Bonjour à tous.
Depuis le déclin des prénoms Hugues et Robert au XIe siècle, il y avait déjà trois siècles que les prénoms dynastiques étaient fixés à Philippe et Louis chez les Capétiens quand le fils de Robert de Clermont, Louis Ier de Bourbon, est devenu l'auteur de la maison capétienne de Bourbon.
Pourtant, il a choisi de prénommer ses deux fils... Pierre et Jacques!
Sait-on s'il y a une raison précise à une telle rupture des traditions familiales?
Et sait-on pourquoi précisément ces deux prénoms-là?
Merci d'avance.

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-Qui suis-je pour discuter avec l'Histoire ?

Pierre et Jacques sont des prénoms en vogue aux XIIe et XIIIe siècles dans les royaumes chrétiens du nord de l'Espagne, en Aragon en particulier, non ? Peut-être y a-t-il quelque chose à creuser de ce côté-là (sans conviction) ?

CNE EMB

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"Sicut Aquila"/"Ils s'instruisent pour vaincre"/"Par l'exemple, le coeur et la raison"/"Labor Omnia Vincit"/"Ensemble en paix comme au combat"/"Si Vis Pacem Para Bellum"/"Passe toujours !"

Bonjour,

Pierre (Petrus, Pedro) est avec Alphonse (Ildefonsus, Alonso) un nom traditionnel des rois d'Aragon de la première dynastie. Quand le trône passe à la seconde dynastie, celle des comtes de Barcelone, les noms traditionnels de celle-ci sont remplacés par les noms aragonais. C'est ainsi que les deux fils de Raymond Bérenger IV de Barcelone et de Pétronille d'Aragon sont nommés à leur naissance Raymond et Pierre, pour finalement règner sous le nom d'Alphonse II d'Aragon et de Raymond Bérenger IV de Provence. Mais en l'occurrence, il s'agit d'un nom secondaire des Capétiens depuis longtemps : un fils de Louis VI (Pierre de Courtenay), un fils de Louis IX, un fils de Robert de Clermont. Il est moins important que Philippe et Louis, mais il n'est pas inconnu.

Jacques (Jacobus, Jacme en catalan médiéval) a une origine très précise, si l'on suit le récit fait par le premier souverain à porter ce nom Jacques Ier d'Aragon, le Conquérant. Son père aurait voulu, dans la continuité des rois d'Aragon, lui donner le nom de Pierre, qu'il porte d'ailleurs dans certains actes solennels du tout début de sa vie. Mais sa mère, Marie de Montpellier, dont les rapports avec son mari étaient très difficiles, choisit une méthode plus originale. Elle dispose douze cierges marqués au nom des apôtres et le dernier qui s'éteint donne son nom au prince. Évidemment, comme il y a deux Jacques parmi les apôtres, ce prénom partait avec une longueur d'avance. D'où l'adoption du nom Jacques, inconnu jusque là. La mort de Pierre II d'Aragon à Muret empêche que la volonté royale triomphe sur l'ingéniosité maternelle. Le nom de Jacques devient alors un nom courant dans la famille des rois d'Aragon et des rois de Majorque. Je n'ai pas vraiment d'hypothèses sur l'adoption de Jacques par Louis de Bourbon pour l'un de ses fils, sans doute l'admiration pour Jacques II d'Aragon, roi de 1291 à 1327, qui joue un rôle de construction de l'État comparable à Philippe le Bel mais prend aussi la tête d'expéditions militaires en Afrique du Nord comme défenseur de l'Église.

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Ira principis mors est

Très instructif, en tout cas.
Et, oui, mea culpa, j'avais oublié le précédent crée par Pierre de Courtenay.
En revanche, pouvez-vous me rappeler la relation entre la dynastie royale capétienne et celle d'Aragon?

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-Qui suis-je pour discuter avec l'Histoire ?

Eh bien, les alliances sont plutôt lointaines dans le cas des Bourbon.

* Blanche de Castille, femme de Louis VIII, est l'arrière-petite-fille de Bérengère de Barcelone.
* Marguerite de Provence (et ses soeurs évidemment), femme de Louis IX, est l'arrière-petite-fille d'Alphonse II d'Aragon, mais en ligne agnatique.

La première alliance directe c'est le mariage en 1262 de Philippe le Hardi avec Isabelle d'Aragon, fille de Jacques le Conquérant, mais ils ne sont pas les ancêtres de Louis de Bourbon.

L'usage du prénom Jacques (et surtout du doublet Jacques et Pierre, qui fait vraiment penser aux enfants de Jacques le Conquérant) ne vient donc pas d'une tradition ou d'un héritage familial mais bien d'une imitation ou d'une adoption, comme on veut, d'usages venus d'une autre cour.

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