, je trouve néanmoins cet article très intéressant. Ce que je retiens surtout c’est la difficulté des sources. J’aimerais donc bien savoir comment les anciens historiens de la Suisse en sont arrivés à étayer leurs théories et opinions.

Car, au terme de ce message, il faut souligner que, contrairement à ce que vous semblez croire, l’historiographie récente ne nie pas l’existence des luttes des paysans comme celle qui les oppose l’abbaye de Saint-Gall. Mais elle est plus nuancée sur leur signification et leurs conséquences. Surtout, il faut bien tenir compte des disparités suivant les territoires, rendant hasardeuse et erronée toute généralisation qui voudrait dire « les paysans suisses ont fait ça ».

:arrow: il y a un problème de sources et certains historiens du passé se sont trop avancés et n'ont pas totalement argumenté leurs propos
:arrow: Des révoltes oui, mais qui n'ont pas conduit à la démocratie et à l'autonomie
:arrow: Donc, pas de démocratie et d'égalité, mais bien des rapports seigneur-paysan (et encore, c'est plus complexe que cela)
:arrow: Pas de "révolution paysanne suisse", le phénomène étant à la fois régional (ne concerne pas toute la Suisse actuelle) et pas unique (il y avait des révoltes dans d'autres régions d'Europe). Il faut y voir des luttes spécifiques pour des enjeux spécifiques
:arrow: Oui, c'est une période très intéressante pour voir se développer le sentiment d'être confédéré, d'appartenir à quelque chose de spécial, mais sans que les fondements juridiques et étatiques d'une Suisse ou d'une Confédération soient arrivés à maturité.

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Message Publié : 17 Juin 2013 16:45 
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Salluste
Salluste

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Localisation : Helvétie
Quand on regarde de plus prêt l'histoire des Confédérés, une chose saute rapidement aux yeux. En ce qui concerne la politique extérieure, chaque canton joue sa propre carte. Il regarde avant tout ses intérêts et ne se préoccupe pas vraiment des autres membres de l'alliance. Et ça se traduit par les mouvements d'expansion de ces différents cantons. Uri et Unterwald vont lorgner sur le sud, Berne et Fribourg (canton en 1481) vers l'ouest, Zurich et Schwytz vers l'est.
Par contre pour la politique interne, on constate qu'à chaque fois que les Confédérés se font attaquer, les autres membres répondent tout de suite à l'appel. Je ne sais pas si on peut déjà employer le terme de conscience commune, mais force est de constater que si la "Suisse" a su résister aux tentatives de reconquête habsbourgeoises, c'est grâce à ce "réalisme" qui fit leur comprendre que si un tombait, les autres avaient toutes les chances de suivre.

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